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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/20292/2010

ACPR/559/2012 du 14.12.2012 sur DTCR/9/2012 ( TCR ) , REFUS

Descripteurs : ASSISTANCE JUDICIAIRE; INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL); RÉDUCTION(EN GÉNÉRAL)
Normes : CPP.135; RAJ.16
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20292/2010 ACPR/559/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 14 décembre 2012

 

Entre

Me A______, avocat, ______,

 

recourant

 

contre la décision d’indemnisation rendue le 22 octobre 2012 par le Tribunal criminel,

 

Et

LE TRIBUNAL CRIMINEL de la République et canton de Genève, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3,

 

intimé.


 

EN FAIT :

A. Par acte déposé au greffe de la Chambre de céans le 2 novembre 2012, Me A______ recourt contre la décision rendue par le Tribunal criminel, le 22 octobre 2012, notifiée le lendemain, dans la cause P/20292/2010, par laquelle ce tribunal a réduit son état de frais.

Le recourant conclut à l’annulation de la décision querellée et « au payement intégral de l’état de frais déposé ».

B. Les faits pertinents pour l'issue du litige sont les suivants :

a. Le 17 décembre 2010, Me A______ a été nommé d’office à la défense des intérêts de B______, interpelé le 15 décembre 2010.

b. Par jugement du 7 juin 2012, B______ a été condamné par le Tribunal criminel, pour infraction aux art. 19 ch. 2 aLStup et 115 al. 1 let. a et b LEtr, à 30 mois d’emprisonnement ferme, sous déduction des jours de détention avant jugement.

c. Le 31 juillet 2012, Me A______ a sollicité une avance sur taxation, laquelle a été octroyée, par décision du 3 août 2012, à concurrence de CHF 30'000.-.

d. Le 27 septembre 2012, Me A______ a adressé au Tribunal criminel son état de frais final, sollicitant le versement d’un montant total de CHF 49'531.85, sous déduction de l’acompte de CHF 30'000.-.

A teneur dudit état de frais, Me A______ relevait avoir consacré 3190 minutes aux différentes audiences, 1170 minutes aux entretiens avec son mandant, 6865 minutes à la consultation du dossier, à l’analyse des pièces ainsi qu’à la rédaction d’observations et de recours. Il requérait ainsi un montant de CHF 37’416.70 (soit 187 heures et 5 minutes à CHF 200.-/heure), auquel s’ajoutait des débours à hauteur de CHF 1’040.- ainsi qu’un montant de CHF 7'483.31 (soit un « forfait courriers et téléphones » de 20%), TVA à 8% en sus.

C. a. Dans sa décision querellée, le Tribunal criminel a admis une indemnité globale arrêtée à CHF 38'000.-, courriers et téléphones inclus, en application de l’art. 16 al. 2 RAJ, à laquelle s’ajoutait des débours à hauteur de CHF 1'040.- (frais d’interprète) et la TVA à 8% de CHF 3'040.-, sous déduction de l’acompte de CHF 30'000.-, versé le 3 août 2012. Il était précisé que le forfait courriers/téléphones, compris dans l’indemnité globale, était réduit à 10% selon l’usage. En outre, le temps consacré à la procédure apparaissait globalement un peu excessif, quand bien même il s’agissait d’une procédure relative à des infractions graves à la LStup.

b. Le 31 octobre 2012, le Tribunal criminel a notifié à Me A______, à sa demande, la motivation de la décision susmentionnée.

Le Tribunal criminel relevait que l’état de frais présenté le 27 septembre 2012 comptait au total 187 heures et 5 minutes, dont 114 heures et 25 minutes pour la seule rubrique « procédure ». Au sein de celle-ci, 65 heures et 45 minutes étaient consacrées à des consultations du dossier et analyses des pièces qu’il contenait, auxquelles s’ajoutaient 24 heures de « reprise du dossier complet et préparation de l’audience de jugement ». Considérant la taille du dossier, passablement volumineux, mais dont seule une fraction concernait B______, lequel n’était impliqué que dans le volet « genevois » de l’affaire, la durée consacrée à ces tâches de consultation et d’analyse était apparue comme excédant la nécessité prescrite par l’art. 16 al. 2 RAJ. De surcroît, la rubrique « procédure » contenait une durée de 4 heures consacrée à l’élaboration d’un recours du 25 janvier 2012, dans lequel Me A______ apparaissait en personne et qui n’était pas lié à la défense des intérêts de B______. Le Tribunal criminel relevait encore qu’à cela s’ajoutait le temps d’examen de certains actes, dont la durée de plusieurs dizaines de minutes apparaissait injustifiable au regard du critère de nécessité. Ainsi, la réduction opérée, de l’ordre de 14 heures et 20 minutes sur un total de 187 heures et 5 minutes, était non seulement justifiée, « mais encore extrêmement mesurée » au regard des considérations qui précédaient.

D. a. A l’appui de son recours, Me A______ relève, en substance, que le volume du dossier, la manière changeante dont les pièces, non numérotées, du dossier étaient classées ainsi que la traduction tardive des documents en allemand avaient compliqué la consultation du dossier. Le Ministère public n’avait, par ailleurs jamais adopté de « position claire et compréhensible » s’agissant de la « problématique de l’accès aux écoutes téléphoniques ». Le temps consacré à la « reprise complète » du dossier n’était pas abusif, compte tenu du nombre de pièces et « des enjeux liés à une comparution devant le Tribunal criminel ». En outre, il avait été contraint de consulter le dossier à nouveau, après que le Ministère public eut déclaré faire appel du jugement du Tribunal criminel. Tout au long de l’instruction, le Ministère public avait considéré que le rôle de B______ était beaucoup plus important que celui qui avait finalement été retenu à son encontre, soit celui se limitant au volet « genevois » de l’affaire. Le Ministère public avait d’ailleurs, en audience de jugement, plaidé au-delà de l’acte d’accusation, ce qui avait « généré un incident ». La durée d’examen de certains actes, notamment en lien avec le contrôle de la détention, s’expliquait par les éléments invoqués par le Ministère public à l’appui de ses demandes de prolongation de détention. Me A______ relève encore que le forfait courriers est « fixé à 20% du total de l’activité déployée pour les autres postes ». Il n’existait pas de base légale ni règlementaire à sa réduction à 10%, ce que les circonstances propres à ce dossier ne justifiaient aucunement. La réduction opérée par le Tribunal criminel apparaissait être davantage de l’ordre de trente-cinq heures que de quatorze, comme ce dernier l’indiquait dans sa motivation du 31 octobre 2012, laquelle ne correspondait, dès lors, pas à la réduction opérée dans la décision querellée.

Enfin, A______ souligne que la nature de l’affaire était complexe, l’importance de la cause particulière et ses difficultés nombreuses. La valeur litigieuse était également élevée. Enfin, la qualité du travail fourni et le résultat obtenu étaient irréprochables.

b. A réception du recours, la cause a été gardée à juger, sans échange d’écritures ni débats.

EN DROIT :

1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 393, 396 et 90 al. 2 CPP), concerner une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 20 al. 1 let. a, art. 393 al. 1 let. b et 135 al. 3 let. a CPP; art. 128 al. 1 let. a et al. 2 let. a LOJ) et émaner du défenseur d'office qui a qualité pour recourir (art. 135 al. 3 let. a CPP).

2. La Chambre de céans peut décider de rejeter les recours manifestement mal fondés, sans échange d’écritures ni débats (art. 390 al. 2, 1ère phrase, a contrario, CPP).

Tel est le cas du présent recours pour les raisons exposées ci-dessous.

3. En l’espèce, le recourant reproche au Tribunal criminel d’avoir estimé que les heures consacrées à la consultation du dossier ainsi qu’à la prise de connaissance de certaines décisions n’étaient pas justifiées et, partant, d’avoir réduit le temps consacré à ces tâches à concurrence de 14 heures et 20 minutes. Il relève également que le forfait « courriers/téléphones » auraient dû être arrêté à 20%, dans la mesure où il n’existait aucune base légale ni réglementaire à sa réduction à 10%.

3.1. A teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. A Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 du Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ ; E 2 05.04).

L’art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

3.2. Il convient de relever que le recourant, qui sollicite le paiement de l’intégralité de son état de frais, ne reproche pas au Tribunal criminel d’avoir refusé d’indemniser les 4 heures consacrées à la rédaction d’un recours, déposé le 25 janvier 2012, car celui-ci n’était pas lié à la défense des intérêts de son mandant. Il n’y a dès lors pas lieu de revenir sur cette réduction. Reste donc litigieuse la réduction de 10 heures et 20 minutes, opérée par le Tribunal criminel. A ce titre, si le recourant expose que les particularités de la cause ont justifié qu’il consacre de très nombreuses heures à la consultation des pièces du dossier et à la prise de connaissance des décisions, il n’en demeure pas moins que le temps qu’il y a consacré excède, dans une très large mesure, la durée à laquelle on pouvait raisonnablement s’attendre. En effet, il ressort clairement des pièces du dossier que seule une partie de celles-ci concernait son mandant et, partant, était en relation avec les faits qui lui étaient reprochés – et donc avec sa défense nécessaire –, de sorte que le recourant ne saurait se prévaloir de plus de 24 heures consacrées exclusivement à la relecture du dossier et à la préparation de l’audience de jugement. La réduction opérée par le Tribunal criminel apparaît, pour ce poste déjà, extrêmement mesurée. De même, le temps consacré à la prise de connaissance de décisions outrepasse également la durée que l’on pouvait raisonnablement exiger du recourant, vu la nature et la teneur desdites décisions. Dans ces circonstances, il apparaît que le Tribunal criminel a réduit, à juste titre, l’état de frais du recourant.

Par ailleurs, en tant que le recourant reproche au Tribunal criminel d’avoir réduit à 10% le forfait « courriers/téléphones », il convient de relever qu’il n’existe, en la matière, aucune base légale ou réglementaire qui fixerait ledit forfait à 20% du total de l’activité déployée pour les autres postes de l’état de frais. Bien au contraire, ce forfait doit pouvoir être adapté en fonction de la nature et de l’importance de l’activité réellement déployée par l’avocat, conformément à l’usage en matière d’assistance juridique (TAX/202/2012 du 3 avril 2012 ; TAX/201/2012 du 26 mars 2012). Au vu des pièces du dossier, l’allocation d’un forfait de 10% pour le poste « courriers/téléphones » apparaît pleinement justifiée, le recourant ne démontrant et n’alléguant, au demeurant, pas avoir déployé, à ce titre, une activité justifiant la prise en compte d’un forfait correspondant à 20% du total de l’activité déployée pour les autres postes de son état de frais.

4. Justifiée, la décision sera confirmée.

5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État (art. 428 al. 1 CPP).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Reçoit le recours formé par Me A______ contre la décision d’indemnisation rendue le 22 octobre 2012 par le Tribunal criminel dans la procédure P/20292/2010.

Le rejette.

Condamne Me A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 600.-.

Siégeant :

Messieurs Christian COQUOZ président ; Louis PEILA et Christian MURBACH, juges ; Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110) ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

 

éTAT DE FRAIS

P/20292/2010

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10 03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (litt. a)

CHF

     

- délivrance de copies (litt. b)

CHF

     

- état de frais (litt. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision indépendante (litt. c)

CHF

600.00

-

CHF

     

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

695.00