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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/8013/2019

ACJC/359/2020 du 02.03.2020 sur JTBL/591/2019 ( SBL ) , CONFIRME

Normes : CPC.257; CO.124.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8013/2019 ACJC/359/2020

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 2 MARS 2020

 

Entre

Monsieur A______, domicilié chemin ______, ______ (GE), appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 11 juin 2019, comparant en personne,

et

Monsieur B______, intimé, comparant par Me Olivier WEHRLI, avocat, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTBL/591/2019 du 11 juin 2019, expédié pour notification aux parties le 14 juin 2019, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ à verser à B______ la somme de 12'467 fr. 90, avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2018 (ch. 1 du dispositif), a écarté l'opposition formée au commandement de payer, poursuite no 1______, notifié le 28 février 2019 (ch. 2), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

En substance, les premiers juges ont retenu que A______ ne contestait pas l'exactitude du décompte de loyer produit par B______. Les objections formulées par A______ ne suffisaient par ailleurs pas à exclure le cas clair, les loyers et indemnités restant dus jusqu'à la restitution des locaux. L'opposition formée au commandement de payer devait donc être écartée.

B.            a. Par acte déposé le 24 juin 2019 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé appel de ce jugement. Il a conclu au rejet de la demande en paiement de B______ ou, alternativement, à la prise en compte de la «non-exécution des engagements contractuels par le bailleur» et l'établissement de «la valeur qui devrait être déduite de la valeur litigieuse».

A______ s'est plaint d'une constatation inexacte des faits. Il a fait valoir que contrairement à ce qu'avait indiqué le conseil de B______ lors de l'audience du 11 juin 2019, il avait été convenu de la création d'un sas et de deux portes dans le hall d'entrée, ce qui n'avait pas été fait, raison pour laquelle il pouvait prétendre à une réduction de loyer jusqu'à réparation du défaut.

A______ a produit une pièce nouvelle, soit une photographie non datée.

b. Par réponse du 3 juillet 2019, B______ a conclu, préalablement, à ce que la nouvelle pièce soit écartée de la procédure et, principalement, à ce que A______ soit débouté de toutes ses conclusions.

B______ a indiqué que l'état de fait n'était pas litigieux, le locataire admettant le décompte de loyers et indemnités. Si A______ alléguait que les locaux n'avaient pas été loués dans un état approprié à l'usage convenu, aucun avis de défaut ni aucune demande de baisse ou de réduction de loyer ne lui avait été formulée. Aucune créance compensatrice ne pouvait dès lors être retenue.

c. Par courrier du 12 août 2019, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger, A______ n'ayant pas fait usage de son droit de répliquer.

 

 

 

C. Les éléments suivants résultent de la procédure :

a. Le 29 janvier 2018, les parties ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de locaux commerciaux d'environ 130 m2 au 3ème étage de l'immeuble sis ______ (adresse) à Genève.

Le contrat a été conclu pour une durée de trois ans, du 1er février 2018 au 31 janvier 2019, avec une clause de renouvellement d'année en année à défaut de résiliation par l'une des parties six mois au moins avant la fin du bail.

Le montant du loyer a été fixé à 7'600 fr. par mois, auquel s'ajoutent des acomptes mensuels pour frais accessoires de 200 fr.

Au terme du contrat de bail, le bailleur s'est notamment engagé à créer un sas et deux portes pour séparer une surface de gauche et droite dans le hall d'entrée.

b. Par avis comminatoire du 15 août 2018, B______ a mis en demeure A______ de lui régler dans les 30 jours le montant de 16'617 fr. 90, à titre d'arriéré de loyer et charges pour la période du 1er juillet au 31 août 2018, ainsi que de frais de rappel, et l'a informé de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail, conformément à l'art. 257d CO.

c. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement acquittée dans le délai imparti, B______ a, par avis officiel du 26 septembre 2018, résilié le bail avec effet au 31 octobre 2018.

d. A______ ayant libéré les locauxle 15 novembre 2018, la procédure C/2______/2018 portant sur la requête en évacuation, déposée par B______ le 8 novembre 2018, est devenue sans objet.

e. Le 28 février 2019, l'Office des poursuites, sur réquisition de B______, a notifié à A______ un commandement de payer, poursuite no 1______, la somme de 12'467 fr. 90, avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2018, pour les loyers et acomptes de charges dus du 1er au 31 octobre 2018, déduction faite d'un acompte de 200 fr. versé le 3 septembre 2018 (7'600 fr.), des indemnités pour occupation illicite et acomptes de charges du 1er au 15 novembre 2018 (3'900 fr.) et un solde de décompte de chauffage établi le 20 juin 2018 (967 fr. 90).

Le poursuivi a formé opposition à la poursuite.

f. Par demande du 9 avril 2019 au Tribunal, B______ a conclu à ce que A______ soit condamné à lui verser la somme de 12'467 fr. 90, avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2018, et à ce que la mainlevée définitive à l'opposition formée au commandement de payer no 1______ du 8 février 2019 soit prononcée.

g. Lors de l'audience du 11 juin 2019 du Tribunal,B______ a persisté dans ses conclusions. A______ a contesté que le cas soit clair au motif de la «non-exécution des obligations du propriétaire». B______ devait en effet diviser l'accès à l'entrée des bureaux en constituant une porte, ce qui n'avait pas été fait, B______ ayant uniquement envoyé un architecte pour prendre des mesures. A______ n'avait pas demandé de baisse ou de réduction de loyer mais seulement indiqué à la régie ce qui n'allait pas. La somme réclamée par B______ n'était pas due car celui-ci n'avait en outre pas le droit de le "mettre dehors" avant l'échéance du contrat et moyennant un préavis aussi court. Il était néanmoins exact que les loyers de juillet et août 2018 avaient été payés en retard. Il pensait en outre que le décompte produit par B______ était exact.

La cause a été gardée à juger au terme de l'audience.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC; Jeandin, Code de procédure civile commentée, Bâle, 2011, n.13 ad art. 308 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

Compte tenu des dernières conclusions, qui comprennent une prétention en paiement de 12'467 fr. 90, la valeur litigieuse est supérieure aux 10'000 fr. prévus à l'art. 308 al. 2 CPC pour que la voie de l'appel soit ouverte.

1.2 Le jugement querellé est une décision finale de première instance, au sens de l'art. 308 al. 1 CPC.

1.3 L'appel et la réponse y relative ont été interjetés respectivement déposés dans les délais et suivant les formes prescrits par la loi (art. 130, 131, 314 CPC), de sorte qu'ils sont recevables.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2010, n. 2314 et 2416; Retornaz, Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens. Neuchâtel 2010, p. 349 ss, n. 121).

2. L'appelant a produit une pièce nouvelle.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

2.2 La pièce nouvelle produite par l'appelant est irrecevable, car non datée, ainsi que les allégués de fait s'y rapportant. Elle n'est en tout état pas déterminante pour l'issue du litige.

3. L'appelant soutient que le Tribunal aurait dû rejeter la demande en paiement de l'intimé, se prévalant, à titre compensatoire, d'une créance en réduction de loyer pour défaut de la chose louée.

3.1 Aux termes de l'art. 257 CPC, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b).

Le tribunal n'entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée. Il peut être procédé par cette voie pour l'expulsion de locataires (ATF 139 III 38 consid. 2.5.3).

L'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur. Il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées. En règle générale, la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce (ATF 141 III 23 consid. 3.2).

En matière pécuniaire, la situation juridique est claire au sens de l'art. 257 CPC lorsque le créancier est en possession d'une reconnaissance de dette (art. 82
al. 1 LP), mais également dans tous les cas où la norme s'applique au cas concret et y déploie ses effets de manière évidente, sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées (ACJC/1003/2012 du 11 juillet 2012). Ainsi, les cas susceptibles de faire l'objet d'une protection en raison de leur clarté sont ceux qui pourraient aboutir au prononcé d'une mainlevée provisoire (Bohnet, La procédure sommaire, in La procédure civile suisse, Neuchâtel, 2010, p. 214).

3.2 La compensation présuppose une déclaration de compensation (art. 124
al. 1 CO). La créance compensante (celle du débiteur opposée à la créance principale qu'il s'agit d'éteindre par compensation) doit être échue et exigible (Lachat, Le bail à loyer, 2ème éd., 2019, p. 378).

La compensation peut intervenir en tout temps, même en cours de procès. Toutefois, lorsqu'il est en demeure dans le paiement de son loyer (art. 257d CO), le locataire doit invoquer en compensation une créance certaine dans le délai comminatoire de l'art. 257d al. 1 CO. A défaut, il ne pourra pas faire obstacle à la résiliation anticipée du bail (Lachat, op. cit., p. 381).

Le locataire qui prétend à une réduction de loyer peut en faire la demande au bailleur, par écrit, ou saisir directement l'autorité de conciliation. Si la réduction de loyer est accordée, soit directement par le bailleur, soit par l'autorité judiciaire, le locataire sera fondé à invoquer la compensation; il cessera de payer le loyer dans la limite de la réduction accordée (Lachat, op. cit., p. 320).

3.3 En l'occurrence, s'il a effectivement été convenu de la création, par l'intimé, d'un sas et de deux portes dans le hall d'entrée des locaux, l'appelant ne dispose en l'état d'aucune créance exigible en réduction de loyer. En effet, il a admis, lors de l'audience du 11 juin 2019, n'avoir demandé aucune baisse ou réduction de loyer à l'intimé. Il n'allègue en outre pas s'être adressé à l'autorité de conciliation en ce sens.

L'appelant ne contestant par ailleurs pas la somme réclamée, le Tribunal a ainsi retenu à bon droit que les conditions du cas clair étaient réunies.

Partant, le jugement querellé sera confirmé.

4. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 24 juin 2019 par A______ contre le jugement JTBL/591/2019 rendu le 11 juin 2019 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/8013/2019-8-SD.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Jean-Philippe FERRERO et
Madame Laurence MIZRAHI, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et
90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.