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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2799/2024

DCSO/514/2024 du 07.11.2024 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Minimum vital; concubinage; frais effectivement payés
Normes : LP.93; LP.17.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2799/2024-CS DCSO/514/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 7 NOVEMBRE 2024

Plainte 17 LP (A/2799/2024-CS) formée en date du 30 août 2024 par A______.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 7 novembre 2024
à :

-       A______

______

______.

- CONFEDERATION SUISSE AFC - TVA

Schwarztorstrasse 50

3007 Bern.

- ETAT DE GENEVE, Administration fiscale cantonale

Service du contentieux
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.

- ETAT DE GENEVE, Service des contraventions

Chemin de la Gravière 5
Case postale 104
1211 Genève 8.

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. Dans le cadre des opérations de saisie dans la série n° 1______, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a adressé le 3 mai 2024 à A______ un avis de saisie pour le 4 juillet 2024.

b. A______ ne s'étant pas présenté à la date fixée, l'Office a procédé, le 8 juillet 2024, à des blocages de ses comptes bancaires auprès de [la banque] B______ et de la banque C______.

c. Le 11 juillet 2024, A______ s'est présenté à l'Office. Il a exposé qu'il exerçait l'activité de paysagiste indépendant. Il vivait en concubinage et n'avait pas d'enfant commun avec sa compagne. Son loyer se montait à 1'257 fr. par mois et la prime d'assurance-maladie à 457 fr. 75.

d. Sur la base des relevés bancaires des six derniers mois du compte commercial de A______ auprès de B______ l'Office a d'abord retenu des revenus mensuels de 73'848 fr. et il en a informé A______, par avis de saisie de gains d'indépendant du 2 août 2024.

e. Le 20 août 2024, l'Office a recalculé la quotité saisissable. Sur la base des relevés bancaires du compte privé de A______, le revenu mensuel moyen s'élevait à 40'080 fr. Ses charges se montaient à 1'478 fr. 50 et comprenaient 850 fr. au titre de montant de base pour un débiteur vivant en concubinage et 628 fr. 50 pour la moitié du loyer. Faute de preuve de paiement, la prime d'assurance-maladie n'était pas comptabilisée.

f. Selon le procès-verbal de saisie établi le 20 août 2024, les quatre poursuites qui participent à la série totalisaient un montant de 87'639 fr. 50 à la date du 20 août 2024. La quotité mensuelle saisissable des gains d'indépendant de A______ s'élevait à un montant arrondi de 38'061 fr. par mois (40'080 fr. – 1'478 fr. 50), et ce pour la période allant du 2 août 2024 au 8 juillet 2024.

B. a. Par acte posté le 30 août 2024, A______ forme plainte auprès de la Chambre de surveillance contre la saisie de ses gains d'indépendant du 20 août 2024. Selon ses calculs, la quotité saisissable mensuelle était de 18'666 fr. 99. Son revenu mensuel était de 21'231 fr. 74 tandis que ses charges se montaient à 2'564 fr. 75, comprenant le loyer, le montant de base et la prime d'assurance-maladie.

b. Dans le délai pour répondre, l'Office a décidé de reconsidérer sa décision et d'admettre le montant allégué par A______ concernant ses revenus, soit 21'231 fr. 74. Avec des charges de 1'478 fr. 50 par mois, qu'il n'y avait pas lieu de reconsidérer, la quotité saisissable s'élevait à 19'750 fr. et était suffisante pour solder la série au terme du délai d'une année. L'Office avait établi un nouvel avis de saisie de gains d'indépendant et notifierait ensuite un nouveau procès-verbal de saisie.

c. Le rapport de l'Office a été transmis à A______ le 1er octobre 2024 puis la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. La plainte est recevable pour avoir été déposée auprès de l'autorité compétente (art. 6 al.1 et 3 LaLP, art. 17 al. 1 LP), par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), dans le délai utile de dix jours (art. 17 al. 2 LP) et selon la forme prescrite par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LaLP, art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), à l'encontre d'une mesure de l'Office sujette à plainte.

2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital).

2.1.2 Pour fixer le montant saisissable - en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c) - l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance (ci-après : NI-2022; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

2.1.3 Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge, les soins corporels, l'entretien du logement, les frais culturels, la téléphonie et la connectivité, l'éclairage, l'électricité, le gaz, les assurances privées, etc. (art. I NI-2024). Le montant de la base mensuelle d'entretien admise ne dépend pas du train de vie du débiteur mais de sa situation familiale. Selon l'art. I NI-2024, le montant de base mensuel s'élève ainsi, dans le canton de Genève, à 1'200 fr. pour un débiteur vivant seul et à 1'700 fr. pour un couple marié, deux personnes vivant en partenariat enregistré ou un couple avec des enfants.

2.1.4 Dans un rapport de concubinage, lorsque les concubins n’ont pas d’enfant en commun, le montant qui peut être retenu à titre de participation du partenaire aux frais communs du ménage ne peut pas dépasser la moitié de ces frais ; cela reviendrait, en effet, à autoriser les créanciers à se satisfaire sur un patrimoine qui n’est pas celui du débiteur et à l’égard duquel ce dernier ne peut faire valoir aucun droit à l’entretien. A ces frais s’ajoutent, pour calculer le minimum vital du poursuivi, la moitié de la base mensuelle d’entretien prévue pour un couple ainsi que l’intégralité des autres charges (assurances maladie, frais de transport etc.), pour autant qu'elles soient effectivement payées de manière régulière (ATF 130 III 765, JdT 2006 II 134, consid. 2.2 ; ATF 128 III 159 ; JdT 2002 II 58 consid. 3.5 et les références citées ; Ochsner, CR-LP, ad art. 93 n° 82, n° 83 et n° 92 ss).

2.2 En cas de plainte, l'office peut, jusqu'à l'envoi de sa réponse, procéder à un nouvel examen de la décision attaquée; s'il prend une nouvelle mesure, il la notifie sans délai aux parties et en donne connaissance à l'autorité de surveillance (art. 17 al. 4 LP). La nouvelle décision ou mesure se substitue à l'ancienne. L'autorité de surveillance doit néanmoins examiner la plainte, à moins que la décision de reconsidération n'ait rendu sans objet les conclusions de cette dernière (ATF 126 III 85 consid. 3).

2.3 En l'espèce, en ce qui concerne les revenus du plaignant, l'Office a effectué un nouveau calcul et admis le montant allégué dans la plainte, à savoir des gains mensuels de 21'231 fr. 74. Sur ce point, la plainte est devenue sans objet.

Pour ce qui est des charges, le plaignant ne conteste pas le fait qu'il vit en concubinage et qu'il n'a pas d'enfant commun avec sa compagne. Il n'allègue pas non plus que cette dernière n'a pas de revenus et qu'elle serait entretenue par ses soins. C'est donc à juste titre que l'Office a pris en compte la moitié du montant de base pour un couple et la moitié du loyer, dans les charges du plaignant, soit 1'478 fr. 50 (850 fr. + 628 fr. 50).

Le plaignant n'établit pas s'être effectivement et régulièrement acquitté de sa prime d'assurance maladie obligatoire, un paiement isolé au mois de mars 2024, soit antérieurement à la saisie, n'étant pas suffisant. L'attention du plaignant sera en revanche attirée sur le fait qu'il peut obtenir le remboursement de la prime d'assurance-maladie effectivement payée, s'il présente à l'Office la preuve de son règlement. Le plaignant n'établit pour le surplus aucun autre frais que l'Office n'aurait pas comptabilisé dans ses charges.

Aussi, en tant qu'elle a conservé un objet, la plainte sera rejetée.

A la date à laquelle l'instruction de la plainte a été close, l'Office n'avait, à teneur du dossier, pas encore notifié au plaignant un nouveau procès-verbal de saisie modifié. Pour plus de clarté, la Chambre de céans prononcera elle-même l'annulation du procès-verbal de saisie attaqué et invitera l'Office à notifier au plaignant un nouveau procès-verbal de saisie, s'il ne l'a pas déjà fait.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 lit. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 30 août 2024 par A______ contre le procès-verbal de saisie du 20 août 2024 dans la série n° 1______.

Au fond :

Constate que la plainte est devenue partiellement sans objet.

Rejette la plainte pour le surplus.

Annule le procès-verbal de saisie attaqué et invite l'Office cantonal des poursuites, s'il ne l'a pas déjà fait, à notifier à A______ un procès-verbal de saisie modifié dans le sens des considérants de la présente décision.

 

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Alisa RAMELET-TELQIU et Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame
Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente : La greffière :

Verena PEDRAZZINI RIZZI Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.