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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2300/2023

DCSO/444/2023 du 19.10.2023 ( PLAINT ) , IRRECEVABLE

Normes : LP.21
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2300/2023-CS DCSO/444/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 19 OCTOBRE 2023

 

Plainte 17 LP (A/2300/2023-CS) formée en date du 3 juillet 2023 par A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du 19 octobre 2023
à :

-       A______

______

______ [GE].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A.           a. Dans le cadre de deux poursuites en réalisation de gage immobilier nos 1______ et 2______ diligentées par B______ et C______ contre A______ et l'hoirie de feu D______, composée de E______, F______, G______ et A______ (ci-après "l'Hoirie"), les premiers ont requis, le 15 juin 2016, la vente de la parcelle n° 3______ sise à H______ [GE], propriété de l'Hoirie.

Cette parcelle a été vendue aux enchères le 24 octobre 2018.

b. Le 8 août 2018, l'Hoirie, représentée par A______, a demandé à l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) de lui transmettre les décomptes de tableaux de distribution concernant trois anciennes poursuites ayant grevé la parcelle n° 3______ (poursuites nos 4______, 5______ et 6______).

Une demande similaire à l'Office avait été formulée le 19 juin 2018 et réitérée le 25 juillet 2018 par Me I______, notaire.

c. Par courriers des 6 juillet, 24 août et 11 octobre 2018, l'Office a répondu à l'Hoirie en rappelant que le sort réservé aux poursuites nos 4______, 5______ et 6______ – qui avaient été soldées, raison pour laquelle aucun tableau de distribution n'avait été établi – avait déjà fait l'objet d'une décision rendue par la Chambre de surveillance le 4 mars 2010 (DCSO/137/2010).

d. En date du 16 octobre 2018, l'Hoirie a formé une plainte auprès de la Chambre de surveillance, tendant à l'obtention de "décomptes et preuves de versements au(x) créancier(s) des poursuites nos 4______, 5______ et 6______ ainsi que toutes les copies des factures de frais et émoluments" y relatifs.

e. Par décision DCSO/36/19 du 17 janvier 2019, la Chambre de surveillance a déclaré la plainte irrecevable. En effet, le courrier de l'Office du 11 octobre 2018 ne constituait pas une décision susceptible de plainte, dans la mesure où il ne faisait que confirmer des précédents courriers et où il renvoyait à une précédente décision de la Chambre de surveillance.

f.a Par lettre du 25 septembre 2019, à laquelle l'Office n'a pas répondu, l'Hoirie a sollicité le remboursement du montant inscrit sur le chèque remis le 11 novembre 2003 à l'Office, soit 1'336'887 fr. 15.

f.b Par courrier posté le 25 octobre 2019, l'Hoirie, représentée par A______, a demandé à la Chambre de surveillance d'ordonner à l'Office de lui rembourser la somme de 1'136'887 fr. 15, de lui restituer la cédule hypothécaire en premier rang de 85'000 fr. et de l'indemniser pour toutes les dépenses qu'elle avait consenties.

Cette demande faisait référence aux trois anciennes poursuites, nos 4______, 5______ et 6______, précitées.

f.c Par décision DCSO/22/20 du 30 janvier 2020, la Chambre de surveillance a déclaré la plainte irrecevable, aux motifs qu'elle ne visait aucune mesure de l'Office, qu'elle ne soulevait aucun motif de nullité et qu'elle avait trait à des questions qui avaient déjà été traitées dans la décision sur plainte DCSO/137/2010 du 4 mars 2010 (en particulier s'agissant du versement de la somme de 1'320'000 fr. plus frais de poursuite en faveur de DOMAINE DE M______ SA afin que les poursuites nos 4______, 5______, 7______, remplacée par la poursuite n° 6______, et 8______ soient contrordrées).

B. a. Par courrier du 24 novembre 2021, l'Hoirie a requis un "relevé des poursuites de Monsieur D______" et des renseignements sur la poursuite n° 9______.

b. Aux termes de sa réponse du 2 décembre 2021, l'Office a répondu qu'il ne pouvait délivrer un extrait du registre des poursuites de feu D______ que moyennant paiement d'un émolument de 18 fr. Quant à la poursuite n° 9______, "elle était en opposition et jamais soldée".

c. En date du 14 novembre 2022, A______ a réclamé à l'Office des décomptes et preuves de paiement aux créanciers dans les poursuites nos 4______, 5______, 6______ et 9______, ces documents ayant été réclamés par le Tribunal civil lors d'une audience de conciliation dans la cause C/10_____/2022. Selon A______, les conseils de DOMAINE DE M______ SA et de J______, parties défenderesses à la procédure précitée, alléguaient n'avoir touché qu'une partie des fonds qui leur étaient destinés. Il avait joint à sa lettre un procès-verbal d'audience de conciliation, à teneur duquel A______ avait un délai à la fin de l'année pour faire savoir s'il souhaitait obtenir une autorisation de procéder.

d. Par courrier du 12 décembre 2022, l'Office a répondu à A______ qu'il ne résultait pas des documents joints à sa lettre du 14 novembre 2022 que le Tribunal avait demandé la production de documents. Les poursuites auxquelles il faisait référence avaient d'ores et déjà fait l'objet d'interminables échanges de correspondance. Quant à "la preuve des versements", toute information utile avait été donnée lors d'une audience du 1er décembre 2021 devant le tribunal de première instance, à la suite d'une action engagée par A______ contre l'Etat de Genève (procédure C/11_____/2019).

e. Le 21 février 2023, A______ a relancé l'Office afin de savoir comment la somme de 1'336'887 fr. 15 avait été distribuée. Il a joint à sa lettre un courrier de la Conseillère d'Etat, Madame K______, du 16 février 2023.

f. Par courrier du 23 mars 2023, l'Office, sous la plume de son Préposé, a répondu à A______ qu'il avait examiné son dossier, en particulier s'agissant du chèque de 1'336'887 fr. 15.

Il a communiqué à A______ un décompte du 9 décembre 2003, attestant que les poursuites nos 4______, 5______ et 6______ avaient été soldées et justifiant de la ventilation des débours et émoluments de l'Office. L'Office a précisé que ce décompte n'avait pas été contesté, de sorte qu'il était définitif et exécutoire. Il lui a aussi transmis une copie d'un courrier du 19 mai 2009 de l'Office faisant référence à la somme de 66'697 fr. Concernant ce dernier montant, l'Office a rappelé que la Chambre de surveillance avait déjà fait référence aux 66'697 fr. dans sa décision DCSO/137/2010. L'Office avait réparti correctement le chèque de 1'336'887 fr. 15 et toutes les décisions prises dans ce contexte étaient forcloses.

g. Par courrier du 4 avril 2023, A______ a soulevé plusieurs griefs en relation notamment avec la vente aux enchères du 16 décembre 1999, la cession du 2 avril 2001 à DOMAINE DE M______ SA des créances détenues par la banque L______ contre D______ et A______ et la décision de la Commission foncière agricole du 11 janvier 2000.

h. Par courrier du 21 avril 2023, l'Office a rappelé à A______ que la réponse à ses questions se trouvait dans les très nombreux courriers et décisions de justice le concernant, l'intéressé ayant saisi la Chambre de surveillance et le Tribunal fédéral et ayant agi en paiement contre l'Etat de Genève. Il n'appartenait pas à l'Office de se prononcer sur l'existence ou le montant de ses dettes, voire d'une éventuelle prétention qu'il pourrait disposer contre un créancier.

B. a. Par acte posté le 1er juillet 2023, A______, alléguant agir en tant que représentant de l'Hoirie, a saisi la Chambre de surveillance d'une plainte concernant un "chèque de 1'336'887 fr. 15 à l'Office des poursuites pour solder les poursuites nos 4______, 5______ et 6______ et 9______". Il fait valoir que ce montant ne correspondrait aucunement "avec les poursuites mentionnées" et que l'avocat de son ancien créancier prétendrait que son client n'aurait "pas été crédité" ou seulement partiellement. Une procédure était en cours devant le Tribunal de première instance, dès lors que 116'087 fr. 65 faisaient défaut.

b. Dans son rapport du 16 août 2023, l'Office a observé que la plainte était tout d'abord irrecevable, dès lors qu'elle avait été déposée bien après le délai de dix jours de l'art. 17 LP à compter de la réception du dernier courrier de l'Office du 21  avril 2023. Par ailleurs, la Chambre de surveillance s'était déjà prononcée sur la demande tendant à l'obtention de décomptes et preuves de versements aux créanciers des poursuites nos 4______, 5______ et 6______, dans sa décision DCSO/36/2019 du 17 janvier 2019. Or, le plaignant, qui ne se prévalait d'aucun fait nouveau, ne pouvait remettre en cause des décisions entrées en force. Dans la mesure où les poursuites nos 4______, 5______ et 6______ avaient été soldées et la poursuite n° 9______ était périmée, le plaignant ne poursuivait aucun intérêt concret sur le plan de l'exécution forcée. Sa plainte était aussi irrecevable pour ce motif. Sur le fond, l'Office a rappelé que le délai de conservation des documents en relation avec le paiement reçu le 12 novembre 2003 était arrivé à échéance le 13 novembre 2013, la période de conservation des pièces relatives aux poursuites liquidées étant de dix ans. Quant à la poursuite n° 9______, le délai de conservation de dix ans avait commencé à courir au moment de la péremption de la poursuite (art. 88 al. 2 LP) le 25 juin 2002 et était arrivé à échéance le 25 juin 2012.

c. Par courriers des 28 août et 11 septembre 2023, A______, "ainsi que l'Hoirie A___/E___/F___/G______", a persisté dans ses précédentes conclusions, tout en concluant à ce que DOMAINE DE M______ SA et J______ soient condamnés à transmettre la liste complète des montants qu'ils avaient touchés en exécution de la convention du 11 novembre 2003 et à entreprendre toute mesure utile afin que la poursuite n° 9______ soit radiée.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP).

Par mesure de l'Office, il faut entendre tout acte matériel d'autorité accompli par l'Office en exécution d'une mission officielle dans une affaire concrète, ayant pour objet la continuation ou l'achèvement de la procédure d'exécution forcée et produisant des effets externes (ATF 116 III 91 consid. 1). Ne constituent en conséquence pas des mesures sujettes à plainte la simple confirmation d'une décision déjà prise, une communication de l'Office sur ses intentions ou un avis (Erard, Commentaire romand LP, 2005, n° 10 ad art. 17 LP).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.1.2 La qualité pour porter plainte selon l'art. 17 LP est reconnue à toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés ou, à tout le moins, atteinte dans ses intérêts de fait par une mesure ou une omission d'un organe de la poursuite. Le plaignant doit dans tous les cas poursuivre un but concret; il doit être matériellement lésé par les effets de la décision attaquée et avoir un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation (ATF 139 III 384 consid. 2.1; 138 III 219 consid. 2.3; 120 II 5 consid. 2a; arrêt 5A_48/2022 du 10 mai 2022 consid. 4.2.1 et les références).

De pratique constante, la plainte n'est recevable que si elle permet d'atteindre un but concret sur le plan de l'exécution forcée; aussi, l'art. 21 LP prévoit-il que, lorsqu'une plainte est reconnue fondée, l'autorité annule ou redresse l'acte qui en fait l'objet. La plainte ne peut ainsi, sous peine d'irrecevabilité, avoir seulement un effet déclaratif ou tendre uniquement à faire constater l'irrégularité du procédé de l'office pour fonder éventuellement une action en responsabilité selon l'art. 5 LP (ATF 138 III 265 consid. 3.2; 138 III 219 consid. 2.3; 120 III 107 consid. 2;
99 III 58 consid. 2; arrêts 5A_837/2018 du 17 mai 2019 consid. 3.1, publié in Pra 2019 (78) p. 785; 7B_245/2003 du 7 janvier 2004 consid. 1.1 in fine). C'est pourquoi, la plainte n'est en particulier pas recevable si la mesure critiquée est irrévocable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_554/2022 du 26 janvier 2023, consid. 5.1 et les références).

1.2 En l'espèce, la plainte apparait irrecevable à plus d'un titre. En premier lieu, elle ne vise aucune mesure ou décision de l'Office. En effet, les courriers de l'Office des 12 décembre 2022, 23 mars et 21 avril 2023 ne sont que des simples informations et ne font que confirmer des décisions déjà prises. Il ne s'agit pas de nouvelles décisions. En deuxième lieu, en l'absence d'un motif de nullité, le plaignant est forclos à se plaindre, plusieurs années plus tard, de décomptes dans des poursuites anciennes et qui plus est soldées depuis longue date, de sorte qu'il ne saurait reprocher à l'Office, sous l'angle du déni de justice, de ne pas avoir fourni pour une énième fois des renseignements à ce sujet.

De plus, la demande contenue dans la plainte a déjà fait l'objet d'une décision, désormais définitive. Dans la mesure où les questions en lien avec la distribution par l'Office du montant encaissé conformément à la Convention du 11 novembre 2003 ont déjà été tranchées (DCSO/137/2010), la nouvelle plainte apparaît irrecevable.

Il ne résulte par ailleurs pas des documents fournis à l'appui de la plainte que les créanciers réclameraient de l'argent à l'hoirie en lien avec le chèque remis à l'Office le 11 novembre 2003 et avec les poursuites litigieuses. C'est en effet le plaignant A______ qui a agi en justice contre DOMAINE DE M______ SA et contre J______ et pas l'inverse.

Il ressort en outre des explications de l'Office, non contestées, que la poursuite n° 9______ est périmée et que le délai de conservation de dix ans, courant dès la péremption, a expiré depuis longue date, de sorte que la plainte ne poursuit aucun but concret sur le plan de l'exécution forcée en tant qu'elle concerne cette poursuite.

Si la demande des plaignants devait être comprise comme étant une action en dommages-intérêts en raison du comportement de l'Office dans ce dossier, force est de constater que la Chambre de céans n'est pas compétente pour statuer sur l'octroi des prétentions réclamées, lesquelles relèvent, le cas échéant, de l'action en responsabilité de l'Etat, du ressort des juridictions civiles (art. 5 LP).

Eu égard à ce qui précède, la plainte sera déclarée irrecevable.

2. La procédure de plainte est gratuite (art. 20 al. 2 ch. 5 LP; 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucun dépens (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Déclare irrecevable la plainte formée le 1er juillet 2023 par A______ dans les poursuites nos 4______, 5______, 6______ et  9______.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente : La greffière :

 

Verena PEDRAZZINI RIZZI Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.