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Décisions | Chambre de surveillance

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C/22216/2021

DAS/103/2022 du 26.04.2022 ( IUS ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22216/2021-CS DAS/103/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 26 AVRIL 2022

 

Recours (C/22216/2021-CS) formé en date du 15 novembre 2021 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), comparant par Me Christian FERRAZINO, avocat, en l'Etude duquel il élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 27 avril 2022 à :

- Monsieur A______
c/o Me Christian FERRAZINO, avocat.
Boulevard Georges-Favon 13, 1204 Genève.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           a. Par ordonnance du 29 juin 2006 du Tribunal tutélaire (depuis lors le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, ci-après: le Tribunal de protection), B______ a fait l'objet d'une mesure de protection, transformée le 16 juin 2015 en curatelle de représentation et de gestion. A______, avocat, a été désigné aux fonctions de curateur de B______.

Il a été relevé de ses fonctions par ordonnance du Tribunal de protection du 25 février 2020.

b. Par ordonnance du 17 juillet 2014, le Tribunal de protection a désigné A______ aux fonctions de curateur de portée générale en faveur de C______.

Il a été relevé de ses fonctions par ordonnance du Tribunal de protection du 14 avril 2020.

c. Par ordonnance du 25 avril 2018, le Tribunal de protection a désigné A______ aux fonctions de curateur de représentation et de gestion en faveur de D______.

Il a été relevé de ses fonctions par ordonnance du Tribunal de protection du 24 juillet 2020.

d. Par ordonnance du 1er juin 2018, le Tribunal de protection a désigné A______ aux fonctions de curateur de portée générale en faveur de E______.

Celle-ci est décédée le ______ 2019.

e. Par ordonnance du 23 janvier 2019, le Tribunal de protection a désigné A______ aux fonctions de curateur de représentation et de gestion en faveur de F______.

Il a été relevé de ses fonctions par ordonnance du Tribunal de protection du 16 juin 2020.

f. Par ordonnance du 9 avril 2019, le Tribunal de protection a désigné A______ aux fonctions de curateur de représentation et de gestion en faveur de G______.

Il a été relevé de ses fonctions par ordonnance du Tribunal de protection du 25 février 2020.

B.            a. A______, après avoir été relevé de ses fonctions dans les six dossiers susmentionnés, a déposé devant le Tribunal de protection ses rapports de fin de mandat, accompagnés de ses notes de frais et honoraires.

Celui concernant E______, portant sur la période du 1er juin 2018 au 5 avril 2019, a été déposé le 23 mai 2019. Un rappel a été adressé au Tribunal de protection par A______ le 14 avril 2020.

Celui concernant B______, portant sur la période du 30 juin 2018 au 25 février 2020, a été déposé le 28 mai 2020.

Celui concernant G______, portant sur la période allant du 9 avril 2019 au 25 février 2020, a été déposé le 28 mai 2020.

Celui concernant C______, portant sur la période allant du 31 juillet 2018 au 14 avril 2020, a été déposé le 18 juin 2020.

Celui concernant D______, portant sur la période du 25 avril 2018 au 30 avril 2020, a été déposé le 8 septembre 2020.

Celui concernant F______, portant sur la période du 23 janvier 2019 au 16 juin 2020, a été déposé le 8 octobre 2020.

b. Le 28 septembre 2021, A______ a adressé au Tribunal de protection des courriers de rappel concernant les six rapports mentionnés ci-dessus, auxquels aucune suite n'avait été donnée.

Divers courriers ont également été adressés par A______ au service du contrôle du Tribunal de protection. Ledit service a répondu, par courriers du 12 octobre 2021, dans les dossiers B______, G______ et C______, qu'en raison d'une surcharge importante de travail au sein du secteur contrôle, les rapports et notes de frais et honoraires n'avaient pas encore pu être examinés. A______ était invité, si l'approbation de l'un ou l'autre de ses rapports devait revêtir un caractère urgent, de s'adresser au magistrat en charge du dossier, en exposant les motifs justifiant un traitement prioritaire.

c. Par courriers du 13 octobre 2021, A______ s'est adressé aux magistrats en charge des procédures concernant B______, G______ et C______, en indiquant que l'approbation des rapports rendus dans ces trois affaires revêtait désormais un caractère urgent, dans la mesure où il était "parfaitement inadmissible qu'une Etude doivent (sic) attendre aussi longtemps pour être taxée et payée". A______ a ajouté ce qui suit: " Ce n'est pas à l'avocat de fonctionner comme institut de crédit et d'attendre sur les carences de certains services de votre juridiction. Il y va de la responsabilité de l'Etat de faire son travail à satisfaction des justiciables et des auxiliaires de la justice".

d. Aucune suite ne semble avoir été donnée auxdits courriers.

A ce jour, les rapports, ainsi que les notes de frais et honoraires déposés par A______ dans les six dossiers susmentionnés, n'ont fait l'objet d'aucune décision.

C.           a. Le 15 novembre 2021, A______ a saisi la Cour de justice d'un recours pour déni de justice et retard injustifié, concluant à ce qu'il soit ordonné au Tribunal de protection de statuer immédiatement sur les rapports de comptes des six curatelles mentionnées ci-dessus et de procéder à la taxation de sa rémunération. Il a également conclu à ce qu'aucun frais ne soit perçu et à ce qu'une indemnité à titre de dépens lui soit allouée.

b. Dans ses observations du 30 novembre 2021, le Tribunal de protection a conclu au rejet du recours.

Il a exposé qu'à la suite de certains faits dénoncés par le Tribunal de protection et la Présidente du Conseil supérieur de la magistrature, le Ministère public avait ouvert, le 7 novembre 2019, une procédure pénale à l'encontre de A______ pour faux dans les titres et gestion déloyale. Lors de sa séance plénière du 10 janvier 2020, le Tribunal de protection avait décidé de libérer A______ de ses fonctions de curateur pour l'ensemble des mandats qui lui avaient été confiés, motifs pris d'une violation de son devoir de diligence et de loyauté accru, respectivement de son devoir de fidélité envers la juridiction. Parallèlement, le Tribunal de protection avait décidé de suspendre l'examen des rapports et comptes déposés par A______, dans l'attente que la justice pénale fasse la lumière sur certains des agissements qui lui étaient reprochés, lesquels risquaient d'avoir un impact sur l'examen desdits rapports et comptes. Le 23 novembre 2021, le Tribunal de protection avait appris que la procédure pénale avait été classée par ordonnance du 14 avril 2021, à la suite d'un accord transactionnel. Par ailleurs et même si le Tribunal de protection avait été informé au mois d'avril du classement de la procédure pénale, la reddition d'une décision relative à l'approbation des rapports et comptes n'aurait pas pu intervenir à ce stade. En effet, le secteur du contrôle du Tribunal de protection, chargé de vérifier l'exactitude des données contenues dans les rapports et comptes des curateurs, était en souffrance depuis plusieurs années et accusait un retard de plus de deux ans dans le traitement des dossiers qui lui étaient soumis. Dans ces circonstances, l'absence de décision dans les dossiers en cause ne constituait pas un retard arbitraire.

A l'appui de ses observations, le Tribunal de protection a notamment produit un courriel adressé le 23 novembre 2021 au Ministère public, sollicitant des informations sur l'avancement de la procédure pénale ouverte à l'encontre de A______. En réponse à ce courrier, le Ministère public a transmis au Tribunal de protection, le même jour, une copie de l'ordonnance de classement rendue le 14 avril 2021. Il ressort de cette ordonnance que les faits reprochés à A______ concernaient trois personnes, dont E______.

c. A______ n'a formulé aucune observation suite à la communication qui lui a été faite, le 6 décembre 2021, de la réponse donnée à son recours par le Tribunal de protection.

EN DROIT

1. 1.1.1 Le retard injustifié couvre l'hypothèse d'une absence de décision, constitutive de déni de justice matériel, étant rappelé que toute partie a droit à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable. ( ). Le retard à statuer au sens de l'art. 319 let. c CPC présuppose que le tribunal saisi ne rend pas de décision attaquable alors qu'il le peut (et le doit). Il n'empêche qu'un tel retard, pour être sanctionné au sens de l'art. 319 let. c, doit constituer une violation évidente de ses obligations par la juridiction concernée, ce qui s'apprécie en fonction des circonstances du cas concret mais ne devrait être admis que dans les cas crasses, c'est-à-dire lorsque le retard est injustifiable et que le prolongement d'une telle situation ne saurait être imposé aux parties. En d'autres termes, le recours pour retard injustifié est exclusivement réservé aux situations dans lesquelles il n'y a pas de décision à attaquer. ( ). (Jeandin, CR CPC Commenté, 2ème éd. 2019, ad art. 319 n. 27 ss).

1.1.2 Le recours pour retard injustifié peut être formé en tout temps (art. 321 al. 4 CPC). Pour le recours, le CPC pose des exigences identiques en appel et dans le cadre d'un recours (arrêt du Tribunal fédéral 5D_190/2014 du 12 mai 2015 consid. 2).

1.2.1 En l'espèce, le recours formé par A______ pour déni de justice est conforme aux prescriptions légales et est par conséquent recevable.

1.2.2 Dans les six procédures concernées par le recours, le recourant a déposé ses rapports ainsi que ses notes de frais et honoraires devant le Tribunal de protection au mois de mai 2019 pour celui concernant E______ et entre les mois de mai et d'octobre 2020 pour les cinq autres. Depuis lors, le Tribunal de protection n'a rendu aucune décision, le service du contrôle n'ayant pas encore opéré les vérifications nécessaires.

A première vue, une telle absence de décision pendant une période de près de trois ans pour le premier rapport et de l'ordre d'un an et demi à deux ans pour les autres pourrait être constitutive d'un déni de justice. Il convient toutefois de tenir compte des particularités du cas d'espèce.

Il résulte en effet des explications fournies par le Tribunal de protection, non contestées par le recourant, bien qu'il n'en ait pas fait état dans son recours, qu'il a fait l'objet d'une procédure pénale ouverte dans le courant du mois de novembre 2019 et s'étant achevée par une ordonnance de classement rendue le 14 avril 2021 suite à un accord transactionnel, ordonnance dont rien ne permet de retenir que le Tribunal de protection aurait eu connaissance avant sa communication par le Ministère public le 23 novembre 2021.

Or, compte tenu des soupçons d'infractions pénales qui pesaient sur le recourant, il ne saurait être fait grief au Tribunal de protection de ne pas avoir statué sur ses rapports et notes de frais et honoraires tant et aussi longtemps que la procédure pénale était en cours. Il ne pouvait en effet être exclu que les actes qui lui étaient reprochés aient concerné plusieurs personnes dont il était le curateur, autre que E______, et que lesdits actes aient pu avoir une influence sur les frais et honoraires dus. Ce n'est par conséquent qu'à compter de fin novembre 2021 que le Tribunal de protection et son service du contrôle ont été en mesure de procéder à l'examen des rapports et notes de frais et honoraires déposés par le recourant. Dès lors, au moment où le recourant a saisi la Cour de justice de son recours pour déni de justice, soit le 15 novembre 2021, il ne pouvait être reproché au Tribunal de protection de ne pas avoir encore statué, alors qu'il n'avait même pas eu connaissance de l'ordonnance de classement, qui lui a été communiquée quelques jours plus tard.

Au vu de ce qui précède, le recours pour déni de justice est infondé et doit être rejeté.

Le Tribunal de protection et son service de contrôle seront néanmoins invités à faire diligence afin que des décisions soient désormais rendues dans les meilleurs délais.

2. Les frais judiciaires de la procédure de recours, arrêtés à 500 fr. (art. 42 RTFMC), seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Celui-ci sera condamné à les verser à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours pour déni de justice formé par A______ le 15 novembre 2021 à l'encontre du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

Au fond :

Le rejette.

Arrête les frais judiciaires à 500 fr., les met à la charge de A______ et le condamne à les verser à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.