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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/16649/2017

ACJC/395/2019 du 18.03.2019 sur JTBL/818/2018 ( OBL ) , CONFIRME

Descripteurs : BAIL À LOYER ; RÉSILIATION ; COLOCATAIRE ; NULLITÉ ; ABUS DE DROIT
Normes : CO.266l.al1; OBLF.9; CO.266l.al2; CO.70
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16649/2017 ACJC/395/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du LUNDI 18 MARS 2019

 

Entre

HOIRIE DE FEUE A______, soit pour elle :

1) Monsieur B______, domicilié ______,

2) Monsieur C______, domicilié ______, appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 12 septembre 2018, représentés par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle ils font élection de domicile,

et

1) Madame D______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Julien PACOT, avocat, rue Verdaine 15, case postale 3015, 1211 Genève 3, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

2) Madame E______, domiciliée ______, autre intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/818/2018 du 12 septembre 2018, expédié pour notification aux parties le lendemain, le Tribunal des baux et loyers, statuant par voie de procédure simplifiée, a condamné E______ et l'Hoirie de feue A______, soit pour elle B______ et C______ (ci-après : l'Hoirie), à évacuer immédiatement de leur personne et de leurs biens ainsi que de toute autre personne faisant ménage commun avec eux l'appartement de 4 pièces au 4ème étage de l'immeuble sis 1______ à Genève (ch. 1 du dispositif), a transmis la cause, à l'expiration du délai d'appel contre ledit jugement, à la 7ème chambre du Tribunal, siégeant dans la composition prévue par l'art. 30 LaCC, pour statuer sur les mesures d'exécution sollicitées (ch. 2), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

En substance, les premiers juges ont retenu que le congé avait été adressé aux colocataires, au moyen d'un seul formulaire officiel, à l'adresse des locaux loués, conformément aux dispositions contractuelles. L'Hoirie n'avait par ailleurs pas
fait valoir l'absence de communication de l'avis de résiliation à l'adresse
privée de C______, celui-ci n'occupant pas le logement en cause. La résiliation était ainsi valable. Dès lors que les colocataires ne disposaient plus d'aucun titre les autorisant à rester dans le logement litigieux, leur évacuation devait être prononcée.

B. a. Par acte déposé le 15 octobre 2018 au greffe de la Cour de justice,
l'Hoirie a formé appel de ce jugement, sollicitant son annulation. Elle a conclu
à la constatation de la nullité du congé notifié le 21 mars 2017 et de la hausse de loyer du même jour.

A l'appui de son appel, elle s'est plainte d'une constatation inexacte des faits, le Tribunal n'ayant pas fait état de l'incapacité de B______ de s'occuper de ses affaires administratives, que C______ palliait. Elle a également reproché aux premiers juges d'avoir retenu la validité de la notification de la résiliation de bail, alors que la bailleresse ne l'avait pas adressée à l'adresse privée de C______. Enfin, elle a fait grief au Tribunal d'avoir retenu qu'elle avait fait montre d'abus de droit en soutenant la nullité du congé.

b. Dans sa réponse du 13 novembre 2018, D______ a conclu au déboutement de l'Hoirie de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement entrepris.

c. E______ n'a pas déposé de réponse dans le délai fixé à cet effet, ni ultérieure-ment.

d. Par réplique du 7 décembre 2018, l'Hoirie a persisté dans ses conclusions.

e. Par duplique du 11 décembre 2018, la bailleresse a également persisté dans ses conclusions.

f. Les parties ont été avisées par plis du greffe du 4 janvier 2019 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Le 25 avril 1984, [la compagnie d'assurances] F______, alors propriétaire, et E______, locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 4 pièces au 4ème étage de l'immeuble sis 1______ à Genève.

Le contrat a été conclu pour une durée d'une année et un mois, du 1er juin 1984 au 30 juin 1985, et s'est depuis lors renouvelé de six mois en six mois. Le préavis de résiliation est de trois mois.

Le loyer annuel, charges de 2'910 fr. non comprises, a été fixé à 9'036 fr. dès le 1er juillet 1984.

b. A teneur de l'art. 19 du contrat, "quel que soit le domicile présent ou futur des parties, celles-ci déclarent, tant pour elles que pour leurs héritiers ou ayants droits, reconnaître sans réserve la compétence exclusive des tribunaux genevois pour trancher tout litige relatif au présent bail. Pour l'exécution et application du bail, le locataire déclare élire domicile attributif de juridiction et de législation dans les locaux loués".

L'art. 20 dudit contrat dispose que "toute communication ou notification du bailleur au locataire relative à l'exécution et à l'application du présent bail, lui est valablement adressée au domicile désigné à l'article 19, à charge pour le locataire d'assurer la remise de son courrier en toutes circonstances et notamment en cas d'absence. Est également valable, toute communication ou notification du bailleur qui atteint le locataire à une autre adresse que celle mentionnée à l'article 19".

c. Par avenant du 18 août 2000, A______ est devenue, à compter du 1er septembre 2000, colocataire de l'appartement précité aux côtés de E______.

d. A une date indéterminée, D______ est devenue propriétaire de l'appartement en cause.

e. A______ est décédée le ______ 2016. Ses seuls héritiers sont ses deux fils, B______ et C______.

A la suite de la demande de la régie en charge de la gestion de l'immeuble de connaître les héritiers de A______, la Justice de paix lui a suggéré, par pli du 10 mai 2016, de contacter C______ à son domicile du 2______.

f. Par courrier du 6 juin 2016 envoyé à l'adresse précitée, la régie a requis de B______ la confirmation de la date de restitution du logement.

Par réponse du 14 juin 2016, B______ a indiqué qu'il souhaitait conserver, aux mêmes conditions, l'appartement concerné précisant qu'il y habitait déjà avec sa mère.

En annexe, il a remis une attestation de son frère C______, du même jour, déclarant lui céder tous ses droits sur l'appartement concerné.

g. Par courrier du 29 juin 2016 expédié à C______, à son domicile sis 2______, la régie lui a fait part du refus de la bailleresse de procéder à un transfert de bail en faveur de B______.

h. Par avis de résiliation du 8 mars 2017 adressé à l'Hoirie de feue A______, soit pour elle B______ et C______, au 1______ à Genève, la bailleresse a résilié le bail pour le 30 juin 2017.

Dans son courrier d'accompagnement, la régie a indiqué que, dans l'hypothèse
où les locataires solliciteraient une prolongation de bail, la bailleresse entendait faire valoir une réserve de hausse pour la période correspondant à l'éventuelle prolongation accordée.

Un avis de majoration du 8 mars 2017 était par conséquent annexé, par lequel la bailleresse déclarait porter le loyer annuel à 11'994 fr., dès le 1er juillet 2017, et les charges à 3'180 fr. L'augmentation était motivée comme suit : "Application de la réserve de hausse locative du fait du loyer LDTR admis par l'APA 30139-5, prévue par le jugement du Tribunal des baux et loyer du 25 octobre 2011 n° JTBL/1262/2011 (Prestations supplémentaires du bailleur au sens des art. 269a lettre b CO, 14 OBLF et 11 LDTR)".

i. La résiliation et l'avis de majoration n'ayant pas été adressés à E______, la bailleresse a notifié le 21 mars 2017 un nouvel avis de résiliation pour le 30 juin 2017 et un nouvel avis de majoration, à l'intention tant de E______ que de l'Hoirie de feue A______, soit pour elle B______ et C______, à l'adresse de l'appartement en cause.

Dans son courrier joint auxdits avis, la régie a motivé la résiliation par la volonté de la bailleresse de procéder à une rénovation totale de l'appartement.

Le pli recommandé, non réclamé dans le délai de garde, a été retourné à la bailleresse.

j. Les 24 mars et 21 avril 2017, la régie a adressé des courriers aux locataires, à l'adresse des locaux loués, concernant le passage dans leur appartement d'une entreprise spécialisée dans le diagnostic amiante.

k. Par pli du 20 avril 2017, B______ a transmis à la régie divers documents, soit notamment une attestation de son frère du même jour déclarant lui céder tous ses droits sur l'appartement concerné, et a sollicité qu'un bail soit établi à son nom.

Par courrier du 11 mai 2017, la régie a réitéré le refus de la bailleresse de céder les droits de C______ en faveur de son frère.

l. Par requête du 21 juillet 2017, déclarée non conciliée à l'audience de la Commission de conciliation du 2 octobre 2017 et portée devant le Tribunal le
10 octobre 2017, la bailleresse a sollicité l'évacuation des locataires de l'apparte-ment concerné, avec exécution directe du jugement d'évacuation.

m. Dans leur réponse du 15 janvier 2018, B______ et C______ ont conclu à la constatation de la nullité du congé du 21 mars 2017 et au déboutement de la bailleresse de toutes ses conclusions.

Reconventionnellement, ils ont conclu à ce que la nullité de la hausse de loyer, notifiée simultanément au congé du 21 mars 2017, soit constatée.

Ils ont fait valoir qu'aussi bien l'avis de résiliation que celui de majoration de
loyer étaient nuls pour ne pas avoir été notifiés au domicile de C______, de sorte qu'ils n'avaient pas pu être contestés dans les délais prévus à cet effet, B______ rencontrant des problèmes de gestion de ses affaires administratives.

n. Dans sa réponse à la demande reconventionnelle du 9 février 2018, la bailleresse a conclu au déboutement de B______ et C______ de toutes leurs conclusions.

o. Par réplique du 12 mars 2018, B______ et C______ ont persisté dans leurs précédentes conclusions.

p. Lors de l'audience du 21 mars 2018 du Tribunal, E______, bien que dûment convoquée, n'était ni présente ni représentée.

Les locataires ont persisté dans leurs conclusions.

Interrogé par le Tribunal, B______ a déclaré avoir quitté son ancien appartement et emménagé chez sa mère, environ cinq ans auparavant, afin d'aider celle-ci. Son frère l'aidait dans les démarches administratives pour lesquelles il rencontrait des difficultés.

C______ a indiqué n'avoir eu aucun contact avec la régie en dehors du courrier du 29 juin 2016 qui faisait suite à une lettre de sa part l'informant du fait qu'il ne souhaitait pas conserver le bail à son nom. Il n'avait reçu aucune information à propos de la résiliation alors même qu'il avait expressément informé la Justice de paix que toute communication en lien avec la succession devait être adressée à son domicile. S'il avait reçu la résiliation et l'avis de majoration, il les aurait contestés.

q. A l'audience du 27 juin 2018, E______, bien que dûment convoquée, n'était à nouveau ni présente ni représentée. Le Tribunal a procédé à l'audition d'un témoin, G______, ancien gérant de l'immeuble concerné jusqu'à la fin de l'année 2016 environ, lequel a déclaré qu'un des deux héritiers avait demandé, bien avant le décès de sa mère, de pouvoir être cotitulaire du bail, ce qui lui avait été refusé. Par ailleurs, la régie avait reçu des plaintes des voisins au sujet du comportement du fils de A______ qui vivait avec elle.

Le Tribunal a clôturé la phase d'administration des preuves à l'issue de l'audience.

r. Par écritures du 6 juillet 2018, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives et la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Lorsque la contestation porte sur la validité d'une résiliation de bail, ou que le locataire requiert à titre préjudiciel la constatation de la nullité ou de l'inefficacité du congé, la valeur litigieuse est égale au loyer, provisions pour frais accessoires incluses, dû pour la période pendant laquelle le bail subsiste nécessairement
si la résiliation n'est pas valable, c'est-à-dire jusqu'au jour où un nouveau congé
pourra être donné. En pratique, il convient de prendre en considération le loyer
et les frais accessoires pour la période de trois ans de l'art. 271a al. 1 let. e CO
(ATF
137 III 389 consid. 1.1; 111 II 384 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_100/2018 du 5 mars 2018 consid. 3). Rien ne commande de traiter diffé-remment la question de la constatation de la validité d'un contrat de bail. Son objet porte, en effet, également sur le maintien des rapports contractuels (ACJC/1565/2017 du 4 décembre 2017 consid. 1.1).

1.2 En l'espèce, les appelants soutiennent que la résiliation et la hausse de loyer sont nulles et contestent ainsi leur évacuation.

Compte tenu du montant du loyer, charges comprises, la valeur litigieuse est de 35'838 fr. (11'946 fr. par an x 3 ans). Elle est ainsi supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte contre le jugement entrepris.

1.3 Interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi, l'appel est recevable (art. 311 al. 1 CPC).

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2010, n. 2314 et 2416; Rétornaz, in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

Dans la mesure où l'instance d'appel assure la continuation du procès de première instance, elle doit user du même type de procédure et des mêmes maximes que celles applicables devant la juridiction précédente (Jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, 2011, n. 6 ad art. 316 CPC). La procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 2 let. c CPC; 142 III 402 consid. 2.6). La maxime inquisitoire sociale régit la procédure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

2. Les appelants sollicitent la constatation de la nullité de la résiliation du bail et de l'avis de majoration de loyer, motif pris de l'absence de notification de ceux-ci à l'adresse privée de C______. Ils se plaignent également d'une constatation inexacte des faits.

2.1 Selon l'art. 266l al. 1 CO, le congé des baux d'habitation doit être donné par écrit; le bailleur doit donner le congé en utilisant une formule agréée par le canton et qui indique au locataire la manière dont il doit procéder s'il entend contester le congé ou demander la prolongation du bail (art. 266l al. 2 CO).

L'art. 9 OBLF précise que la formule destinée à notifier au locataire le congé au sens de l'art. 266l, 2ème al. CO doit indiquer (a.) la chose louée sur laquelle porte le congé; (b.) la date à laquelle le congé sera effectif; (c.) le fait que le bailleur doit motiver le congé si le locataire le demande; (d.) les conditions légales dans lesquelles le locataire peut contester le congé et demander la prolongation du bail (art. 271 à 273 CO); (e.) la liste des autorités de conciliation et leur compétence à raison du lieu.

La résiliation doit mentionner le destinataire du congé, l'expéditeur, la désignation de l'objet loué, la manifestation claire et inconditionnelle de mettre fin au bail, la date pour laquelle le bail est résilié et la signature de la personne qui résilie le contrat de bail (art. 9 OBLF; Bohnet/Montini, Droit du bail à loyer, Bâle, 2017, nos 16-18 ad art. 266l CO; Lachat, Le bail à loyer, 2ème éd., 2008, p. 629).

Le congé donné par un bailleur à une pluralité de colocataires doit, à peine de nullité, être adressé à l'ensemble d'entre eux (art. 70 CO; arrêts du Tribunal fédéral 4A 352/2012 du 21 novembre 2012 consid. 3.2; 4A_437/2009 du 11 novembre 2009 consid. 4.3.3; Lachat, op. cit., n. 6.3 p. 637 et les auteurs cités; Higi, Berner Kommentar, 3ème éd. 1994, no 120 ad Vorbem. zu Art. 253-274g CO; Jacquemoud Rossari, Jouissance et titularité du bail, CdB 4/99, p. 103; Micheli, Les colocataires dans le bail commun, in 8ème Séminaire sur le droit du bail, 1994, p. 12). Cette résiliation peut être donnée au moyen d'une seule formule officielle portant le nom de tous les colocataires, sauf s'ils sont mariés et que le bail porte sur un logement de la famille (Lachat, op.cit., p. 638).

2.2 La résiliation du bail est une manifestation de volonté sujette à réception. Elle déploie ses effets lorsqu'elle entre dans la sphère de puissance du destinataire de telle sorte qu'en organisant normalement ses affaires, celui-ci soit à même d'en prendre connaissance; peu importe qu'une prise de connaissance effective ait lieu ou non. Lorsque l'agent postal ne peut pas remettre le pli recommandé à son destinataire ou à un tiers autorisé et qu'il laisse un avis de retrait dans la boîte aux lettres ou la case postale, la communication est reçue dès que le destinataire est en mesure d'en prendre connaissance au bureau de poste selon l'avis de retrait, soit en règle générale le lendemain du dépôt de l'avis (théorie de la réception absolue; ATF 137 III 208 consid. 3.1.2; 107 II 189 consid. 2). En principe, le congé doit être adressé au domicile du locataire. Il faut réserver les conventions prévues par les parties. L'usage admet que le bailleur puisse envoyer le courrier à l'adresse des locaux loués (arrêt du Tribunal fédéral 4A_350/2014 du 16 septembre 2014 consid. 2.2; Corboz, Les congés affectés d'un vice, in 9ème Séminaire sur le droit du bail, 1996, p. 15).

La preuve de la réception du congé incombe à son auteur. En cas d'envoi sous pli recommandé, il doit à tout le moins prouver que son destinataire a reçu l'avis de retrait.

Lorsque le destinataire ne reçoit pas le congé (ou à tout le moins un avis l'invitant à retirer le pli à la poste), le congé est nul (Corboz, op. cit., p. 14). Tel est le cas, selon la doctrine, lorsqu'une résiliation est notifiée à l'adresse de l'objet loué,
alors que le bailleur a pendant plusieurs années envoyé tous ses courriers à une autre adresse, conformément au voeu du locataire (arrêt du Tribunal 4A_350/2014 ibid. ; Bohnet/Dietschy, in Droit du bail à loyer, Commentaire pratique, 2010, n. 10 ad art. 266a CO).

2.3 En l'espèce, les conditions générales annexées au bail prévoient que le bailleur enverra ses communications à l'adresse des locaux loués. Les locataires soutiennent qu'une autre pratique s'était imposée au moment de l'envoi du congé. En particulier, l'appelant C______ allègue avoir indiqué à la Justice de paix que toute communication devait être faite à son adresse privée. Cette allégation n'est démontrée par aucune pièce versée à la procédure. La preuve par titre apparaît comme le principal moyen d'établir un tel fait. Même à retenir que le précité ait effectivement requis que toute correspondance lui soit adressée, il ne démontre pas que la bailleresse en ait été informée.

Il résulte par ailleurs de la procédure que l'intimée a adressé deux correspondances au précité à son adresse privée, notamment les 6 et 29 juin 2016. La première avait pour but de fixer une date de restitution des locaux. Quant à la seconde, il s'agissait d'une réponse au courrier adressé le 14 juin 2016. Sur la base de ces seuls éléments, les appelants n'ont pas démontré que contrairement à ce qui était convenu dans le contrat de bail, une pratique différente se serait imposée au moment de la notification de la résiliation.

Par ailleurs, il ne ressort pas du dossier que les appelants aient informé l'intimée de ce que l'appelant C______ gérait les aspects administratifs pour son frère B______, de sorte que les faits tels qu'établis par le Tribunal sont exacts. Il n'est pas ailleurs pas allégué que le précité soit sous curatelle.

Dans ces circonstances, les premiers juges ont à bon droit retenu que les avis de résiliation et de majoration de loyer pouvaient être valablement envoyés à l'adresse des locaux loués. Le congé est dès lors efficace.

2.4 Les appelants soutiennent qu'ils n'ont commis aucun abus de droit à se prévaloir de la nullité de la résiliation de bail.

2.4.1 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le locataire qui invoque le défaut de notification à sa colocataire commet un abus de droit lorsque la colocataire a déjà quitté définitivement l'objet du bail avant la notification de l'avis comminatoire et du congé et qu'elle n'a aucun intérêt au maintien du bail (ATF 140 III 491 consid. 4.2). Il a également retenu, s'agissant d'un logement de la famille, que la locataire qui, pour faire constater la nullité de la résiliation, se prévaut de l'intérêt de son époux - à qui le congé n'a pas été notifié - alors que celui-ci a quitté les lieux et s'est totalement désintéressé de la question, invoque l'art. 266n CO de manière abusive (ATF 139 III 7 consid. 2.3.2).

2.4.2 Dans le présent cas, avant la résiliation du bail en cause, l'appelant C______ a déclaré, par courrier à l'intimée du 14 juin 2016, céder l'ensemble de ses droits sur l'appartement à son frère. Il a confirmé cette volonté de cession par correspondance du 20 avril 2017. Il a ainsi démontré qu'il n'avait aucun intérêt au maintien du contrat. Par conséquent, c'est à bon droit que le Tribunal a retenu que les appelants commettaient un abus de droit à se prévaloir de l'absence de communication du congé à l'adresse privée du précité, alors qu'il n'habite pas le logement litigieux et qu'il n'a aucune intention de l'intégrer.

Le congé notifié aux appelants est donc valable et les appelants seront déboutés des fins de leur appel.

2.5 A la fin du bail, le locataire doit restituer la chose dans l'état qui résulte d'un usage conforme au contrat (art. 267 CO).

Dès lors que les appelants ne disposent plus d'aucun titre juridique, c'est à bon droit que le Tribunal a prononcé leur évacuation.

2.6 Le jugement entrepris sera, partant, confirmé.

3. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 15 octobre 2018 par l'HOIRIE DE FEUE A______, soit pour elle B______ et C______, contre le jugement JTBL/818/2018 rendu le 12 septembre 2018 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/16649/2017-5-OSD.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Laurence CRUCHON et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2.