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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/23528/2017

ACJC/968/2019 du 01.07.2019 sur JTBL/214/2019 ( SBL ) , CONFIRME

Descripteurs : BAIL À LOYER ; DEMEURE ; SOMMATION ; RÉSILIATION ; EXPULSION DE LOCATAIRE ; CAS CLAIR
Normes : CPC.257; CO.257d
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23528/2017 ACJC/968/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du LUNDI 1ER JUILLET 2019

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, Genève, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 13 mars 2019, comparant en personne,

et

B______ SA, sise ______, ______ (VS), intimée, représentée par C______ SA, ______, ______ (VD), en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. B______ SA, bailleresse, et A______, locataire, sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 4,5 pièces n° 1______ situé au 5ème étage de l'immeuble sis ______ à Genève, ainsi qu'une cave n  1______ dans le même immeuble.

Le montant du loyer et des charges a été fixé en dernier lieu à 2'180 fr. par mois.

b. Par avis comminatoire du 11 juillet 2017, la bailleresse a mis en demeure la locataire de lui régler dans les 30 jours le montant de 4'489 fr. 60, à titre d'arriéré de loyer et de charges pour les mois de juin et juillet 2017, et l'a informée de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

c. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement réglée dans le délai imparti, la bailleresse a, par avis officiel du 25 août 2017, résilié le bail pour le 30 septembre 2017.

d. Par requête déposée le 12 octobre 2017 devant le Tribunal des baux et loyers, la bailleresse a sollicité l'évacuation de la locataire ainsi que l'exécution directe de ladite évacuation.

e. Lors des audiences des 11 janvier, 3 mai et 8 novembre 2018, la représentante de la bailleresse a consenti à l'octroi de "délais d'épreuve" à la locataire avant de retirer sa requête. L'intéressée a toutefois régulièrement accumulé du retard dans le paiement des indemnités pour occupation illicite.

Lors de l'audience du 14 février 2019, la bailleresse a persisté dans sa requête. La locataire avait opéré le dernier versement le 20 décembre 2018 et l'arriéré s'élevait à 4'217 fr.

La locataire a expliqué que son compte était bloqué par l'Office des poursuites depuis janvier 2019 et qu'elle n'avait pas pu effectuer ses paiements. Il est par ailleurs apparu que la locataire disposait également d'un appartement à la rue ______ à ______ (GE), adresse à laquelle elle était toujours officiellement domiciliée.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience du 14 février 2019.

B. Par jugement JTBL/214/2019 du 13 mars 2019, le Tribunal a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec elle l'appartement de 4,5 pièces n° 1______ situé au 5ème étage de l'immeuble sis ______ à Genève, ainsi que la cave n° 2______ située dans le même immeuble (ch. 1 du dispositif), autorisé B______ SA à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

Le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation selon l'art. 257d al. 1 CO étaient manifestement réunies en l'espèce et que la locataire n'avait pas rendu vraisemblable que l'une ou l'autre d'entre elles ferait défaut. Le bailleur était ainsi fondé à donner congé, ce qu'il avait fait en respectant les conditions de l'art. 257d al. 2 CO. En continuant à occuper les locaux, la locataire violait l'art. 267 al. 1 CO. Dès lors, il serait fait droit à la demande tendant à son évacuation. Enfin, le bailleur avait requis l'exécution de l'évacuation, ce à quoi il devait également être fait droit.

C. a. Par acte expédié le 27 mars 2019 au greffe de la Cour, A______ a formé appel contre ce jugement. Elle a exposé qu'elle n'avait pas été en mesure de payer son loyer au motif que son compte avait été bloqué de manière inattendue en janvier 2019 et qu'elle s'en était acquittée lorsqu'il avait été débloqué en mars 2019. Son salaire avait en outre augmenté. Enfin, elle ne voudrait pas que son fils doive changer de cadre scolaire.

Elle a déposé des pièces nouvelles, relatives à des faits intervenus en mars 2019.

b. B______ SA n'a pas répondu à l'appel dans le délai qui lui avait été imparti.

c. Les parties ont été avisées le 24 avril 2019 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Si en procédure de protection des cas clairs, seule l'expulsion est contestée, la valeur litigieuse correspond au loyer à échoir depuis le dépôt de la requête jusqu'à la fin prévisible de la procédure sommaire d'expulsion, soit pendant une durée que le Tribunal fédéral estime à six mois (ATF 144 II 346 consid. 1.2.1).

1.2 En l'espèce, il doit être compris des explications fournies par la locataire qu'elle conteste la décision d'évacuation, mais pas celle d'exécution de cette dernière. La valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (6 × 2'180 fr. = 13'080 fr.), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.3 Interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi, l'appel est recevable (art. 311 al. 1 CPC).

1.4 L'appelante a déposé des pièces nouvelles avec son appel. Dans la mesure où elles contiennent des faits nouveaux proprement dits et qu'elles ont été produites sans retard, elles sont recevables (art. 317 al. 1 CPC).

1.5 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit.

1.6 Conformément à l'art. 121 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), dans les causes fondées sur l'art. 257d CO (comme en l'espèce) et 282 CO, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice siège sans assesseurs.

2. L'appelante soutient que le dernier retard accumulé dans le paiement de son loyer résultait du blocage de son compte.

2.1
2.1.1
La procédure sommaire prévue par l'art. 257 CPC est une alternative aux procédures ordinaire ou simplifiée normalement disponibles, destinée à offrir à la partie demanderesse, dans les cas dits clairs, une voie particulièrement simple et rapide. Selon l'art. 257 al. 1 let. a et b CPC, cette voie suppose que l'état de fait ne soit pas litigieux ou qu'il soit susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a), et que la situation juridique soit claire (let. b). Selon l'art. 257 al. 3 CPC, le juge n'entre pas en matière si l'une ou l'autre de ces hypothèses n'est pas vérifiée.

Le cas n'est pas clair, et la procédure sommaire ne peut donc pas aboutir, lorsqu'en fait ou en droit, la partie défenderesse oppose à l'action des objections ou exceptions motivées sur lesquelles le juge n'est pas en mesure de statuer incontinent. L'échec de la procédure sommaire ne suppose pas que la partie défenderesse rende vraisemblable l'inexistence, l'inexigibilité ou l'extinction de la prétention élevée contre elle; il suffit que les moyens de cette partie soient aptes à entraîner le rejet de l'action, qu'ils n'apparaissent pas d'emblée inconsistants et qu'ils ne se prêtent pas à un examen en procédure sommaire. La situation juridique est claire lorsque l'application du droit au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées. En règle générale, la situation juridique n'est pas claire s'il est nécessaire que le juge exerce un certain pouvoir d'appréciation, voire rende une décision en équité (ATF 141 III 23 consid. 3.2 p. 25; 138 III 123 consid. 2.1.2; 138 III 620 consid. 5).

2.1.2 A teneur de l'art. 257d al. 1 CO, lorsque le locataire, après réception de la chose, a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Le délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitation ou de locaux commerciaux. L'art. 257d al. 2 CO dispose qu'à défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat.

La validité du congé suppose notamment que le locataire se soit effectivement trouvé en retard dans le paiement du loyer ou de frais accessoires lorsque la sommation lui a été adressée, d'une part, et qu'il ne se soit pas acquitté de cet arriéré dans le délai fixé, d'autre part (arrêt du Tribunal fédéral 4A_299/2011 du 7 juin 2011 consid. 5).

L'avis comminatoire doit indiquer le montant impayé de façon suffisamment claire et précise. Une indication chiffrée n'est pas indispensable; il suffit que l'objet de la mise en demeure soit déterminable sans discussion, par exemple avec une désignation précise des mois de loyers impayés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_134/2011 du 23 mai 2011 consid. 3 et les références citées).

2.2 En l'espèce, l'appelante ne conteste pas qu'elle s'est trouvée en retard dans le paiement des loyers de juin et juillet 2017 qui ont fait l'objet de l'avis comminatoire de l'intimée du 11 juillet 2017, ni que ledit avis remplissait les conditions de forme prévues par l'art. 257d al. 1 CO, ni qu'elle ne s'est pas acquittée du montant réclamé dans le délai imparti.

Le fait que le compte de l'appelante ait été bloqué en janvier 2019 n'est pas déterminant pour statuer sur la validité du congé notifié en 2017. L'intimée avait par ailleurs déjà accordé plusieurs "délais d'épreuve" à l'appelante, lui laissant la jouissance des locaux loués à bien plaire, mais celle-ci a accumulé d'autres retards dans le paiement des indemnités pour occupation illicite. Enfin, elle dispose d'un autre logement.

Le congé est dès lors valable et l'appelante ne dispose plus de titre pour continuer à occuper les locaux. La situation est claire et c'est à bon droit que le Tribunal a prononcé l'évacuation de l'appelante. La recourante ne soulève par ailleurs aucun grief contre la décision d'exécution de l'évacuation.

Le jugement attaqué sera donc confirmé.

3. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 27 mars 2019 par A______ contre le jugement JTBL/214/2019 rendu le 13 mars 2019 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/23528/2017-7-SE.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.