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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2305/2021

DCSO/272/2022 du 30.06.2022 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS

Normes : LP.17.al1; LP.17.al3; LP.115.al3
Résumé : Saisie complémentaire
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2305/2021-CS DCSO/272/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 30 JUIN 2022

 

Plainte 17 LP (A/2305/2021-CS) formée en date du 6 juillet 2021 par A______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

- A______

M. B______

______

______ [VD].

- C______

c/o D______

Agent d'affaires breveté

______

______.

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. A des dates ne ressortant pas du dossier, A______ (ci-après : A______ ou la Banque) a engagé à l'encontre de C______ les poursuites N° 1______, portant sur un montant de 100'000 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 4 janvier 2017, et 2______, portant sur divers montants totalisant 7'233 fr. en capital, plus frais et intérêts à compter du 4 juillet 2019.

Les 4 juillet 2019 et 11 mars 2020, la Banque a requis la continuation de ces poursuites.

b. Par lettre du 23 juillet 2019, soit trois semaines après avoir requis la continuation de la poursuite N° 1______, A______ a demandé à l'Office de saisir les actifs spécifiques suivants, dont le débiteur était selon elle propriétaire ou titulaire :

·         Une montre E______, numéro de série 4______, achetée par le débiteur à la société F______ SA selon contrat du 5 mai 2017.

·         La marque "G______", inscrite au nom du débiteur dans le registre des marques tenu par l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle.

·         Les titres des sociétés F______ SA, H______ SARL et I______ SA détenus par le débiteur ainsi que les éventuels revenus que lui versaient ces sociétés.

c. Le 10 octobre 2019, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a adressé à F______ SA, H______ SARL et I______ SA des avis les informant de la saisie en leurs mains des avoirs et revenus qu'elles pourraient détenir pour le compte du débiteur.

Le même jour, l'Office a informé l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle de la saisie de la marque "G______".

d. C______ a été entendu le 6 novembre 2019 par l'Office dans le cadre des opérations de saisie. Il ne ressort pas du procès-verbal dressé à cette occasion qu'il aurait déclaré d'autres actifs que son salaire, ni qu'il aurait été interrogé spécifiquement sur les actifs mentionnés par la Banque dans sa communication du 23 juillet 2019.

e. Un premier procès-verbal de saisie, série N° 3______, a été établi le 25 juin 2020 et adressé le même jour aux créanciers participant à la saisie (soit, outre A______ pour les poursuites N° 1______ et 2______, J______ SA pour deux poursuites, l'Etat de Genève et le Cautionnement romand) ainsi qu'à C______. Il en résulte que la saisie avait porté, à hauteur d'une quotité saisissable de 1'512 fr. par mois du 5 mai 2020 au 5 mai 2021, sur le salaire versé au débiteur par H______ SARL ainsi que sur les éventuels revenus et titres détenus par les sociétés F______ SA, H______ SARL et I______ SA pour le compte de C______, pour une valeur non estimée. Il n'était en revanche pas fait mention de la montre E______, numéro de série 4______, dont la Banque avait spécifiquement requis la saisie dans sa lettre du 23 juillet 2019.

f. Par lettre du 14 juillet 2020, la Banque s'est plainte auprès de l'Office du caractère incomplet du procès-verbal de saisie, dans la mesure où d'une part celui-ci ne mentionnait pas la saisie de la marque "G______", pourtant portée à la connaissance de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle, et que la montre E______, numéro de série 4______ n'y figurait pas.

g. Par courrier du 6 août 2020, l'Office a invité C______ à lui remettre la montre E______, numéro de série 4______. Par l'intermédiaire de son conseil – et sous une forme ne ressortant pas du dossier – ce dernier lui aurait alors répondu que la montre en question avait été cédée – au titre d'apport en nature selon contrat du 13 juillet 2017 – à la société I______ SA dans le cadre de la constitution de cette dernière.

h. Le 13 novembre 2020, l'Office a établi un second procès-verbal de saisie, série N° 3______, remplaçant celui du 25 juin 2020, et l'a adressé aux créanciers et débiteur, la Banque l'ayant reçu le 17 novembre 2020. Cet acte se distinguait du premier procès-verbal de saisie par la mention de la saisie de la marque "G______"; en revanche, il ne comportait toujours aucune mention de la montre E______, numéro de série 4______.

i. Par courriers du 23 novembre 2020, A______ a requis la vente des actifs saisis.

Par lettre du même jour, elle a indiqué à l'Office demeurer dans l'attente d'un "complément de saisie" devant porter sur la montre E______, numéro de série 4______ et l'a invité à prendre cet actif sous sa garde. Elle l'a de même invité à procéder à une révision de la situation du débiteur au vu de la faillite de son employeur, la société H______ SARL.

j. Par courrier daté du 2 décembre 2020, auquel était annexé une copie d'un extrait du procès-verbal de l'audition de C______ le 23 septembre 2020 par la police vaudoise, la Banque a invité l'Office à ordonner la saisie de diverses montres mentionnées dans ledit procès-verbal. Selon ce document, en effet, la police vaudoise avait pris sous sa garde cinq montres de marque G______, soit, selon les explications de C______, une lui appartenant, une appartenant à I______ SA et trois appartenant à des clients. Ce dernier avait par ailleurs indiqué avoir déposé trois montres auprès de l'Office cantonal des faillites.

k. Par décision du 28 janvier 2021, l'Office a renoncé à réaliser les actifs saisis en mains des sociétés F______ SA, H______ SARL et I______ SA au vu des faillites des deux premières, déclarées le 1er septembre 2020, et de la radiation de la troisième du Registre du commerce, intervenue le ______ 2020.

Cette décision, dûment communiquée aux créanciers participant à la série N° 3______ ainsi qu'au débiteur, n'a pas été contestée.

l. Par lettre du 4 février 2021, la Banque a indiqué à l'Office demeurer dans l'attente de ses nouvelles à la suite de ses requêtes de saisie de montres, de réalisation et de révision de la situation financière du débiteur.

Dans sa réponse du 22 février 2021, l'Office l'a informée que la procédure de réalisation de la marque "G______" était paralysée en raison des mesures sanitaires alors en vigueur. Les trois montres prises sous sa garde par l'Office cantonal des faillites l'avaient été dans le cadre de la faillite de la société H______ SARL. Enfin, C______ devait être réentendu sur sa situation personnelle dans le cadre de nouvelles poursuites en cours à son encontre.

m. Le 24 juin 2021, l'Office a établi et adressé à A______, qui les a reçus le 28 juin 2021, deux actes de défaut de biens après saisie au sens de l'art. 149 LP, l'un dans le cadre de la poursuite N° 1______ et le second dans le cadre de la poursuite N° 2______. Selon ces documents, le produit des poursuites était nul et le découvert s'élevait en conséquence à 122'329 fr. 80 dans la poursuite N° 1______ et à 8'490 fr. 90 dans la poursuite N° 2______.

B. a. Par acte adressé le 6 juillet 2021 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre les actes de défaut de biens du 24 juin 2021, concluant à leur annulation, à ce qu'il soit procédé à une saisie complémentaire sur "les montres" ou à ce que des renseignements circonstanciés soient donnés, à la réalisation de la marque "G______" et à ce que des renseignements détaillés sur les revenus et charges du débiteur lui soient donnés. A l'appui de ces conclusions, la Banque a relevé qu'en l'état l'Office n'avait pas donné suite à sa requête de saisie complémentaire. La marque "G______" n'avait pas été réalisée et le débiteur n'avait pas été réentendu suite à la faillite de son employeur, en violation de l'art. 93 al. 3 LP.

b. Dans ses observations du 1er septembre 2021, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Le débiteur avait apparemment quitté la Suisse et ne répondait pas aux courriels qui lui étaient adressés. Les trois montres remises à l'Office cantonal des faillites dépendaient de la faillite de la société H______ SARL. S'agissant de celles mentionnées dans le procès-verbal d'audition de C______ par la police vaudoise, elles étaient saisies dans le cadre d'une enquête pénale, la plaignante pouvant s'adresser à cet égard au procureur vaudois la conduisant.

Dans ses observations complémentaires du 3 février 2022, faisant suite à une ordonnance d'instruction rendue le 19 janvier 2022 par la Chambre de surveillance, l'Office a exposé les recherches effectuées en relation avec la montre E______, numéro de série 4______ (cf. ci-dessus let. A.f), lesquelles l'avait conduit à considérer que cet actif ne faisait plus partie du patrimoine du débiteur et donc à ne pas le mentionner dans le procès-verbal de saisie rectifié du 13 novembre 2020. Une décision – depuis lors entrée en force – avait par ailleurs été rendue concernant les saisies exécutées en mains des sociétés F______ SA, H______ SARL et I______ SA, la seconde étant le dernier employeur connu du débiteur.

S'agissant de la marque "G______", l'Office devait encore procéder à son estimation, ce qui s'annonçait coûteux, puis, selon l'estimation retenue, la réaliser.

En définitive, les actes de défaut de biens délivrés le 24 juin 2021 seraient annulés dans la mesure où un actif saisi (la marque "G______") n'avait pas été réalisé.

c. Par détermination du 16 février 2022, la plaignante a maintenu sa plainte en tant qu'elle portait sur l'absence d'investigations sur la situation financière du poursuivi postérieurement à la faillite de son employeur d'une part et, d'autre part, sur l'absence de saisie complémentaire portant sur les montres trouvées par la police vaudoise en possession du débiteur.

d. La cause a été gardée à juger le 8 mars 2022.

EN DROIT

1. 1.1.1 La voie de la plainte au sens de l'art. 17 LP est ouverte contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al.1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF
136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).

Par mesure de l'Office, il faut entendre tout acte matériel d'autorité accompli par l'Office en exécution d'une mission officielle dans une affaire concrète, ayant pour objet la continuation ou l'achèvement de la procédure d'exécution forcée et produisant des effets externes (ATF 116 III 91 consid. 1). Ne constituent en conséquence pas des mesures sujettes à plainte la simple confirmation d'une décision déjà prise, une communication de l'Office sur ses intentions ou un avis (Erard, in CR LP, 2005, n° 10 ad art. 17 LP).

1.1.2 La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP). Une augmentation des conclusions après l'expiration du délai de plainte n'est pas admissible (arrêt du Tribunal fédéral 5A_326/2015 du14 janvier 2016 consid. 2.2).

A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3).

1.1.3 L'exercice d'une voie de recours suppose l'existence d'un intérêt actuel à obtenir l'annulation ou la modification de la décision contestée. Cet intérêt doit exister tant au moment du dépôt du recours qu'à celui où la décision tranchant le sort du recours est tranchée (ATF 139 I 206 consid. 1.1). Si cet intérêt existe lors du dépôt du recours mais disparaît pendant la durée de la procédure de recours, la cause doit être radiée du rôle car devenue sans objet (ATF 137 I 23 consid. 1.3.1).

De pratique constante, la plainte n'est recevable que si elle permet d'atteindre un but concret sur le plan de l'exécution forcée, mais non si la mesure critiquée est irrévocable, lors même qu'une cause de nullité est alléguée (ATF 99 III 58 consid. 2, JT 1974 II 71 et les arrêts cités; GILLIERON, op. cit., n. 156 ad art. 17 LP). Il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur des plaintes formulées dans le seul but de faire constater qu'un organe de poursuite a, en agissant ou en omettant d'agir, violé ses obligations (ATF 99 III 58).

1.1.4 En cas de plainte, l'office peut, jusqu'à l'envoi de sa réponse, procéder à un nouvel examen de la décision attaquée; s'il prend une nouvelle mesure, il la notifie sans délai aux parties et en donne connaissance à l'autorité de surveillance (art. 17 al. 4 LP). La nouvelle décision ou mesure se substitue à l'ancienne. L'autorité de surveillance doit néanmoins examiner la plainte, à moins que la décision de reconsidération n'ait rendu sans objet les conclusions de cette dernière (ATF
126 III 85 consid. 3).

1.1.5 Il y a retard non justifié, au sens de l'art. 17 al. 3 LP, lorsqu'un organe de l'exécution forcée n'accomplit pas un acte qui lui incombe – d'office ou à la suite d'une requête régulière – dans le délai prévu par la loi ou dans un délai raisonnable compte tenu de l'ensemble des circonstances (Cometta/Möckli, in BAK SchKG I, 2ème édition, 2010, n° 31-32 ad art. 17 LP; Dieth/Wohl, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, n° 32 ad art. 17 LP; Erard, in CR LP, 2005, n° 55 ad art. 17 LP).

Il y a déni de justice au sens de l'art. 17 al. 3 LP lorsque l'Office (ou un autre organe de l'exécution forcée) refuse de procéder à une opération alors qu'il en a été régulièrement requis ou qu'il y est tenu de par la loi. Cette disposition vise ainsi le déni de justice formel – soit la situation dans laquelle aucune mesure n'est prise ou aucune décision rendue alors que cela devrait être le cas – et non le déni de justice matériel – soit la situation dans laquelle une décision est effectivement rendue, mais qu'elle est arbitraire (Pauline Erard, in CR LP, 2005, n° 52 à 54 ad art. 17 LP; Markus Dieth/Georg J. Wohl, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, n° 32 ad art. 17 LP). Il en découle qu'il ne peut en principe y avoir déni de justice au sens de l'art. 17 al. 3 LP lorsqu'une mesure ou une décision susceptible d'être attaquée dans le délai de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP a été prise par l'Office, quand bien même elle serait illégale ou irrégulière (ATF 97 III 28 consid. 3a; Erard, op. cit., n° 53 ad art. 17 LP).

1.2 La plainte est en l'occurrence dirigée contre plusieurs actions ou omissions de l'Office.

1.2.1 La plainte est formellement dirigée contre les actes de défaut de biens délivrés le 24 juin 2021. Respectant les exigences de forme prévues par la loi, déposée en temps utile et émanant d'une partie à la procédure de poursuite susceptible d'être lésée dans ses intérêts légitimes par ces actes, elle est, sous cet angle, recevable.

Dans le délai que lui avait imparti par la Chambre de surveillance pour déposer ses observations complémentaires, l'Office a toutefois décidé, comme le lui permettait l'art. 17 al. 4 LP, de reconsidérer sa décision et donc d'annuler les actes de défaut de biens contestés de manière à estimer puis le cas échéant réaliser le droit à la marque saisi. La plainte est donc devenue sans objet sur ce point, ce qui sera constaté.

1.2.2 La plaignante reproche ensuite à l'Office de ne pas avoir procédé en application de l'art. 93 al. 3 LP à une révision de la situation financière du débiteur alors même que celle-ci s'était modifiée du fait de la faillite de son employeur. Dans la mesure où il est ainsi reproché à l'Office de ne pas avoir procédé à une mesure qui lui incombait, le grief, qui n'est pas formellement dirigé contre les actes de défaut de biens du 24 juin 2021, relève du retard non justifié ou du déni de justice, avec pour conséquence qu'il pouvait être soulevé en tout temps (art. 17 al. 3 LP).

La plainte est cependant irrecevable de ce point de vue, pour un autre motif.

Dès lors en effet que la durée maximum de la saisie portant sur les revenus du débiteur a expiré le 5 mai 2021, soit antérieurement au dépôt de la plainte, une éventuelle admission de cette dernière n'améliorerait en rien la situation de la plaignante sous l'angle de l'exécution forcée : la saisie ordonnée ne pourrait en effet être adaptée a posteriori et une nouvelle saisie de revenus ne pourrait être ordonnée (art. 93 al. 2 LP).

1.2.3 Il est enfin reproché à l'Office de ne pas avoir procédé à une saisie complémentaire sur les cinq montres trouvées en possession du débiteur par la police vaudoise.

Là encore, le grief porte sur l'omission de l'Office d'exécuter une mesure qui, selon la plaignante, lui aurait incombé. Dans la mesure où, dans ses observations, l'Office a exposé les raisons pour lesquelles il avait renoncé à donner suite à la requête de la plaignante tendant à l'exécution d'une saisie complémentaire sur ces objets, il faut considérer que la plaignante invoque de ce point de vue un déni de justice.

Elle est dans cette mesure recevable, avec les restrictions suivantes.

Dès lors que la plaignante avait d'emblée – soit en même temps qu'elle avait sollicité la continuation de l'une des poursuites – signalé à l'Office l'existence de la montre E______, numéro de série 4______ supposée appartenir au débiteur puis, après la communication du procès-verbal de saisie du 25 juin 2020, s'était plainte de l'absence de mention de cet actif dans ledit procès-verbal, elle devait comprendre du fait que cette montre ne figurait à nouveau pas dans la liste des biens saisis selon le procès-verbal de saisie rectifié du 3 novembre 2020 que l'Office, contrairement à sa requête expresse, n'entendait pas la saisir. Il lui appartenait dès lors, si elle entendait remettre en cause cette décision, de le faire par le dépôt en temps utile d'une plainte contre le procès-verbal de saisie rectifié. A défaut d'une telle plainte, la décision prise au moment de l'établissement de ce second procès-verbal de saisie par l'Office ne peut plus être contestée aujourd'hui par la voie d'une plainte pour déni de justice.

L'Office a par ailleurs fait savoir à la plaignante, par courrier du 22 février 2021, qu'il n'entendait pas procéder à la saisie des trois montres remises par le débiteur à l'Office cantonal des faillites au motif qu'elles tombaient dans la masse en faillite de la société H______ SARL. Faute d'avoir contesté en temps utile cette décision, la plaignante ne peut plus le faire aujourd'hui par le biais d'une plainte pour déni de justice.

1.2.4 En résumé, la plainte est irrecevable en tant qu'elle porte sur l'absence de révision de la situation financière du débiteur en application de l'art. 93 al. 3 LP, sans objet en tant qu'elle porte sur l'annulation des actes de défaut de biens du 24 juin 2021 ainsi que l'absence de réalisation de la marque "G______" et recevable en tant qu'elle porte sur le refus de l'Office de procéder à une saisie complémentaire sur les montres trouvées en possession du débiteur par la police vaudoise.

2. La plaignante, se référant expressément à l'art. 115 al. 3 LP, reproche à l'Office de ne pas avoir procédé à une saisie complémentaire sur les cinq montres découvertes le 23 septembre 2020 par la police vaudoise en possession du débiteur, lesquelles paraissent faire actuellement l'objet d'un séquestre pénal dans le cadre d'une procédure pénale conduite dans le canton de Vaud.

2.1.1 Selon l'art. 115 al. 2 LP, le procès-verbal de saisie tient lieu d'acte de défaut de biens provisoire lorsque les biens saisissables sont insuffisants d'après l'estimation. Cet acte de défaut de biens provisoire permet notamment au créancier d'exiger, dans le délai d'une année prévu par l'art. 88 al. 2 LP, la saisie de biens nouvellement découverts (art. 115 al. 3 LP).

La saisie complémentaire prévue par l'art. 115 al. 3 LP revêt un caractère indépendant. Elle doit être requise par écrit, et son exécution devra en principe être précédée de la communication d'un avis de saisie (Jeandin, in CR LP, N° 15 ad art. 115 LP; Jent-Soerensen, in BSK SchKG I, 3ème édition, 2021, N° 17a ad art. 115 LP). Elle ne profite qu'au créancier requérant, sous réserve du droit de participation d'autres créanciers en mesure de requérir la saisie (mêmes références).

Au sens de l'art. 115 al. 3 LP, les biens nouvellement découverts comprennent tant les biens dont l'existence était ignorée lors de l'exécution de la saisie que ceux acquis depuis lors par le débiteur (Jent-Soerensen, op. cit., N° 19 ad art. 115 LP).

2.1.2 Seuls peuvent être saisis les biens appartenant au débiteur, respectivement les droits dont il est titulaire (ATF 135 III 663 consid. 3.2.1). Lorsque l'appartenance d'un actif est litigieuse, il n'appartient toutefois pas à l'Office de statuer sur ce point; dans une telle hypothèse, il devra au contraire saisir cet actif en dernier lieu (art. 95 al. 3 LP) et, s'il le saisit, mentionner les prétentions des tiers (art. 106 al. 1 LP). Ce n'est que si le bien concerné n'appartient manifestement pas au débiteur, ou lorsque le créancier poursuivant lui-même indique qu'il n'appartient pas au débiteur, que l'Office devra s'abstenir de le saisir (Winkler, in Kommentar SchKG, 4ème édition, 2017, N° 9 ad art. 92 LP; Kren Kostkiewicz, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, N° 3 ad art. 92 LP).

2.2.1 Il résulte en l'espèce du dossier que les biens saisissables mentionnés dans le procès-verbal de saisie rectifié du 13 novembre 2020 étaient, selon leur estimation, insuffisants pour couvrir les montants réclamés dans le cadre des poursuites participant à la saisie. Ledit procès-verbal de saisie valait donc acte de défaut de biens provisoire au sens de l'art. 115 al. 2 LP, ce qui ouvrait aux créanciers participant à la saisie la possibilité de requérir, dans le délai d'une année prévu par l'art. 88 al. 2 LP, la possibilité de requérir une saisie complémentaire portant sur des biens nouvellement découverts. Cette possibilité est au demeurant expressément mentionnée à la page de garde du procès-verbal de saisie.

Il ressort de même du dossier que la plaignante a fait usage de cette possibilité en requérant de l'Office, par lettre du 2 décembre 2020, qu'il procède, en relation avec les poursuites N° 1______ et 2______, à la saisie de diverses montres dont l'existence était ignorée lors de l'exécution de la saisie.

Cette requête était tardive en tant qu'elle concernait la poursuite N° 1______ : le commandement de payer établi dans cette poursuite a en effet été notifié le 11 septembre 2017 et l'opposition formée par le débiteur écartée par jugement du 10 mai 2019, de telle sorte que le délai d'une année prévu par l'art. 88 al. 2 LP avait déjà expiré au moment de la requête de saisie complémentaire.

Il n'en va toutefois pas de même de la poursuite N° 2______, dans laquelle le commandement de payer a été notifié le 24 octobre 2019 et le délai de l'art. 88 al. 2 LP suspendu du 4 novembre 2019 au 9 mars 2020 pendant la durée de la procédure sommaire de mainlevée.

Les actifs dont la plaignante a sollicité la saisie complémentaire doivent par ailleurs être qualifiés de nouvellement découverts au sens de l'art. 115 al. 3 LP. C'est en particulier le cas de la montre – qualifiée par le débiteur de prototype non vendable – dont ce dernier a indiqué à la police vaudoise qu'elle lui appartenait, puisqu'il avait omis de déclarer ce bien à l'Office au moment de l'exécution de la saisie. Il en va de même des trois montres dont il a indiqué qu'elles appartenaient à des clients. La cinquième montre prise sous sa garde par la police vaudoise, dont le débiteur a indiqué qu'elle appartenait à la société I______ SA, pourrait pour sa part être celle (E______, numéro de série 4______) dont la plaignante avait d'emblée sollicité la saisie mais que l'Office avait renoncé à saisir au motif qu'elle avait été cédée à ladite société. Le fait que cette dernière ait été radiée du Registre du commerce la veille de la requête de saisie complémentaire, avec pour conséquence qu'elle ne peut en principe plus être titulaire de droits ou d'obligations, constitue toutefois un élément nouveau ignoré lors de l'exécution de la saisie, permettant de considérer cet actif comme nouvellement découvert.

La plaignante était donc en droit, dans le cadre de la poursuite N° 2______, de requérir la saisie complémentaire des cinq montres mentionnées dans le procès-verbal d'audition de la police vaudoise du 23 septembre 2020.

2.2.2 Il n'apparaît enfin pas, à tout le moins en l'état de la procédure, que les actifs dont la saisie complémentaire a été requise seraient insaisissables.

Le fait qu'ils fassent actuellement l'objet d'un séquestre pénal est certes de nature à paralyser la procédure d'exécution forcée. Il ne constitue toutefois pas un empêchement à la saisie, laquelle peut être exécutée en mains du Ministère public vaudois et sous réserve de l'issue de la procédure pénale en cours.

L'absence de toute valeur de réalisation de la montre dont le débiteur a admis qu'elle lui appartenait est pour sa part de nature à entraîner son insaisissabilité en application de l'art. 92 al. 2 LP. Elle n'est toutefois nullement établie à ce stade : c'est à l'Office qu'il incombera, le moment venu, d'estimer la valeur de réalisation de cet objet et de décider de sa saisissabilité dans le cadre d'une décision pouvant être contestée par la voie de la plainte.

Rien ne permet par ailleurs en l'état du dossier d'exclure que les trois montres dont le débiteur a indiqué qu'elles appartiendraient à des clients ne seraient pas en réalité sa propriété : conformément aux principes rappelés ci-dessus (consid. 2.1.2), elles sont donc en principe saisissables, l'art. 106 al. 1 LP étant toutefois applicable.

Enfin, le statut de la montre dont le débiteur a indiqué qu'elle avait été cédée à la société I______ SA est en l'état incertain au vu notamment de la radiation de cette société du Registre du commerce. Là encore toutefois, la propriété du débiteur sur cet actif ne peut être d'emblée écartée, dès lors notamment qu'il était vraisemblablement actionnaire de la société I______ SA et que les actifs non liquidés de cette dernière pourraient donc lui revenir.

Aucun des actifs dont la plaignante a requis la saisie complémentaire n'apparaît ainsi, en l'état du dossier, d'emblée insaisissable.

2.2.3 Il résulte de ce qui précède que, à réception de la requête de saisie complémentaire formée le 2 décembre 2020 par la plaignante, l'Office aurait dû, dans le cadre de la poursuite N° 2______ uniquement, procéder à la saisie complémentaire de tout ou partie (les art. 97 al. 2 et 95 al. 3 LP étant à cet égard applicables) des cinq montres prises sous sa garde par la police vaudoise, son omission à cet égard étant constitutive d'un déni de justice au sens de l'art. 17 al. 3 LP.

La plainte doit donc être admise dans cette mesure et l'Office sera invité à donner suite, dans le cadre de la poursuite N° 2______, à la requête de saisie complémentaire.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare irrecevable la plainte formée le 6 juillet 2021 par A______ contre les actes de défaut de biens, poursuites N° 1______ et 2______, délivrés le 24 juin 2021 par l'Office cantonal des poursuites en tant qu'elle vise l'omission de l'Office cantonal des poursuites de réviser la situation du débiteur en application de l'art. 93 al. 3 LP.

La déclare recevable pour le surplus.

Au fond :

Constate que la plainte est devenue sans objet en tant que la plaignante concluait à l'annulation des actes de défaut de biens délivrés le 24 juin 2021 et à la réalisation de la marque "G______".

Constate en tant que de besoin l'annulation desdits actes de défaut de biens.

Admet la plainte en tant qu'elle porte sur l'omission de l'Office cantonal des poursuites de donner suite, dans la poursuite N° 2______, à la requête de saisie complémentaire formée le 2 décembre 2020.

Invite en conséquence l'Office cantonal des poursuites à donner suite, dans le cadre de la poursuite N° 2______, à ladite requête de saisie complémentaire.

Rejette la plainte pour le surplus.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Ekaterine BLINOVA et
Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 


 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.