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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/6383/2012

ACJC/640/2014 du 30.05.2014 sur JTBL/1155/2013 ( OBL ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 03.07.2014, rendu le 05.02.2015, CONFIRME, 4A_422/14
Descripteurs : DÉFAUT DE LA CHOSE; REMISE EN L'ÉTAT
Normes : CO.259a
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6383/2012 ACJC/640/2014

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU VENDREDI 30 MAI 2014

 

Entre

A______, ______Genève, appelante d'un jugement rendu le 17 octobre 2013 par le Tribunal des baux et loyers, comparant par Me Irène Buche, avocate, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

B______, ______Neuchâtel, intimée, représentée par C______, ______Genève, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par mémoire adressé au greffe de la Cour de justice le 21 novembre 2013, A______ a formé appel contre le jugement JTBL/1155/2013, rendu le 17 octobre 2013 par le Tribunal des baux et loyers, dans la présente cause. Ce jugement a été communiqué aux parties par plis du greffe du 21 octobre 2013.

Dans ce jugement, le Tribunal des baux et loyers a donné acte à B______ de son accord de faire exécuter les travaux de réfection de l'appartement de la demanderesse énumérés dans le devis du 28 janvier 2011 de l'entreprise D______(ch. 1) et l'y a condamnée en tant que de besoin (ch. 2), ordonné en outre à B______ de procéder aux travaux suivants : bouchage du trou au plafond de la cuisine, réfection de la peinture des murs et du plafond; suppression des moisissures à la salle de bains, réfection de la peinture des murs et du plafond; réfection de la peinture du plafond et des murs du hall d’entrée et des deux chambres (ch. 3). Il a en outre réduit de 5% du 15 avril 2011 et jusqu'à complète exécution des travaux précités le loyer (sans les charges) de l'appartement de trois pièces et demi situé au 3ème étage de l’immeuble sis 1______(ch. 4), ordonné aux services financiers du Pouvoir judiciaire la libération des loyers consignés à concurrence de la réduction octroyée en faveur de A______ et à concurrence du solde en faveur de B______ (______) (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

En substance, s'agissant de la remise en état des peintures de l'appartement, le Tribunal des baux et loyers a considéré que leur défraîchissement constituait un défaut dont la réparation incombait à la bailleresse, dans la mesure où la locataire occupait les lieux depuis plus de douze ans, de sorte que la durée de vie desdites installations était échue, leur état d'usure, constaté par le Tribunal lors d'une inspection locale du 23 janvier 2013, constituant au surplus un défaut dont la réparation incombait à la bailleresse. Le Tribunal des baux et loyers n'a pas examiné précisément la question des boiseries, le raisonnement précité l'ayant pourtant conduit à condamner la bailleresse à la réfection de la peinture des sols, murs et plafonds des pièces concernées. Les questions de la réparation des fissures et de l'isolation d'un des murs du salon, de même que la réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de cette pièce, n'ont pas été examinées par le Tribunal, celui-ci ayant concentré son examen sur la seule question de la remise en état du salon à l'emplacement de l'ancienne armoire murale précédemment enlevée par la locataire. A ce sujet, le Tribunal des baux et loyers a considéré que la locataire avait fait procéder à l'enlèvement de cette armoire sans avoir obtenu l'autorisation de la bailleresse, laquelle lui avait par ailleurs proposé par gain de paix de mandater un menuisier afin qu'une armoire ouverte en mélaminé avec des étagères soit installée dans le salon au même emplacement, de sorte que la bailleresse ne pouvait pas être tenue pour responsable de la remise en état du salon s'agissant de l'emplacement de l'ancienne armoire murale

B. L'appelante conclut à ce que le chiffre 3 du jugement entrepris soit modifié et à ce que la Cour ordonne à B______ de procéder aux travaux suivants : bouchage du trou au plafond de la cuisine, réfection de la peinture des murs et du plafonds; suppression des moisissures à la salle de bains, réfection de la peinture des murs et du plafond; réfection de la peinture du plafond et des murs du hall d'entrée et des deux chambres; réfection de la peinture des boiseries de la cuisine, de la salle de bains et du hall d'entrée; suppression des fissures et pose d’une isolation sur le mur côté fenêtres dans le salon; réfection complète du salon (plafond, murs et boiseries), avec pose d'une tapisserie sur les murs se situant à l'endroit de l'ancienne armoire, et à ce que le jugement soit confirmé pour le surplus.

C. L'intimée conclut à la confirmation du jugement attaqué et à ce que l'appelante soit déboutée de toutes autres ou contraires conclusions.

D. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par contrat de bail à loyer signé le 9 juin 2000, E______, bailleresse, et A______, locataire, se sont liées pour la location d'un appartement de 3,5 pièces, situé au 3ème étage de l'immeuble sis 1______Genève.

Le début du bail était fixé au 1er juillet 2000 et son échéance au 30 juin 2001, le contrat devant se renouveler tacitement de douze mois en douze mois, sauf préavis notifié par l'une ou l'autre des parties trois mois au moins avant l'échéance.

Le loyer initial a été fixé à 10'680 fr. par année, les acomptes pour charges à 1'080 fr. par année.

Ce loyer n'a pas été modifié depuis, de sorte que le loyer annuel brut s'élève à 11'760 fr.

b. Au courant de l’année 2003, la locataire a sollicité des travaux de remise en état de son appartement.

Certains travaux ayant été effectués, elle s'est adressée, par requête du 20 avril 2004, à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, afin de solliciter notamment la réfection des murs, plafonds et des boiseries de la cuisine et de la salle de bains, ainsi qu'une nouvelle réparation de l'intérieur de l'armoire du salon, dès lors que de la poussière continuait de s'y infiltrer. Par décision n° 290, rendue le 16 août 2004 par la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, la bailleresse a été condamnée à effectuer certains des travaux mentionnés dans les conclusions de la requête de la locataire et notamment tous les travaux précités.

Il ne ressort pas du dossier que ces travaux aient finalement été exécutés.

c. Par courrier du 26 septembre 2004, la locataire s'est adressée à la régie en charge de la gestion de l'immeuble pour lui demander de faire enlever l'armoire de son salon, celle-ci ayant déjà été refaite une fois, puis une deuxième, afin de mettre fin à l'infiltration d'air et de poussière, mais le problème persistait toujours.

d. Par courrier du 21 février 2010, la régie a répondu à un courrier précédemment envoyé par la locataire que, s'agissant de l'armoire, la bailleresse n'avait pas donné son accord afin que cette installation soit déposée. Dès lors, tous les travaux de remise en état se trouvaient à la charge de la locataire. Toutefois, par gain de paix, la régie proposait de mandater un menuisier afin qu'une armoire ouverte en mélaminé avec des étagères soit installée dans son salon au même emplacement. En cas d'accord, la locataire devrait retourner copie dudit courrier daté et signé.

e. Diverses correspondances ont été échangées par la suite entre la locataire et la régie au sujet de travaux à faire effectuer dans l'appartement, notamment suite à un dégât d'eau intervenu en 2010.

f. Le 7 février 2012, la locataire s'est adressée par courrier recommandé à la régie, afin de la mettre en demeure de procéder notamment à la réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de la cuisine, de la salle de bains, du hall d'entrée, ainsi que du salon, à la réfection complète de cette pièce, en particulier à l'endroit de l'ancienne armoire qui était complètement "pourrie" et à la suppression de fissures et pose d'une isolation sur le mur côté fenêtres, ainsi qu'à la pose d'une tapisserie sur les murs se situant à l'endroit de l'ancienne armoire. A défaut d'avoir effectué les travaux précités jusqu'au 27 février 2012, la locataire consignerait son loyer et entamerait une procédure.

g. La régie n'ayant répondu qu'en partie s'agissant des travaux sollicités, la locataire a procédé la consignation de son loyer le 29 février 2012 (______).

h. Par requête déposée le 30 mars 2012 auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, la locataire a persisté dans sa demande en exécution de travaux et notamment quant à la réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de la cuisine, de la salle de bains, du hall d'entrée et du salon, de la réfection complète de cette pièce, en particulier à l'endroit de l'ancienne armoire qui était complètement "pourrie", avec la pose d'une tapisserie sur les murs se situant à l'endroit de l'ancienne armoire et la suppression des fissures et pose d'une isolation sur le mur côté fenêtres. La locataire a également sollicité que la consignation de loyer soit validée et que le loyer soit réduit de 30% dès le 15 avril 2011 jusqu'à suppression définitive des défauts, à ce qu'elle soit autorisée à consigner le loyer réduit jusqu'à la suppression définitive des défauts, à ce que la libération des loyers consignés à concurrence de la réduction de loyer soit ordonnée en sa faveur et à ce que le solde des loyers consignés ne soit libéré qu'à la fin des travaux de suppression des défauts, à ce qu'elle soit autorisée à effectuer les travaux aux frais de la bailleresse, en prélevant le montant dû sur les loyers consignés.

i. Une audience de conciliation s'est tenue le 24 mai 2012, lors de laquelle aucun accord n'ayant pu être trouvé, l'autorisation de procéder a été délivrée à la locataire.

j. Cette dernière a introduit sa demande en validation de consignation, exécution de travaux et réduction de loyer auprès du Tribunal des baux et loyers le 25 juin 2012, ce jour étant un lundi.

A l'appui de ses écritures, la locataire a produit un chargé de pièces, notamment diverses photographies des pièces de son appartement dont il ressort que les peintures des murs, plafonds et boiseries présentées sur ces photographies se trouvent dans un état défraîchi.

k. Par mémoire réponse du 20 septembre 2012, la bailleresse a conclu à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle acceptait de faire exécuter les travaux visés dans un bon de travail daté du 2 février 2011, relatif à un devis de D______du 28 janvier 2011, à ce que les Services financiers du Pouvoir judiciaire libèrent l'intégralité des montants consignés en sa faveur et à ce que la demanderesse soit déboutée de toutes autres ou contraires conclusions.

A l'appui de ses conclusions, la bailleresse a notamment produit le bon de travaux et le devis précités, ainsi que diverses photographies de l'appartement litigieux.

Le devis précité prévoit des travaux de peinture sur les plafonds et murs de diverses pièces de l'appartement, mais aucun travail sur les boiseries d'aucune pièce de l'appartement, ni de travaux dans le salon.

l. Le 6 décembre 2012, une audience de débats principaux a eu lieu devant le Tribunal des baux et loyers. Les parties sont convenues qu'il était opportun de procéder en premier à l'inspection locale et dans un deuxième temps, si nécessaire, à l'audition de témoins.

m. Le 23 janvier 2013, une inspection locale a eu lieu dans l'appartement litigieux. Le procès-verbal rédigé à cette occasion consigne différents défauts présents sur différentes installations des diverses pièces de l'appartement. Le Tribunal a ainsi pu constater les éléments suivants : un trou au plafond de la cuisine, des traînées brunâtres sur un mur et sur une vitre, ainsi que des marques autour de la fenêtre. Rien n'est spécifié au sujet des boiseries desdites pièces.

Quant au salon, il est indiqué qu'à l'emplacement de l'ancienne armoire en bois enlevée par la locataire, le mur et le sol (parquet) sont endommagés. Sur toute la hauteur du mur, une bande d'une largeur d'environ 30 cm est dépourvue de tout revêtement (papier peint ou peinture). La moulure du plafond présente une fissure.

n. A l'issue de l'inspection locale, d'entente entre les parties, le Tribunal a ordonné l'audition de trois témoins.

Le 21 mars 2013, F______, amie de longue date de la locataire, a indiqué se rendre fréquemment à son domicile pour lui rendre visite. Elle a confirmé une déclaration rédigée et signée de sa main le 19 novembre 2012, selon laquelle elle a indiqué que depuis de nombreuses années, l'état de l'appartement litigieux, à cause surtout de nombreuses inondations, était dans un état très délabré. Elle avait constaté la dangerosité de l'armoire du salon, qui petit-à-petit s'était décollée du mur et du plafond et pouvait tomber sur la tête de quelqu'un à tout moment, sans compter le froid horrible qui passait au travers de la fissure du mur du salon et les vitres mal isolées. Elle était navrée pour les problèmes de froid subis par son amie et ses enfants dans leur appartement. Lors de son audition, ce témoin a spécifié que l'armoire était délabrée et commençait à se décoller du mur et qu'on pouvait voir un espace entre le mur et l'armoire. La locataire avait peur que l'armoire tombe et lui avait dit qu'elle avait écrit à la régie pour demander des réparations. Faute d'obtenir une réponse de la régie, elle avait fait enlever elle-même cette armoire. Elle avait profité de certains travaux de réfection de la cuisine pour demander aux ouvriers d'enlever l’armoire du salon. Elle ignorait si cela lui avait causé des frais. Elle avait vu l'appartement depuis que l'armoire avait été enlevée. L'état du logement était horrible. Selon elle, si l'armoire n'avait pas été enlevée, un jour elle aurait fini par tomber. Au sujet d'une photo qui lui était présentée et sur laquelle on voyait l'emplacement où se trouvait l'armoire dans le salon, la témoin a indiqué que de l'air froid s'infiltrait du côté du mur donnant sur l'extérieur.

Le 13 juin 2013, G______, inspecteur auprès de la Police du feu du DCTI, a indiqué avoir eu l'occasion de se rendre dans l'appartement de la locataire le 14 septembre 2012, n'y étant pas retourné postérieurement. Il avait notamment constaté des fissures au plafond dans la petite chambre et le salon. Dans cette pièce, des morceaux de plâtre se détachaient du plafond. Il s'agissait également des conséquences d'un dégât d’eau. Ce témoin avait écrit deux fois à la régie pour solliciter des travaux de mise en conformité de l'appartement, notamment s'agissant de problèmes d'humidité, d'isolation thermique et de fissures dans la petite chambre et le salon, voire de chutes de morceaux de plafond dans cette pièce. Un délai avait été fixé à la régie pour procéder aux travaux requis et notamment aux travaux précités.

Le 9 janvier 2013, il avait à nouveau écrit à la régie, afin de proposer une rencontre pour qu'un accord soit trouvé par les parties permettant l'exécution en bonne et due forme des travaux nécessaires à la remise en état de l'appartement. Les photographies produites par la demanderesse concernant le salon et particulièrement l'emplacement de l'ancienne armoire ayant été soumises au témoin, celui-ci a indiqué qu'on y voyait l'emplacement dont il venait de parler, mais qu'il ne pouvait pas situer les fissures qu'il avait observées.

o. Les parties ayant renoncé d'un commun accord aux plaidoiries orales, un délai leur a été imparti par le Tribunal au 29 juillet 2013 pour déposer au greffe leurs plaidoiries écrites.

Par plaidoiries écrites du 29 juillet 2013, les deux parties ont repris en faveur de leurs conclusions les éléments ressortis des enquêtes et de l'inspection locale et ont persisté dans leurs conclusions respectives.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

E. L'argumentation des parties sera reprise en tant que de besoin dans la partie "EN DROIT" ci-dessous.

EN DROIT

1. La décision entreprise est une décision finale, susceptible d'appel si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins, étant relevé qu'aucun des cas excluant l'appel (art. 309 CPC) n'est réalisé (art. 308 al. 1 lit. a et 308 al. 2 CPC).

1.1. Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC). Le texte légal vise ainsi le dernier état des conclusions de première instance (JEANDIN, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/ Schweizer/Tappy, Bâle 2011, ch. 13 ad art 308 CPC).

Devant les juges de première instance, la demanderesse a conclu à ce que son loyer soit réduit de 30% dès le 15 avril 2011 jusqu’à suppression définitive des défauts, correspondant à 9'612 fr. au minimum, soit 30% de 10'680 fr. (loyer net sur lequel doit être calculée la réduction) durant trois ans que dure déjà la procédure, des sorte que si on y ajoute la valeur estimée des travaux dont l'exécution est requise, on aboutit à une valeur litigieuse bien supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.2. Selon l'art. 311 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les trente jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d'appel.

Le présent litige est soumis aux règles de la procédure simplifiée (art. 243 al. 2 let. c CPC).

Les règles de la procédure ordinaire s'appliquent à la procédure simplifiée, sauf dispositions contraires de la loi (art. 219 CPC).

En procédure simplifiée, comme en procédure ordinaire, le délai d'appel est de trente jours (art. 311 al. 1 CPC).

L'acte d'appel doit être écrit et motivé et répondre aux conditions des art. 130 et 131 CPC. L'appelant doit indiquer la décision qu'il attaque et exposer les motifs de faits et/ou de droit qui, à ses yeux, justifient l'appel (LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne 2008, chiffre 5.2.3.1, p. 186).

Interjeté dans le délai et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est ainsi recevable, étant rappelé qu'il est limité aux chiffres 3 et 6 de la décision entreprise.

1.3. L'appel peut être formé pour violation de la loi (art. 310 let. a CPC) ou constatation inexacte des faits (310 let. b CPC).

La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen. Elle n'est nullement liée par l'appréciation des faits à laquelle s’est livré le juge de première instance (JEANDIN, op. cit., n. 6 ad art. 310 CPC).

2. Les questions demeurées litigieuses en appel sont relatives à l'exécution de travaux de réfection des peintures des boiseries des cuisine, salle de bains, hall d'entrée et des deux chambres, de travaux de réparation des fissures et d'isolation d'un mur du salon, de la réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de cette pièces, ainsi que de la pose d'une tapisserie sur les murs du salon contre lesquels l'ancienne armoire enlevée par la locataires était installée.

2.1. A teneur de l'art. 256 al. 1 CO, le bailleur est tenu de délivrer la chose dans un état approprié à l'usage pour lequel elle a été louée et de l'entretenir dans cet état.

Aux termes de l'art. 259a al. 1 CO, lorsque apparaissent des défauts de la chose qui ne sont pas imputables au locataire et auxquels il n'est pas tenu de remédier à ses frais (art. 259 CO) ou lorsque le locataire est empêché d'user de la chose conformément au contrat, il peut notamment exiger du bailleur : a. la remise en état de la chose; b. une réduction proportionnelle du loyer.

Faute de définition légale, la notion de défaut - qui relève du droit fédéral - doit être rapprochée de l'état approprié à l'usage pour lequel la chose a été louée; elle suppose la comparaison entre l'état réel de la chose et l'état convenu; il y a ainsi défaut lorsque la chose ne présente pas une qualité que le bailleur avait promise ou lorsqu'elle ne présente pas une qualité sur laquelle le locataire pouvait légitimement compter en se référant à l'état approprié à l'usage convenu (ATF 135 III 345 consid. 3.2). Le défaut de la chose louée est une notion relative; son existence dépendra des circonstances du cas particulier. Il convient de prendre en compte notamment la destination de l'objet loué, l'âge et le type de la construction, le montant du loyer (arrêts du Tribunal fédéral 4A_174/2009 du 8 juillet 2009 consid. 2.1, 4C.387/2004 du 17 mars 2005 consid. 2.1 et 4C.527/1996 du 29 mai 1997 consid. 3a, publié in SJ 1997 p. 661). L'usage dont il est question plus haut peut avoir été convenu soit expressément, soit tacitement, ainsi par une utilisation adoptée pendant longtemps par le locataire sans opposition du bailleur (ATF 136 III 186 consid. 3.1.1). Si le bail ne précise pas clairement l'usage convenu, celui-ci doit être apprécié objectivement en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes du cas d'espèce (LACHAT, Le bail à loyer, 2008, p. 217) et dégagé à partir des règles régissant l'interprétation des contrats (ATF 136 III 186 consid. 3.1.1). Lesdites circonstances sont en particulier le montant du loyer, le lieu de situation de l'immeuble, soit l'environnement des locaux, l'âge du bâtiment, les normes usuelles de qualité, les règles de droit public applicables et les usages courants (MONTINI/BOUVERAT, in Droit du bail à loyer, Commentaire pratique, 2010, n. 28 ad art. 256 CO; LACHAT, op. cit., p. 217 s.).

Le défaut peut être purement esthétique, le locataire étant en droit d'escompter que l'apparence extérieure de la chose louée corresponde à des standards normaux (LACHAT in Commentaire Romand, op. cit., p. 1344 no 3; SJ 1997 661 consid. 3; CORBOZ, op. cit., loc. cit.).

L'usure normale des locaux ne constitue un défaut (subséquent, si les locaux étaient neufs ou rénovés à l'origine) qu'à partir du moment où elle atteint un certain degré, et où elle peut être assimilée à un manque d'entretien de la chose louée (ACJC 966/2012 du 29 juin 2012, consid. 4.1.2).

Les associations de bailleurs et de locataires de Suisse romande ont édicté une tabelle de durée d'amortissement commune des installations et des équipements contenus dans un appartement. Cette tabelle est entrée en vigueur le 1er mars 2007 pour une durée de deux ans. Par la suite, elle s’est renouvelée pour deux ans et ainsi de suite. Il faut préciser que cette tabelle n'a aucune force contraignante et ne permet pas aux parties d'en tirer un droit. Elle donne, à titre indicatif, des durées de vie moyennes pour des installations et des équipements de qualité ordinaire, dans un contexte d'usure normale. S'agissant des défauts invoqués par la locataire, cette tabelle prévoit les durées d'amortissement suivantes : 8 ans (dispersion) à 15 ans (résine alkyde ou synthétique) pour les peintures de plafonds, murs, portes et boiseries; 20 ans (aggloméré) à 35 ans (bois massif) pour les armoires murales; 10 ans (qualité moyenne) à 15 ans (bonne qualité, lisse, lavable) pour des tapisseries.

En application de l'art. 8 CC, le fardeau de la preuve de l'existence d'un défaut incombe au locataire.

2.2. L'intimée n'a pas critiqué ce que le Tribunal des baux et loyers a retenu dans son jugement, à savoir que depuis l'entrée de la locataire dans les locaux en juillet 2000, aucune remise en état des peintures n'a été effectuée.

a. A fortiori, cela doit être le cas pour les boiseries.

Les photographies produites par les parties permettent de constater que l'état des peintures des boiseries de l'appartement (chambranles de portes, portes et plinthes) est ancien, dans la mesure où on y voit notamment des encoches et des écailles, en particulier sur le bas desdites installations.

Dès lors que la durée de vie des peintures des murs, plafonds et boiseries des différentes pièces de l'appartement est échue selon la tabelle précitée dont il n'y a pas lieu de s'écarter en l'espèce, l'état des boiseries de l'appartement est entaché d'un défaut dont la réparation incombe à la bailleresse.

Il est en est de même des peintures des murs et plafonds du salon et de la réparation de la fissure constatée au plafond de cette pièce par le Tribunal et G______.

C'est donc à tort que les conclusions de l'appelante à ce sujet n'ont pas été admises par les premiers juges.

b. et c. S'agissant de la réparation de fissures et de la réfection de l'isolation d'un mur du salon, la locataire n'a pas apporté de preuve quant à l'existence d'un défaut.

En effet, le seul défaut ressorti de l'instruction de la cause vise la vétusté des joints des fenêtres, dont la réfection n'a pas été sollicitée.

Il ressort du dossier, notamment des courriers de la locataire, de F______ et de G______, de même que des déclarations de ces derniers et que des problèmes de froid existaient dans l'appartement.

Aucun lien n'a cependant été établi entre la présence de fissures alléguée par la demanderesse - dont l'existence n'a pas non plus été établie de manière suffisante - et ces problèmes de froid, pas plus qu'entre un prétendu défaut d’isolation, non prouvé, et ces mêmes problèmes.

Au vu de ce qui précède, l’appelante a échoué à apporter la preuve de l'existence des défauts liés à des fissures et à un manque d’isolation dans le salon.

Elle a été à juste titre déboutée de ses conclusions en réparation des fissures et de la réfection de l'isolation d'un mur du salon par le Tribunal, de sorte que le jugement sera confirmé sur ce point.

d. Enfin, relativement à la remise en état de la tapisserie à l'endroit où se situait l'ancienne armoire enlevée par la locataire, le Tribunal a considéré que la bailleresse ne pouvait être tenue pour responsable de ces travaux. La locataire avait en effet décidé d'elle-même d'enlever cette armoire, alors que la bailleresse ne lui avait pas donné son accord et avait même proposé, par gain de paix, d'installer à l'endroit en question une armoire en mélaminé.

Ce raisonnement n'a pas été valablement contesté en appel.

En outre, de par la décision de la locataire d'enlever l'armoire litigieuse, il est impossible de savoir si son changement était réellement nécessaire.

Certes, F______ a indiqué que l'armoire était dangereuse selon elle, au vu de son état vétuste.

Vu l'absence de procès-verbal d'état des lieux d'entrée, la durée d'occupation des lieux par l'actuelle locataire, il n'est pas possible de vérifier si la durée de vie de l'armoire prévue par la tabelle des installations précitée est véritablement échue.

En tous les cas, cela ne permet pas de valider avec effet rétroactif la décision de la locataire d'enlever cette armoire qui fait partie des installations de l'appartement, pour solliciter la prise en charge par la bailleresse de travaux relatifs à la tapisserie des murs où l'armoire se situait.

On ne peut en effet considérer que l'état actuel des murs constitue un défaut dont la réparation incombe à la bailleresse.

Le jugement entrepris a correctement débouté l'appelante de ses conclusions à ce sujet. Il sera confirmé sur ce point.

3. Par souci de simplification, le chiffre 3 du jugement attaqué sera entièrement annulé et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède.

4. A priori, la valeur litigieuse, déterminée au considérant 1.1. ci-dessus, est supérieure à 15'000 fr., de sorte que le recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral peut être interjeté contre la présente décision (art. 74 al. 1 let. a LTF).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare valable l'appel formé par A______ contre les chiffres 3 et 6 du dispositif du jugement JTBL/1155/2013 rendu le 17 octobre 2013 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/6383/2012-OSD-4.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du jugement entrepris.

Condamne B______ à exécuter les travaux suivants dans l’appartement loué par A______ :

-       bouchage du trou au plafond de la cuisine, réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de cette pièce;

-       suppression des moisissures à la salle de bains, réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de cette pièce;

-       réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries du hall d'entrée et des deux chambres;

-       bouchage du trou au plafond du salon, réfection des peintures des murs, plafonds et boiseries de cette pièce.

Confirme le jugement pour le surplus.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Elena SAMPEDRO et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Laurence CRUCHON et Monsieur Serge PATEK, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF : cf. considérant 4.