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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/3500/2012

ACJC/1133/2012 (3) du 08.08.2012 sur JTBL/505/2012 ( SBL ) , JUGE

Descripteurs : CAS CLAIR; ÉVACUATION(EN GÉNÉRAL)
Normes : CPC.257 CPC.317 CO.257d
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3500/2012 ACJC/1133/2012

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MERCREDI 8 AOÛT 2012

 

Entre

Madame R______, domiciliée ______ Genève, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 22 mai 2012, comparant par Me Albert J. Graf, avocat, avenue Alfred Cortot 1, 1260 Nyon (VD), en l’étude duquel elle fait élection de domicile,

d’une part,

et

Monsieur R. L______ et Madame P. L______, domiciliés ______ Genève, représentés par la régie W______ SA, chemin de Grange-Canal 21-23, 1208 Genève, intimés,

d’autre part,

 


EN FAIT

A. a. Par acte envoyé par pli recommandé le 11 juin 2012 au greffe de la Cour de justice, R______ appelle d’un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 22 mai 2012, expédié pour notification aux parties par plis recommandés du 25 mai 2012, la condamnant à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens et de tout tiers dont elle est responsable l'appartement de 6,5 pièces au 8ème étage de l'immeuble sis ______ à Genève, autorisant R. et P. L______ à requérir l'évacuation par la force publique de R______ dès l'entrée en force du jugement et déboutant les parties de toutes autres conclusions.

R______ conclut, préalablement, à l'octroi de l'effet suspensif, et, principalement, à l'annulation du jugement entrepris, et, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée en première instance pour instruction et nouvelle décision, avec suite de frais et dépens.

A l'appui de son appel, R______ fait valoir que le congé extraordinaire n'est pas exécutoire, puisqu'une requête en constatation de l'inefficacité a été déposée devant la juridiction des baux et loyers, de sorte que le Tribunal des baux et loyers a violé les art. 59, 126 et 337 al. 2 CPC. Elle indique également que compte tenu des circonstances spécifiques du cas d'espèce, R. et P. L______ commettent un abus de droit à requérir son évacuation.

R______ reproche pour le surplus aux premiers juges d'avoir retenu que l'invocation de la nullité du loyer initial alléguée était abusive, contrairement aux art. 269d et 270 al. 2 CO. Elle fait de plus valoir que les conditions du cas clair, prévu à l'art. 257 CPC ne sont pas réunies. Enfin, elle explique que son droit d'être entendue n'a pas été respecté, le Tribunal des baux et loyers n'ayant pas tenu compte des pièces versées à la procédure.

Outre le jugement querellé, elle a produit des pièces nouvelles datant de 2010 et 2011 (pièces 2 à 13), ainsi qu'une ordonnance rendue par le Tribunal des baux et loyers le 6 juin 2012 dans la cause C/26376/2011 (pièce 12bis).

b. Dans leur réponse du 2 juillet 2012, R. et P. L______ concluent au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement.

Ils font valoir que R______ n'a pas contesté la quotité des montants dus et avait indiqué que ceux-ci avaient été valablement acquittés par la consignation du loyer. R______ n'avait par ailleurs pas excipé de compensation.

Pour le surplus, R. et P. L______ indiquent qu'une procédure en contestation du congé ne fait pas obstacle à la procédure du cas clair. De jurisprudence constante, l'invocation de la nullité du loyer initial dans la procédure d'évacuation pour défaut de paiement est abusive.

c. Les parties ont été informées le 3 juillet 2012 par le greffe de la Chambre de céans de la mise en délibération de la cause.

d. Par courrier expédié le 13 juillet 2012, R______ a sollicité qu'un délai lui soit fixé pour répliquer.

B. Les faits pertinents de la cause peuvent être résumés comme suit :

a. Le 10 octobre 1996, C______, actionnaire-locataire de la SA D______, et R______ ont conclu un seul contrat de bail à loyer portant sur la location du lot_,U_, comprenant un appartement de 5,5 pièces au 7ème étage, un appartement de 6,5 pièces au 8ème étage, une pièce en attique (9ème étage) et deux locaux au rez-de-chaussée de l’immeuble sis ______ à Genève.

Le bail a débuté le 1er novembre 1996 pour se terminer le 31 octobre 1997, renouvelable par tacite reconduction d'année en année, sauf congé donné trois mois à l'avance. L'échéance du bail a été modifiée au 30 juin de chaque année, par procès-verbal de conciliation du 3 novembre 2004.

Le loyer initial a été fixé à 24'840 fr. par année, l’acompte de charges à 3'300 fr. annuellement et le téléréseau à 462 fr. l'an.

L'acompte de charges a été porté de 2'760 fr. à 3'600 fr. par an dès le 1er juillet 2005, par avenant du 20 avril 2005.

Les locaux étaient destinés à l'usage d'habitation et d'atelier.

b. En 1997, le lot PPE précité a été saisi dans le cadre d'une poursuite en réalisation de gage. La disposition du bien a été retirée à C______. Une gérance légale a été instaurée et confiée à la régie W______ SA.

La faillite de la SA D______ a été prononcée le 22 mars 2004 par jugement du Tribunal de première instance. Dès cette date, la gérance s'est poursuivie dans le cadre de la liquidation de cette faillite.

c. Depuis le mois de septembre 2008, R______ a mis à disposition de la Communauté des copropriétaires de l'immeuble, sur demande de celle-ci, l'attique, de manière à ce que des travaux de rénovation puissent être entrepris. Toutes les affaires de R______ sont depuis lors entreposées dans son logement, au 8ème étage.

d. Par avis officiel du 7 septembre 2009, le bail de R______ a été résilié pour le 30 juin 2010, l'Office des faillites s'étant vu confier la mission de vendre les biens de la SA D______ en liquidation.

e. R______ a contesté ce congé le 1er octobre 2009 auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers (cause C/__/2009).

Dans le cadre de cette procédure, il a été porté à la connaissance de R______ que l'appartement de 5,5 pièces au 7ème étage avait été vendu le 8 novembre 2010 aux époux A______.

R______ a retiré sa contestation de congé à la suite d'un accord trouvé avec les nouveaux propriétaires.

f. Le 18 avril 2011, les époux L______ ont fait l'acquisition de l'appartement de 6,5 pièces au 8ème étage.

g. Le Tribunal des baux et loyers a rendu un jugement le 7 novembre 2011, entre R______ d'une part, et les époux L______ et la MASSE EN FAILLITE DE LA SA D______, EN LIQUIDATION d'autre part (cause C/__/2009), par lequel une unique prolongation de bail d'un an et demi, échéant le 31 décembre 2011, a été accordée à R______. Pour le surplus, le Tribunal a déclaré irrecevables les conclusions de cette dernière visant à la réduction de 100% de son loyer depuis fin septembre 2008 et jusqu'à la fin des travaux de rénovation de l'immeuble, respectivement pour la pièce en attique jusqu'à restitution de celle-ci, ainsi que ses conclusions en constatation que le loyer relatif à l'appartement du 7ème étage n'était plus dû à la MASSE EN FAILLITE DE LA SA D______, EN LIQUIDATION (ci-après : la MASSE EN FAILLITE), depuis le mois de janvier 2011.

R______ a formé appel contre ce jugement, procédure actuellement en cours auprès de la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice.

h. Par avis comminatoires du 21 septembre 2011, dont l'intitulé concerne aussi bien l'appartement de 6,5 pièces que la pièce en attique, les époux L______ ont mis en demeure R______ de leur régler dans les trente jours le montant de 7'216 fr. 20 (sous déduction d'un acompte de 1'016 fr. 05), les loyers ayant été acquittés "jusqu'au 30 avril 2011". Ils l'ont informée de leur intention de résilier le bail à défaut de paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, conformément à l’art. 257d CO.

Le courrier de sommation a été distribué à R______ le 26 septembre 2011.

R______ a indiqué aux époux L______ le 28 septembre 2011 que les loyers étaient consignés depuis avril 2011. Elle avait versé 630 fr. 40 pour avril et 1'646 fr. 45 par mois pour mai à août 2011, soit un total de 7'216 fr. 20.

i. Considérant que la somme n’avait pas été réglée dans le délai imparti, R. et P. L______ ont, par avis officiel du 28 octobre 2011, résilié le bail pour le 31 décembre 2011. Ils ont indiqué que l'arriéré de loyer s'élevait à 8'862 fr. 65, correspondant à six mensualités (juin à octobre 2011).

j. La consignation de 1'646 fr. 45 a été faite de mai à novembre 2011, de manière irrégulière. Le loyer du mois de juin 2011 a été versé directement à la régie. Ces montants ont été déconsignés sans condition le 12 décembre 2011.

k. Par requête en cas clair (art. 257 CPC) déposée le 31 janvier 2012 au greffe du Tribunal des baux et loyers, R. et P. L______ on sollicité l’évacuation de R______ des locaux en cause, non libérés par elle dans le délai imparti. Ils ont également requis l'exécution directe du jugement d'évacuation.

Les époux L______ font valoir que la part du loyer dû par R______ pour l'ensemble des lots loués a été répartie en fonction des millièmes de chacun des lots, soit 762 fr. 05 par mois pour les époux A______ et 1'646 fr. 45 pour l'appartement de 6,5 pièces leur appartenant et la pièce en attique de la MASSE EN FAILLITE.

Ils soulignent que la somme de 1'646 fr. 45 se décompose de 1'421 fr. 20 de loyer, 206 fr. d'acompte de charges et 19 fr. 25 de téléréseau.

A l'appui de leur demande, R. et P. L______ ont expliqué que la consignation, opérée uniquement en raison de la non-restitution de la pièce au 9ème étage n'avait pas été valablement effectuée par R______, faute d'avoir été précédée d'une menace et assortie d'un délai pour remédier au défaut, de concerner des loyers non échus et d'avoir été validée. Les loyers n'avaient ainsi pas été payés, la consignation n'étant pas valable. Par ailleurs, aucune déclaration de compensation n'avait été faite dans le délai comminatoire.

l. Par requête introduite le 9 décembre 2011 en conciliation, objet d'une autorisation de procéder le 4 avril 2012 et portée devant le Tribunal des baux et loyers le 3 mai 2012 (cause C/__/2011), R______ a requis la constatation de l'inefficacité du congé notifié, subsidiairement son annulation.

Elle a fait valoir que son loyer avait arbitrairement été fixé à 1'645 fr. 45, dès lors que ce montant incluait la pièce en attique demeurée propriété de la MASSE EN FAILLITE, loyer pour le surplus nul, faute d'avoir été notifié au moyen d'un formulaire officiel.

Elle a également indiqué que le délai de 30 jours pour le paiement de l'arriéré visé dans la sommation du 23 septembre 2011 n'avait commencé à courir que le 15 novembre 2011, date de réception du jugement du Tribunal des baux et loyers du 7 novembre 2011 (cause C/__/2009). Ce n'était qu'à partir de cette date qu'elle avait compris que sa consignation n'était pas valable, ce dont elle ne pouvait préalablement douter. Elle avait immédiatement déconsigné son loyer. La régie avait fait obstruction au paiement, en refusant de lui communiquer ses coordonnées bancaires.

m. Lors de l’audience de débats du 22 mai 2012, R. et P. L______ ont persisté dans leurs conclusions. Ils ont réaffirmé que la consignation qu'avait faite R______ n'était pas valable pour plusieurs motifs.

Pour sa part, R______ a conclu à l'irrecevabilité de la requête, subsidiairement à son rejet, plus subsidiairement à ce que la cause soit suspendue jusqu'à droit jugé dans la procédure en constatation de l'inefficacité du congé.

Elle a ajouté avoir initié une procédure en réduction de loyer (cause C/__/2011) tant contre R. et P. L______ que contre la MASSE EN FAILLITE, concluant à la gratuité du loyer depuis septembre 2008 et à l'octroi de dommages-intérêts. Introduite en conciliation le 25 novembre 2011, l'autorisation de procéder avait été délivrée le 4 avril 2012 et la demande a été portée au Tribunal des baux et loyers le 3 mai 2012.

Le Tribunal des baux et loyers a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

C. Les arguments des parties seront examinés en tant que de besoin ci-après.

EN DROIT

1. Selon l'art. 121 al. 2 LOJ (RS/GE E 2 05), entré en vigueur le 1er janvier 2011, dans les causes fondées sur les art. 257d et 282 CO, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice siège sans assesseurs.

2. L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt 4C.310/1996 du 16 avril 1997 = SJ 1997 p. 493 consid. 1).

Lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal détermine la valeur litigieuse si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur ce point ou si la valeur qu'elles avancent est manifestement erronée (art. 91 al. 2 CPC). La détermination de la valeur litigieuse suit les mêmes règles que pour la procédure devant le Tribunal fédéral (RETORNAZ in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 363; SPÜHLER BSK ZPO, no 8 ad art. 308).

L'art. 51 al. 2 LTF dispose que si les conclusions ne tendent pas au paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal fédéral fixe la valeur litigieuse selon son appréciation. La jurisprudence prévoit, s'agissant d'une procédure relative à une évacuation, dans laquelle la question de l'annulation, respectivement de la prolongation du bail ne se pose pas, que l'intérêt économique du locataire peut être assimilé à la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période où son déguerpissement ne peut pas être exécuté par la force publique (arrêt 4A_72/2007 du 22 août 2007 consid. 2.2). Dans un arrêt de 2009, le Tribunal fédéral a également précisé que la valeur correspond à l'usage de l'appartement pendant la période durant laquelle le locataire pourrait encore l'occuper s'il obtient gain de cause (arrêt 4A_549/2008 du 19 janvier 2009 consid. 1).

2.1. En l'espèce, la présente procédure a trait à une demande d'évacuation et d'exécution directe. La valeur litigieuse correspond dès lors à la somme des loyers entre le moment du dépôt de l'appel par l'appelante et le moment où son déguerpissement pourra vraisemblablement être exécuté par la force publique. Le montant du loyer, charges et téléréseau compris, dû par l'appelante aux intimés est contesté par les parties, l'appelante alléguant qu'une partie de la somme de 1'646 fr. 45 revient à la MASSE EN FAILLITE s'agissant de la pièce sise au 9ème étage de l'immeuble. Le montant exact du loyer peut en l'état rester indécis, la valeur litigieuse étant supérieure à 10'000 fr., en prenant en considération une part de 1'300 fr. par mois (loyer mensuel charges comprises de 1'300 fr. x 9 mois = 11'700 fr.). La période de 9 mois correspond à l'estimation suivante : trois mois de procédure devant la Cour de justice, trente jours pour recourir au Tribunal fédéral, quatre mois de procédure devant le Tribunal fédéral et trente jours pour la force publique pour procéder à l'évacuation.

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

2.2. Selon l'art. 311 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d'appel.

Le délai d'appel est réduit à 10 jours si la décision a été rendue en procédure sommaire (art. 314 al. 1 CPC). Cette procédure s'applique notamment aux cas clairs (art. 248 lit. b CPC).

Il y a cas clair si l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé et si la situation juridique est claire (art. 257 al. 1 CPC).

Il est admis que la procédure d'évacuation postérieure à une résiliation de bail pour défaut de paiement du loyer appartient, en principe, à cette catégorie (HOFMANN/LUSCHER, Le Code de procédure civile, 2009, p. 165; LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2011, ch. 4.4.2.2, p. 167).

L'appel a été interjeté dans le délai de dix jours (art. 257 et 314 al. 1 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

3. 3.1. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

3.2. La maxime des débats s'applique à la procédure des cas clairs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_447/2011 du 20.9.2011).

3.3. La Cour examine, en principe, d'office la recevabilité des pièces produites en appel (REETZ/HILBER, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2010, n. 26 zu 317).

3.4. Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (JEANDIN, Code de procédure civile commenté, Bâle, 2011, no 6 ad art. 317 CPC).

3.5. En l'espèce, les pièces 2 à 13 produites par l'appelante datent de 2010 et 2011, de sorte qu'il s'agit de faux nova. Elle n'indique pas pour quel motif ces pièces n'ont pas été versées à la procédure de première instance, ni n'allègue qu'elles ne pouvaient pas l'être. Ces pièces sont dès lors irrecevables.

En revanche, la pièce 12bis, soit une ordonnance du Tribunal du 6 juin 2012, a été établie après que la cause ait été gardée à juger, de sorte qu'elle sera admise.

4. Après que la cause a été mise en délibération, l'appelante a sollicité la fixation d'un délai pour répliquer.

4.1. Selon les art. 312 et 314 CPC, en procédure sommaire, l'instance d'appel doit notifier l'appel à la partie adverse pour qu'elle se détermine par écrit et dépose sa réponse dans un délai de dix jours. La suite de la procédure est réglée par l'art. 316 CPC qui permet à l'instance d'appel d'ordonner des débats ou de statuer sur pièces, voire d'ordonner un deuxième échange d'écritures.

En l'occurrence, la Cour de céans n'a ordonné ni débat ni second échange d'écriture, choisissant de statuer sur pièces, ce qui ressortait implicitement de la mise en délibération communiquée aux parties.

4.2. Selon la jurisprudence, le Code de procédure civile n'impose pas à la juridiction d'appel de fixer à la partie appelante un délai pour se déterminer sur la réponse. Si cette partie estime devoir s'exprimer sur celle-ci, il lui incombe de produire directement ses observations, cela dans un délai raisonnable ne devant pas être supérieur à celui dont elle avait bénéficié pour recourir, soit en l'espèce d'un délai de dix jours (arrêt du Tribunal fédéral 5A_777/2011 du 7 février 2012 consid. 2.2).

En l'occurrence, l'appelante a été informée par courrier du 3 juillet 2012 de la mise en délibération de la cause. Si elle entendait répliquer, elle devait déposer spontanément une réplique, dans un délai de dix jours, ce qu'elle n'a pas fait.

La Cour n'entrera dès lors pas en matière sur ce point.

5. 5.1. Il y a cas clair si l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé et si la situation juridique est claire (art. 257 al. 1 CPC).

Il est admis que la procédure d'évacuation postérieure à une résiliation de bail pour défaut de paiement du loyer appartient, en principe, à cette catégorie (BOHNET, Code de procédure civile commenté, no 9 ad art. 257 CPC; HOFMANN/LUSCHER, Le Code de procédure civile, 2009, p. 165; LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2011, ch. 4.4.2.2, p. 167).

L'état de fait doit pouvoir être établi sans peine, c'est-à-dire que les faits doivent être incontestés et susceptibles d'être immédiatement prouvés. Dans le doute, l'affaire doit être traitée dans une procédure complète. La situation juridique peut être considérée comme claire si, sur la base d’une doctrine et d’une jurisprudence éprouvées, la norme s’applique au cas concret et y déploie ses effets de manière évidente (BOHNET, op. cit., no 13 ad art. 257 CPC; HOHL, Procédure civile, Tome II, Berne, 2010, p. 304; Message du Conseil fédéral relatif au Code de procédure civile, p. 6959).

Si la partie adverse, qui doit être entendue (art. 253 CPC), conteste les faits ou oppose une exception à la prétention du demandeur, la protection dans les cas clairs ne peut pas être accordée. Il suffit de démontrer la vraisemblance des objections; par contre, des allégations dénuées de fondement ne sauraient faire obstacle à un procès rapide (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au Code de procédure civile suisse [CPC], in FF 2006 p. 6841 ss, p. 6959; ACJC/60/2012 du 16.01.2012).

Selon la doctrine, si le locataire a saisi, parallèlement à la demande d'expulsion, l'autorité paritaire de conciliation d'une demande d'annulation du congé anticipé, il y a lieu de considérer qu'il appartient à cette autorité d'examiner le cas. Dans une telle hypothèse, le "cas clair" devra être dénié (LACHAT, op. cit., p. 168-169).

Selon l'art. 254 al. 1 CPC, la preuve est en principe rapportée par titres, en procédure sommaire.

A teneur du Message du Conseil fédéral, la limitation des moyens de preuve est relativement stricte. L'inspection d'un objet apporté à l'audience est envisageable, mais les expertises et les interrogations des parties ne sauraient en principe entrer en ligne de compte (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au Code de procédure civile suisse [CPC], op. cit., p. 6959).

5.2. La maxime des débats s'applique à la procédure des cas clairs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_447/2011 du 20.9.2011).

6. 6.1. Selon l’art. 257d CO, lorsque, après la réception de la chose, le locataire a du retard pour s’acquitter d’un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer, par écrit, un délai de paiement et lui signifier qu’à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail.

Ce délai sera de 10 jours au moins et, pour des baux d’habitation et de locaux commerciaux, de 30 jours au moins.

Faute de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d’habitation et de locaux commerciaux peuvent être résiliés, moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d’un mois.

En matière d’évacuation pour défaut de paiement, le juge doit examiner si la créance invoquée par le bailleur existe, si elle est exigible, si le délai imparti est conforme à l’art. 257d al. 1 CO, si l’avis comminatoire du bail était assorti d’une menace de résiliation du bail en cas de non-paiement dans le délai imparti, si le versement réclamé n’a pas été payé, et si le congé satisfait aux exigences de forme prévues aux art. 266l et 266n CO et respecte le délai et le terme prescrits par l’art. 257d al. 2 CO.

Le délai comminatoire de l’art. 257d al. 1 CO commence à courir le lendemain du jour où le locataire a reçu l’avis du bailleur (LACHAT, Le bail à loyer, 2008, p. 667).

Si les conditions légales sont remplies, le juge doit prononcer l’évacuation; sinon, il doit rejeter la requête.

6.2. L’art. 257d CO s’applique lorsque le locataire est en retard dans le paiement du loyer prévu par le bail ou résultant de majorations valablement notifiées, non contestées ou admises par le juge. Les intérêts moratoires (art. 104 CO) liés aux loyers arriérés sont assimilables à celui-ci (LACHAT, op. cit., p. 664; HIGI, Commentaire zurichois, no 10 ad. art. 257d CO; WEBER, Commentaire bâlois, no 3 ad. art. 257d CO; SVIT-Kommentar no 16 ad. art. 257d CO). Il en va de même des frais accessoires échus. Le bailleur n’est toutefois pas habilité à résilier le contrat en application de l’art. 257d al. 2 CO lorsque le locataire est en retard dans le paiement de frais de poursuite, de la garantie bancaire ou de dommages et intérêts (LACHAT, op. cit., p. 664; HIGI, op. cit., no 11 ad. art. 257d CO; SVIT-Kommentar no 16 ad. art. 257d CO).

L’invitation à payer doit clairement mentionner le montant de l’arriéré lui-même, lequel ne doit pas nécessairement être chiffré, mais être déterminable de manière certaine. Si le bailleur a des créances qui ne permettent pas l’application de l’art. 257d CO et d’autres qui la permettent, son courrier doit les distinguer de manière précise, de sorte que le locataire puisse reconnaître sans difficulté les dettes à éteindre pour éviter la résiliation du bail (LACHAT, op. cit., p. 666; RAJOWER, PJA 1998, p. 807).

La commination doit être claire et expresse, même s’il apparaît a priori qu’elle restera sans effet. Elle ne peut renvoyer sans autre précision à l’art. 257d CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_551/2009 consid. 2.4.1.; BOHNET/MONTINI, Droit du bail à loyer, p. 229). L’avis précisera au besoin de manière détaillée les loyers en souffrance (BOHNET/MONTINI, ibidem, p. 229).

6.3. Selon la jurisprudence, une résiliation de bail est annulable lorsqu’elle est abusive ou contraire à la bonne foi, même si elle a pour cause la demeure du locataire, l’art. 271 al. 1 CO s’appliquant en cas de résiliation opérée en application de l’art. 257d CO. Mais le juge ne peut alors annuler le congé litigieux que si celui-ci est inadmissible au regard de la jurisprudence relative à l’abus de droit. Seules des circonstances particulières justifient l’annulation d’un tel congé (ATF 120 II 31 cons. 4a p. 32 et réf. citées, ATF in SJ 2004 I p. 424, consid. 3.1.).

Le locataire qui entend faire valoir l’annulabilité du congé pour ce motif doit avoir agi dans le délai péremptoire prescrit par l’art. 273 al. 1 CO, soit 30 jours dès la réception du congé, sous peine d’être déchu de ses droits (arrêt du Tribunal fédéral 4C.40/2004 paru in SJ 2005 p. 310, 312).

Lorsque le congé est inefficace ou dépourvu d’effet, soit lorsque ses conditions matérielles font défaut (ATF 121 III 156 consid. 1c), le locataire n’a pas l’obligation de le contester dans le délai de l’art. 273 CO et peut le soulever lorsque le bailleur engage la procédure d’expulsion (ATF 122 III 92 consid. 2b = JdT 1996 I 595, 598).

6.4. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, interprétant l'art. 270 al. 2 CO, il a été considéré qu'un vice de forme dans la notification du loyer initial entraînait la nullité du loyer fixé (cf. ATF 120 II 341 consid. 5c et d p. 348 s. confirmé in ATF 124 III 62 consid. 2a p. 64). Le Tribunal fédéral a en outre souligné que, lorsque, dans cette hypothèse, le locataire avait introduit une procédure judiciaire pour contester le loyer initial, il était en tout cas exclu qu'il tombe en demeure (art. 257d CO) jusqu'à la fixation judiciaire du loyer (ATF 120 II 341 consid. 6c p. 350 s.).

Toutefois, l'application de ces principes suppose que le vice de forme ne soit pas abusivement invoqué par le locataire (cf. en matière d'augmentation de loyer: ATF 123 III 70 consid. 3c p. 74 s.; 113 II 187 consid. 1a; HIGI, Commentaire zurichois, n. 119 ad art. 270 CO).

Pour déterminer s'il y a abus manifeste d'un droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC, il convient d'examiner les circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 121 III 60 consid. 3d p. 63). Parmi les cas typiques d'abus de droit figurent notamment une attitude contradictoire et l'utilisation d'une institution juridique contrairement à son but (cf. ATF 120 II 105 consid. 3a p. 108). Il a été jugé que le comportement du locataire qui, après s'être rendu compte du vice de forme résultant de la non- utilisation de la formule officielle, s'était abstenu de protester dans le dessein d'en tirer ultérieurement profit était abusif (ATF 113 II 187 consid. 1a).

La Haute Cour a ainsi retenu que l'invocation par le locataire de la nullité de loyer, initiée aux seules fins de faire échec à une procédure d'évacuation fondée sur un défaut de paiement, et formulée six ans après la conclusion du bail, était abusive (arrêt du Tribunal fédéral 4C.315 du 5 février 2001 consid. 4b).

6.5. Dans le cas d'espèce, l'appelante est locataire depuis 1996 de deux appartements sis respectivement aux 7ème et 8ème étage de l'immeuble, ainsi que d'une pièce en attique, faisant l'objet d'un seul contrat. En 1997, une gérance légale a été instituée. A la suite de la faillite de la SA D______ en 2005, l'Office des faillites s'est vu confier la mission de vendre les biens de celle-ci. C'est ainsi que le couple A______ est devenu propriétaire de l'appartement de 5,5 pièces au 7ème étage le 8 novembre 2010. Il ne ressort toutefois pas de la procédure à quelle date l'appelante a restitué le logement. Le 18 avril 2011, les intimés ont acquis l'appartement de 6,5 pièces sis au 8ème étage. Quant à la pièce en attique, elle est demeurée propriété de la SA D______, EN LIQUIDATION.

Lors de la sommation du 21 septembre 2011, les intimés ont sollicité le paiement de cinq mois d'arriérés de loyer et de charges, tant pour le logement que pour l'attique. Par ailleurs, les intimés se sont bien gardés devant les premiers juges d'indiquer que le loyer de 1'646 fr. 45 par mois auquel ils se référaient, concernaient les deux objets. Or, les intimés n'ont pas allégué, ni rendu vraisemblable, qu'ils seraient titulaires de la créance en paiement du loyer de l'attique, dont ils ne sont pas propriétaires. De plus, ils n'ont pas indiqué les millièmes de ces deux lots ni n'ont calculé la valeur respective de ces deux objets. Comme l'a relevé à juste titre le Tribunal des baux et loyers, il est impossible de déterminer le loyer correspondant à l'appartement litigieux.

L'appelante se prévaut de la nullité, respectivement de l'inefficacité du congé, en se fondant sur la nullité du loyer. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'appelante ne commet pas d'abus de droit en se prévalant de la nullité dudit loyer, compte tenu des circonstances spécifiques du cas d'espèce sus rappelées. En effet, la situation juridique s'est modifiée depuis respectivement les mois de novembre 2010 (acquisition de l'appartement par les époux A______) et avril 2011, et l'appelante a saisi immédiatement la juridiction des baux et loyers d'une requête en constatation de l'inefficacité du congé, suite à la résiliation du bail du 28 octobre 2011. Dans cette demande, elle a fait valoir que le loyer avait arbitrairement été fixé par les intimés, puisque celui-ci incluait le loyer de l'attique. Ainsi, l'invocation de la nullité du loyer n'a en l'occurrence pas pour seul but de faire échec à la procédure d'évacuation.

Compte tenu de l'ensemble des éléments qui précèdent, l'état de fait ne peut pas être établi sans peine et la situation juridique n'est pas claire.

En conséquence, le jugement entrepris sera annulé et la requête en cas clair sera déclarée irrecevable.

7. La procédure est gratuite, de sorte qu'il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens (art. 17 al. 1 LaCC), étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC.

L'appelante sera par conséquent déboutée de ses conclusions en condamnation des intimés aux frais et dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 8 juin 2012 par R______ contre le jugement JTBL/505/2012 rendu le 22 mai 2012 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/3500/2012-7-E.

Déclare irrecevables les pièces 2 à 13 produites par R______, ainsi que les alléguées de faits s'y rapportant.

Au fond :

Annule le jugement.

Statuant à nouveau :

Déclare irrecevable la demande de R. L______ et P. L______ en cas clair du 31 janvier 2012.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Monsieur Blaise PAGAN, Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

A priori, la valeur litigieuse des conclusions est inférieure à 15'000 fr. : cf. consid. 2.1