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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/873/2021

DCSO/318/2021 du 19.08.2021 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : PV d'inventaire; droit de rétention du bailleur; estimation de la valeur des biens inventoriés
Normes : LP.283.al1; LP.283.al3; CO.268ss; LP.97.al1; LP.97.al2; LP.276; LP.279.al2
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/873/2021-CS DCSO/318/21

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 19 AOÛT 2021

 

Plainte 17 LP (A/873/2021-CS) formée en date du 8 mars 2021 par A______ et B______, comparant en personne.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 19 août 2021
à :

-       A______ et B______

______

______ [GE].

- C______ GMBH

p.a. D______, gérante

______

______ [ZH].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ et B______ étaient conjointement locataires d'une arcade située au rez-de-chaussée de l'immeuble sis route 1______ [no.] ______, [code postal] E______ (Genève), ainsi que de plusieurs places de parking situées devant le même immeuble.

L'arcade était exploitée par A______, par le biais de F______ SA, société ayant son siège à Genève, dont la précitée est l'administratrice unique. Cette société a pour but, notamment, l'achat et la vente d'objets d'occasion.

Dans le courant du mois de septembre 2020, la société bailleresse, C______ GMBH, a résilié le contrat de bail avec effet au 31 octobre 2020 pour défaut de paiement du loyer.

b. Le 28 octobre 2020, C______ GMBH a adressé à l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) deux réquisitions de prise d'inventaire pour sauvegarde des droits de rétention, l'une à l'encontre de A______ (n° 2______) et l'autre à l'encontre de B______ (n° 3______), en qualité de débiteurs solidaires, portant sur un montant total de 69'090 fr. 30, soit 38'383 fr. 50 au titre des loyers échus au 28 octobre 2020 et 30'706 fr. 80 au titre des loyers à échoir jusqu'au 28 février 2021.

Le 4 novembre 2020, l'Office a informé C______ GMBH que ses réquisitions de prise d'inventaire étaient admises pour la somme de 38'383 fr. 50 et qu'elles étaient rejetées pour le surplus.

c. Le 29 octobre 2020, un huissier de l'Office s'est rendu dans l'arcade louée afin de procéder à l'inventaire des objets mobiliers s'y trouvant. Les débiteurs poursuivis étant absents, l'huissier s'est adressé à l'employé chargé de tenir la caisse, qui a contacté A______ par téléphone. L'huissier a expliqué à cette dernière que C______ GMBH avait déposé deux réquisitions de prise d'inventaire en vue de sauvegarder son droit de rétention et A______ s'est engagée à remettre à l'Office l'inventaire détaillé des marchandises garnissant l'arcade. L'huissier a fait le tour du magasin et procédé à l'inventaire général des biens s'y trouvant, à savoir de nombreux objets d'occasion proposés à la vente. Il a par ailleurs inspecté le véhicule parqué sur l'une des places de parking louées pour relever les kilomètres inscrits au compteur.

d. Par courriel du 30 octobre 2020, A______ a transmis à l'Office l'inventaire actualisé des marchandises garnissant l'arcade – réparties en plusieurs lots (bijoux/montres/accessoires, culture, discographie, habitat, informatique, jeux vidéo, musique/sono, son/image, sport, téléphonie, services) – et mentionnant un "prix d'achat" total de 74'383 fr. 61. Elle a précisé que B______ avait co-signé le contrat de bail à la demande de C______ GMBH, mais qu'il n'occupait aucune fonction administrative ou juridique au sein de la société F______ SA, "qui occup[ait] les locaux et à qui appart[enait] la marchandise".

e. Les procès-verbaux des inventaires nos 2______ et 3______ ont été adressés à C______ GMBH par plis recommandés du 18 décembre 2020 et celle-ci les a reçus le 23 décembre 2020. Ces procès-verbaux ont le même contenu : douze objets ou ensemble d'objets y sont inventoriés, pour une valeur totale estimée – par l'huissier ayant procédé à l'inventaire, après consultation du Service des ventes de l'Office – à 7'290 fr., soit environ 10% du prix d'achat mentionné dans l'inventaire établi par A______ le 30 octobre 2020 (cf. supra let. d). La liste des objets inventoriés est la suivante :

1/ 1 lot "bijoux, montres et accessoires", soit bijoux divers, argent, or, fantaisie, cassés, lunettes, sacs à main, porte-monnaie, montres : 1'500 fr.

2/ 1 lot "culture", soit jeux enfant, livres, livres anglais, livres de cuisine, mangas 70 fr.

3/ 1 lot "culture discographie", soit CD, DVD, Blu-Ray, vinyl 260 fr.

4/ 1 lot "habitat", soit gros et petit électroménager, jardinage, outillage, vaisselle, bibelots, déco

1'000 fr.

5/ 1 lot "informatique", soit PC de bureau, PC portables, tablettes, imprimantes, écrans, disques durs, clés USB 860 fr.

6/ 1 lot "jeux vidéo", soit consoles, jeux vidéo, manettes, figurines, accessoires 550 fr.

7/ 1 lot "musique et sono", soit accordéon G______, ampli guitare, ampli sono, batterie, câbles, accessoires éclairage/effet lumière, enceintes, guitare/ukulele, harmonica, haut-parleur, laser sono, lecteur CD DJ, machine à fumée/bulles, micros, percussions, synthétiseur, table de mixage, trompette/trombone, violon, violoncelle, alto 1'000 fr.

8/ 1 lot "son et image ", soit accessoires son & image, ampli hi-fi, appareil photo, automobile + accessoires, caméscope, casque, chaine hi-fi, haut-parleur, home cinéma, IPod, lecteur CD, DVD et Blu-Ray, magnétoscope, radio et TV 700 fr.

9/ 1 lot "sport", soit accessoires sport, casques, fitness, skate et rollers, skis, sports enfant, tennis, trottinettes, vélos de ville, vélos enfant, VTT 350 fr.

10/ 1 lot "téléphonie", soit accessoires téléphonie, chargeurs, GPS, montres connectées, téléphones fixes et portables 1'000 fr.

11/ 1 véhicule de livraison H______ [marque, modèle] 0 fr.

12/ 1 scooter I______ [marque, modèle] 0 fr.

Total : 7'290 fr.

f. Par plis recommandés du 29 décembre 2020, C______ GMBH a adressé à l'Office deux réquisitions de poursuite en réalisation de gage mobilier, portant chacune sur la somme de 38'383 fr. 50 (loyers échus de juin à octobre 2020), l'une à l'encontre de A______ (n° 4______), l'autre à l'encontre de B______ (n° 5______), en qualité de débiteurs solidaires, aux fins de valider les procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______.

L'Office a reçu ces réquisitions le 4 janvier 2021 et les a traitées le 5 janvier 2021. Le 8 janvier 2021, les commandements de payer, poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______, ont été notifiés aux débiteurs poursuivis qui ont formé opposition totale.

Le 12 janvier 2021, l'Office a transmis les exemplaires des commandements de payer frappés d'opposition à C______ GMBH qui les a reçus le 14 janvier 2021.

Le 22 janvier 2021, C______ GMBH a saisi le Tribunal de première instance de deux requêtes en mainlevée des oppositions formées aux poursuites nos 4______ et 5______.

g. Par courrier du 15 février 2021, A______ et B______, alors représentés par l'ASLOCA, ont informé l'Office qu'ils n'avaient pas eu connaissance des procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______ mentionnés sur les commandements de payer notifiés le 8 janvier 2021. L'Office était prié de leur remettre une copie de ces procès-verbaux dans les meilleurs délais.

h. Par courriel du 25 février 2021 adressé à l'ASLOCA, l'Office a précisé qu'il avait "malheureusement oublié" d'envoyer les procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______ à A______ et B______.

Afin de réparer cette omission, l'Office a communiqué lesdits procès-verbaux aux débiteurs poursuivis par plis recommandés du 24 février 2021, que ceux-ci ont retirés au guichet de la Poste le 26 février 2021.

i. Par courriel du 28 février 2021, l'ASLOCA a informé l'Office que A______ et B______ n'avaient eu d'autre choix que de restituer les locaux loués à C______ GMBH afin de réduire leur dommage, cette dernière continuant à leur facturer des indemnités pour occupation illicite. En conséquence, ils avaient été contraints de libérer l'arcade et d'entreposer les biens inventoriés dans un container; ces biens étaient tenus à disposition de l'Office qui pouvait venir les récupérer à sa meilleure convenance.

B. a. Par acte adressé au greffe de la Chambre de surveillance le 8 mars 2021, A______ et B______ ont formé une plainte au sens de l'art. 17 LP, concluant, principalement, à l'annulation des poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______, au motif qu'elles reposaient "sur une procédure viciée (vice dans l'établissement de l'inventaire, notification tardive d'inventaires, non introduction des mainlevées selon [l'art.] 153a al. 3 LP)". Subsidiairement, ils ont conclu à la rectification des procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______, en ce sens que la valeur des objets inventoriés devait être estimée au montant arrondi de 74'400 fr.

En substance, ils ont reproché à l'Office d'avoir tardé à leur communiquer les procès-verbaux d'inventaire et d'y avoir mentionné, de façon erronée, que l'huissier avait établi l'inventaire "le 30 octobre 2020 en présence d'employés". Selon eux, ce n'était pas l'huissier qui avait inventorié la marchandise entreposée dans l'arcade louée, mais A______ qui avait transmis un inventaire détaillé à l'Office par courriel du 30 octobre 2020. Le droit de rétention s'était quoi qu'il en soit éteint, dans la mesure où C______ GMBH n'avait pas démontré avoir requis la mainlevée des oppositions formées aux poursuites nos 4______ et 5______ dans le délai prévu par l'art. 153a al. 3 LP. En tout état, les biens inventoriés étaient revendiqués par F______ SA qui en était la propriétaire exclusive.

Subsidiairement, les plaignants contestaient la valeur d'estimation retenue par l'Office pour les objets inventoriés sous les chiffres 1 à 10 de l'inventaire. A cet égard, ils ont exposé que F______ SA avait pour habitude de racheter des articles de seconde main à des particuliers (ou à des entreprises) à la moitié de leur valeur d'occasion, à savoir au quart de leur valeur à neuf; les objets d'occasion rachetés par F______ SA étaient ensuite revendus le double du prix à la clientèle du magasin. En l'occurrence, l'inventaire du 30 octobre 2020 faisait état d'un prix d'achat de l'ordre de 75'000 fr., de sorte que le prix de vente escompté s'élevait au double de ce montant, soit à 150'000 fr. Dans la mesure où le prix d'achat mentionné dans l'inventaire "tenait déjà compte d'un abattement de 50% sur la valeur du marché de l'occasion", il était arbitraire d'estimer la valeur des objets inventoriés à 10% de ce prix, puisque cela revenait à sous-estimer le produit probable de leur réalisation.

b. Dans ses observations du 25 mars 2021, C______ GMBH a conclu au rejet de la plainte, exposant, pièces à l'appui, qu'elle avait requis la mainlevée des oppositions formées aux poursuites litigieuses en temps utile. Au surplus, l'Office disposait des connaissances nécessaires pour procéder à l'estimation des biens inventoriés et les plaignants ne fournissaient aucun élément de nature à remettre en cause cette estimation.

c. Dans son rapport explicatif du 30 mars 2021, complété le 26 avril 2021, l'Office a exposé les circonstances ayant entouré la prise d'inventaire effectuée le 29 octobre 2020 par l'huissier chargé du dossier (cf. supra let. A.c). L'Office a conclu au rejet de la plainte, en précisant que la décision d'estimer la valeur des objets inventoriés à 10% de leur valeur d'achat avait été prise en concertation avec le responsable du Service des ventes. Cette estimation était adéquate, dès lors qu'il était notoire que les biens vendus au terme d'une procédure d'exécution forcée subissaient une lourde dévaluation.

d. Les plaignants, à qui les déterminations de C______ GMBH et de l'Office ont été communiquées par courrier du 18 mai 2021, n'ont pas fait usage de leur droit à la réplique.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.


 

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'Office cantonal des poursuites qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'Office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.2 En tant qu'elle tend à l'annulation, respectivement à la rectification des procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______, la plainte a été déposée en temps utile et dans les formes prévues par la loi, par les débiteurs poursuivis – à savoir par des personnes lésées ou exposées à l'être dans leurs intérêts juridiquement protégés –, à l'encontre de mesures de l'Office sujettes à plainte. Elle est donc recevable à cet égard.

La question de savoir si la plainte a été formée en temps utile en tant qu'elle vise l'annulation des poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______ (les commandements de payer ont été notifiés aux plaignants le 8 janvier 2021) peut demeurer ouverte, la plainte étant en tout état mal fondée sur ce point (cf. infra consid. 2).

2. Selon les plaignants, la procédure de prise d'inventaire serait viciée à plusieurs égard. Ils soutiennent que les procès-verbaux d'inventaire n'ont pas été communiqués aux parties avec la célérité voulue et que C______ GMBH n'a pas requis la mainlevée des oppositions formées aux poursuites litigieuses dans le délai fixé à l'art. 153a al. 3 LP.

2.1 Selon l'art. 283 al. 1 LP, le bailleur de locaux commerciaux peut requérir l'office des poursuites, même sans poursuite préalable, de le protéger provisoirement dans son droit de rétention, tel que prévu par les art. 268 ss CO. A réception d'une réquisition de prise d'inventaire, l'office vérifie de manière sommaire si les conditions matérielles du droit de rétention sont réalisées (ATF 109 III 42 consid. 1). Il procède ensuite à un inventaire des objets saisissables se trouvant dans les locaux loués (art. 283 al. 3 LP), en appliquant par analogie les règles sur la saisie (Rohner, in KUKO SchKG, 2ème éd. 2014, n. 13 ad art. 283 LP) : il doit ainsi procéder à l'estimation de la valeur des objets inventoriés, si nécessaire avec l'aide d'experts (art. 97 al. 1 LP), ne peut inventorier plus d'objets qu'il n'est nécessaire pour couvrir la créance invoquée en poursuite (art. 97 al. 2 LP) et doit respecter l'ordre de la saisie prévu par l'art. 95 LP. Au contraire de la saisie, toutefois, la prise d'inventaire ne doit pas être préalablement annoncée au débiteur poursuivi, dont la présence n'est pas nécessaire (ATF 93 III 20 consid. 3). Si le débiteur est absent, l'office doit lui accorder ultérieurement la possibilité de prendre position quant au contenu de l'inventaire (STOFFEL/OULEVEY, in CR LP, 2005, n. 26 ad art. 283 LP).

Le procès-verbal d'inventaire doit être communiqué immédiatement, par application analogique de l'art. 276 LP, au créancier et au débiteur (Stoffel/Oulevey, in CR LP, 2005, n. 29 ad art. 283 LP). Cette communication, soumise aux exigences de forme de l'art. 34 LP, fait courir le délai de plainte et celui – de dix jours – imparti au créancier pour valider l'inventaire par l'introduction d'une poursuite en réalisation de gage (art. 283 al. 3 LP). Est abusif, à cet égard, et doit conduire à la révocation de la prise d'inventaire, le comportement de l'office des poursuites consistant, à l'instigation du créancier, à retarder la communication du procès-verbal d'inventaire de manière à prolonger les effets de la mesure (ATF 106 III 28 consid. 1b).

Lorsque le débiteur a fait opposition au commandement de payer, le créancier a dix jours – à compter de la date à laquelle le double du commandement de payer lui a été notifié – pour requérir la mainlevée. S'il n'obtient pas la mainlevée provisoire, le créancier a dix jours pour intenter l'action en reconnaissance de dette et/ou de son droit de rétention (art. 279 al. 2 LP par analogie; ATF 102 III 145 consid. 3a, JdT 1978 II 75; Stoffel/Oulevey, op. cit., n. 35 ad art. 283 LP).

2.2 Dans le cas d'espèce, l'Office a établi l'inventaire des biens entreposés dans l'arcade louée le 30 octobre 2020, après qu'un huissier se soit rendu sur place le 29 octobre 2020. Les procès-verbaux d'inventaire ont été adressés par l'Office à la créancière poursuivante – selon les formes prescrites par l'art. 34 LP – le 18 décembre 2020, soit environ un mois et demi après la prise d'inventaire. Un tel délai ne paraît pas excessif, même s'il ne répond pas à la définition d'immédiateté. Il sera rappelé à cet égard que les dispositions légales fixant aux autorités de poursuite des délais pour accomplir certains actes sont des prescriptions d'ordre, dont l'inobservation n'a en principe pas de conséquence sur la validité de l'acte (Gilliéron, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 5ème éd. 2012, § 430). C'est notamment le cas du délai ("sans retard" selon l'art. 114 LP) pour communiquer le procès-verbal de saisie (ATF 108 III 15) et de celui ("immédiatement" selon l'art. 276 al. 2 LP) pour communiquer le procès-verbal de séquestre (Stoffel/Chabloz, in CR LP, n. 18 ad art. 276 LP). Il faut admettre qu'il en va de même du délai pour communiquer le procès-verbal d'inventaire de l'art. 283 al. 3 LP, dès lors que, comme celle du procès-verbal de séquestre, cette communication a pour effet de faire courir le délai dont dispose le créancier pour valider par une poursuite la mesure conservatoire qu'il a obtenue (DCSO/148/2015 du 2 avril 2015 consid. 2.2).

A juste titre, les plaignants reprochent à l'Office d'avoir tardé à leur communiquer les procès-verbaux d'inventaire querellés. Celui-ci a d'ailleurs reconnu qu'il avait "malheureusement oublié" de faire le nécessaire à ce sujet, omission qu'il a rectifiée le 24 février 2021. Il convient néanmoins de relever que les plaignants ont été informés de l'existence des procès-verbaux d'inventaire le 8 janvier 2021 au plus tard (les commandements de payer, poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______, y font expressément référence), mais qu'ils n'ont interpellé l'Office à ce sujet que le 15 février 2021. De plus, aucun élément au dossier ne permet de retenir que l'Office aurait délibérément tardé à communiquer les procès-verbaux d'inventaire aux débiteurs poursuivis de manière à prolonger les effets de la mesure. Dans ces circonstances, le retard accusé par l'Office pour communiquer ces actes aux plaignants, certes regrettable, est resté sans effet sur la validité de la prise d'inventaire et sur celle des procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______.

Au surplus, C______ GMBH a validé la prise d'inventaire dans les dix jours suivant la communication des procès-verbaux d'inventaire, par le biais des poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______. Le délai prévu à l'art. 283 al. 3 LP a ainsi été respecté. De la même façon, C______ GMBH a sollicité la mainlevée des oppositions formées à ces poursuites dans les dix jours suivant la communication du double des commandements de payer frappés d'opposition, conformément l'art. 279 al. 2 LP applicable par analogie (l'art. 153a LP concerne les gages immobiliers).

Les plaignants reprochent encore à l'Office d'avoir indiqué, dans les procès-verbaux d'inventaire querellés, que la prise d'inventaire avait eu lieu "le 30 octobre 2020 en présence d'employés". Ce grief est dénué de portée. Les plaignants ne soutiennent pas que l'inventaire des biens figurant dans ces procès-verbaux serait incomplet ou inexact (par exemple parce que certains objets, non soumis au droit de rétention de la bailleresse, auraient été inventoriés à tort). Au reste, la prise d'inventaire n'a pas à être annoncée au débiteur et peut être effectuée hors sa présence. Il ressort des explications de l'Office – non remises en cause par les plaignants – que l'inventaire a été établi par l'huissier sur la base d'une inspection des locaux loués effectuée le 29 octobre 2020, d'une part, et sur la base de l'inventaire de la marchandise dressé par les plaignants eux-mêmes le 30 octobre 2020, d'autre part. L'on ne discerne pas en quoi cette façon de procéder serait préjudiciable aux intérêts des plaignants.

Il résulte des considérations qui précèdent que les procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______, à l'instar des poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______, ne sont affectés d'aucun vice justifiant leur annulation. Les conclusions principales des plaignants sont ainsi mal fondées.

3. A titre subsidiaire, les plaignants contestent l'estimation qu'a faite l'Office de la valeur de certains des biens inventoriés.

3.1 Conformément à l'art. 97 al. 1 LP, applicable à la prise d'inventaire au sens de l'art. 283 al. 3 LP, l'office des poursuites doit estimer la valeur des objets portés à l'inventaire et ne doit pas inventorier plus de biens qu'il n'est nécessaire pour garantir la prétention du créancier (ATF 112 III 75 consid. 1a, JdT 1988 II 105). Cette estimation est principalement destinée à fixer la mesure de la couverture et à orienter le créancier sur le produit prévisible de la réalisation (ATF 112 III 75 consid. 1a). Elle permet également d'informer les tiers, notamment les éventuels acquéreurs, en leur donnant une valeur de référence : elle ne permet toutefois en elle-même de tirer aucune conclusion sur le produit retiré d'une éventuelle réalisation future (ATF 129 III 595 consid. 3.1; FOEX, in CR LP, 2005, n. 14 ad art. 155 LP).

L'estimation des biens saisis doit être faite au moment de la saisie (respectivement de la prise d'inventaire). Elle devra correspondre à la valeur présumée de ces biens lors de la réalisation, soit à leur valeur vénale, et non à leur valeur de rendement ou d'exploitation ou encore à la valeur que pourrait en obtenir le débiteur en cas de vente volontaire (ATF 99 III 52 consid. 4b). S'il existe une valeur de marché, c'est elle qui sera retenue (De Gottrau, in CR LP, 2005, n. 6 ad art. 97 LP).

S'agissant de biens usuels, l'office peut les estimer lui-même et jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 120 III 79 consid. 2). Si le préposé ne dispose pas des connaissances spéciales nécessaires à l'estimation d'un bien saisi (ce qui vaut notamment et de manière générale pour les immeubles et les œuvres d'art), le recours à un expert s'impose en principe. Dans certains cas cependant, par exemple parce que l'expertise entraînerait des coûts disproportionnés ou prendrait trop de temps, une telle mesure peut s'avérer inutile ou déraisonnable : l'office doit alors s'en tenir à une estimation sommaire (De Gottrau, op. cit., n. 10 et 11 ad art. 97).

3.2 Dans le cas d'espèce, l'Office a procédé lui-même à l'estimation des objets inventoriés, à savoir des biens de consommation courante achetés d'occasion. Cette décision, à juste titre, n'est pas critiquée par les plaignants. En effet, ces objets ne présentent pas des caractéristiques telles que la détermination de leur valeur nécessiterait qu'il soit fait appel à un expert et, en tout état, une telle démarche aurait entraîné des coûts disproportionnés. L'Office est par ailleurs régulièrement amené à réaliser des objets de seconde main aux enchères par le biais de plateformes de vente en ligne (par exemple par le biais de J______.ch).

Se fondant sur son expérience de terrain, l'Office a estimé la valeur des objets inventoriés à 7'920 fr., soit à environ 10% du "prix d'achat" mentionné dans l'inventaire dressé par les plaignants le 30 octobre 2020. Ce faisant, l'Office a estimé ces biens en tenant compte, non pas de leur valeur réelle, mais de leur valeur probable de réalisation en cas de vente aux enchères forcée qui, comme le démontre la pratique, est souvent sensiblement inférieure à la valeur réelle. Cette façon de faire n'est pas critiquable. S'il ne doit pas inventorier plus de biens que nécessaire pour garantir la prétention du créancier (in casu, la prétention de C______ GMBH s'élève à 38'383 fr. 50), l'Office doit néanmoins faire preuve d'une certaine prudence et veiller à ne pas retenir une valeur d'estimation trop optimiste, faute de quoi le produit de réalisation risquerait de ne pas suffire pour désintéresser le créancier.

Dans leur plainte, les débiteurs poursuivis se limitent à critiquer le montant retenu par l'Office, sans fournir le moindre élément de nature à remettre en cause son estimation. Ils n'ont produit aucune facture ou justificatif susceptible d'étayer leur thèse, se bornant à renvoyer à un document établi par leurs soins et à substituer leur propre appréciation à celle de l'Office. Il sera par ailleurs relevé que l'estimation critiquée est seulement destinée à orienter la créancière poursuivante sur le montant prévisible qui pourrait être obtenu en cas de vente, sans avoir une valeur contraignante, puisque l'Office est de toute manière tenu de vendre les biens aux enchères au prix le plus haut possible.

Au vu de ce qui précède, le grief des plaignants à cet égard est infondé. La plainte sera donc rejetée dans la mesure de sa recevabilité.

3.3 Bien qu'aucun grief n'ait été soulevé par les plaignants sur ce point, la Chambre de céans précisera, à toutes fins utiles, que la revendication de F______ SA sur les objets inventoriés devra être traitée par l'Office conformément aux art. 106 ss LP, applicables par analogie à la prise d'inventaire.

4. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 lit. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 8 mars 2021 par A______ et B______ contre les procès-verbaux d'inventaire nos 2______ et 3______ et contre les poursuites en réalisation de gage mobilier nos 4______ et 5______.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Messieurs Luca MINOTTI et
Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF).
L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.