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Décisions | Chambre civile

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C/984/2013

ACJC/267/2014 du 28.02.2014 sur JTPI/12662/2013 ( SDF ) , MODIFIE

Descripteurs : PROTECTION DE L'UNION CONJUGALE; OBLIGATION DE RENSEIGNER; ACTION EN PAIEMENT D'ENTRETIEN; OBLIGATION D'ENTRETIEN
Normes : CPC.317; CPC.318; CC.170; CC.176.1.1; CC.163
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/984/2013 ACJC/267/2014

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 28 FEVRIER 2014

 

Entre

Madame A.______, domiciliée ______ (GE), appelante d'un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 septembre 2013, comparant par Me Marc Mathey-Doret, avocat, boulevard des Philosophes 14, 1205 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B.______, domicilié ______ (GE), intimé, comparant par Me Brigitte Besson, avocate, chemin de Grange-Canal 42, case postale 349, 1224 Chêne-Bougeries (GE), en l'étude de laquelle il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 14 octobre 2013, A.______ appelle d'un jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale du 30 septembre 2013, reçu par elle le 2 octobre 2013, aux termes duquel le Tribunal de première instance a autorisé les époux B.______ et A.______ à vivre séparés, pour une durée indéterminée (ch. 1 du dispositif), a confié à la mère la garde de l'enfant C.______ (ch. 2), a réservé au père un large droit de visite devant s'exercer, sauf accord contraire des parties, à raison d'un jour par semaine, avec la nuit y afférente, d'un week-end sur deux, du vendredi soir au dimanche soir, et, jusqu'à ce que C.______ soit scolarisé, deux semaines non consécutives durant l'été, trois jours durant les fêtes de Pâques et trois jours durant les fêtes de fin d'année, à Noël ou Nouvel An, en alternance (ch. 3), a attribué la jouissance exclusive du domicile conjugal à la mère (ch. 4) et a donné acte au père de son engagement à verser à la mère, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de l'enfant, un montant de 1'100 fr., avec effet dès le 22 janvier 2013, sous déduction de toutes sommes déjà versées (ch. 5). Par ailleurs, les parties ont été condamnées, en tant que de besoin, à respecter et exécuter le jugement (ch. 6), les frais de la procédure, fixés à 200 fr. et compensés avec l'avance versée, ont été laissés à la charge de B.______ (ch. 7), chaque partie assumant le défraiement de son conseil (ch. 8). Elles ont été déboutées de toutes autres conclusions (ch. 9).

A.______ conclut à l'annulation des chiffres 5 et 9 du dispositif de ce jugement et à ce que son époux soit condamné à lui verser la somme de 2'500 fr., par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, dès le 22 janvier 2013 à titre de contribution à l'entretien de l'enfant, sous déduction des montants déjà versés, les frais de la procédure devant, en outre, être mis à la charge de son époux.

A titre préalable, elle sollicite la production par son époux de tous les documents attestant de ses revenus, de sa fortune et de ses charges, notamment ses comptes en banque pour les trois dernières années, les bilans, les comptes de pertes et profits et les relevés bancaires de sa société pour les trois dernières années ainsi que les extraits du grand livre permettant de déterminer la part des frais privés supportés par l'entreprise.

b. B.______ conclut au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de son épouse en tous les frais de la procédure.

c. Les parties produisent des pièces nouvelles.

d. Elles ont été avisées le 12 novembre 2013 de la mise en délibération de la cause.

B. Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. B.______, né le ______ 1983 à ______ (GE), et A.______, née le ______1982 à ______ (GE), tous deux de nationalité suisse, se sont mariés à ______ (GE) le ______ 2010.

Ils sont les parents de C.______, né le ______ 2011 à ______ (GE).

Les époux ont conclu un contrat de séparation de biens devant Me Pierre CRITTIN, notaire à ______ (VS), le ______ 2010.

b. Les époux vivent séparés depuis le mois de mai 2012.

c. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance le 22 janvier 2013, B.______ a formé une demande de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant, dépens compensés, à ce que les époux soient autorisés à vivre séparés, à ce que la jouissance exclusive de l'appartement conjugal soit attribuée à son épouse, à ce que la garde de l'enfant soit confiée à cette dernière, avec un large droit de visite à son profit, à raison d'un jour par semaine, d'un week-end sur deux et de la moitié des vacances scolaires, et à ce qu'il lui soit donné acte de sa proposition de verser, mensuellement, un montant de 1'000 fr. à titre de contribution à l'entretien de la famille, allocations familiales non comprises.

d. Durant la procédure, les époux sont parvenus à un accord s'agissant du principe de la vie séparée, de l'attribution du domicile conjugal et de la garde de l'enfant en faveur de la mère ainsi que sur les modalités du droit de visite, celui-ci devant s'exercer en faveur du père du mardi à 18h30 au mercredi à 18h30, un week-end sur deux, du vendredi à 18h30 au dimanche à 18h30 et jusqu'à ce que l'enfant soit scolarisé, deux semaines non consécutives durant les vacances d'été, trois jours durant les fêtes de Pâques et trois jours durant les fêtes de fin d'année, à Noël ou Nouvel An par alternance.

Seul le montant de la contribution à l'entretien de la famille est resté litigieux.

e. Dans ses dernières conclusions devant le Tribunal, le père a proposé de verser un montant de 1'100 fr. par mois, allocations familiales non comprises à ce titre.

La mère a conclu à la condamnation de son époux à lui verser, dès la date du jugement, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, un montant de 2'500 fr. à titre de contribution à l'entretien de la famille, ainsi que les arriérés de contribution d'entretien à compter du 29 avril 2012, sous déduction des versements déjà effectués, ainsi que la condamnation de son époux au versement d'une provision ad litem de 7'000 fr., enfin au prononcé de la séparation de biens, la liquidation du régime matrimonial devant être réservée.

C. Dans la décision querellée, le Tribunal a notamment considéré que le salaire mensuel net de 4'583 fr. de l'époux ressortait du certificat de salaire annuel pour 2012, établi et signé par une société fiduciaire et admis par l'administration fiscale. Il n'y avait pas lieu de contester le principe de son taux d'activité à 80% qui lui permettait de prendre largement en charge l'enfant.

Ses charges incompressibles étaient de 3'246 fr. 55 par mois, comprenant le loyer (1'500 fr.), les primes d'assurance-maladie (456 fr. 65) et d'assurance ménage et responsabilité civile (19 fr. 90), les frais de transport (70 fr.) ainsi que l'entretien de base selon les normes OP (1'200 fr.).

L'épouse travaillait à 60% en qualité de sage-femme auprès de D.______ SA, activité impliquant des gardes de nuit et des horaires irréguliers, pour un salaire mensuel net moyen de 3'250 fr., allocations familiales de 300 fr. non comprises.

Ses charges admissibles et celles de l'enfant s'élevaient à 3'622 fr., comprenant le loyer de l'appartement (1'220 fr.) et du box (50 fr.), les primes d'assurance-maladie pour elle-même et l'enfant (407 fr. 60 et 26 fr. 90), les primes d'assurance ménage et responsabilité civile (32 fr. 10), les frais liés à l'usage d'un véhicule, eu égard à ses horaires de travail irréguliers (135 fr. 40) et les montants de base selon les normes OP pour elle-même et l'enfant (1'350 fr. + 400 fr.).

Ainsi, le montant de 1'100 fr. proposé par l'époux, qui disposait d'un solde mensuel, hors impôts, de 1'336 fr. 75, permettrait à la mère, dont le déficit mensuel s'élève à 72 fr. 20, de s'acquitter de frais de garde qui s'élevaient à
1'080 fr. par mois.

D. a. Depuis 2010, l'époux est l'un des deux associés gérants, à parts égales, de la société E.______ Sàrl, dont il est également salarié.

Il a perçu un salaire mensuel net moyen de 4'451 fr. en 2011 pour une activité à 100% et de 4'583 fr. en 2012, compte tenu d'un salaire mensuel net de 4'000 fr. et d'un bonus annuel de 7'000 fr., pour une activité à 80%.

Aucun dividende n'a été versé par E.______ Sàrl aux associés aux termes des exercices 2010 à 2012, étant précisé que le bénéfice net de la société était de 16'360 fr. pour les exercices 2010 à 2012.

E.______ Sàrl facture à son employé l'utilisation à titre privé du véhicule de la société ainsi que du téléphone professionnel.

b. En sus des charges déjà admises par le Tribunal, l'épouse fait valoir des frais médicaux non couverts par l'assurance maladie (330 fr. 80 pour elle-même et 70 fr. 40 pour l'enfant) et les frais de garde pour l'enfant (1'080 fr.) et précise que la prime d'assurance maladie pour l'enfant s'élève à 86 fr. 90 puisqu'elle ne perçoit, en l'état, aucun subside à cet égard.

c. Depuis la séparation des époux, le père s'est acquitté chaque mois d'une contribution d'entretien de 1'000 fr.

E. Les arguments des parties en appel seront examinés ci-après dans la mesure utile à la solution du litige.

EN DROIT

1. 1.1 Contre une décision en matière de mesures protectrices de l'union conjugale, qui constitue une décision finale (art. 308 al. 1 let. a CPC), la voie de l'appel, écrit et motivé (art. 309 a contrario et 311 al. 1 CPC), interjeté dans un délai de 10 jours (art. 271 let. a et 314 al. 1 CPC), est ouverte.

Formé selon la forme et dans le délai prescrits, l'appel est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen
(art. 310 CPC).

La procédure est soumise aux maximes inquisitoire et d'office illimitées, compte tenu de la présence d'un enfant mineur (art. 296 CPC). Par ailleurs, les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire (art. 271 CPC), la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit. Il suffit que les faits soient rendus simplement vraisemblables, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité du droit (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 1901
p. 349; Haldy, La nouvelle procédure civile suisse, 2009, p. 71).

1.3 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Dans deux cas où le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral était limité à l'arbitraire parce qu'il s'agissait de mesures provisionnelles, il a été jugé qu'il n'était pas insoutenable de considérer que les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC s'appliquent également aux procédures soumises à la maxime inquisitoire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_592/2011 du 31 janvier 2012 consid. 4.1; 5A_402/2011 du
5 décembre 2011 consid. 4.1 et 4.2; cf. ég. arrêt du Tribunal fédéral 5A_342/2013 du 27 septembre 2013 consid. 4.1.2).

Plus récemment, le Tribunal fédéral a précisé que l'art. 317 al. 1 CPC régit de manière complète et autonome la possibilité pour les parties d'invoquer des faits et moyens de preuve nouveaux en procédure d'appel (ATF 138 III 625 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_310/2012 du 1er octobre 2012 consid. 2.1). Il a en outre relevé que cette disposition ne contient aucune règle spéciale pour la procédure simplifiée ou pour les cas où le juge établit les faits d'office, de sorte qu'aucune violation de l'art. 317 al. 1 CPC ne résulte de la stricte application de ses conditions (arrêt du Tribunal fédéral 4A_228/2012 précité, consid. 2.2). En revanche, la question de savoir s'il en va de même lorsque les maximes d'office et inquisitoire illimitée s'appliquent, n'a pas été tranchée. Dès lors, dans les causes de droit matrimonial concernant les enfants mineurs, la Cour de céans persistera à admettre tous les novas (dans ce sens : Trezzini, in Commentario al Codice di diritto processuale civile svizzero (CPC), Cocchi/Trezzini/Bernasconi [éd.], 2011, p. 1394; Tappy, Les voies de droit du nouveau Code de procédure civile, in JdT 2010 III p. 115 ss, 139).

En l'espèce, les pièces versées par les parties devant la Cour sont postérieures à la mise en délibération de la cause par le Tribunal ou permettent de déterminer la situation financière de chacune des parties et comportent les données nécessaires pour statuer sur la quotité des aliments à verser par le débirentier pour l'entretien de sa famille. Les documents concernés, ainsi que les éléments de faits qu'ils comportent, seront donc pris en considération.

2. Se fondant sur l'art. 170 CC, l'appelante sollicite à titre préalable la production par son époux de tous les documents attestant de ses revenus, de sa fortune et de ses charges, notamment ses comptes en banque pour les trois dernières années ainsi que les bilans, les comptes de pertes et profits et les relevés bancaires de sa société pour les trois dernières années ainsi que les extraits du grand livre permettant de déterminer la part des frais privés supportés par l'entreprise.

2.1 Selon l'art. 170 al. 1 CC, chaque époux peut demander à son conjoint qu'il le renseigne sur ses revenus, ses biens et ses dettes. Ce droit aux renseignements est inconditionnel mais doit cependant servir à la protection des droits découlant pour le requérant des effets généraux du mariage et du régime matrimonial (ATF 118 II 27 = JdT 1994 I 535 consid. 3a; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, Les effets du mariage, 2ème édition, 2009, p. 172). La demande de renseignement ne doit être admise que si le requérant justifie d'un intérêt juridique digne de protection. Ceci exclut notamment les demandes de renseignements chicanières ou manifestant une pure curiosité. Il faut en outre respecter le principe de la proportionnalité (ATF 132 III 291 = JdT 2007 I 3 consid. 4.2).

2.2 En l'espèce, les certificats de salaire de l'intimé ainsi que les factures relatives aux charges de celui-ci suffisent à établir sa situation financière. En effet, la société fiduciaire qui contrôle les comptes de la société de l'intimé a attesté qu'aucun bénéfice n'a été versé aux associés depuis 2010 et que l'intimé se voit facturer l'usage des véhicules et téléphone de la société. Par conséquent, la production des comptes de pertes et profits et les relevés bancaires de la société pour les trois dernières années ainsi que les extraits du grand livre n'est pas nécessaire.

Dès lors, il y a lieu d'écarter la demande en production de pièces formée par l'appelante.

3. L'appelante conteste les montants retenus par le premier juge en ce qui concerne les revenus de son époux et des charges des parties.

3.1 En vertu de l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, à la requête d'un des conjoints, le juge fixe la contribution pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre. Le montant de la contribution d'entretien se détermine en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux (art. 163 CC; ATF 121 I 97 consid. 3b; 118 II 376 consid. 20b).

Le législateur n'a pas arrêté de mode de calcul à cette fin. L'une des méthodes préconisée par la doctrine et considérée comme conforme au droit fédéral est celle dite du minimum vital, avec répartition de l'excédent. Elle consiste à évaluer d'abord les ressources des époux, puis à calculer leurs charges en se fondant sur le minimum vital de base du droit des poursuites (art. 93 LP), élargi des dépenses incompressibles et enfin à répartir le montant disponible restant à parts égales entre eux (arrêt du Tribunal fédéral 5P.428/2005 du 17 mars 2006 consid. 3.1; ATF 126 III 8 consid. 3c). Le train de vie mené jusqu'à la cessation de la vie commune constitue la limite supérieure du droit à l'entretien (ATF 121 I 97 consid. 3b).

Dans le calcul de la contribution d'entretien, le montant de base compris dans le minimum vital d'un conjoint est déterminé selon les Normes d'insaisissabilité admises en matière d'exécution forcée (arrêt du Tribunal fédéral 5P.90/2002 du 1er juillet 2002 consid. 2.b.b; cf. à Genève : Normes d'insaisissabilité publiées in RS/GE - E 3 60.04). La majoration forfaitaire de 20% de ce montant de base n'est pas prévue dans le cadre de mesures provisionnelles telles que les mesures protectrices de l'union conjugale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_63/2012 du 20 juin 2012 consid. 4.2.2 et les nombreuses jurisprudences citées). A ce montant de base, s'ajoutent les frais de logement, les cotisations de caisse maladie, les frais professionnels tels que frais de déplacement nécessaires pour se rendre au travail, les frais supplémentaires de repas pris à l'extérieur ainsi que les frais de garde des enfants pendant le travail (Bulletti, L'entretien après divorce : méthodes de calcul, montant, durée et limites, in SJ 2007 II 77, p. 86). Dans les situations financières modestes, où le revenu des époux ne suffit pas à couvrir les besoins minimaux de deux ménages, la charge fiscale du débirentier ne doit en principe pas être prise en compte dans le calcul de son minimum vital du droit de la famille (ATF 128 III 257 consid. 4a/bb p. 259; 127 III 289 consid. 2a/bb p. 292; 126 III 353 consid. 1a/aa p. 356). Ce principe s'applique aussi aux mesures protectrices de l'union conjugale (arrêts 5A_592/2011 du 31 janvier 2012 consid. 4.2; 5A_511/2010 du 4 février 2011 consid. 2.2.3; 5A_383/2007 du 9 novembre 2007 consid. 2).

Si le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties pour fixer la contribution d'entretien, il peut, dans certaines conditions, leur imputer un revenu hypothétique supérieur à celui obtenu effectivement. Le juge doit avant tout juger si l'on peut raisonnablement exiger de cette personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Il doit ensuite examiner si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; ATF 128 III 4 consid. 4a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_218/2012 du 29 juin 2012 consid. 3.3.3; 5A_99/2011 du 26 septembre 2011 consid. 7.4.1 non publié aux ATF 137 III 602 mais publié in FamPra.ch 2012 p. 228; 5A_18/2011 du 1er juin 2011 consid. 3.1.1; 5A_290/2010 du 28 octobre 2010 consid. 3.1, publié in SJ 2011 I 177).

La répartition du disponible entre les époux ne doit pas conduire à procéder à un pur calcul mathématique; la fixation de la contribution d'entretien dépend en définitive du large pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC).

3.2.1 En l'espèce, les revenus de l'appelante arrêtés par le Tribunal à 3'250 fr. net par mois ne sont pas contestés.

L'appelante fait valoir, en sus des charges admises à son égard par le premier juge et non contestées par l'intimé, qu'il doit être tenu compte de ses frais médicaux non couverts ainsi que de ceux de l'enfant, du fait qu'elle ne perçoit à ce jour aucun subside pour les primes d'assurance maladie, enfin des frais de garde pour l'enfant.

La déclaration d'impôt 2012 ne suffit pas à rendre vraisemblable le caractère répétitif des frais médicaux non couverts de 3'815 fr. pour l'appelante et de 800 fr. pour l'enfant. La somme alléguée pour l'appelante apparaît, en outre, particulièrement élevée (3'815 fr. en 2012) en comparaison des montants admis par l'administration fiscale pour les années précédentes (1'750 fr. en 2010 et
1'177 fr. en 2011), sans que l'appelante explique cette augmentation. Dès lors, la prise en compte de ses frais sera limitée à 100 fr. par mois. Les frais médicaux non couverts allégués à raison de 800 fr. pour l'enfant ne sont également pas expliqués, étant précisé que les enfants ne sont soumis à aucune franchise de la part de l'assurance maladie et qu'il n'a pas été allégué que l'enfant souffrirait d'une maladie particulière. Ces frais seront donc écartés.

En revanche, l'appelante n'étant, en l'état, pas en mesure de percevoir des subsides pour l'aider à couvrir sa prime d'assurance maladie et celle de l'enfant, il sera tenu compte de l'intégralité des montants dont elle s'acquitte à ce jour.

Enfin, les frais de garde de l'enfant par une personne privée, et non une crèche, sont justifiés puisque l'appelante travaille de manière irrégulière. En revanche, même en tenant compte des revenus cumulés des époux d'environ 80'000 fr. par an, les frais de garde d'une maman de jour reconnue par l'Etat ne devraient pas dépasser 40 fr. par jour (cf. barème évolutif de l'ACCUEIL FAMILIAL DE JOUR, www.accueilfamilial-geneve.ch), ce qui représente 519 fr. par mois en tenant compte du fait que l'appelante travaille trois jours par semaine au plus
(40 fr. x 3 x 4.33 semaines).

Dès lors, les charges de l'appelante et de l'enfant s'élèvent à 4'001 fr. par mois, comprenant le loyer de l'appartement (1'220 fr.) et du box (50 fr.), les primes d'assurance-maladie pour elle-même et l'enfant (407 fr. 60 et 86 fr. 90), les frais médicaux non couverts (100 fr.), les primes d'assurance ménage et responsabilité civile (32 fr. 10), les frais liés à l'usage d'un véhicule, compte tenu de ses horaires de travail irréguliers (135 fr. 40), les frais de garde (519 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP pour elle-même et l'enfant (1'350 fr. + 400 fr. – 300 fr. d'allocations familiales).

3.2.2 En 2012, l'intimé a réalisé un salaire mensuel net moyen de 4'583 fr. en travaillant à 80%. Dès lors que l'intimé prend en charge son enfant un jour par semaine, il ne saurait lui être reproché d'avoir réduit son temps de travail, ce que l'appelante ne conteste pas au demeurant.

Il est également établi qu'aucun bénéfice n'a été versé aux associés depuis le début de leur prise d'activité en 2010. L'intimé n'étant pas l'unique associé de la société, il ne saurait lui être reproché ce manque de distribution du bénéfice, étant précisé que celui-ci était d'environ 16'000 fr. en 2010 ce qui aurait rapporté
666 fr. par mois à chacun des associés. En outre, l'intimé s'acquitte envers sa société de frais couvrant l'utilisation du véhicule de la société et d'usage de son téléphone professionnel à des fins privées, de sorte qu'il n'y a pas lieu de lui ajouter un gain en nature à cet égard.

L'appelante fait en vain valoir qu'il y a lieu d'imputer à l'intimé un revenu hypothétique, au motif qu'il serait en mesure de gagner plus selon les statistiques de l'Observatoire genevois du marché du travail, soit 7'146 fr. net à 80%, selon ses calculs, pour un cadre supérieur ayant une maturité travaillant indépendamment dans le domaine du conseil marketing. En effet, l'intimé, salarié de sa propre entreprise qui dégage des bénéfices, perçoit un salaire mensuel net qui lui permet de couvrir ses propres charges et celles de sa famille, de sorte qu'il ne saurait être exigé de lui qu'il vende ses parts sociales pour devenir un simple salarié. En outre, l'intimé exerçait déjà cette activité du temps de la vie commune des époux sans que l'appelante ne s'y oppose. Ainsi la Cour, à l'instar du Tribunal, se fondera sur le revenu effectif actuel de l'intimé.

Par conséquent, les revenus (4'583 fr.) et les charges (3'246 fr. 55) de l'intimé tels que retenus par le Tribunal ne sont pas critiquables, étant précisé que les primes d'assurance RC/ménage de l'intimé doivent être prises en compte par égalité de traitement avec l'appelante qui les fait également valoir.

3.2.3 Compte tenu du déficit de 751 fr. (3'250 fr. – 4'001 fr.) encouru par l'appelante, qui assume en plus l'essentiel de la prise en charge quotidienne et de l'éducation de l'enfant du couple confié à ses soins, ainsi que du disponible de l'intimé, qui représente 1'336 fr., la proposition de ce dernier de contribuer à l'entretien de la famille à raison de 1'100 fr. par mois est conforme aux besoins de celle-ci. Une fois cette contribution versée, il lui restera 236 fr., alors que l'appelante disposera, pour elle et l'enfant, de 349 fr. une fois ses charges et celles de l'enfant couvertes, étant précisé qu'elle bénéficiera, en outre, d'un subside cantonal pouvant représenter jusqu'à 100 fr. par mois pour couvrir sa prime d'assurance maladie après le prononcé de la séparation des époux, voire une aide au logement, étant toutefois rappelé que l'aide sociale est subsidiaire au devoir d'entretien entre époux.

Le jugement attaqué sera donc confirmé sur ce point.

3.2.4 Les parties n'ayant pas remis en cause la date de début du versement de la contribution d'entretien fixée par le Tribunal - qui correspond à celle du dépôt de la requête - il n'y a pas lieu de modifier la décision querellée sur ce point.

En ce qui concerne la période précédant le prononcé de la décision, la mainlevée définitive ne peut être accordée qu'au créancier bénéficiant d'un jugement exécutoire condamnant le débiteur à verser une somme d'argent déterminée. Dès lors, la somme à payer doit être chiffrée dans le jugement (ATF 135 III 315, consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_860/2011 du 11 juin 2012 consid. 6.3).

Le dispositif de la décision querellée qui condamne l'intimé à une pension de 1'100 fr. par mois "sous déduction de toutes sommes déjà versées", ne satisfait pas à l'exigence précitée et n'autorise pas le prononcé de la mainlevée définitive (ATF 135 précité, consid. 2.3 et 2.4).

Pour la période du 22 janvier 2013 au 28 février 2014, la contribution d'entretien représente 14'655 fr. ((1'100 fr. / 31 x 10) + (13 x 1'100 fr.)); l'intimé a payé à l'appelante 13'323 fr. ((1'000 / 31 x 10) + (13 x 1'000 fr.)) pendant cette même période. L'intimé sera ainsi condamné à verser à l'appelante 1'332 fr. La décision querellée sera donc modifiée sur ce point.

4. 4.1 Lorsque la Cour de céans statue à nouveau, elle se prononce sur les frais fixés par le Tribunal (art. 318 al. 3 CPC).

En l'espèce, la décision querellée est confirmée dans son fondement, son dispositif étant uniquement modifié pour être en conformité avec la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. supra 3.2.4). Dès lors, il n'y a pas lieu de modifier le dispositif du jugement querellé en ce qui concerne les frais judiciaires et les dépens fixés par le Tribunal.

4.2 L'appelante, qui succombe entièrement dans ses conclusions, sera condamnée aux frais d'appel, fixés à 800 fr. (art. 104 al. 1, 105, 106 al. 1 et 111 al. 1 CPC; art. 31 et 37 RTFMC - E 1 05.10) couverts par l'avance de frais qu'elle a opérée et qui reste acquise à l'Etat.

Chacun des époux supportera ses propres dépens (art. 107 al. 1 let. c CPC).

5. L'arrêt de la Cour, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, est susceptible d'un recours en matière civile, les moyens étant limités en application de l'art. 98 LTF. La valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr. (art. 51 al. 4 LTF).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A.______ contre les chiffres 5 et 9 du dispositif du jugement JTPI/12662/2013 rendu le 30 septembre 2013 par le Tribunal de première instance dans la cause C/984/2013-1.

Au fond :

Annule le chiffre 5 du dispositif de ce jugement et statuant à nouveau :

Condamne B.______ à verser à A.______ 1'332 fr. à titre de contribution d'entretien pour la période du 22 janvier 2013 au 28 février 2014.

Condamne B.______ à verser à A.______, par mois et d'avance, la somme de 1'100 fr. dès le 1er mars 2014 à titre de contribution à l'entretien de la famille.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., entièrement couverts par l'avance de frais fournie par A.______, qui reste acquise à l'Etat.

Les met à charge d'A.______.

Dit que chacune des parties supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Florence KRAUSKOPF, présidente; Madame Marguerite JACOT-DES-COMBES et Madame Elena SAMPEDRO, juges; Madame Nathalie DESCHAMPS, greffière.

La présidente :

Florence KRAUSKOPF

 

La greffière :

Nathalie DESCHAMPS

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure à 30'000 fr.