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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4233/2021

JTAPI/915/2022 du 05.09.2022 ( ICCIFD ) , ADMIS PARTIELLEMENT

ADMIS par ATA/789/2023

Descripteurs : SOUSTRACTION D'IMPÔT;DÉNONCIATION SPONTANÉE;MANDATAIRE;AMENDE;FAUTE
Normes : LIFD.175.al1; LIFD.175.al3; LPFisc.69.al1; LPFisc.69.al3
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4233/2021 ICCIFD

JTAPI/915/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 septembre 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Bénédict FONTANET, avocat, avec élection de domicile

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne une procédure de rappel d’impôt pour l’année 2008, ainsi que pour soustraction d’impôt pour les périodes fiscales 2010 à 2015, ouvertes à l’encontre de Monsieur A______.

2.             Du 12 avril 2006 au 21 juin 2019, le contribuable a été titulaire de l’entreprise individuelle « B______ » (ci-après : l’entreprise), ayant pour but : « achat et vente de perles fines, perles de cultures, pierres précieuses, diamants et bijoux anciens ». En 2019, son entreprise a été transformée en société anonyme.

3.             Lors d’un contrôle de l’entreprise mené en août et novembre 2017, l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a constaté que des écritures en lien avec les variations de stock de l’entreprise avaient été comptabilisées au bilan, sans influencer le compte d’achat, ni le compte de résultat. Des dépenses privées avaient également été prises en charge par l’entreprise.

4.             Par pli du 24 octobre 2017, adressé à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), le contribuable a expliqué qu’à la suite du contrôle effectué par l’AFC-CH, il avait mandaté un expert-réviseur afin de se mettre en règle avec la législation comptable. Celui-ci avait décelé des inexactitudes : la variation du compte stock avait été portée au crédit du compte capital et l’amortissement du stock n’avait pas été opéré.

Il s’est prévalu des dispositions sur la dénonciation spontanée non punissable.

5.             Le 29 janvier 2018, l’intéressé a exposé à l’AFC-GE qu’il ne disposait d’aucune formation dans le domaine de la bijouterie, ni dans le secteur commercial, ni dans celui de la comptabilité. Les erreurs comptables ayant conduit à une diminution de ses résultats d’exploitation avaient été enregistrées sur les conseils et les recommandations de son précédent mandataire, Monsieur C______.

Il a transmis un tableau détaillant annuellement le bénéfice et la fortune corrigés, ainsi que les anciens et nouveaux états financiers.

Le bénéfice net initial 2008 se montait à CHF 87'876.-. Au 31 décembre 2007 et 2008, le solde du compte stock s’élevait à respectivement CHF 205'000.- et CHF 255'000.-. À teneur des nouveaux états financiers, le bénéfice net 2008 se chiffrait à CHF 151'432.-, tandis que le solde du compte stock au 31 décembre 2008 s’établissait à CHF 312'119.-.

Après vérification des comptes stock et capital, l’expert-réviseur avait constaté qu’une partie du stock avait été comptabilisée au crédit du compte capital, alors que, conformément au droit comptable, une variation positive aurait dû être portée au crédit du compte de résultat. En outre, l’abattement fiscalement autorisé d’un tiers sur la valeur du stock n’avait pas été enregistré de manière régulière dans la comptabilité des exercices antérieurs, mais uniquement reporté dans les déclarations d’impôt. Une correction dans les comptes devait être effectuée.

6.             Le 3 octobre 2018, l’AFC-GE a ouvert à l’encontre du contribuable une procédure en rappel d’impôt, ainsi qu’une procédure en soustraction d’impôt pour les années 2008 à 2015. Les reprises seraient effectuées sur la base des éléments présentés. Elle renoncerait ou non à la poursuite pénale, suivant que les conditions sur la dénonciation spontanée non punissable étaient ou non remplies.

7.             Donnant suite à une demande de renseignements de l’AFC-GE du 12 novembre 2019, le contribuable a produit des justificatifs par pli du 16 décembre 2019.

8.             Le 4 février 2020, l’AFC-GE a informé le contribuable que l’AFC-CH lui avait adressé une communication selon laquelle des écritures relatives à la variation des stocks avaient été saisies de manière erronée et des dépenses privées (frais de bateau en 2014 et 2015, s’élevant à respectivement CHF 7'368.- et CHF 3'105.-) avaient été comptabilisées en charge dans les comptes commerciaux.

Les conditions d’une dénonciation spontanée n’étaient pas remplies. Les lettres des 24 octobre 2017 et 29 janvier 2018 faisaient suite au contrôle de l’AFC-CH. Or, la spontanéité faisait défaut lorsque le contribuable agissait sous la menace d’un tiers ou que les autorités fiscales étaient déjà en train d’enquêter sur son dossier.

Ses bénéfices se présentaient comme suit, étant précisé qu’une provision AVS de 10 % sur le bénéfice serait admise pour chaque période fiscale :

Bénéfice net

Avant correction

Après correction

2008

87'876

194'994

2009

94'819

123'690

2010

145'450

476'321

2011

181'438

378'979

2012

411'917

1'300'532

2013

455'268

1'545'219

2014

458'570

2'073'684

2015

543'709

1'826'906

Un délai a été accordé au contribuable pour faire valoir d’éventuelles observations.

9.             Par pli du 5 juin 2020 adressé à l’AFC-GE, le contribuable a contesté avoir adressé sa dénonciation de crainte que le contrôle de l’AFC-CH ne permette de découvrir les erreurs commises dans la comptabilité de son entreprise. Dès qu’il s’était aperçu que les conseils donnés par M. C______ contrevenaient au droit et à la bonne pratique, il en avait informé l’AFC-GE. Il n’aurait pu le faire auparavant, puisqu’il ne disposait pas de compétences dans le domaine comptable. Il collaborait depuis trois ans avec l’AFC-GE, notamment en lui transmettant tous les documents et en fournissant toutes les informations demandées.

Les montants retenus par l’AFC-GE dans sa lettre du 4 février 2020 étaient exacts, hormis pour l’année 2008, lors de laquelle le bénéfice imposable s’élevait à CHF 151'433.- et non à CHF 194'994.-.

10.         Le 16 novembre 2020, l’AFC-GE a informé le contribuable de la clôture des procédures de rappel et de soustraction d’impôt. Elle lui a notifié des bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2008 à 2015.

Elle a effectué des reprises au niveau de son bénéfice d’exploitation comme annoncé dans sa lettre du 4 février 2020. Le bénéfice net de l’année 2008, s’élevant à CHF 194'994.-, incluait une reprise de CHF 43'562.- intitulée : « supplément variation stock dans la mesure où la valeur déterminante du stock au 1er janvier 2008 se montait à CHF 205'000.- ». Le bordereau d’ICC 2012 faisait par ailleurs état du prélèvement de la contribution ecclésiastique, en CHF 31'386.45.

L’AFC-GE a également remis au précité des bordereaux d’amendes pour soustraction intentionnelle concernant les années 2010 à 2015 (pour l’ICC), ainsi que 2010 à 2014 (pour l’IFD). Les procédures s’étaient en revanche terminées sans pénalité concernant les périodes fiscales 2008 et 2009, l’action pénale étant prescrite. En déposant des états financiers erronés en lien avec son activité indépendante, le contribuable n’avait pas été imposé selon sa réelle capacité contributive. Au vu de l’importance des montants soustraits, la quotité des amendes avait été arrêtée à une fois les impôts éludés.

11.         Le 17 décembre 2020 le contribuable a élevé réclamation à l’encontre des bordereaux de rappel d’impôt 2008, ainsi que 2012 (ICC uniquement).

L’AFC-GE avait réintégré à tort dans son compte de profit et pertes 2008 un montant de CHF 43'562.-. L’incidence de la variation de stock avait eu lieu en 2007, étant rappelé que le droit d’ouvrir une procédure de rappel d’impôt pour cette année était prescrit. En outre, puisqu’il s’était toujours déclaré sans confession, c’était indûment que l’AFC-GE avait prélevé une contribution ecclésiastique en 2012.  

12.         Par une seconde réclamation datée du même jour, l’intéressé a contesté les bordereaux d’amendes.

Il remplissait les conditions pour bénéficier des dispositions relatives à la dénonciation spontanée non punissable. Il était faux de prétendre qu’il s’était dénoncé de crainte que le contrôle mené par l’AFC-CH ne permette de découvrir des erreurs dans sa comptabilité.

Subsidiairement, il n’avait pas commis de soustraction d’impôt, car il n’avait jamais cherché à induire les autorités fiscales en erreur. Ne disposant d’aucune formation professionnelle et ne maîtrisant ni la comptabilité ni la fiscalité, il avait confié la tenue de ses comptes et la gestion de ses affaires fiscales à un professionnel de confiance et à qui il avait donné tous les documents nécessaires. Aucune amende ne pouvait lui être infligée.

En tout état de cause, la quotité des amendes devait être réduite au minimum légal. Il s’était dénoncé spontanément, avait largement collaboré, n’avait jamais connu auparavant de problèmes fiscaux, ne maîtrisait pas la fiscalité et se retrouvait dans une situation financière catastrophique.

13.         Le 18 juin 2021, le contribuable a adressé à l’AFC-GE une attestation de M. C______ datée du 15 juin précédent dont il découlait que ce dernier avait toujours décidé seul la manière dont les variations du stock de l’entreprise avaient été comptabilisées.

Selon le contribuable, cette attestation constituait un élément supplémentaire confirmant que les conditions d’une soustraction d’impôt n’étaient pas remplies et qu’aucune amende ne pouvait lui être infligée. Subsidiairement, puisque le contrôle mené par l’AFC-CH portait sur les années 2012 à 2015, l’AFC-GE ne pouvait pas l’amender pour les périodes fiscales 2010 et 2011.

14.         Par décision du 10 novembre 2021, l’AFC-GE a admis partiellement les réclamations en ce sens qu’elle a annulé la contribution ecclésiastique pour l’année 2012 et ramené la quotité des amendes à une demi-fois les impôts soustraits. Pour le surplus, elle a rejeté les réclamations.

Lors du contrôle mené par l’AFC-CH, il avait été découvert que l’écriture relative à l’augmentation de stock entre le 1er janvier 2008 (CHF 205'000.-) et le 31 décembre de cette même année (CHF 255'000.-) avait été comptabilisée sans effet sur le compte de résultat. Il avait été nécessaire de procéder à une reprise afin de rendre la comptabilité 2008 conforme au droit commercial. En outre, il était également apparu que le prix d’acquisition du stock au 31 décembre 2008 se chiffrait à CHF 468'178.- et non à CHF 255'000.-. La valeur déterminante du stock à cette date, compte tenu d’un abattement de 1/3, s’élevait à CHF 312'119.-. Il était également nécessaire de procéder à une reprise pour provision injustifiée de CHF 57'119.- (CHF 312'119.- – CHF 255'000.-).

Lorsque le contribuable s’était dénoncé, le 24 octobre 2017, l’AFC-CH avait déjà connaissance des soustractions commises du fait du contrôle mené en août précédent. L’une des conditions cumulatives relatives à la dénonciation non punissable n’étant pas remplie, l’intéressé ne pouvait en bénéficier.

En ayant déposé des déclarations incomplètes ou inexactes, le recourant avait commis un acte illicite ayant généré une perte pour la collectivité. L’élément objectif d’une soustraction d’impôt était rempli. En tant qu’exploitant d’une entreprise, il devait forcément connaître précisément les marges réalisées dans le cadre des ventes effectuées. Ayant déclaré des bénéfices se montant en moyenne à 3.4 fois inférieurs à ceux effectivement réalisés, il devait nécessairement être conscient que ses déclarations fiscales étaient inexactes, ce malgré le fait qu’il ait mandaté un professionnel pour la tenue de sa comptabilité et qu’il ne dispose d’aucune connaissance en matière comptable et fiscale. Dès lors, il avait voulu tromper les autorités fiscales afin d’obtenir une taxation moins élevée ou avait, à tout le moins, agi par dol éventuel.

S’agissant de fixer la quotité des amendes, il convenait de prendre en considération, à titre de circonstances atténuantes, le repentir sincère de l’intéressé, son absence d’antécédents, ainsi que l’impact financier des pénalités sur l’avenir de l’entreprise. La quotité était ainsi ramenée à 0.5 fois les impôts soustraits.

Le même jour, l’AFC-GE a notifié au contribuable des bordereaux d’amendes rectificatifs 2010 à 2015 (pour l’ICC) et 2010 à 2014 (pour l’IFD), afin de tenir compte de l’admission partielle de ses réclamations.

15.         Par acte du 13 décembre 2021, le contribuable, sous la plume de son mandataire, a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant, principalement, à l’annulation de la décision du 10 novembre 2021 en tant qu’elle maintenait le rappel d’impôt pour l’année 2008 et à l’annulation des bordereaux d’amendes. Subsidiairement, il a sollicité la réduction de la quotité des amendes au minimum légal, le tout sous suite de frais et dépens.

Il a repris, en les développant, les arguments exposés dans ses précédentes écritures.

S’agissant de la dénonciation spontanée, le contrôle de l’AFC-CH ne concernait que les années 2012 à 2015, de sorte que l’AFC-GE n’était pas informée des erreurs figurant dans les comptes 2008 à 2011 de l’entreprise, qu’il avait intégralement portées à sa connaissance. Le rapport de l’AFC-CH était moins précis que sa dénonciation spontanée, laquelle avait seule permis de procéder au rappel d’impôt. Pour le surplus, il n’avait pas commis de soustraction d’impôt.

16.         Dans sa réponse du 15 mars 2022, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours reprenant, en les développant, les arguments exposés dans sa décision sur réclamation.

17.         Par réplique du 25 avril 2022, le contribuable a persisté dans les conclusions de son recours. L’AFC-GE ne s’était pas déterminée sur le fait que le contrôle de l’AFC-CH n’avait porté que sur les années 2012 à 2015, alors que sa dénonciation spontanée revenait également sur les périodes 2008 à 2011. Aucune faute ne pouvait lui être imputée, compte tenu des éléments relevés dans l’attestation rédigée par M. C______. À titre de circonstance atténuante, il convenait de tenir compte notamment des importants efforts qu’il avait déployés pour s’acquitter de sa dette fiscale dans les plus brefs délais.

18.         Dans sa duplique du 17 juin 2022, l’AFC-GE a persisté dans les conclusions de sa réponse, rappelant que le recourant répondait des fautes commises par son mandataire.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Le recourant conteste la reprise de CHF 43'562.- dans son bénéfice 2008, effectuée dans le cadre de la procédure de rappel d’impôt.

4.             Le 1er janvier 2010 est entrée en vigueur la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), dont l'art. 69 abroge les cinq anciennes lois sur l’imposition des personnes physiques (aLIPP-I à V).

L’art. 72 al. 1 LIPP prévoit que cette loi s’applique pour la première fois pour les impôts de la période fiscale 2010, et que les impôts relatifs aux périodes fiscales antérieures demeurent régis par les dispositions de l’ancien droit, même après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.

En l’espèce, la procédure de rappel d’impôt concerne la période fiscale 2008. Il s’ensuit cette question est régie par les dispositions de l’ancien droit (aLIPP-I à V).

5.             Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque là inconnus de l’autorité fiscale lui permettent d’établir qu’une taxation n’a pas été effectuée, alors qu’elle aurait dû l’être, ou qu’une taxation entrée en force est incomplète ou qu’une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou à un délit commis contre l’autorité fiscale, cette dernière procède au rappel de l’impôt qui n’a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 151 al. 1 LIFD ; art. 59 al. 1 LPFisc).

6.             Selon les art. 28 al. 1 LIFD et 3 al. 3 let. d aLIPP-IV dans leur teneur en vigueur au moment des faits, sont déductibles du revenu des contribuables exerçant une activité lucrative indépendante, les amortissements des actifs, justifiés par l’usage commercial, à condition que ceux-ci soient comptabilisés ou, à défaut de comptabilité tenue selon l’usage commercial, qu’ils apparaissent dans un plan spécial d’amortissement.

7.             Dans la mesure où un amortissement serait déclaré non admissible fiscalement, le montant non admis sera ajouté au revenu commercial imposable. La valeur fiscale du bien ayant fait l’objet d’un amortissement s’en trouvera augmentée d’autant (Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 5ème édition, 2021, § 312, p. 202).

8.             En l’espèce, le solde du compte stock résultant des premiers états financiers s’élève à CHF 255'000.-, alors qu’à teneur de la comptabilité transmise le 29 janvier 2018 (et acceptée par l’AFC-GE), ledit solde ascende à CHF 312'119.- (soit CHF 468'178.- sous déduction d’une provision de 1/3). Comptablement parlant, le contribuable a trop amorti son stock. Il convient dès lors d’effectuer une reprise au niveau de son bénéfice, correspondant à la différence entre le solde après l’amortissement admissible (CHF 312'119.-) et le solde après l’amortissement pratiqué initialement par l’intéressé (CHF 255'000.-), soit CHF 57'119.-.

Par ailleurs, le contribuable admet qu’au 31 décembre 2008, la réévaluation du compte stock a été effectuée en créditant le compte capital alors qu’elle aurait dû impacter le compte de résultat. Il convient par conséquent de procéder à un redressement au niveau de son bénéfice, qui s’établit par différence entre l’état du stock au 31 décembre 2008 et celui au début de cette même année, à savoir CHF 50'000.- (CHF 255'000.- – CHF 205'000.-).

Le total des deux reprises se chiffre à CHF 107'119.- (CHF 50'000.- + 57'119.-). Il doit être rajouté au bénéfice net initialement déclaré, de CHF 87'876.-, ce qui porte le bénéfice net de l’année 2008 à CHF 194'995.-, ainsi que l’a déterminé l’AFC-GE dans son bordereau de rappel d’impôt du 16 novembre 2020.

Contrairement à ce que soutient le recourant, ces reprises influencent son revenu réalisé durant l’année fiscale 2008 et non pas 2007.

Partant, le bénéfice résultant du bordereau de rappel d’impôt 2008 est confirmé.

9.             Le contribuable conteste les amendes qui lui ont été infligées pour soustraction d’impôt 2010 à 2015 (pour l’ICC), ainsi que 2010 à 2014 (pour l’IFD).

10.         Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu’une taxation ne soit pas effectuée alors qu’elle devrait l’être, ou qu’une taxation entrée en force soit incomplète est puni de l’amende (art. 175 al. 1 LIFD ; art. 69 al. 1 LPFisc).

Selon les art. 175 al. 3 LIFD et 69 al. 3 LPFisc, dans leur teneur en vigueur depuis 2010, lorsque le contribuable dénonce spontanément et pour la première fois une soustraction d'impôt, il est renoncé à la poursuite pénale (dénonciation spontanée non punissable), à condition: qu'aucune autorité fiscale n'en ait connaissance (let. a) ; qu'il collabore sans réserve avec l'administration pour déterminer le montant du rappel d'impôt (let. b) ; qu'il s'efforce d'acquitter le rappel d'impôt dû (let. c).

11.         Pour qu'il y ait soustraction au sens de l’art. 175 LIFD, il faut qu'il y ait soustraction d'un montant d'impôt en violation d'une obligation légale incombant au contribuable et une faute de ce dernier (arrêt du Tribunal fédéral 2C_674/2021 du 27 avril 2022 consid. 10.1).

En règle générale et pour autant que toutes les autres conditions soient remplies, une soustraction est commise dès qu’il y a irrégularité dans la comptabilité (ATF 135 II 86 consid. 3.1). 

12.         En l’occurrence, il est établi et non contesté que la comptabilité que le recourant a initialement transmise à l’AFC-GE comprenait de nombreuses inexactitudes, ayant conduit à une réduction de son bénéfice imposable. Il en a découlé une perte fiscale pour la collectivité. L’élément objectif d’une soustraction d’impôt est ainsi réalisé.

Cela étant, l’intéressé fait valoir qu’il doit bénéficier d’une exemption de peine. Il se prévaut des dispositions légales sur la dénonciation spontanée non punissable.

13.         Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_15/2021 du 27 mai 2021 consid. 6.2), la notion de dénonciation suppose que le contribuable annonce de lui-même son infraction à l'autorité fiscale, alors que celle-ci n'en a encore pas eu connaissance d'une autre manière. Le caractère spontané fait défaut lorsque la déclaration intervient alors que les autorités fiscales sont déjà en train d'enquêter sur le dossier du contribuable et que celui-ci, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, doit s'attendre à ce que la soustraction sera découverte même sans dénonciation. La déclaration spontanée de l'art. 175 al. 3 LIFD n'est réalisée que lorsque l'auteur se dénonce spontanément (« de son propre mouvement »), sans pression extérieure.

14.         En l’espèce, le contribuable soutient que ce n’est pas par crainte que le contrôle de l’AFC-CH ne permette de découvrir les erreurs que la comptabilité de son entreprise comportait, qu’il avait effectué sa dénonciation. Il avait accompli les démarches nécessaires aussitôt que son nouveau mandataire lui eut expliqué les problèmes, soucieux de se mettre en règle avec l’AFC-GE.

L’intéressé ne peut être suivi. En effet, il a envoyé à l’AFC-GE sa première lettre qu’il estime valoir dénonciation le 24 octobre 2017, soit deux mois après que l’AFC-CH eu mené un contrôle auprès de son entreprise et découvert des irrégularités entachant sa comptabilité, soit alors qu’une autorité fiscale enquêtait sur son dossier. Il s'ensuit qu’il se trouvait sous l'empire de la crainte concrète que l’AFC-CH informe l'autorité intimée d’éventuels bénéfices non taxés en vertu de l'art. 112 al. 1 2ème phr. LIFD, selon lequel les autorités de la Confédération, des cantons, des districts, des cercles et des communes peuvent spontanément signaler aux autorités chargées de l'exécution de la LIFD les cas qui pourraient avoir fait l'objet d'une imposition incomplète (arrêt du Tribunal fédéral 2C_15/2021 du 27 mai 2021 consid. 6.4).

15.         Le recourant objecte que le contrôle de l’AFC-CH ne concernait que les années 2012 à 2015, de sorte que l’AFC-GE n’était pas informée des inexactitudes figurant dans les comptes 2008 à 2011 de l’entreprise, qu’il avait intégralement portées à la connaissance de l’autorité intimée. Selon lui, le rapport de l’AFC-CH 2012 à 2015 était moins précis que la dénonciation spontanée, laquelle avait seule permis de procéder au rappel d’impôt.

Cette argumentation n’est pas fondée. En effet, la communication à l’AFC-GE d’irrégularités figurant dans les comptes 2012 à 2015 était de nature à faire naître auprès de cette dernière un soupçon sur le caractère inexact des taxations des années antérieures, qui l’aurait amenée à ouvrir une procédure de rappel d’impôt pour ces périodes fiscales (arrêt du Tribunal fédéral 2C_15/2021 du 27 mai 2021 consid. 6.4). C’est ainsi à tort que l’intéressé soutient que seule sa dénonciation a permis de procéder aux reprises pour les années 2008 à 2011.

Il résulte de ce qui précède que le recourant ne remplit pas les conditions pour bénéficier d’une exemption de peine en application des art. 175 al. 3 LIFD et 69 al. 3 LPFisc. Il convient par conséquent de se pencher sur l’élément subjectif de l’infraction, à savoir la faute et, cas échéant, la quotité des amendes.

16.         L’intéressé conteste avoir commis une soustraction d’impôt, subsidiairement sollicite la réduction de la quotité des amendes au minimum légal.

17.         En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait ; si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 69 al. 2 LPFisc).

18.         La soustraction consommée est punissable aussi bien intentionnellement que par négligence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_553/2018 du 17 juin 2019 consid. 4.2 et les références citées).

Les notions d'intention et de négligence de l'art. 175 LIFD sont identiques à celles de l'art. 12 al. 2 et 3 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Ainsi, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait (art. 12 al. 2 CP). En outre, commet un crime ou un délit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP), par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle. Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 p. 91 et les références).

19.         Selon la jurisprudence fédérale, les actes du représentant sont opposables au représenté comme les siens propres ; ce principe vaut également en droit public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_280/2013 du 6 avril 2013).

La responsabilité du mandant ne saurait être dissociée de celle de son mandataire. En effet, le premier est responsable des actes de celui qui le représente et répond de toute faute de ses auxiliaires. En particulier, le contribuable qui mandate une fiduciaire pour remplir sa déclaration d’impôt n’est pas pour autant libéré de ses obligations fiscales. Il doit, le cas échéant, supporter les inconvénients d’une telle intervention et répond de l’erreur de l’auxiliaire qu’il n’instruit pas correctement ou dont il ne contrôle pas l’activité (ATA/370/2015 du 21 avril 2015 consid. 9b).

Toutefois, lorsque le contribuable qui ne dispose pas de connaissances fiscales particulières choisit un mandataire compétent et lui communique tous les documents et renseignements nécessaires à l’établissement d’une déclaration conforme à la vérité, on ne peut raisonnablement pas lui reprocher de signer sa déclaration sans la contrôler dans les moindres détails. Il y aurait plutôt lieu de déterminer si le contribuable a transmis des documents incomplets à son mandataire, s’il l’a correctement instruit ou s’il s’est entendu avec lui pour commettre l’infraction fiscale (ATA/370/2015 du 21 avril 2015 consid. 9c).

20.         Le recourant fait valoir que, ne disposant d’aucune connaissance en fiscalité ni en comptabilité, il a fait entièrement confiance à son précédent mandataire, M. C______, dont il n’avait aucune raison de douter des compétences. Il lui a communiqué tous les documents nécessaires à l’établissement de ses déclarations fiscales et de ses comptes. Dès lors, aucune faute ne peut lui être reprochée.

L’AFC-GE prétend au contraire que l’intéressé, en tant que chef d’entreprise, devait obligatoirement connaître les marges réalisées sur ses ventes. Au vu des bénéfices déclarés, qui se montaient à quelque 3.4 fois ceux effectivement réalisés, il était forcément conscient de l’inexactitude de ses déclarations fiscales. Il a ainsi voulu tromper les autorités fiscales et commis une soustraction intentionnelle.

21.         Selon son curriculum vitae, après sa scolarité obligatoire, le recourant a étudié durant un an à l’École de commerce André Chavannes, à Genève et durant trois ans, à la Mutuelle d’études secondaires, toujours à Genève. En ce qui concerne ses expériences professionnelles, il a été instructeur de plongée sous-marine et coursier à vélo. Depuis 2006, il se trouve à la tête de son entreprise, transformée en société anonyme en 2019.

Au vu de sa formation et de ses expériences professionnelles, l’allégation selon laquelle il ne dispose d’aucune connaissance en comptabilité ni en fiscalité paraît plausible. D’ailleurs, l’AFC-GE l’admet dans sa décision du 10 novembre 2021.

Les reprises – et les amendes en résultant – concernent en premier lieu l’évaluation, la variation et l’amortissement du compte stock. Rien ne permet de retenir que le contribuable se serait entendu avec son précédent mandataire pour transmettre au fisc une comptabilité inexacte, ni qu’il l’aurait insuffisamment instruit, ni non plus qu’il ne lui aurait pas communiqué l’intégralité des pièces sur la base desquelles la comptabilité devait être établie. Il ne ressort pas non plus du dossier qu’il aurait dû douter des compétences ou de l’intégrité de son mandataire. Par ailleurs, selon l’attestation établie le 18 juin 2021 par M. C______, seul ce dernier décidait la manière dont les variations du stock de l’entreprise avaient été comptabilisées.

Les redressements portent en second lieu sur des frais de bateau. Ces dépenses revêtant un caractère privé, elles n’auraient pas dû être comptabilisés dans le compte de résultat de l’entreprise mais dans le compte privé du contribuable. De la sorte, le bénéfice de l’entreprise n’aurait pas été impacté.

Les reprises se rapportent ainsi à des erreurs de comptabilisation ayant entraîné une diminution des bénéfices imposables. Au vu de son absence de connaissances comptables et fiscales, il est fort douteux que l’intéressé eût été en mesure de porter un regard critique sur les comptes établis par M. C______. Dès lors, on ne peut pas lui reprocher de ne pas avoir vérifié les documents remis à l’AFC-GE. En transmettant des déclarations fiscales incomplètes, il n’a pas été en capable de se rendre compte qu’il induisait l’AFC-GE en erreur. Aucune faute, même par négligence, ne peut ainsi lui être reprochée.

Partant, les bordereaux d’amendes du 10 novembre 2021 doivent être annulés.

22.         Il résulte de ce qui précède que le recours doit être admis partiellement dans le sens des considérants qui précèdent.

23.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui obtient partiellement gain de cause, est condamné au paiement d’un émolument réduit s'élevant à CHF 400.- ; il est couvert par l’avance de frais de CHF 900.- versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de l’avance de frais de CHF 500.- lui sera restitué.

Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 900.-, à la charge de l'État de Genève, soit pour lui l’administration fiscale cantonale, sera allouée au recourant (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).

 


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 13 décembre 2021 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 10 novembre 2021 ;

2.             l'admet partiellement, dans le sens des considérants ;

3.             annule les bordereaux d’amendes du 10 novembre 2021 ;

4.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 400.-, lequel est couvert par l'avance de frais de CHF 900.- ;

5.             ordonne la restitution au recourant du solde de l’avance de frais de CHF 500.- ;

6.             condamne l'État de Genève, soit pour lui l’administration fiscale cantonale, à verser au recourant une indemnité de procédure de CHF 900.- ;

7.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Jean-Marie HAINAUT et Yuri KUDRYAVTSEV, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière