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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/113/2022

JTAPI/958/2022 du 05.09.2022 ( ICCIFD ) , REJETE

REJETE par ATA/932/2023

Descripteurs : SOUSTRACTION D'IMPÔT;TENTATIVE(DROIT PÉNAL);PERSONNE MORALE;DOL ÉVENTUEL;AMENDE
Normes : LIFD.181.al1; LIFD.176.al6; LPFisc.74.al1; LPFisc.70
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/113/2022 ICCIFD

JTAPI/958/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 septembre 2022

 

dans la cause

 

A______, représentée par Me Sébastien DESFAYES, avocat, avec élection de domicile

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne des amendes pour tentative de soustraction d’impôt infligées à A______ (ci-après : la société ou la contribuable) pour la période fiscale 2009. Durant cette année, Monsieur B______ en était administrateur avec signature individuelle.

2.             Le 21 décembre 2010, la société a déposé sa déclaration fiscale 2009, qui faisait état d’un bénéfice de l’exercice de CHF 969'378.-. Dans une lettre annexée, elle a expliqué que ses comptes annuels 2009 comprenaient « les éléments de produits et charges des opérations effectuées sur les comptes auprès de la C______ & CIE SA depuis 2007. En effet, ces dernières ne figuraient pas dans les comptes annuels 2007 et 2008 ».

3.             Par lettre datée du 16 février 2011 remise en mains propres, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a informé la contribuable de l’ouverture de procédures en rappel et soustraction d’impôt pour l’ICC et l’IFD 2001 à 2006, ainsi que d’une procédure pénale pour tentative de soustraction d’impôt pour l’ICC et l’IFD 2007 à 2009. Des éléments de bénéfice et capital semblaient ne pas avoir été déclarés, notamment un compte bancaire auprès de la banque C______ & CIE SA. La contribuable était invitée à lui remettre divers documents.

4.             Sur demande d’explications et de justificatifs de l’AFC-GE du 15 mai 2012, la contribuable a expliqué, par courrier de son mandataire du 28 juin 2012, avoir effectué avec [sa société-sœur] D______ (dont M. B______ est administrateur unique depuis décembre 2004) des transactions concernant des actions E______ dans une proportion similaire. Elles étaient convenues que le résultat global des transactions portant sur ces actions serait partagé entre elles à part égales. Avant la participation à la perte de D______ de CHF 4'612'321.20, les résultats 2009 sur actions E______ des deux sociétés se présentaient comme suit (en euros) :

Contribuable

bénéfice

2'017'889

D______

perte

-4'201'740

Résultat global

perte

-2'183'851

Perte pour chaque société

-1'091'925

Elle avait dès lors comptabilisé un montant de EUR 3'109'815.- (EUR 2'017'889.- + EUR 1'091'925.-), soit CHF 4'612'321.-.

5.             Le 9 juin 2015, l’AFC-GE a notifié à la société des bordereaux de taxation 2009, en reprenant un montant de CHF 4'612'321.-, correspondant à la répartition non justifiée de la perte sur les actions E______, et de CHF 583'439.- pour des commissions payées dont la justification n’avait pas été apportée.

6.             Par décision sur réclamation du 23 novembre 2018, l’AFC-GE a modifié ces bordereaux en faveur de la contribuable en tenant compte d’une provision pour impôts sur l’ensemble des reprises de 2009.

7.             Le 23 novembre 2018, l’AFC-GE lui a notifié des bordereaux d’amendes 2009. En comptabilisant des charges non justifiées par l’usage commercial, elle avait commis une tentative de soustraction. En tenant compte de l’impact financier, leur quotité avait été fixée à 0.5 fois les impôts soustraits. Étant donné qu’il s’agissait d’une tentative, l’amende correspondait au tiers du supplément d’impôt.

8.             Par acte du 21 décembre 2018, sous la plume de son mandataire, la contribuable a interjeté recours contre la décision sur réclamation du 23 décembre précédent auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à l’annulation des reprises.

9.             Le même jour, la société a élevé réclamation à l’encontre des bordereaux d’amendes 2009 en concluant, préalablement, à la suspension de l’instruction de la réclamation jusqu’à droit jugé sur son recours contre les bordereaux de taxation et principalement, à l’annulation des pénalités.

10.         Dans sa réponse au recours datée du 28 février 2020, l’AFC-GE a conclu à une diminution de la reprise des commissions non justifiées de CHF 583'439.- à CHF 25'453.- et au rejet du recours pour le surplus.

11.         Par jugement du 1______ 2020 (JTAPI/_/2020), le tribunal a partiellement admis le recours de la contribuable, donné acte à l’AFC-GE de ce qu’elle acceptait de réduire à CHF 25'453.- le montant de la reprise relative aux commissions non justifiées concernant l’année fiscale 2009 et renvoyé le dossier à l’AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation ICC et IFD 2009. Enfin, il a confirmé la reprise de CHF 4'612'321.-.

12.         Par arrêt du 2______ 2021 (ATA/_/2021), entré en force, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours déposé contre le jugement du 23 novembre 2020.

La société reprochait à l’AFC-GE de ne pas avoir tenu compte de la perte de CHF 4'612'231.- liée aux actions E______ et invoquait avoir passé un accord oral avec D______ concernant la répartition de la perte.

La chambre administrative a retenu qu’en l’absence d’éléments démontrant l’existence d’un accord préalable entre ces deux sociétés, cette somme ne pouvait être prise en compte comme une perte.

13.         Le 15 juillet 2021, l’AFC-GE consécutivement à l’ATA/_/2021, a notifié à la société des bordereaux de taxation 2009 rectificatifs arrêtant les reprises dans son bénéfice à CHF 4'612'321.- et à CHF 25'453.-.

14.         Le 20 juillet 2021, l’AFC-GE a accordé un délai à la société pour compléter sa réclamation à l’encontre des bordereaux d’amendes 2009 au vu de l’arrêt de la chambre administrative précité.

15.         Le 16 septembre 2021, la contribuable a contesté avoir commis une tentative de soustraction d’impôt. La chambre administrative n’avait pas retenu que sa déclaration fiscale 2009 fût contraire à la vérité. Par ailleurs, rien ne démontrait qu’elle ait eu l’intention de transmettre des informations incomplètes à l’AFC-GE.

16.         Par décision du 10 décembre 2021, l’AFC-GE a maintenu les bordereaux d’amendes dont les montants étaient recalculés sur la base des taxations rectifiées.

Dans sa déclaration fiscale 2009, la contribuable n’avait effectué aucune remarque au sujet de la comptabilisation de la perte de CHF 4'612'321.-, laquelle n’avait pas été présentée de manière adéquate dans les états financiers. Ce montant était ressorti de la vérification de sa comptabilité 2009, lors de laquelle il avait été constaté que cette perte avait été compensée avec des produits, raison pour laquelle elle n’apparaissait pas dans les états financiers. Le compte de résultat affichait des postes dont le montant le plus important était un produit de CHF 1'827'194.-.

Compte tenu de l’importance de cette perte et des autres montants figurant dans les états financiers, le fait de dissimuler ce montant en le compensant découlait d’un comportement intentionnel. En outre, l’économie d’impôt était importante, puisque le bénéfice imposable redressé représentait presque cinq fois le bénéfice initial.

Sa bonne collaboration pouvait être considérée comme une circonstance atténuante permettant de diminuer la quotité des amendes, mais non de supprimer la tentative.

Le même jour, l’AFC-GE a notifié à la société des bordereaux d’amendes rectificatifs, reprenant la motivation de ceux datés du 23 novembre 2018.

17.         Par acte du 12 janvier 2022, la société, sous la plume de son mandataire, a interjeté recours devant le tribunal en concluant à l’annulation de la décision sur réclamation et des bordereaux d’amendes du 10 décembre précédent, le tout sous suite de frais et dépens.

Elle a repris les arguments exposés dans son complément de réclamation du 16 septembre 2021. Il aurait été impensable qu’elle dissimule intentionnellement des éléments imposables dans sa déclaration fiscale, alors que dans le même temps, elle annonçait que ses comptes annuels comprenaient des éléments de produits et charges des opérations effectuées auprès de la banque C______ & CIE SA qui ne figuraient pas dans sa comptabilité 2007 et 2008. Elle savait que cette divulgation entraînerait l’ouverture d’une procédure pour tentative de soustraction d’impôt.

18.         Dans sa réponse du 14 avril 2022, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours, se référant à sa décision du 10 décembre 2021.

19.         Par réplique du 10 mai 2022, la société a maintenu son recours. Il n’avait pas été démontré qu’elle aurait voulu tromper les autorités de taxation. L’AFC-GE ne pouvait pas simplement prononcer une amende sur la base de l’arrêt de la chambre administrative du 2______ 2021, qui ne faisait que constater l’échec de la preuve quant à l’existence d’un accord entre elle-même et D______. Faute d’intention, il n’existait aucune tentative de soustraction.

20.         Dans sa duplique du 3 juin 2022, l’AFC-GE a persisté dans les conclusions de sa réponse, laquelle procédait à une analyse complète des éléments objectifs et subjectifs de la tentative, contrairement à ce que soutenait la recourante.

21.         Le détail de l’argumentation des parties sera repris, ci-après, dans la mesure utile.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             La société conteste les amendes qui lui ont été infligées pour tentative de soustraction d’impôt concernant l’année fiscale 2009.

4.             Selon les art. 181 al. 1 LIFD et 74 al. 1 LPFisc, lorsque des obligations de procédure ont été violées ou qu'une soustraction ou une tentative de soustraction d'impôt a été commise au profit d'une personne morale, celle-ci est punie d'une amende.

5.             La tentative de soustraction se situe entre les actes préparatoires d'une soustraction, qui ne sont pas punissables, et la soustraction consommée, qui l'est. Le comportement illicite réprimé correspond, sur le plan objectif, à celui de la soustraction fiscale au sens des art. 175 LIFD et 69 LPFisc (arrêt du Tribunal fédéral 2C_874/2018 du 17 avril 2019 consid. 10.3). Dans la procédure de taxation, il suffit que le contribuable donne à l'autorité fiscale des renseignements inexacts, en particulier en fournissant une déclaration d'impôt incomplète et qui n'est pas conforme à la vérité au sens des art. 124 al. 2 LIFD et 26 al. 2 LPFisc. Pour qu'il y ait tentative, l'autorité de taxation doit découvrir que les renseignements fournis sont inexacts avant que la décision de taxation ne soit entrée en force, car, ensuite, la soustraction est consommée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.1).

6.             En l’espèce, la recourante conteste en premier lieu l’élément objectif de l’infraction. Elle nie avoir remis une déclaration fiscale 2009 contraire à la vérité, ce que, selon elle, la chambre administrative ne lui d’ailleurs a pas reproché dans son arrêt du 2______ 2021.

Dans son recours, la contribuable ne conteste plus le bien-fondé de la reprise de CHF 25'453.- à titre de commissions non justifiées, ni de CHF 4'612'321.-, représentant sa participation de la perte de D______. La chambre administrative a confirmé ce second redressement, retenant qu’en l’absence d’éléments démontrant l’existence d’un accord préalable entre ces deux sociétés et portant sur la répartition des pertes des actions E______, cette somme ne pouvait être prise en compte comme une perte.

Le tribunal ne voit pas de quelle manière la recourante aurait remis une déclaration fiscale exacte et conforme à la vérité, accompagnée de ses annexes (comme le prescrivent les art. 124 al. 2 et 125 al. 2 LIFD, ainsi que 26 al. 2 et 29 al. 2 LPFisc), en faisant valoir en déduction des commissions commercialement non justifiées, ainsi qu’en revendiquant une perte dont elle n’a pas été en mesure de démontrer le bien fondé. Elle n’a pas non plus attiré l’attention de l’AFC-GE sur le fait qu’elle-même et D______ étaient convenues oralement de prendre en charge à parts égales la perte sur les actions E______.

Partant, la société a, objectivement, commis une tentative de soustraction. Demeure à examiner l’élément subjectif.

7.             Lorsque la soustraction d'impôt est commise au profit une personne morale, la faute au sens des art. 175 al. 1 LIFD ne peut être qu'un attribut de la personne physique, soit d'un organe de la personne morale, dont le comportement doit être imputé à celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 2C_11/2018 du 10 décembre 2018 consid. 10.2).

8.             Sur le plan subjectif, la tentative de soustraction suppose, contrairement à la soustraction consommée, qui peut être commise par négligence, un agissement intentionnel de l'auteur. Il faut donc que le contribuable ait agi avec conscience et volonté. Le dol éventuel suffit. Il n'est toutefois pas aisé de distinguer le dol éventuel de la négligence consciente. Il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas où il se produirait. S'agissant de savoir si une tentative de soustraction est intentionnelle ou procède d'une négligence non punissable, l'importance des montants en cause joue un rôle non négligeable, dès lors que l'absence d'un montant sur la déclaration d'impôt peut d'autant plus difficilement échapper au contribuable que la somme est élevée. Selon la jurisprudence constante, la preuve d'un comportement intentionnel en relation avec une tentative de soustraction fiscale doit être considérée comme apportée lorsqu'il est établi de façon suffisamment sûre que le contribuable était conscient que les informations données étaient incorrectes ou incomplètes, ce qui doit s'établir en fonction de l'ensemble du comportement de l'intéressé lors de la déclaration. Si tel est le cas, il faut présumer qu'il a volontairement voulu tromper les autorités fiscales, ou du moins qu'il a agi par dol éventuel, afin d'obtenir une taxation moins élevée ; cette présomption ne se laisse pas facilement renverser, car l'on peine à imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu'il sait incorrectes ou incomplètes (arrêt du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.2 et les références citées).

S'agissant de savoir si une tentative de soustraction est intentionnelle ou procède d'une négligence, l'importance des montants en cause joue un rôle non négligeable, dès lors que l'absence d'un montant sur la déclaration d'impôt peut d'autant plus difficilement échapper au contribuable que la somme est plus élevée. Lorsqu'un montant est déduit à la fois dans la comptabilité commerciale et dans la déclaration d'impôt, il convient ainsi de le mettre en relation avec les autres sommes en jeu, afin de déterminer si le contribuable devait s'apercevoir de l'irrégularité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_528/2011 du 17 janvier 2012 consid. 2). 

9.             En l’espèce, la recourante nie avoir agi intentionnellement. Plus exactement, elle conteste implicitement qu’une faute intentionnelle puisse être reprochée à ses organes, en l’occurrence à M. B______.

À l’appui de son argumentation, elle se prévaut de la lettre annexée à sa déclaration fiscale 2009, dans laquelle elle a annoncé que sa comptabilité de cette année-là comprenait des éléments de produits et de charges concernant diverses opérations effectuées auprès de la banque C______ & CIE SA qui ne figuraient pas dans ses comptes 2007 et 2008. Elle en conclut qu’à la lecture de ces informations, l’AFC-GE ouvrirait immanquablement une procédure pour tentative de soustraction d’impôt concernant l’année 2009, ce qui exclut qu’elle ait volontairement transmis une déclaration fiscale 2009 inexacte. Faute de comportement intentionnel, aucune tentative de soustraction ne pouvait ainsi lui être imputée.

La recourante ne peut être suivie. En effet, le courrier susmentionné attire certes l’attention de l’autorité intimée à propos du fait que sa comptabilité 2007 et 2008 comporte des irrégularités en lien avec des opérations effectuées auprès de la banque C______ & CIE SA. Toutefois, ce document ne dit rien d’un accord qu’elle prétend avoir passé avec D______ au sujet de la répartition du résultat global des transactions portant sur les actions E______. L’intéressée n’a pas non plus joint de pièces faisant état de la comptabilisation du montant de CHF 4'612'321.-. Ce n’est que dans son courrier du 28 juin 2012, soit postérieurement à l’ouverture de la procédure de tentative de soustraction d’impôt, que la société a fourni des explications à l’AFC-GE à ce sujet. Ainsi, à la simple lecture de la lettre 21 décembre 2010, l’AFC-GE n’avait aucune raison de se douter que les comptes et la déclaration fiscale 2009 ne correspondaient pas à la réalité, étant rappelé que le fisc peut en principe considérer que la déclaration d'impôt est conforme à la vérité et complète ; il n'a pas l'obligation, en l'absence d'indice particulier, de se mettre à la recherche de renseignements supplémentaires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1225/2012 du 7 juin 2013 consid. 3.1). Partant, c’est à tort que la recourante estime que la rédaction de la lettre incriminée conduirait à l’ouverture d’une procédure pour tentative de soustraction d’impôt pour l’année 2009.

En outre, les montants ayant fait l’objet des reprises sont très importants au regard du résultat annuel 2009. En effet, tandis que le bénéfice ressortant du compte de profit et pertes s’élève à CHF 969'378.-, la perte qui n’a pas été admise en déduction se chiffre à CHF 4'612'321.-. À cette somme s’ajoute les commissions non justifiées commercialement, de CHF 25'453.-. L’on voit mal pour quelle raison la recourante aurait revendiqué ces déductions, si ce n’est afin de payer moins d’impôt.

M. B______, en qualité d’administrateur avec signature individuelle de la recourante et donc d’organe de celle-ci, devait nécessairement avoir connaissance de ces commissions et de cette perte, objets des reprises. Il peut d’autant moins ignorer le montant de ladite perte, que celle-ci découle de transactions menées conjointement entre la recourante et D______, société dont il est administrateur unique depuis 2004. Il en résulte qu’un faute intentionnelle – réalisée à tout le moins sous la forme du dol éventuel – doit être reprochée à M. B______, laquelle est imputée à la contribuable.

Tous les éléments constitutifs d’une tentative de soustraction étant réunis, demeure à examiner la quotité de la peine.

10.         En cas de tentative de soustraction, l'amende est fixée aux deux tiers de la peine qui serait infligée si la soustraction avait été commise intentionnellement et consommée (art. 176 al. 2 LIFD et 70 al. 2 LPFisc).

La soustraction consommée est réprimée par les art. 175 LIFD et 69 LPFisc.

En règle générale, l’amende est fixée au montant de l’impôt soustrait. Si la faute est légère, l’amende peut être réduite jusqu’au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD et 69 al. 2 LPFisc).

11.         La quotité de l’amende n’est pas fixée en fonction de l’intention de soustraire ou de la négligence qui peut être reprochée au contribuable mais de l’intensité de sa faute, qui doit être fixée en fonction de sa culpabilité (art. 106 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0). En revanche, le fait que l’auteur ait agi intentionnellement ou par négligence peut avoir une incidence sur l’intensité de la faute et, partant, sur la quotité de l’amende (ATA/513/2016 du 14 juin 2016 consid. 10). Il en découle qu’en présence d’une infraction intentionnelle sans circonstances particulières, l’amende équivaut en principe au montant de l’impôt soustrait. Ce dernier constitue donc le premier critère de fixation de l’amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d’augmentation de sa quotité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.2).

Selon l’art. 106 al. 3 CP, le juge fixe l’amende en tenant compte de la situation de l’auteur afin que la peine corresponde à la faute commise. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération à cet égard sont le montant de l’impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l’auteur. Le cadre de la peine fixé par l’art. 175 al. 2 LIFD ne peut en revanche pas être dépassé ni vers le haut ni vers le bas, à moins que l’on ne soit en présence de circonstances aggravantes ou atténuantes au sens de l’art. 48 CP (arrêt du Tribunal fédéral 2C_180/2013 du 5 novembre 2013 consid. 9.1).

12.         En l’espèce, la société ne fait valoir aucune argumentation relative à la peine. L’AFC-GE a tenu compte, à titre de circonstances atténuantes, de sa bonne collaboration, ainsi que de l’impact financier que représentaient les pénalités. Elle a ainsi ramené la quotité des amendes à 0.5 fois les impôts soustraits, puis l’a encore réduite à deux tiers pour tenir compte que la société avait commis une tentative de soustraction et non une soustraction consommée. Ce faisant, l’autorité intimée n’a pas fait preuve d’une sévérité excessive, étant relevé que la recourante ne peut se prévaloir d’autres circonstances atténuantes que celles évoquées ci-dessus.

En conséquence, les bordereaux d’amendes du 10 décembre 2021 sont confirmés.

13.         Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.

14.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 700.- versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

 


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 12 janvier 2022 par A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 10 décembre 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 900.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais de CHF 700.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Jean-Marie HAINAUT et Yuri KUDRYAVTSEV, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière