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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/28745/2003

ACJC/1098/2006 (1) du 09.10.2006 sur JTBL/1631/2005 ( OBL ) , MODIFIE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/28745/2003 ACJC/1098/2006

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre d’appel en matière de baux et loyers

AUDIENCE DU LUNDI 9 OCTOBRE 2006

 

Entre

FONDATION DE LA COMMUNE DE A______ ______, sise ______[GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 9 novembre 2005, comparant par Me Bruno MEGEVAND, avocat, place Claparède 3, 1205 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

D'une part,

et

B______, C______ et D______, sis ______[GE], intimés, comparant par Me Ulysse ROCHAT, avocat, rue Massot 9, 1206 Genève, en l'étude duquel ils font élection de domicile,

D'autre part.

 


EN FAIT

A. Par acte déposé au greffe de la Cour le 14 décembre 2005, la FONDATION DE LA COMMUNE DE A______ _______ appelle du jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 9 novembre 2005 et communiqué aux parties le 11 novembre 2005. Ce jugement constate la nullité de la majoration de frais accessoires, signifiée par la bailleresse le 11 décembre 2001 à B______, C______ et D______, concernant le local commercial de 159,49 m2 que ceux-ci occupent au rez-de-chaussée de l’immeuble 1______ à A______[GE] et dit que les créances résultant des soldes des décomptes annuels de charges pour les saisons 1997 à 1999 sont prescrites, soit les montants de 948 fr. 90 et 1'047 fr. 80.

Ledit jugement ordonne en outre au bailleur d’exécuter à ses frais les travaux d’isolation thermique appropriée du local loué, en particulier les portes coulissantes de l’atelier et l’installation d’un système de chauffage efficace permettant de maintenir les températures appropriées dans les locaux loués d’un minimum de 15 degrés à 16 degrés, respectivement de procéder à la réfection du système existant, en tenant compte de l’activité exercée par les locataires et de ses aléas incontournables. Il réduit le loyer des locataires de 20% dès le 1er février 2002, jusqu’à complète exécution des travaux précités et déboute les parties de toutes autres conclusions.

L’appelante conclut préalablement à l’audition de E______ en vue de la confirmation de son expertise, ainsi qu’à l’annulation des chiffres 3 (première partie), 4 et 5 du dispositif du jugement, en tant que celui-ci a ordonné à la bailleresse l’exécution d’une isolation thermique appropriée du local loué, en particulier des portes coulissantes de l’atelier, et prononcé la réduction du loyer de 20% et le déboutement des parties de toutes autres conclusions. Elle prie la Cour d'accorder une baisse de loyer de 10% aux locataires durant la saison froide, soit d’octobre à avril, à partir de février 2002 et jusqu’à complète et parfaite exécution des travaux de remplacement des aérothermes existants. Les intimés, B______, C______ et D______ concluent à la confirmation du jugement querellé.

B. Il résulte du dossier les faits pertinents suivants :

Par contrat du 14 avril 1994, l’appelante a loué à B______, C______ et D______ les locaux précités sis au rez-de-chaussée de l’immeuble 1______ à A______, bâtiment 2______, à destination d’un atelier de mécanique automobile, pour une durée de dix ans à compter du 1er juin 1994 pour finir le 31 mai 2004. Le loyer initial de 33'390 fr. est réputé adapté à la variation de l’indice suisse des prix à la consommation au jour de la signature du bail. Le contrat se renouvelle d’année en année à défaut d’une résiliation notifiée six mois au moins avant une échéance. La provision pour la fourniture du chauffage et de l’eau chaude s’élève à 795 fr. par année. La convention relative aux services du chauffage et de l’eau chaude que les parties ont signée prévoit que la jouissance et le paiement de ces services, lorsqu’ils fonctionnent dans l’immeuble, font partie des droits et obligations découlant du bail; la conduite du chauffage et du service d’eau chaude est du ressort du bailleur qui assure aux locaux loués une température normale au moyen de l’installation de chauffage existante. Par avis de majoration du 29 novembre 1996, le loyer a été porté en dernier lieu à la somme annuelle de 35'549 fr. 90 et la provision pour la fourniture du chauffage à 1'113 fr. par année. Cette notification n’a pas été contestée.

Par lettre du 1er décembre 2003, les locataires ont rappelé à la régie qu’ils avaient contesté devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers l’augmentation des charges signifiée à partir du 1er janvier 2002, au motif que le système de chauffage ne fonctionnait pas correctement, la température restant très basse et que, pour l’eau chaude, ils avaient installé un petit transformateur électrique à leurs frais.

La cause n'ayant pas été conciliée lors de l’audience de la Commission de conciliation du 12 mars 2004, les locataires ont déposé, au greffe du Tribunal des baux et loyers le mardi 13 avril 2004, suivant le lundi de Pâques, une requête tendant à ce que la bailleresse soit condamnée à exécuter à ses frais une isolation thermique des locaux, qu’elle procède à l’installation d’un système de chauffage efficace permettant de maintenir une température appropriée, que le loyer soit réduit de 20% dès le 1er janvier 2002 jusqu’à l’exécution des susdits travaux, que l’augmentation des provisions pour charges notifiée à compter du 1er février 2002 soit déclarée nulle et que les locataires ne doivent pas les soldes des décomptes de charges, de frais de chauffage et d’eau chaude pour les années 1997 à 2000. Ils ont invoqué les défauts présentés par le système du chauffage, totalement inadapté au local loué, de même qu’une insuffisance de l’isolation thermique; alléguant que l’hiver la température n’excèdait pas les 12 ou 13 degrés dans l’atelier. Dans sa réponse du 20 septembre 2004, la bailleresse a conclu à la validité de la provision mensuelle pour charges de 150 fr. à compter du 1er février 2002 et au déboutement des locataires de leur demande en exécution de travaux et en baisse de loyer, cette dernière étant fixée, à titre subsidiaire, à 10% maximum dès le 1er février 2002 jusqu’à complète et parfaite exécution des travaux. Lors de l’audience du 21 février 2005, les parties admirent que la totalité de leur différend avait été évoquée devant l’instance de conciliation, la requête du 13 avril 2004 constituant un complément à la requête formulée en conciliation.

Le Tribunal a procédé à diverses auditions; à titre de renseignement, l’épouse de C______ a déclaré qu'elle s'occupe du secrétariat et de la comptabilité pour le garage et qu’elle ne peut se tenir dans les locaux loués en raison du froid qui y règne; le matin de son audition du 21 février 2005, la température était de 10 degrés dans l’atelier; elle doit travailler à la maison; en l’absence d’eau chaude, un petit boiler a été installé par les locataires; le chauffage est assuré par deux espèces de petits ventilateurs au plafond totalement insuffisants pour chauffer l’espace. Les problèmes de chauffage ont toujours existé. F______, employé du garage depuis sept années, a rapporté qu’en hiver, la température à l’intérieur de l’atelier est de l’ordre de 10 à 15 degrés durant la journée. Les ventilateurs du chauffage sont installés au plafond vers l’unique mur de l’atelier près de l’entrée; en dessous, l’air est froid; la hauteur du garage est supérieure à 5 mètres. Trois des quatre portes du garage sont régulièrement actionnées pour faire entrer et sortir les véhicules, toutefois le moins possible mais cela arrive près de six fois par jour; les portes doivent fonctionner en raison de la disposition des lifts pour les véhicules. Le froid passe également sous les portes lorsqu’elles sont fermées faute d’étanchéité. Le travail est ainsi rendu plus difficile parce que l’usage de gants n’est pas possible et qu’une superposition de vêtements rend les mouvements plus difficiles.

G______, administrateur de l’entreprise de chauffage H______ SA, a fait installer le système de chauffage du bâtiment il y a une dizaine d’années. Le chauffage des bureaux est indépendant du système de chauffage des ateliers; celui-ci est identique pour tous les ateliers. Il s’agit d’un aérotherme placé au centre du local; il est compatible avec une température de 15 à 16 degrés au minimum qui est la norme. Cette température peut être obtenue quelle que soit la température extérieure, jusqu’à -5 degrés. Si l’étanchéité des portes coulissantes est suffisante, on peut obtenir jusqu’à 20 degrés avec une température extérieure d’environ 0 degré. La production de chaleur est centralisée, quand bien même la production peut être réglée pour chaque atelier par chaque locataire. Ceux des autres ateliers ne se plaignent pas à sa connaissance; le témoin a enregistré une plainte des locataires demandeurs parce que le fonctionnement de l’installation était trop bruyant et que cette dernière n’était utilisée qu’occasionnellement. Il estime que le bruit de l’installation est compatible avec le type des locaux considérés. Il est possible que des radiateurs aient été posés par une autre entreprise et que l’installation de radiateurs du côté de la seule paroi de l’atelier soit insuffisante par rapport au système actuel.

Dans ses conclusions du 31 mars 2005, la bailleresse estime que l’insuffisance du chauffage est provoquée par les locataires, c’est-à-dire en raison d’une ouverture fréquente des portes de l’atelier, jusqu’à six fois par jour; le système du chauffage ne présente aucun défaut; de surcroît, aucun relevé de température n’a été opéré dans les locaux; à titre subsidiaire, elle indique que la réduction de loyer ne pourrait être supérieure à 10% et devrait prendre effet à compter du 1er février 2002, suivant l’avis de défaut donné par les locataires et le délai raisonnable dont dispose le bailleur pour remédier aux défauts qui lui sont signalés.

C. Le jugement querellé retient que la majoration des acomptes de charges, destinée à prendre effet le 1er février 2002 est nulle pour défaut de notification sur la formule officielle; les locataires ont démontré avoir contesté cette majoration alors que l’issue de ce litige est inconnue du Tribunal, la bailleresse n’ayant pas justifié avoir validé cette notification, ni produit la justification d’un accord entre les parties. S’agissant des décomptes de charges, ceux des saisons 1997-1999 sont prescrits et seul entre en ligne de compte celui de l’exercice 1999-2000 portant sur un montant de 875 fr. 70 pour lequel aucune conclusion en paiement n’a été prise.

Quant à la question du chauffage des locaux loués, l’usage de ces derniers était connu de la bailleresse qui ne pouvait dès lors ignorer les fréquentes entrées et sorties de véhicules. Les locataires ont rapporté la preuve de l’insuffisance du chauffage, au dire des personnes entendues par le Tribunal; le défaut provient de l’installation elle-même et d’un manque d’isolation, auxquels la bailleresse devra être invitée à remédier. Compte tenu de la jurisprudence, la réduction de loyer de 20% est justifiée et prendra effet quelques semaines après l’avis donné à la bailleresse, soit en l’occurrence à compter du 1er février 2002, jusqu’à complète exécution des travaux prescrits.

L’appelante reconnaît l’insuffisance du chauffage. Elle produit en outre une expertise privée effectuée le 9 décembre 2005 qui constate des températures moindres que celles rapportées par les personnes entendues par le Tribunal. Elle dit s’engager à remplacer les aérothermes existant par des modèles plus puissants. Selon l’expertise, les portes coulissantes comportent des vitrages isolants et suffisamment de protection contre les infiltrations d’air; un aérotherme plus puissant permettra de compenser le courant passant sous les portes et rend superflu un renforcement d’isolation. L’absence de relevés précis des températures régnant dans les locaux ne permet pas de justifier 20% de baisse du loyer. Selon les constatations effectuées par l’expert le 9 décembre 2005, alors que la température extérieure était de 3 degrés, la température mesurée à l’intérieur des locaux, à une hauteur de 0,5 m. oscille entre 11,5 et 13,9 degrés selon les réglages opérés; après l’ouverture d’une porte pendant cinq minutes et sa fermeture, la mise en fonction des aérothermes à grande vitesse permet d’atteindre 11 degrés après cinq minutes et 12 degrés dix minutes plus tard, les mesures ayant été faites à 0,5 m. du sol directement sous l’aérotherme. La baisse de loyer ne peut excéder 10% sur un maximum de sept mois par année durant la saison froide.

Pour les intimés, les locaux sont insuffisamment isolés notamment du fait des infiltrations d’air sous les portes coulissantes; le pourcentage de baisse qui a été fixé par le Tribunal et qui ne représente qu’une réduction moyenne doit être maintenu du fait de la durée de persistance du défaut sur une dizaine d’années.

 

EN DROIT

1. L’appel est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 443 et 444 LPC).

Les dernières conclusions prises devant le Tribunal des baux et loyers ayant porté sur une valeur litigieuse supérieure à 8'000 fr., et n’ayant pas trait à la protection contre les loyers abusifs ou d’autres prétentions abusives du bailleur, le Tribunal a statué en premier ressort (art. 56P LOJ). La Cour revoit donc la cause librement; sous réserve de l’immutabilité du litige, elle peut connaître de nouvelles conclusions, de nouveaux allégués et de nouvelles preuves (BERTOSSA/-GAILLARD/GUYET/SCHMIDT, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n° 15 ad art. 291 LPC, n° 2 ad art. 445 LPC).

L’appel ne vise ni la remise en cause de la nullité de la majoration des frais accessoires dès le 1er février 2002, ni la prescription des soldes des décomptes annuels de charges pour les saisons 1997 à 1999. La bailleresse, qui se déclare prête à changer les aérothermes pour en installer de plus puissants, conteste le bien-fondé des travaux d’isolation thermique appropriés, en particulier aux portes coulissantes de l’atelier, tels qu'ordonnés par le Tribunal des baux et loyers. Elle estime que les nouveaux aérothermes compenseront les infiltrations d’air en dessous des portes coulissantes, comme le confirme l’expert qu’elle a appelé pour remédier aux problèmes dénoncés par les locataires.

2. 2.1 Les déclarations recueillies par les premiers juges établissent que le manque de chauffage dans les locaux considérés n’est pas nouveau et qu’il remonte au début du bail à compter du 1er juin 1994; c’est à une période indéterminée de la location que les locataires se sont plaints à la bailleresse de cette insuffisance, sans qu’une date précise ne figure au dossier.

Selon l’art. 256 al. 1 CO, le bailleur est tenu de délivrer la chose dans un état approprié à l’usage pour lequel elle a été louée et de l’entretenir dans cet état; les locaux ont été loués à destination d’un atelier de mécanique automobile et il ne ressort pas du dossier que le locataire se soit plaint d’une insuffisance du chauffage dès le premier hiver; cette attitude du locataire, soit l’absence de réaction de sa part permet-elle de considérer que les locaux ont été livrés dans un état conforme à l’usage convenu ? Selon la doctrine, cette règle n’est cependant pas absolue : d’une part, le code n’impose pas au locataire un avis de défaut immédiat; d’autre part, la loi ne présume plus que le locataire a reçu la chose en bon état (ancien CO, art. 271 al. 3; LACHAT, in Commentaire romand, Code des obligations I, p. 1323, n° 3.

En l'espèce, il faut considérer que les locataires ont en tous les cas contesté le décompte annuel des charges dès la saison 1997, vraisemblablement pour le motif du chauffage; il n’est toutefois pas nécessaire d’examiner plus avant cette question, puisque l’appelante annonce vouloir changer les aérothermes pour en installer de plus puissants, reconnaissant par là que les locaux n’étaient pas dans un état conforme à l’usage convenu, s’agissant du chauffage.

2.2 En revanche, elle s’oppose à l’isolation thermique des locaux, en particulier aux portes coulissantes de l’atelier. Elle se fonde sur le rapport du spécialiste qu’elle a mis en oeuvre durant le délai d’appel, lequel a relevé que les portes coulissantes comportaient des vitrages isolants et suffisamment de protection contre les infiltrations d’air, hormis le point faible présenté par l’espace entre la porte et le sol, qui pourrait être compensé par un balayage efficace de l’air par un aérotherme plus puissant. Ce raisonnement est fondé.

D’une part, il n’appartient pas à l’autorité judiciaire, en l’absence d’avis d’experts au sens de l’art. 255 LPC, de décréter dans le détail quelles sont les tâches précises à préconiser pour remédier à un défaut technique; elle ne peut mesurer les problèmes pratiques d’une exigence technique qu’elle formulerait et qui pourrait rendre difficile ou compliquer à l’excès le remède à apporter au défaut que le spécialiste est mieux à même de trouver en fonction des données particulières du cas. Il n’en reste pas moins que la bailleresse devra trouver le moyen adéquat par le recours à un spécialiste car, en cas de persistance du défaut, elle sera exposée à devoir entreprendre des travaux supplémentaires, en application du devoir légal qui lui incombe selon l’art. 259b CO, sans préjudice de la réduction du loyer prévue à l’art. 259d CO.

D’autre part, la décision des premiers juges d'ordonner au bailleur d’exécuter une isolation thermique appropriée du local loué ne peut être confirmée; si cette injonction va dans le bon sens, au regard en particulier des économies d’énergie, elle constitue cependant une modification de la chose louée qui ne peut être imposée au bailleur dans l’application de l’art. 259b CO. La demande de remise en état ne peut viser qu’à des travaux d’entretien (réparations), c’est-à-dire à l’élimination des défauts. Le locataire ne peut pas exiger que le bailleur effectue une prestation supplémentaire, c’est-à-dire exécute des travaux de rénovation (LACHAT, Le bail à loyer, éd. 1997, p. 165, n° 2.2 in fine).

Il ne résulte pas du dossier que l’isolation des locaux se serait dégradée durant le bail, nécessitant une remise en l'état au sens de l’art. 259b CO. Cette disposition, qui limite le droit du locataire à l’élimination du défaut par des réparations, n’oblige pas le bailleur à augmenter le confort et l’équipement de la chose louée; il incombe à ce dernier ainsi qu’au spécialiste qu’il pourra appeler de décider des interventions destinées à supprimer le défaut, avec ou sans plus-value de la chose louée.

3. Si le défaut entrave ou restreint l’usage pour lequel la chose a été louée, le locataire peut exiger du bailleur une réduction proportionnelle du loyer à partir du moment où le bailleur a eu connaissance du défaut et jusqu’à l’élimination de ce dernier (art. 259d CO). En principe, il convient de procéder selon la méthode dite relative ou proportionnelle, telle qu’elle est pratiquée dans le contrat de vente : la valeur objective de la chose avec défaut est rapportée à sa valeur objective sans défaut, le loyer étant ensuite réduit dans la même proportion. Quelle que soit la méthode choisie, le calcul proportionnel n’est pas toujours aisé (ATF 130 III 504, consid. 4.1 et les références citées); dans cet arrêt, où il s’agissait de nuisances dont l’intensité était variable, le recours à une appréciation en équité, par référence à l’expérience générale de la vie, au bon sens et à la casuistique, a été jugé conforme au droit fédéral.

Les parties ne contestent pas la date de prise d’effet de la réduction de loyer prononcée à compter du 1er février 2002; l’appelante s’en prend aux 20% fixés par les premiers juges qui, se fondant sur les déclarations recueillies, ont relevé que la température dans l’atelier pouvait avoisiner 10 degrés en hiver et rarement plus de 15 degrés; selon l’installateur, le système est compatible avec une température admissible d’au moins 15 à 16 degrés, jusqu’à moins 5 degrés à l’extérieur.

La température devant régner dans les ateliers où les personnes qui y travaillent sont actives est nécessairement moindre que dans un logement; la Cour de céans se réfère à la déclaration de l’installateur pour admettre qu’une fourchette de 15 à 16 degrés pour les locaux considérés est conforme à l’usage convenu par les parties, selon l’état de la chose louée lors de sa délivrance, c’est-à-dire selon l’équipement dont il a été pourvu et qui n’a pas été contesté durant les premières années de bail.

Il n’en reste pas moins que l’ouverture des portes coulissantes nécessitée par l’activité du locataire, dûment prévue dans le bail, occasionne une baisse de la température que les installations actuelles ne sont pas à même de corriger pour atteindre une moyenne de 15 à 16 degrés; selon les constatations du spécialiste mis en oeuvre par l’appelante, l’ouverture d’une porte durant cinq minutes fait tomber la température entre 3 et 6,5 degrés, qui remonte, cinq minutes plus tard, à 11 degrés, puis après dix minutes s’établit à 11,8 degrés, la température tendant vers une constance limitée à environ 13 degrés, avec une température extérieure de 3 degrés et les aérothermes arrêtés durant l’ouverture.

Cette insuffisance du réchauffement des locaux après l’ouverture d’une porte, qui ne ménage qu’une température de 13 degrés par la suite, peut être mise en comparaison, mutatis mutandis, avec l’insuffisance du chauffage, jugée par la Cour de céans, légitimant une réduction de loyer de 20% sur la période de chauffage s’étendant des mois d’octobre à mai de chaque année (ACJ du 21 décembre 2002, n° 1336/2000 en la cause n° C/18047/1996).

Aussi, la Chambre de céans confirme le pourcentage retenu par les premiers juges, qui n’ont toutefois pas précisé qu’il devait s’entendre sur la saison de chauffage, alors qu’aucun élément du dossier ne vient justifier une réduction supplémentaire hors de la période de chauffe.

4. Chaque partie succombant dans une part de ses conclusions sera condamnée à un émolument d’appel en faveur de l’Etat de Genève (art. 447 al. 2 LPC).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

A la forme :

Reçoit l’appel interjeté par la FONDATION DE LA COMMUNE DE A______ ______ contre le jugement JTBL/1631/2005 rendu le 9 novembre 2005 par le Tribunal des baux et loyers en la cause C/28745/2003-5-D.

Au fond :

Confirme les chiffres 1 et 2 du dispositif dudit jugement.

Annule ledit jugement pour le surplus.

Cela fait, statuant à nouveau :

Ordonne au bailleur de procéder à la réfection ou à l’installation d’un système de chauffage permettant de chauffer les locaux loués d’une moyenne minimale de 15 à 16 degrés, en tenant compte de l’activité exercée par le locataire.

Réduit le loyer de B______, C______ et D______ de 20% pour la période courant du 1er février 2002 jusqu’au 31 mai 2002, et pour chaque saison de chauffage d’octobre à mai des années suivantes, jusqu’à l’installation d’un système de chauffage approprié permettant de maintenir les températures des locaux loués d’un minimum de 15 à 16 degrés.

Condamne la FONDATION DE LA COMMUNE DE A______ ______, de même que B______, C______ et D______, à payer à l’Etat de Genève un émolument de 200 fr. chacun.

Siégeant :

Monsieur François CHAIX, président; Mesdames Marguerite JACOT-DES-COMBES et Florence KRAUSKOPF, juges; Messieurs Alain MAUNOIR et Pierre DAUDIN, juges assesseurs; Madame Muriel REHFUSS, greffier.

 

Le président :

François CHAIX

 

Le greffier :

Muriel REHFUSS