Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/367/2024

JTAPI/95/2024 du 05.02.2024 ( LVD ) , ADMIS

Descripteurs : MESURE D'ÉLOIGNEMENT(EN GÉNÉRAL);PROLONGATION;VIOLENCE DOMESTIQUE
Normes : LVD.8; LVD.11
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/367/2024 LVD

JTAPI/95/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 février 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant en son nom et celui de son enfant mineur B______, représentées par Me Yael AMOS, avocate, avec élection de domicile

 

contre

 

Monsieur C______

 


 

EN FAIT

1.             Par décision du 25 janvier 2024, le commissaire de police a prononcé une mesure d'éloignement d'une durée de dix jours à l'encontre de Monsieur C______, lui interdisant de s'approcher ou de pénétrer à l'adresse privée de Madame A______, située ______[GE], et de contacter ou de s'approcher de celle-ci et de leur enfant B______.

2.             Cette décision, prononcée sous la menace de la sanction prévue par l'art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et indiquant notamment que M. C______ devait, dans un délai de trois jours ouvrables, prendre contact avec l'association D______, dont les coordonnées étaient mentionnées, afin de convenir d'un entretien socio-thérapeutique et juridique, était motivée comme suit :

Description des dernières violences :

« Voies de fait (saisie du bras, fortement), menaces de mort et injures, en date du 23.01.2024.

Descriptions des violences précédentes :

Multiples voies de fait, menaces, injures, lésions corporelles simples, contrainte, vol et, de manière globale, une pression psychologique ayant notamment poussé Mme A______ à accepter des rapports sexuels non protégés, entre 2021 et 2023 ».

3.             L’intéressé n’a pas formé opposition à ladite mesure.

4.             Il résulte du rapport de renseignements établi par la police le 25 janvier 2024 que la veille, la police était intervenue au domicile de Mme A______ suite à un conflit entre cette dernière et M. C______, son ex petit-ami. Lors de l'arrivée de la patrouille ce dernier avait déjà quitté les lieux. Mme A______ avait alors expliqué aux policiers avoir été victime d'injures et de menaces et qu'elle souhaitait déposer plainte pour ces faits. Leur fille commune, âgée de 4 ans, était restée sur place avec ses grands-parents maternels. Dans sa plainte, Mme A______ était revenue sur de nombreux évènements de violence physique, verbale et psychologique qu'elle avait subis à Genève et au Danemark pendant et après sa relation avec M. C______ dont elle demandait l’éloignement.

Il ressortait de la recherche informatique effectuée sur les 36 derniers mois les évènements suivants :

- 04.12.2021 : Conflit (ID 1______) Les deux protagonistes s'étaient "secoués" mutuellement selon notre base de données. Pas de coups ni de plainte enregistrés ;

- 23.02.2023 : (ID 2______) Conflit, concernant la non remise de B______ par M.  C______ ;

- 07.03.2023: (ID 3______) Conflit - voie de fait. Plainte de Mme A______ contre M. C______ pour des motifs divers dont des violences conjugales. M. C______ a été entendu sur les faits ;

- 24.01.2024 à 12h54 (ID 4______) Main courante déposée au poste de Cornavin par M. C______ concernant l'évènement du 22.01.2024.

Mme A______ leur avait par ailleurs présenté une photo d'elle datant de novembre 2021 où elle présentait un hématome sous l'œil droit, qu’elle associait au coup porté par M. C______ avec le manche d’une hache en bois. Elle leur avait remis volontairement la hache avec laquelle elle avait été blessée ainsi qu’un taser.

La photo ainsi que divers documents donnés par la plaignante dont une vidéo envoyée par M. C______ où on le voyait dépecer un chevreuil, des captures d'écran de discussion WhatsApp, divers documents judiciaires d’affaires concernant M. C______ et un résumé en espagnol de neuf pages des violences subies étaient annexés au rapport.

5.             Il ressort, en substance, du procès-verbal d’audition de Mme A______ du 25  janvier 2024 qu’elle avait rencontré M. C______ en 2018. A sa connaissance, ce dernier avait eu des problèmes avec la justice au Danemark et en Argentine, notamment pour violences domestiques. Sa fille était née en Argentine le ______ 2020 et ils s’étaient installés à Genève en mai de la même année. A partir du mois de mars 2020, les violences avaient commencé, graduellement. Le 24 janvier 2024, ils avaient eu une dispute en lien avec la garde de B______. Elle avait eu très peur et avait pensé qu'il allait lui prendre à nouveau sa fille. Ils s’étaient bousculés légèrement. Il l’avait notamment prise par le bras. Cela avait été très bref mais il avait mis beaucoup de force. Il avait également essayé de prendre de force sa fille qui se trouvait dans les bras de son grand-père. Finalement il était parti de lui-même lorsqu'il l’avait vue appeler la police. Elle a détaillé les actes de violences physiques et verbales subis depuis novembre 2021. La violence avait progressé graduellement et elle avait demandé à maintes reprises à M. C______ de partir. Concernant B______, il lui avait notamment envoyé des vidéos violentes, d’animaux dépecés. En février 2023, il était parti avec elle au Danemark. Ils devaient revenir le 24 février 2023. Lorsqu’elle l’avait appelé la veille, il lui avait indiqué qu’il n’allait pas revenir. Elle avait immédiatement prévenu la police et s’était rendue au Danemark afin de récupérer sa fille. Elle avait dû loger chez lui et négocier pendant une semaine avant qu’il la laisse repartir avec sa fille. Elles étaient parvenues à rentrer en Suisse le 1er mars 2023. Elle avait alors constaté qu’il avait fait des démarches en vue de domicilier et scolariser B______ au Danemark. Suite à cela, ils avaient encore eu des différents en lien avec la garde de B______, M.  C______ déposant notamment plainte contre elle pour séquestration. B______ avait assisté à toutes leurs disputes. Elle était actuellement suivie par un psychologue.

Egalement entendu le même jour, M. C______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés. Il reconnaissait uniquement avoir insulté Mme A______ et avoir envoyé à sa fille la vidéo dans laquelle il dépeçait un chevreuil. Il n’y avait rien d’anormal à cela et les insultes avec son ex-compagne étaient réciproques. Il reconnaissait avoir détenu un taser lequel, qui ne fonctionnait pas, appartenait conjointement à Mme A______. Il lui avait effectivement donné un coup à l'œil en novembre 2021 avec le manche en bois de la hache mais cela avait eu lieu accidentellement. Il n’avait aucun souvenir concernant la blessure à l’œil visible sur la photo. Il ne souhaitait pas déposer plainte contre son ex-compagne. Il respecterait la mesure d’éloignement qui pourrait être prise à son encontre. Il ne souhaitait plus revoir son ex-compagne mais souhaitait pouvoir revenir voir sa fille. Il a remis deux vidéos de disputes avec Mme A______.

6.             Par acte du 2 février 2024, parvenu au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour, Mme A______, sous la plume d’un conseil, a demandé la prolongation de la mesure d'éloignement pour une durée supplémentaire de trente jours, en expliquant que, quand bien même M.  C______ serait reparti au Danemark, elle avait très peur qu’il revienne dans son appartement et des conséquences que cela entrainerait pour elle-même et sa fille. Elle avait été victime durant plusieurs années de violences psychologiques, physiques, sexuelles et économiques de la part de M. C______. Malgré la mesure d’éloignement, ce dernier avait tenté à trois reprises de la contacter ce qui tendait à démontrer la propension de l’intéressé à ne pas respecter les interdictions qui lui étaient faites. Ses craintes étaient renforcées par les deux tentatives préméditées de M. C______ d’enlever B______ et les menaces de mort formulées. Le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) était au courant de la situation et un rapport serait prochainement rendu s’agissant des droits de l’intéressé sur sa fille. Elle envisageait enfin de déposer des mesures complémentaires devant le juge civil aux fins de protéger B______ des agissements de son père.

Elle a joint un chargé de pièces, dont une ordonnance du TPAE du 8 mars 2023, des documents relatifs à l’incident survenu en février/mars 2023, des captures d’écran des appels reçus de ce dernier entre le 19 et le 27 janvier 2024 et un courrier du TPAE du 26 janvier 2024.

7.             Vu l'urgence, le tribunal a informé les parties par téléphone du 2 février 2024 de l'audience qui se tiendrait le 5 février 2024.

M. C______ ayant, dans ce cadre, indiqué qu’il se trouvait au Danemark et ne pourrait pas être présent, mais qu’en tout état il ne s’opposait pas à la prolongation de la mesure d’éloignement en ce qui concernait Mme A______, le tribunal l’a invité à lui confirmer sa position par écrit.

8.             M. C______, excusé, ne s’est pas présenté à l’audience du 5 février 2024.

Lors de celle-ci, la Présidente a informé Mme A______ avoir contacté l’intéressé pour lui faire part de la demande de prolongation de la mesure d'éloignement et lui avoir offert la possibilité de se déterminer, par écrit, dès lors qu’il lui avait indiqué se trouver au Danemark et ne pas pouvoir être présent.

Mme A______ a expliqué que M. C______ lisait ses courriels mais qu’il ne répondait pas aux demandes qui lui étaient faites. Il ne souhaitait pas être partie aux procédures car il pensait que, cas échéant, il serait condamné. Elle a confirmé sa demande de prolongation du 2 février 2024 pour l'ensemble des motifs qui y étaient invoqués. Sa demande concernait tant B______ qu’elle-même. S'agissant des motifs, elle a précisé que M. C______ ne l’avait pas contactée durant la mesure d'éloignement mais qu'il avait tenté de contacter B______. Cela faisait plusieurs années qu’elle et sa fille étaient victime d'abus et de violences de la part de M. C______. Elle avait très peur et paniquait à l'idée qu'il s'approche à nouveau d’elles car il l’avait menacée de mort et également de lui prendre sa fille, si elle agissait en justice contre lui. Il avait également menacé de tuer sa famille. M. C______ était un ex-militaire danois qui avait travaillé comme sniper en Afghanistan et en Irak. C'était un professionnel dans l'utilisation des armes et de la violence. Lorsqu'il avait cessé cette activité, il s'était consacré à des activités criminelles. Il avait notamment été condamné au Danemark pour vente de stupéfiants et en Argentine pour fraude à la carte de crédit. Actuellement, il faisait l'objet d'une procédure au Danemark car il avait perçu indûment des prestations de l'aide sociale. B______ avait assisté à leurs disputes et présentait des signes traumatiques, raison pour laquelle elle était actuellement suivie par une psychologue des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG). En raison du stress qu'elle avait subi et des tensions familiales, elle avait recommencé à faire caca dans ses culottes. Elle avait peur qu’elle meurt et ne voulait pas rester toute seule. Son père tentait de l'utiliser pour l'atteindre. Il avait essayé à plusieurs reprises de la lui prendre. Chaque fois que B______ parlait avec son père, elle se sentait très mal et finissait par pleurer. Elle ne savait pas ce qu'il lui racontait car ils se parlaient en danois. M. C______ utilisait ses conversations téléphoniques avec B______ pour lui faire passer des messages. Il lui demandait également de lui montrer avec la vidéo du téléphone l'intérieur de l'appartement et elle-même, pour la contrôler, ceci quelle que soit la situation dans laquelle elle se trouvait. La pièce 14 versée à la procédure illustrait les appels téléphoniques de M. C______ à B______. C’était elle était qui gérait le téléphone de B______. Il s'agissait d'un téléphone différent du sien, qui était utilisé pour les appels téléphoniques avec son père. B______ n'avait accès à ce téléphone que par son intermédiaire. Elle prenait note que le Tribunal ne pouvait régler la situation que sur le plan administratif et de manière temporaire. La présente procédure lui permettait toutefois d'envisager avec un peu plus de sérénité les procédures engagées sur les plans civil et pénal. Cela l’aiderait également à dormir avec plus de tranquillité. Elle sentait enfin que ses dénonciations avaient un impact et qu’elle pourrait commencer à envisager le retour à une vie normale.

Sur question de son conseil, la vidéo que M. C______ avait envoyé sur le téléphone de sa fille et le sien, le montrait en train de dépecer un animal. Elle pensait qu'il essayait par ce biais de lui montrer ce qu'il entendait lui faire. M.  C______ n'avait aucun filtre. Il lui avait demandé de montrer cette vidéo à sa fille, ce qui était inimaginable au vu de la brutalité des images. B______ avait trois ans lorsque cette vidéo lui avait été envoyée. C'était le jour de son anniversaire. Il ne lui avait donné aucune explication lors de l'envoi de cette vidéo. Il n'y avait ni contexte ni message l'accompagnant. Elle avait très peur lorsque M.  C______ faisait ce genre de choses, car il ne faisait pas la différence entre le bien et le mal. Cette vidéo durait 17 minutes et montrait le dépeçage de l'animal du début à la fin. On pouvait y constater les connaissances professionnelles de M. C______ dans l'utilisation d'armes blanches.

Le conseil de Mme A______ a renoncé à plaider et conclu à la prolongation de la mesure d'éloignement pour une durée de trente jours, se référant aux motifs et conclusions de sa demande du 2 février 2024.

9.             Par courriel du 5 février, à 10h16, M. C______ a, en substance, informé le tribunal qu’il n’avait pas pu venir au tribunal car il n’avait pas d’argent pour voyager mais surtout par qu’il ne se sentait pas en sécurité en Suisse, en raison des mensonges de son ex-compagne le concernant. Il n’entendait pas être envoyé en prison à cause d’elle. C’était lui que la police devait protéger. Tout ce qu’il demandait c’était d’avoir du temps avec sa fille, de pouvoir la voir et lui parler. Il ne souhaitait plus voir ni parler avec son ex-compagne. Sa fille n’avait pas à être punie du fait que Mme A______ et lui n’arrivaient pas à communiquer. B______ avait également besoin de son père. Il voulait juste du temps avec elle et demandait au tribunal de l’aider dans ce sens.

10.         Ce courriel a été transmis à Mme A______, pour information.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des demandes de prolongation des mesures d'éloignement prononcées par le commissaire de police (art. 11 al. 2 de la loi sur les violences domestiques du 16 septembre 2005 - LVD - F 1 30), sur lesquelles il est tenu de statuer avant l'échéance de la mesure, avec un pouvoir d'examen s'étendant à l'opportunité (art. 11 al. 3 LVD).

2.             Déposée en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, la demande de prolongation est recevable au sens de l'art. 11 al. 2 LVD.

3.             La LVD a pour but de contribuer à la protection de la personnalité dans le cadre familial et domestique en soutenant et en renforçant les efforts de lutte contre les violences domestiques (art. 1 al. 1 LVD).

Par « violences domestiques », la loi désigne une situation dans laquelle une personne exerce des violences physiques, psychiques, sexuelles ou économiques sur une autre personne avec laquelle elle est liée par un rapport familial, conjugal, de partenariat ou d'union libre, existant ou rompu (art. 2 al. 1 LVD).

Par « personnes concernées par les violences domestiques », la loi vise notamment les victimes et les auteurs de violences domestiques, les proches de ces personnes ainsi que les professionnels du domaine (art. 2 al. 2 LVD).

Selon l'art. 8 al. 1 LVD, la police peut prononcer une mesure d'éloignement à l'encontre de l'auteur présumé d'actes de violence domestique, si la mesure paraît propre à empêcher la réitération de tels actes.

Selon l'art. 8 al. 2 LVD, une mesure d'éloignement consiste à interdire à l'auteur présumé de

a) pénétrer dans un secteur ou dans des lieux déterminés ;

b) contacter ou approcher une ou plusieurs personnes.

La mesure d'éloignement est prononcée pour une durée de dix jours au moins et de trente jours au plus (art. 8 al. 3 LVD).

Elle peut être prolongée pour trente jours au plus. Depuis le prononcé initial de la mesure, sa durée totale ne peut excéder nonante jours (art. 11 al. 2 LVD).

En vertu de l'art. 12 LVD, la mesure d'éloignement est assortie de la menace des peines prévues à l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), qui prévoit que « celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende ».

Il ressort des travaux préparatoires relatifs à la révision de la LVD en 2010, que la volonté clairement exprimée par le législateur était de simplifier la loi, de manière à en favoriser une application plus régulière et effective. Dans ce sens, le nouvel art. 8 al. 1 LVD ne vise plus une mesure qui serait nécessaire pour écarter un danger relatif à des actes de violences domestiques, mais qui doit être simplement propre à empêcher la réitération de tels actes. En revanche, la loi continue à poser pour condition l'existence d'une présomption que des actes de violences domestiques ont été commis auparavant (rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le PL 10582, p. 11).

Ainsi que cela résulte des principes rappelés ci-dessus, les violences à l'origine de la mesure d'éloignement n'ont pas à être prouvées. Il suffit que l'on puisse présumer, sur la base de l'ensemble des circonstances, qu'elles ont eu lieu. La LVD est ainsi faite pour protéger la personne dont il paraît plausible qu'elle a été victime de telles violences, et constitue ainsi un cadre essentiellement préventif. Elle diffère sur ce point d'une procédure pénale, dont l'issue emporte des conséquences beaucoup plus sévères pour l'auteur, et qui est parallèlement soumise à des exigences de preuve plus strictes.

4.             En l'espèce, il apparait que les intéressés se déchirent au sujet de la garde de leur fille et que d’importantes tensions, qui existaient déjà au sein de leur couple avant leur séparation, perdurent entre eux. Mme A______ a expliqué en audience qu’elle et sa fille faisaient depuis plusieurs années l’objet de menaces, abus et actes de violence de la part de M. C______. Le tribunal a pu constater que Mme  A______ était très angoissée à l’idée qu’elle-même et/ou sa fille aient à nouveau des contacts avec M. C______, vu notamment les menaces de mort proférées par ce dernier. Elle a rappelé que l’intéressé avait tenté à deux reprises de lui prendre sa fille et confirmé que cette dernière, aujourd’hui âgée de quatre ans, avait assisté aux disputes de ses parents. Elle était très perturbée par toute cette situation et était suivie par une psychologue. Les déclarations de Mme A______ et les craintes qu’elle exprime apparaissent crédibles. L’on relèvera encore que lors de son audition par la police, M. C______ a admis avoir envoyé à sa fille la vidéo le montrant dépecer un animal, expliquant qu’il n’y voyait rien de problématique. Il ressort en outre de la pièce 14 qu’il a tenté de joindre sa fille malgré la mesure d’éloignement. Il apparait ainsi plausible que des actes de violence domestique pourraient se reproduire si les intéressés devaient être mis en présence.

Dans ces circonstances, vu en particulier le caractère récent des événements, de la situation visiblement conflictuelle et complexe dans laquelle les deux intéressés se trouvent, notamment s’agissant de la garde et des droits sur B______, de leurs domiciles séparés et de l’accord de M. C______ à rester éloigné de Mme  A______, pour trente jours supplémentaires, il apparait opportun de prolonger la mesure d'éloignement pour la durée requise. Dans la mesure où cette situation a clairement également eu des répercussions sur la jeune B______, il apparait, à ce stade, également opportun de prolonger la mesure d’éloignement concernant cette dernière.

Il sera toutefois rappelé à Mme A______ que la prolongation de la mesure d’éloignement ne peut être envisagée que sous l’angle de la prévention de violences domestiques et n’a pas pour vocation de se substituer aux mesures à prendre sur les plan civil et/ou pénal.

5.             En conclusion, le tribunal prolongera la mesure d'éloignement en cause jusqu'au 7  mars 2024 à 17h00, en ce qu'elle fait interdiction à M. C______ de s'approcher ou de pénétrer à l'adresse privée de Mme A______, située ______[GE], et de contacter ou de s'approcher de celle-ci et de leur enfant B______.

6.             Il ne sera pas perçu d'émolument ni alloué d’indemnité (art. 87 LPA).

7.             Un éventuel recours déposé contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif (cf. rapport du 1er juin 2010 de la Commission judiciaire et de la police du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi 10582-A du Conseil d'État modifiant la LVD, in MGC 2009-2010/IX A, D. Examen de détail, ad art. 11 al. 1 LVD).

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande formée par Madame A______ le 2 février 2024 tendant à la prolongation de la mesure d'éloignement prononcée par le commissaire de police le 25 janvier 2024 à l’encontre de Monsieur C______ ;

2.             l'admet ;

3.             prolonge la mesure d'éloignement pour une durée de 30 jours, soit jusqu'au 7 mars 2024 à 17h00, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, dont la teneur figure dans les considérants ;

4.             dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

6.             dit qu'un éventuel recours contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif.

 

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au commissaire de police et au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, pour information.

Genève, le

 

La greffière