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Décisions | Chambre civile

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C/16501/2017

ACJC/1128/2017 du 04.09.2017 ( SOM ) , REJETE

Descripteurs : ASSISTANCE JUDICIAIRE ; COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE ; DROIT TRANSITOIRE ; NULLITÉ
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16501/2017

(anciennement AP/552/2006) ACJC/1128/2017

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU LUNDI 4 SEPTEMBRE 2017

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Me A______, rue ______, 1204 Genève,

représentée par Me Romain JORDAN, avocat, 15, rue du Général-Dufour, case postale 5556, 1211 Genève 11,

 

contre la décision du 28 juin 2017 de la Vice-présidente du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. Par décision du 24 septembre 2007, le Vice-président du Tribunal de première instance a nommé Me A______, avocate, en qualité de défenseur d'office de B______ dans le cadre de la procédure pénale P/1______.

b. Par arrêt rendu le 27 septembre 2007 dans la procédure précitée, la Cour correctionnelle a condamné B______ à une peine privative de liberté de 7 ans.

Par arrêt du 13 janvier 2009, la Cour de cassation a admis partiellement le pourvoi formé par B______, ce dernier ayant été acquitté de certains chefs d'accusation, la cause étant renvoyée à la Cour correctionnelle pour nouvelle décision.

c. Par arrêt du 26 mars 2009, la Cour correctionnelle a statué définitivement dans la procédure P/1______.

d. Me A______ a déposé une requête en indemnisation pour son mandant auprès du Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) le 20 janvier 2010, procédure PM/2______.

La requête a été rejetée par le TAPEM, puis, en dernier lieu, par la Cour de justice, par arrêt du 14 novembre 2011.

B______ n'avait pas sollicité le bénéfice de l'assistance juridique pour la procédure PM/2______.

e. Par courriel du 30 mars 2017, Me A______ a transmis au greffe de l'Assistance juridique son état de frais pour l'activité déployée en faveur de son mandant du 24 septembre 2007 au 14 novembre 2011.

Il résulte de l'état de frais produit que les activités déployées par l'avocate après le 26 mars 2009 consistaient en une requête en indemnisation le 20 janvier 2010, puis en une analyse de l'arrêt de la Cour de justice le 14 novembre 2011.

B.            Par décision du 26 mai 2017, la Vice-présidente du Tribunal civil a considéré que la créance d'honoraires de Me A______ était prescrite.

C.           Par décision du 28 juin 2017, notifiée le 30 du même mois, la Vice-présidente du Tribunal civil a rejeté la demande de reconsidération formée par l'avocate précitée.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 10 juillet 2017 à la Présidence de la Cour de justice. Me A______ conclut préalablement à son audition en audience publique. Principalement, elle sollicite l'annulation de la décision entreprise et le renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour taxation de ses honoraires de défenseur d'office dans la P/1______, avec suite de dépens.

b. Par courrier du 20 juillet 2017, le greffe de la Cour a invité la recourante à se déterminer sur la compétence de la Vice-présidente du Tribunal civil pour statuer sur sa demande de taxation d'honoraires en lien avec une procédure pénale terminée en 2009.

c. Par pli du 18 août 2017, la recourante s'en est rapportée à justice sur cette question.

d. La Vice-présidente du Tribunal civil n'a pas formulé d'observations.

EN DROIT

1.             1.1. La présidente de la Cour de justice est compétente pour connaître des recours dirigés contre les décisions rendues en matière d'assistance juridique (art. 21 al. 3 LaCC et 1 al. 3 RAJ). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Il ne sera pas donné suite à la demande de la recourante tendant à son audition en audience publique, celle-ci n'expliquant ni en quoi une telle audition serait utile pour statuer, ni sur quels points son interrogatoire devrait porter.

3.             3.1. Avant le 1er janvier 2011, l'octroi de l'assistance juridique civile comme pénale, les modalités de ce dernier et sa révocation, étaient de la compétence du Président du Tribunal de première instance, en application de l'art. 143A de la Loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (aLOJ). Les conditions selon lesquelles l'assistance juridique était accordée, refusée ou retirée, ainsi que les droits du défenseur à une indemnisation et au remboursement de ses frais étaient fixés par l'aRAJ.

Depuis le 1er janvier 2011, la procédure concernant l'octroi et les modalités de l'assistance juridique pénale sont soumises exclusivement au Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (ci-après : CPP) et à la Loi d'application du code pénal suisse (ci-après : LaCP), le RAJ s'appliquant uniquement à la fixation du montant de l'indemnité due à l'avocat et au défenseur d'office en matière pénale (art. 135 al. 1 CPP). Selon cette nouvelle procédure, le Ministère public ou le tribunal qui statue au fond sont seuls compétents pour fixer l'indemnité due au défenseur d'office à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

3.2. Le CPP ne prévoit pas de dispositions transitoires spécifiques concernant l'assistance juridique pénale. Selon l'art. 448 al. 2 CPP, les actes de procédure ordonnés ou accomplis avant l'entrée en vigueur du CPP conservent leur validité. En revanche, les procédures pendantes au moment de l'entrée en vigueur du CPP sont soumises au nouveau droit et se poursuivent devant les autorités compétentes selon le nouveau droit, à moins que le CPP n'en dispose autrement (art. 448 al. 1, 449 al. 1 CPP).

Par conséquent, en ce qui concerne la fixation de l'indemnité due au défenseur d'office (art. 135, 138 CPP), le nouveau droit s'applique, aussi pour les procédures terminées après le 1er janvier 2011, lorsqu'un cas de défense obligatoire ou d'assistance judiciaire gratuite était déjà terminé à l'entrée en vigueur du CPP, mais qu'aucune décision d'indemnisation n'avait été rendue (Schmid, Übergangsrecht der Schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, n. 142).

3.3. Selon la jurisprudence, l'inefficacité et la nullité doivent être relevées d'office par toute autorité (ATF 129 V 485 consid. 2.3, 129 I 363 consid. 2 et les références), que ce soit l'autorité de recours, l'autorité qui a rendu la décision voire une tierce autorité (arrêt du Tribunal fédéral H 300/03 du 19 août 2004 consid. 3).

Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 129 I 363 consid. 2 et 2.1; arrêt du Tribunal fédéral H 300/03 du 19 août 2004 consid. 3).

3.4. En l'espèce, bien que la procédure pénale pour laquelle la recourante a été désignée en qualité de défenseur d'office se soit terminée définitivement par arrêt de la Cour correctionnelle du 26 mars 2009, la recourante n'a adressé sa note de frais à l'Assistance juridique qu'en mars 2017. Or, au vu de l'entrée en vigueur du CPP au 1er janvier 2011, et des dispositions transitoires y relatives, la Vice-présidente du Tribunal civil n'était pas l'autorité compétente en matière d'assistance juridique pénale.

Il convient dès lors de constater la nullité des décisions rendues par la Vice-présidente du Tribunal civil les 26 mai 2017 (décision de refus de taxer) et 28 juin 2017 (refus de reconsidération) dans la cause AP/552/2006.

La recourante sera, partant, invitée à adresser sa note de frais auprès de l'autorité compétente aux fins d'obtenir une décision non viciée.

4. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Par ailleurs, selon la pratique constante de l'Autorité de céans, aucune indemnité de dépens n'est allouée en matière d'assistance judiciaire, notamment au vu du caractère simple et non formel de cette procédure. Un recourant peut ainsi agir seul sans l'aide d'un avocat. S'il souhaite néanmoins recourir par l'intermédiaire de son conseil, il doit prendre à sa charge les honoraires de ce dernier.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE DE LA COUR :

À la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le
28 juin 2017 par la Vice-présidente du Tribunal civil dans la cause AP/552/2006.

Au fond :

Rejette le recours.

Constate la nullité des décisions rendues par la Vice-présidente du Tribunal civil les 26 mai 2017 et 28 juin 2017 dans la cause AP/552/2006.

Invite A______ à mieux agir en vue d'être indemnisée pour son activité d'avocate dans la procédure P/1______.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me Romain JORDAN (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Monsieur David VAZQUEZ, commis-greffier.

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.