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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/959/2007

ACOM/62/2007 du 02.07.2007 ( CRUNI ) , ADMIS

Résumé : pouvoir d'examen de la CRUNI, plagiat + élimination
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

A/959/2007-CRUNI ACOM/62/2007

DÉCISION

DE

LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

du 2 juillet 2007

 

dans la cause

 

 

 

 

Mme S______

contre

 

 

FACULTÉ DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION

et

 

 

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 

(pouvoir d’examen de la CRUNI, plagiat + élimination)


EN FAIT

1. Mme S______, domiciliée à Genève, est immatriculée au sein de l’Université de cette ville depuis octobre 2000 à la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (ci-après  : FPSE) afin d’y suivre les enseignements de la licence en sciences de l’éducation, mention "recherche et intervention".

2. Elle a réussi le tronc commun au terme de la session d’examens d’octobre 2001.

3. Au cours de l’année académique 2001-2002, elle a commencé à suivre les enseignements du 2ème cycle d’études qu’elle devait achever en octobre 2008. Lors des années académiques 2001 à 2006, elle a continué à suivre les enseignements du 2ème cycle d’études et présenté des examens presqu’à chaque session.

4. A l’issue de la session de février 2006, elle totalisait 42 crédits en échec.

5. Par décision du 22 mars 2006, elle a été éliminée de la section des sciences de l’éducation. Cette décision a toutefois été modifiée par une nouvelle notification du 28 mars 2006. L’élimination a été confirmée mais Mme S______ n’avait que 36 et non 42 crédits en échec.

6. Par acte du 22 avril 2006, l’étudiante a formé opposition. Elle n’avait que 33 crédits en échec ayant réussi un enseignement comptabilisé alors comme étant manqué.

Par ailleurs, elle évoquait l’obligation dans laquelle elle se trouvait de travailler pour subvenir à ses besoins. Elle évoquait ses difficultés familiales : son père, victime d’un accident du travail, ne recevait qu’une rente de l’assurance accidents, l’assurance-invalidité ne voulant rien lui verser. Quant à sa mère, elle était malade également et percevait une petite rente de l’assurance-invalidité. Enfin, son grand-père étant tombé malade, ses parents et elle-même avaient dû se rendre en Espagne pour le voir et assister à son enterrement.

Elle avait dû faire face à de graves problèmes de santé affectant la vue. Aucun certificat médical n’était joint à cette opposition.

Elle insistait sur sa motivation et demandait qu’une chance lui soit octroyée pour qu’elle puisse réussir sa licence pour laquelle il ne lui restait que deux évaluations et le mémoire. Elle sollicitait un délai qui lui permettrait de ne plus être "en dépassement d’échec puisqu’elle redescendrait à 27 crédits d’échec".

7. Le 9 mai 2006, l’opposition a été admise. L’étudiante a été autorisée à poursuivre son programme d’études de 2ème cycle étant précisé que plus aucun échec ne serait toléré. Il était spécifié en outre  : "le projet indépendant mis en échec en février 2006 devra être validé au plus tard en octobre 2006. L’UF d’articulation 7221J est en revanche annulée. Vous devrez compenser les 3 crédits manquants par l’inscription à une autre UF selon votre plan d’études".

8. En juillet 2006, Mme S______ n’a présenté aucun examen.

9. Elle a rendu son travail indépendant le 6 octobre 2006 au professeur concerné, soit Mme L______, en dehors du délai fixé. Ce travail a néanmoins été accepté.

10. Courant octobre 2006, Mme L______ a dénoncé au doyen de la faculté une tentative de plagiat considérée comme une fraude réalisée par l’étudiante dans le travail indépendant précité. Mme S______ était ainsi convoquée pour le 1er novembre 2006 afin de fournir toutes explications utiles à ce sujet.

Lors de cette audition, l’étudiante a admis avoir cherché des textes sur internet et en avoir copié des passages sans citer ses sources. Le doyen a alors rappelé à l’étudiante la sanction minimale en cas de fraude, à savoir l’échec à l’examen en question et l’annulation de tous les autres de la session d’octobre 2006, ce qui aurait pour effet de mettre à nouveau l’intéressée en situation d’élimination.

11. Une telle décision d’élimination a été signifiée à Mme S______ par lettre-signature du 1er décembre 2006 en raison d’une fraude au projet indépendant.

12. Le 27 décembre 2006, Mme S______ a fait opposition. Sur 70 pages, moins de 4 pages n’étaient pas "référencées".

Elle a réitéré ses explications relatives à sa situation personnelle de même que sa volonté de terminer à tout prix ses études. Elle a demandé à ne pas être pénalisée par une double sanction et à pouvoir s’exmatriculer afin de pouvoir reprendre ses études plus tard lorsque sa situation personnelle serait plus favorable.

13. Par décision du 6 février 2007 communiquée par le doyen de la faculté, le collège des professeurs a rejeté cette opposition, les conditions posées dans la décision sur opposition précédente n’ayant pas été respectées et le travail dénoncé comme fraude en octobre 2006 noté comme échec entraînant l’élimination de l’étudiante.

Par ailleurs, aucune des circonstances évoquées ne revêtait le caractère exceptionnel nécessaire à l’octroi d’une dérogation au sens de l’article 12 du règlement d’études.

14. Par acte posté le 8 mars 2007, Mme S______ a recouru contre cette décision auprès de la commission de recours de l’Université (ci-après  : CRUNI). Elle a conclu à l’annulation de la décision sur opposition.

La CRUNI devait dire qu’aucune sanction ne serait prise à son encontre et qu’elle était valablement immatriculée à l’Université.

Cela fait, une dérogation devait lui être accordée jusqu’en octobre 2008 pour qu’elle puisse terminer ses études ou alors qu’il lui soit possible d’intégrer le parcours du baccalauréat afin d’obtenir des équivalences pour les unités de formation déjà acquises. Subsidiairement, elle concluait à l’annulation des seuls examens présentés à la session d’octobre 2006 et à l’octroi d’une dérogation pour lui permettre de terminer ses études jusqu’en octobre 2008 ou d’intégrer le parcours du baccalauréat.

15. L’Université a conclu au rejet du recours ; l’étudiante était en situation d’échec après 36 crédits en échec lors de la session de mars 2006 et 6 crédits en échec en octobre 2006, le plagiat étant avéré.

Les circonstances personnelles invoquées par la recourante n’étaient pas des circonstances exceptionnelles permettant l’octroi d’une dérogation. Il n’existait pas non plus de nouvelles circonstances exceptionnelles dont le doyen aurait dû tenir compte avant de prononcer l’élimination de l’intéressée. De plus, et contrairement aux allégués de la recourante, ce n’était pas elle qui avait proposé qu’un délai lui soit octroyé pour présenter son projet indépendant car sinon il aurait été annulé tout comme l’unité de formation d’articulation. Cette dernière avait été annulée car ce type de formation disparaissait à partir de la rentrée d’octobre 2006 et que l’étudiante n’avait pas encore rendu le moindre travail. Il était donc logique d’annuler cette inscription et de lui demander de s’inscrire à un autre cours pour obtenir les 3 crédits manquants. Le fait d’avoir octroyé à la recourante un délai à octobre 2006 pour valider le projet indépendant découlait d’une politique de la section des sciences de l’éducation appliquée d’une manière générale.

16. Le 30 mai 2007, la CRUNI a prié Mme S______ de bien vouloir se déterminer par écrit sur la réponse de l’Université à laquelle étaient joints un rapport établi le 1er avril 2007 par Mme L______ ainsi que plusieurs pièces, ces documents ne figurant pas dans le dossier au moment du dépôt du recours.

17. Par courrier du 14 juin réceptionné le 18 juin 2007, Mme S______ s’est déterminée au sujet de ces documents en alléguant que lors de la séance du 1er novembre 2006, Mme L______ avait dit clairement qu’elle avait eu beaucoup de mal à trouver du plagiat dans le travail en question. L’étudiante indiquait avoir reconnu qu’elle avait consulté des sites internet et s’en être inspirée mais elle n’avait jamais vu les documents que son professeur lui avait présentés comme étant plagiés.

Enfin, l’étudiante est revenue sur les unités de formation en échec. Elle totalisait 213 crédits alors que 240 crédits étaient exigés pour la licence et le mémoire comptait pour 18 crédits. Il lui en manquait ainsi 9, le travail présenté pour Mme L______ en représentant 6. Or, le bachelor était octroyé au vu de 180 crédits. Sachant qu’il était possible d’accéder au baccalauréat pour les étudiants ayant suivi précédemment le programme de licence et qu’elle avait bien plus de crédits que l’obtention du bachelor n’en requérait, elle voulait pouvoir emprunter cette filière. A teneur du règlement d’études, cela n’était pas possible pour les personnes qui avaient été éliminées mais cette faculté existait pour l’étudiant qui s’était exmatriculé et qui demandait sa réadmission et c’était ce qu’elle demandait.

18. Ce courrier a été transmis à l’Université pour information et la cause gardée à juger.

EN DROIT

1. Dirigé contre la décision sur opposition du 6 février 2007 et interjeté le 8 mars 2007 dans le délai légal et la forme prescrite auprès de l’autorité compétente, le recours est recevable (art. 62 de la loi sur l’université du 26 mai 1973 - LU – C 1 30 ; art. 87 du règlement de l’université du 7 septembre 1988 - RU – C 1 30.06 ; art. 26 et 27 du règlement interne relatif aux procédures d’opposition et de recours du 25 février 1977 - RIOR).

2. Dans le cadre de la procédure de recours, Mme L______ a fourni un rapport très complet daté du 1er avril 2007 ainsi qu’un lot de pièces. Bien que l’étudiante se soit déterminée à leur sujet, ces documents n’étaient pas connus du collège des professeurs au moment où la décision sur opposition a été rendue.

La CRUNI ne disposant pas du même pouvoir d’examen que l’autorité intimée, la cause ne peut qu’être renvoyée à cette dernière pour nouvelle décision sur opposition, sauf à violer le droit d’être entendu de la recourante (arrêt du Tribunal fédéral 2P.209/2006 du 25 avril 2006).

3. Vu la nature du litige aucun émolument ne sera perçu (art. 33 RIOR).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

à la forme  :

déclare recevable le recours interjeté le 8 mars 2007 contre la décision sur opposition de la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation 6 février 2007 ;

au fond  :

l’admet partiellement ;

renvoie la cause au collège des professeurs de la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation pour nouvelle décision sur opposition après avoir pris connaissance du rapport établi le 1er avril 2007 par Mme L______ et des explications de la recourante dans le cadre de la procédure de recours ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Mme S______, à la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, au service juridique de l’Université, ainsi qu’au département de l’instruction publique.

Siégeants : Madame Hurni, vice-présidente ;
Messieurs Schulthess et Bernard, membres

Au nom de la commission de recours de l’université :

la greffière :

 

 

 

C. Barnaoui-Blatter

 

la vice-présidente :

 

 

 

E. Hurni

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :