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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/4089/2022

DCSO/159/2023 du 06.04.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Acte de défaut de biens après saisie; continuation de la poursuite; délai de 6 mois; computation; dies a quo
Normes : lp.149.al3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4089/2022-CS DCSO/159/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 6 AVRIL 2023

 

Plainte 17 LP (A/4089/2022-CS) formée en date du 23 novembre 2022 par A______ et B______, comparant en personnes.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

______

______.

- B______

c/o A______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a émis en faveur de A______ et B______ deux actes de défaut de biens, n° 1______ et n° 2______, respectivement les 19 août et 24 septembre 2021, pour des montants de 46'540 fr. 85 (créance en poursuite 44'270 fr., intérêts 5'349 fr. 29, frais 658 fr. 69, sous déduction d'un produit de la poursuite de 3'737 fr. 13) et 43'315 fr. 10 (créance en poursuite 44'270 fr., intérêts 5'789 fr. 40, frais 916 fr. 40, sous déduction de frais payés en 22 fr. 30 et d'un produit de la poursuite de 7'638 fr. 38), le premier au préjudice de C______ et le second au préjudice de D______, le titre de créance étant le même dans les deux cas : "vente restaurant E______, sis rue 3______ no. ______, [code postal] Genève (CHF 44'270.00)".

b. Le 11 février 2022, A______ et B______ ont écrit à l'Office pour confirmer la teneur de plusieurs entretiens téléphoniques au cours desquels ils avaient demandé, sans succès, des explications sur la rédaction des actes de défauts de biens dont ils ne comprenaient pas que les découverts en soit différents alors que les débiteurs étaient solidaires de la dette. Selon eux, les montants figurant sur l'acte de défaut de biens n° 1______ visant C______ étaient corrects, alors que ceux mentionnés sur l'acte de défauts de biens n° 2______ visant D______ étaient erronés. Ils avaient compris des explications de l'Office que de nouveaux actes de défaut de biens devaient être établis et que l'Office reprendrait contact avec eux à cette fin, ce que celui-là n'avait jamais fait. Ils lui envoyaient par conséquent les deux actes de défaut de biens originaux en vue de correction. Ils précisaient en fin de courrier que "n'ayant pas de nouvelles de votre part, et ne pouvant procéder aux requêtes de continuer les poursuites en l'état, nous vous joignons les deux originaux des [actes de défaut de biens] précités en annexe et vous saurions gré de procéder aux modifications qui s'imposent".

c. Sans nouvelles de l'Office, A______ et B______ l'ont relancé le 17 octobre 2022, l'invitant à "reprendre le dossier dans les meilleurs délais et de procéder aux modifications qui s'imposent, afin [qu'ils puissent] procéder aux requêtes de continuer les poursuites".

d. L'Office a retourné les actes de défaut de biens originaux à A______ et B______ avec une rectification apportée en surimpression sur l'acte de défaut de biens n° 1______ au préjudice de C______, mais sans en modifier la date d'émission. L'acte de défaut de biens n° 2______ au préjudice de D______ n'a pas été modifié.

e. A______ et B______ ont renvoyé les actes de défaut de biens à l'Office le 15 novembre 2022 avec des réquisitions de continuer les poursuites contre C______ et D______.

f. L'Office a rendu 17 novembre 2022 des décisions de refus de donner suite aux réquisitions de continuer les poursuites au motif qu'elles intervenaient plus de six mois après l'émission des actes de défaut de biens. Ils devaient par conséquent requérir de nouvelles poursuites.

B. a. Par acte expédié le 23 novembre 2022 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ et B______ appelaient de leurs vœux qu'une solution soit trouvée leur permettant de reprendre leurs démarches en continuation de la poursuite, au motif qu'ils tentaient depuis septembre 2021 d'obtenir des actes de défaut de biens modifiés de la part de l'Office, lequel avait toutefois tardé à le faire, provoquant l'écoulement du délai de six mois dès l'émission des commandements de payer et la possibilité de requérir directement la continuation de la poursuite sans requérir la notification d'un nouveau commandement de payer.

b. Dans ses observations du 15 décembre 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Il a exposé que les saisies de revenus au préjudice de C______ et D______ avaient pris fin à des dates et avec des produits différents car elles avaient couru sur des périodes qui ne se recouvraient pas et avaient porté sur des revenus qui n'étaient pas les mêmes. Cela étant, l'Office a admis qu'il avait commis une erreur en ce sens que, les poursuites portant sur une même créance dont C______ et D______ étaient solidairement débiteurs, la part du produit attribuée au capital en poursuite dans la saisie ayant abouti en premier lieu (n° 1______; C______), soit 3'078 fr. 44, devait être ajouté au produit de la seconde saisie (n° 2______; D______) pour réduire d'autant le montant en poursuite et éviter un enrichissement indû des créanciers et un paiement à double par les débiteurs. Pour le reste, il appartenait aux plaignants de requérir à temps la continuation de la poursuite dans les six mois suivant l'émission initiale des actes de défaut de biens.

c. La Chambre de surveillance a informé les parties par courrier du 20 décembre 2022 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

1.2 Il y a retard non justifié, au sens de l'art. 17 al. 3 LP, lorsqu'un organe de l'exécution forcée n'accomplit pas un acte qui lui incombe – d'office ou à la suite d'une requête régulière – dans le délai prévu par la loi ou dans un délai raisonnable compte tenu de l'ensemble des circonstances (Cometta/Möckli, Basler Kommentar, SchKG I, 2ème édition, 2010, n° 31-32 ad art. 17 LP; Dieth/Wohl, Kurz Kommentar, SchKG, 2ème édition, 2014, n° 32 ad art. 17 LP; Erard, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 55 ad art. 17 LP).

1.3 De pratique constante, la plainte n'est recevable que si elle permet d'atteindre un but concret sur le plan de l'exécution forcée. Il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur des plaintes formulées dans le seul but de faire constater qu'un organe de poursuite a, en agissant ou en omettant d'agir, violé ses obligations (ATF 99 III 58 consid. 2, JT 1974 II 71 et les arrêts cités; GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n° 156 ad art. 17 LP).

1.4 A teneur de l'art. 149 LP, le créancier qui a participé à la saisie et n'a pas été désintéressé intégralement reçoit un acte de défaut de biens pour le montant impayé; le débiteur reçoit une copie de l'acte de défaut de biens (al. 1). L'Office délivre l'acte de défaut de biens dès que le montant de la perte est établi (al. 1bis). Le créancier est dispensé du commandement de payer, s'il continue la poursuite dans les six mois de la réception de l'acte de défaut de biens (al. 3).

Notifié au poursuivant et au poursuivi, l'acte de défaut de biens doit être daté et signé. Si les indications figurant dans l'acte de défaut de biens sont inexactes, le poursuivant et le poursuivi peuvent en demander en tout temps la rectification. L'office doit d'office corriger les inexactitudes qu'il a lui-même portées sur l'acte de défaut de biens. L'art. 149 al. 1bis LP a pour but de rappeler à l'Office que la délivrance de l'acte de défaut de biens doit intervenir d'office immédiatement après que le poursuivant a eu connaissance de son découvert. Le créancier a un intérêt à recevoir cet acte de défaut de biens le plus rapidement possible, soit dans les quelques jours à compter du moment où le tableau de distribution est devenu définitif et le dividende distribué. Commençant à courir dès la réception de l'acte de défaut de biens par le poursuivant, le délai de six mois prévu par l'art. 149 al. 3 LP est un délai de forclusion, qui ne peut être ni prolongé, ni restitué. Si la délivrance de l'acte de défaut de biens n'a pas eu lieu alors qu'il aurait pu être communiqué, le délai pour requérir la continuation d'une nouvelle poursuite commence à courir du jour où le poursuivant a vraiment eu connaissance de sa perte effective. En principe, cette connaissance intervient à la date à laquelle le tableau de distribution devient définitif. En tout état de cause, le poursuivant ne doit pas rester inactif. Il peut former une plainte pour retard injustifié (art. 17 al. 3 LP) ou requérir la continuation de la nouvelle poursuite sans commandement de payer. S'il laisse s'écouler six mois dès cette date, le créancier est présumé y avoir renoncé (Rey-Mermet, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 9, 10, 13, 32 et 33 ad art. 149 LP; Gilliéron, op, cit., n° 46 et 48 ad art. 149 LP).

2. En l'espèce, les décisions attaquées sont justifiées dès lors qu'à la date où elles ont été rendues, l'émission des actes de défaut de biens litigieux remontait à plus d'une année, quand bien même ils comportaient une erreur que l'Office avait d'ailleurs admise. Le délai de six mois permettant de requérir la continuation de la poursuite sans requérir la notification préalable d'un commandement de payer, conformément à l'art. 149 al. 3 LP, était échu, quel que soit le dies a quo à partir duquel on le calcule en application des principes rappelés ci-dessus. Les plaignants ne peuvent se prévaloir des difficultés à obtenir une correction des actes de défaut de biens par l'Office pour étendre le délai de six mois du privilège que confère l'acte de défaut de biens puisqu'il s'agit d'un délai de forclusion qui échoit au plus tard dans les six mois dès que le créancier connaît son découvert, qu'il ait ou non reçu un acte de défaut de biens, toute inactivité de sa part dans ce délai lui étant imputable.

Il peut certes être reproché à l'Office d'avoir tardé à opérer la correction requise sur l'un des actes de défaut de biens qui lui ont été retournés par les créanciers et qu'il a conservés pendant plusieurs mois sans les traiter. Ce retard n'a toutefois eu aucune incidence sur l'échéance du délai de six mois de l'art. 149 al. 3 LP puisqu'il était certainement déjà échu ou était sur le point de l'être lorsque les plaignants ont retourné les actes de défauts de biens litigieux à l'Office en février 2022. A ce jour, la correction a été effectuée et il n'y a plus de raison de constater un retard conformément aux principes rappelés ci-dessus.

La plainte est ainsi infondée et elle sera rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte déposée le 23 novembre 2022 par A______ et B______ contre les décisions de l'Office du 17 novembre 2022 rejetant les réquisitions de continuer la poursuite sur la base des actes de défaut de biens n° 1______ et n° 2______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.