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Décisions | Chambre de surveillance

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C/2070/2010

DAS/77/2022 du 24.03.2022 sur DAS/181/2020 ( PAE ) , REJETE

Recours TF déposé le 27.04.2022, rendu le 09.09.2022, CONFIRME, 5A_313/2022
Normes : CPC.126.al1; CPC.319.al1.ch2
En fait
En droit
Par ces motifs

*republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2070/2010-CS DAS/77/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 24 MARS 2022

 

Recours (C/2070/2010-CS) formé en date du 3 février 2020 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Martine GARDIOL, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 25 mars 2022 à :

 

- Madame A______
c/o Me Martine GARDIOL, avocate
Rue de l'Eglise 1, 1299 Crans-près-Céligny.

- Monsieur B______
c/o Me Vincent LATAPIE, avocat
Boulevard Helvétique 4, 1205 Genève.

- Mesdames C______ et D______
Monsieur E
______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

 

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

Pour information à :

- Professeur F______
Centre universitaire romand de médecine légale
Unité de psychiatrie légale
p.a. HUG, rue Gabrielle-Perret-Gentil 4, 1211 Genève 14.

 

Cause renvoyée par arrêt 5A_1019/2020 rendue le 30 juin 2021 par le Tribunal fédéral.


EN FAIT

A.           a) G______, née le ______ 2005, et H______, né le ______ 2010, sont issus du mariage contracté par A_____ et B______. La vie séparée des époux A______/B______ a été réglée par mesures protectrices de l’union conjugale prononcées le 28 janvier 2010, modifiées le 17 juin 2015.

b) Dans le cadre de la procédure de divorce subséquente opposant les parties, une expertise psychiatrique familiale a été effectuée le 31 janvier 2017 par I______, Psychologue FSP, supervisé par le Prof. Dr. J______, Directeur du Centre K______. Il en est notamment ressorti que les mineurs étaient victimes d’aliénation parentale et que, pour ne pas faire souffrir leur mère, ils s’étaient distancés de leur père.

c) Par jugement JTPI/6204/2018 de divorce prononcé le 23 avril 2018, le Tribunal de première instance a, notamment, maintenu l’autorité parentale conjointe sur les mineurs G______ et H______, attribué leur garde à leur mère et réservé un droit de visite à leur père de manière progressive mais toujours au Point rencontre et, dans l’hypothèse où A_____ ne présenterait pas les enfants aux visites organisées, a condamné celle-ci à une amende d’ordre de 100 fr. pour chaque jour d’inexécution; il a également maintenu la curatelle éducative et la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles, d’ores et déjà en place, et ordonné la mise en œuvre de diverses thérapies.

d) Suite à un courrier du Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi) du 17 avril 2019, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après: Tribunal de protection) a informé les parents de l’ouverture d’une procédure en retrait de garde des enfants.

e) Par décision sur mesures superprovisionnelles du 17 octobre 2019, par apposition de son timbre humide sur les conclusions du rapport du SPMi du 16 octobre 2019, le Tribunal de protection a retiré à A_____ la garde et le droit de déterminer le lieu de résidence des enfants et ordonné leur placement en foyer, placement qui est intervenu le lendemain. Le SPMi avait, en substance, relevé que la mère faisait constamment obstruction, tant à l’intervention des curatrices, qu’à l’exercice du droit de visite de B______.

d) Le 23 octobre 2019, L______, avocat, a été nommé aux fonctions de curateur de représentation des enfants G______ et H______.

B.            a) Par ordonnance DTAE/7431/2019 du 27 novembre 2019, après instruction de la cause et audition des parties, le Tribunal de protection, statuant sur mesures provisionnelles, a notamment confirmé le retrait à A______ de la garde et du droit de déterminer le lieu de résidence de ses enfants G______ et H______ et lui a fait interdiction de quitter le canton de Genève sans l'accord préalable du Tribunal de protection (ch. 1), maintenu le placement en l'état des mineurs au sein du Foyer M______ (ch. 2), accordé aux parents un droit aux relations personnelles sur leurs enfants devant s'exercer en alternance à raison d'une heure à quinzaine auprès du [cabinet de consultations familiales] N______, dont il a précisé les modalités (ch. 3), fait interdiction à A______, sauf autorisation expresse préalable des curatrices ou du Tribunal de protection, de contacter ses enfants par quelque moyen direct ou indirect que ce soit, d'approcher ceux-ci dans un périmètre de moins de 200 mètres, ou encore de pénétrer dans un périmètre de 200 mètres autour de leur lieu de vie, de leur école, ou de tout autre lieu fréquenté par les enfants, mais aussi de les recevoir à son propre domicile ou au domicile d'un tiers (ch. 4).

Le Tribunal de protection a également ordonné la mise en place d'un suivi thérapeutique individuel pour chaque enfant (ch. 5), ordonné une thérapie de parentalité à l'intention de A______ et B______ (ch. 6), exhorté A______ à entreprendre un suivi thérapeutique individuel "au long cours" auprès d'un psychiatre pour adultes (ch. 7), prononcé les interdictions et injonctions visées aux chiffres 1 paragraphes 2, 4 et 6 paragraphe 2 du dispositif de l'ordonnance sous la menace de l'art. 292 du Code pénal dont il a rappelé la teneur (ch. 8), confirmé l'inscription des enfants et de leur mère dans le registre RIPOL/SIS, ainsi que l'obligation de dépôt de l'ensemble des documents d'identité des mineurs auprès du Service de protection des mineurs (ch. 9).

Il a au surplus instauré diverses curatelles et confirmé les curatelles existantes (ch. 10 à 17), confirmé les curatrices d’ores et déjà nommées dans leurs fonctions et a étendu leurs pouvoirs (ch. 18), autorisé la mineure G______ à effectuer au cours des prochains mois les déplacements nécessaires à Paris pour participer à un concours de chant télévisé (ch. 19), rappelé que les mesures ordonnées étaient immédiatement exécutoires (ch. 20) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 21).

Sur le fond, et à titre préparatoire, le Tribunal de protection a ordonné une expertise psychiatrique familiale et imparti un délai au 23 décembre 2019 aux parties, ainsi qu'au Service de protection des mineurs, pour déposer la liste des questions qu'ils souhaitaient poser aux experts (ch. 22 et 23).

b) Suite au recours formé par A______, la Chambre de surveillance de la Cour de justice a, par décision DAS/242/2019 du 23 décembre 2019, octroyé l’effet suspensif au recours et prononcé des mesures provisionnelles, aux termes desquelles elle a ordonné la restitution provisoire de la garde des mineurs à leur mère jusqu’à droit jugé sur le recours et ordonné la sortie immédiate des enfants du foyer dans lequel ils étaient placés, aucun danger imminent et concret ne justifiant le placement des enfants sur mesures provisionnelles, sans instruction au fond.

c) Par décision DAS/114/2020 du 26 juin 2020, la Chambre de surveillance a annulé les chiffres 1, 2, 3, 4, 8, en tant qu'il concernait les interdictions et injonctions relatives aux chiffres 1§ 2 et 4 du dispositif de l'ordonnance, 14 et 15 du dispositif, a confirmé pour le surplus l'ordonnance attaquée, dit que la procédure était gratuite et n'a pas alloué de dépens.

Elle a notamment retenu que l’attitude d’obstruction de la mère des mineurs était blâmable et susceptible de porter préjudice au bon développement de ces derniers, dont la vision paternelle était fortement altérée. Cependant, le retrait de garde et le placement d’enfants en foyer étaient des mesures extrêmes, soit des ultima ratio, qui devaient être prononcées avec toutes les précautions nécessaires et après s’être entourés d’avis de spécialistes, ce d’autant plus que la mécanisme d’aliénation parentale (suspecté en l’espèce) était complexe, d’autres mesures moins incisives devant également être investiguées afin de permettre de parvenir au but recherché, soit la reprise des relations personnelles entre le père et les enfants, après avoir examiné si cette reprise était actuellement dans l’intérêt des mineurs, compte tenu de leur état psychologique.

S’agissant de l’expertise psychiatrique ordonnée sur le fond à titre préalable, la Chambre de surveillance a retenu que la mère des mineurs s’était contentée de contester cette mesure, sans exposer les motifs de son refus, et alors même qu’elle avait acquiescé à son principe lors de son audition par le Tribunal de protection; si certes la réalisation d’une expertise psychiatrique était toujours, par nature, susceptible de causer un préjudice difficilement réparable, il n’en demeurait pas moins que l’intérêt supérieur des mineurs primait en l’occurrence cet éventuel préjudice, puisque pris dans un conflit de grande ampleur, ils ne voyaient plus leur père et adoptait à son égard une attitude de rejet extrêmement forte. L’expertise judiciaire réalisée en 2017 l’avait été par une psychologue et il était en l’état judicieux qu’elle soit réalisée par des psychiatres spécialisées pour enfants et adultes qui pourraient éclairer d’un jour nouveau la problématique familiale et diagnostiquer les éventuels dysfonctionnements, leur origine et les moyens d’y remédier, les mesures jusqu’alors mises en place pour permettre aux enfants d'avoir accès à leur père n’ayant pas été couronnés de succès.

C.           a) Par ordonnance DTAE/272/2020 du 17 janvier 2020, le Tribunal de protection a, statuant préparatoirement, ordonné une expertise psychiatrique familiale (A), confié la réalisation de celle-ci au Prof. F______, Centre universitaire de médecine légale (CURML), unité de psychiatrie légale, auprès des HUG, avec la précision que les diagnostics (y compris l'absence de diagnostics) portant sur les père et mère devront être dûment validés par un psychiatre pour adultes (B) et déterminé la mission qu'il confiait aux experts (C). Il a formulé quinze questions à l'expert (D), l'a invité à formuler toutes autres constatations ou observations utiles à la compréhension de la situation familiale et personnelle des enfants concernés (E), fixé un délai pour la reddition du rapport (F), rendu l'expert attentif à la teneur des art. 307 et 320 CP (G), mis les frais d'expertise à la charge de l'Etat (H) et ajourné la cause à réception du rapport d'expertise (I).

Le Tribunal de protection a retenu qu'il était nécessaire qu'un nouvel état de situation soit effectué par des médecins spécialisés afin de permettre une analyse approfondie et actualisée de l'état psychologique de chaque membre de la famille, puis de renseigner avec précision l'autorité de protection et lui adresser des préconisations ajustées aux besoins spécifiques de chaque enfant et aux capacités parentales de leurs père et mère.

b) Par décision DAS/ 181/2020 du 29 octobre 2020, la Chambre de surveillance a déclaré irrecevable le recours formé le 3 février 2020 par A______ contre l'ordonnance DTAE/272/2020 rendu le 17 janvier 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/2070/2010.

La Chambre de surveillance a retenu que A______ ne pouvait plus remettre en question le principe de l’expertise, lequel avait été tranché par décision DAS/114/2020, l'expertise ordonnée de nouveau dans l'ordonnance litigieuse ne pouvant l'être que pour rappel, ce qui n’ouvrait pas la possibilité d’un nouveau recours sur cette question. S’agissant de la désignation de l’expert, la Chambre de surveillance a considéré que A______ n’avait pas formé de grief à l’encontre du choix de l’expert, soit le Prof. F______, à laquelle la mission d'expertise avait été confiée.

c) Par arrêt 5A_1019/2020, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours, annulé la décision attaquée et renvoyé la cause à la Chambre de surveillance de la Cour de justice afin qu'elle se prononce sur le grief soulevé par la mère des mineurs s'agissant de la personne de l'expert, le recours étant rejeté pour le surplus.

Le Tribunal fédéral a rejeté les griefs de A______ formulés en relation avec le principe de l’expertise, lequel ne faisait pas l’objet de l’ordonnance du Tribunal de protection du 17 janvier 2020, ainsi que les autres griefs, en relation avec la représentation et le droit d’être entendu des mineurs. Toutefois, le Tribunal fédéral a retenu que A______ avait, en page 24, n° 98 de son mémoire de recours, soulevé un grief en relation avec le choix de l’expert, exposant les motifs pour lesquels elle s’opposait à ce qu’un expert de l’Institut de médecine légale soit désigné, et sollicitant que l’expertise soit supervisée par un expert étranger à cette institution, sur lequel la Chambre de surveillance ne s’était pas prononcée, et dont la pertinence ne saurait d’emblée être niée, de sorte que la cause devait lui être renvoyée pour nouvelle décision sur cette question.

D.           a) Suite à l'arrêt rendu par le Tribunal fédéral, la Chambre de surveillance a invité les parties à se déterminer.

b) B______ a conclu au rejet du grief de A______ et à la confirmation du Centre universitaire de médecine légale (ci-après: CURML) dans sa mission d'expertise. Il a relevé que la critique formulée par A_____ contre le CURML était générale, imprécise et indigne. La suspicion de partialité du CURML, que la recourante ne tentait même pas de rendre vraisemblable, ne pouvait pas se justifier par un hypothétique lien de dépendance du CURML envers le Tribunal de protection. Admettre l'existence d'un conflit d'intérêt in abstracto reviendrait à écarter le CURML de toute mission d'expertise à l'avenir, ce qui était absurde et contraire à sa raison d'être. Le grief formulé par A______ n'était en réalité qu'une critique déguisée du principe même de l'expertise. Elle n'avait, par ailleurs, pas rendu vraisemblable les faits qui motivaient son grief, à savoir l'existence d'une suspicion de partialité du CURML.

c) A______ est revenue dans son écriture, pour les critiquer, sur le "Principe de l'expertise" et sur les "Autres griefs", soit la représentation des enfants devant la Cour et le Tribunal fédéral. S'agissant de l'expert désigné, elle a maintenu que l'Institut de médecine légale, qui recevait exclusivement les expertises familiales de la part du Tribunal de protection se trouvait "dans un conflit d'intérêt" avec celui-ci, "qu'il pourrait avoir à désavouer dans le cadre de la présente procédure". Selon elle, "seule une institution véritablement indépendante serait à même de réaliser une telle expertise ou au minimum l'Institut de médecine légale devrait se faire superviser en contradictoire par un expert étranger à l'institution, reconnu au niveau international et idéalement étranger dans la mesure où la médecine connaît toujours un fort corporatisme local". Aucun expert de l'Institut de médecine légale des HUG dans le cadre des expertises familiales n'avait le titre de psychiatre pour adultes, ce qui rendait le contenu des expertises s'agissant de la personnalité des parents des enfants particulièrement sujet à critique. Il était selon elle "manifeste que le lien de dépendance entre le Service de médecine légale des HUG et les tribunaux, ici le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, ne permet pas d'assurer à l'expert-e l'impartialité indispensable à sa mission compte tenu des manquements du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans le cadre de la procédure de placement des enfants G______ et H______ (DAS/114/2020) ". Il fallait "s'interroger ici sur la nécessité d'une telle expertise qui pourrait prendre plusieurs mois et ne sera achevée qu'à un moment où G______ sera majeure et H______ légitimée à refuser de voir un père qu'il ne connaît pas et dont les seuls souvenirs sont particulièrement pénibles et douloureux".

Elle a produit des pièces nouvelles, soit un courrier adressé au Tribunal de protection par son conseil le 28 mai 2021, une lettre du 23 mai 2021 du père à ses enfants, les réponses des mineurs à leur père lui signifiant qu'ils ne voulaient plus le voir et un courrier du Dr O______, spécialiste FMH psychiatrie, psychothérapie enfants et adolescents, du 26 juillet 2021, se positionnant défavorablement au sujet de l'expertise.

d) Le Service de protection des mineurs s'en est rapporté à justice sur le choix de l'expert.

e) Les parties et intervenants à la procédure ont été avisés par plis du 3 août 2021 de la Chambre de surveillance de ce que la cause serait mise en délibération dans un délai de dix jours.

f) Par courrier du 16 août 2021, A______ a invité la Chambre de surveillance à suspendre la procédure dans l'attente d'une décision relative à deux plaintes pénales, l'une concernant G______ et l'autre concernant H______, déposées au Ministère public à l'encontre de B______. Il s'agissait d'un fait nouveau et elle considérait qu'il serait contraire au bon déroulement de la procédure pénale d'envisager une expertise en parallèle. Il était dans l'intérêt manifeste de G______ et H______ de pouvoir être entendus comme partie plaignante dans le cadre des procédures pénales avant d'envisager une expertise qui les contraindrait à revoir leur père sans connaître l'issue d'une procédure pénale diligentée à son encontre, leur faisant courir le risque d'être influencés ou de subir des pressions de sa part.

g) Le 19 août 2021, A______ a indiqué qu’elle était convoquée le 25 août 2021 par la Police judiciaire - Section des infractions contre la personne et le patrimoine - Brigade des mœurs, dans le cadre des plaintes pénales déposées à l'encontre de B______.

Elle a transmis à la Chambre de surveillance le mandat de comparution qui lui avait été adressé.

h) B______ s'est opposé à la suspension de la procédure. A______, qui invoquait des faits nouveaux, ne précisait pas lesquels, manquant à son devoir de motivation et frisant la témérité. Elle n'avait pas joint une copie des plaintes pénales, ni indiqué leur objet, les numéros de procédure sous lesquelles elles étaient enregistrées, ni même le nom du magistrat en charge du dossier. B______ n'avait pas été convoqué. Il n'était pas possible d'analyser, faute d'explications, en quoi la mise en œuvre de l'expertise psychiatrique du groupe familial porterait atteinte au bon déroulement de la "soi-disant procédure pénale".

i) Invité à se déterminer, le Service de protection des mineurs a précisé que rien ne justifiait de suspendre la procédure. L'ouverture d'une procédure pénale n'était pas de nature à prétériter le déroulement de l'expertise en parallèle. Il ne lui avait jamais été fait mention, hormis par la mère, de pressions ou d'influence de la part du père à l'endroit de ses enfants. Par ailleurs, dans le cas où un droit de visite devrait être préconisé par les experts au terme de leur analyse, il allait de soi que des modalités de visite préservant la procédure pénale en cours pourraient être mises en place, telles que des visites médiatisées, en présence d'un tiers, comme cela avait déjà été fait par le passé.

j) Les parties et intervenants à la procédure ont été avisées par avis du 31 août 2021 de ce que la cause était gardée à juger sur suspension de la procédure.

EN DROIT

1.             1.1.1 En cas de renvoi de la cause par le Tribunal fédéral conformément à l’art. 107 al. 2 LTF, l’autorité cantonale doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants en droit de l’arrêt de renvoi. Le juge auquel la cause est renvoyée voit ainsi sa cognition limitée par les motifs de l’arrêt de renvoi, en ce sens qu’il est lié par ce qui a été tranché définitivement par le Tribunal fédéral (ATF 133 III 201 consid. 4.2). Cela signifie que l’autorité cantonale doit limiter son examen aux points sur lesquels sa première décision a été annulée et que, pour autant que cela implique qu’elle revienne sur d’autres points, elle doit se conformer au raisonnement juridique de l’arrêt de renvoi. En revanche, les points qui n’ont pas ou pas valablement été remis en cause, qui ont été écartés ou dont il avait été fait abstraction lors de la procédure fédérale de recours ne peuvent plus être réexaminés par l’autorité cantonale, même si, sur le plan formel, la décision attaquée a été annulée dans son intégralité (ATF 135 III 334 consid. 2.1; Donzallaz, Loi sur le Tribunal fédéral, Commentaire, 2008, n. 1695 et 1697).

1.1.2 Des faits nouveaux ne peuvent être pris en considération que sur les points qui ont fait l'objet du renvoi, lesquels ne peuvent être ni étendus, ni fixés sur une base juridique nouvelle. Dans le cadre fixé par l'arrêt de renvoi, la procédure applicable devant l'autorité à laquelle la cause est renvoyée détermine s'il est possible de présenter de nouveaux allégués ou de nouveaux moyens de preuve (ATF 131 III 91 consid. 5.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_631/2018 du 15 février 2019 consid. 3.2.1; 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 1.2).

1.1.3 Selon l'art. 126 al. 1 CPC, le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d'opportunité le commandent; la procédure peut notamment être suspendue lorsque la décision dépend du sort d'un autre procès (Haldy, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 8 ad art. 126 CPC).

La suspension doit répondre à un besoin réel et être fondée sur des motifs objectifs dès lors qu'elle contrevient à l'exigence de célérité de la procédure, imposée par les art. 29 al. 1 Cst. et 124 al. 1 CPC. Elle ne peut être ordonnée qu'exceptionnellement et l'exigence de célérité l'emporte en cas de doute (ATF 135 III 127 consid. 3.4; 119 II 386 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_218/2013 du 17 avril 2013 consid. 3.1; Frei, in Berner Kommentar, 2012, n. 1 ad art. 126 CPC).

Le juge civil n'étant pas lié par le juge pénal, l'existence d'une procédure pénale ne justifiera qu'exceptionnellement la suspension de la procédure civile (arrêt du Tribunal fédéral 4A_683/2014 du 17 février 2015 consid. 2.1 et 2.2).

1.2 En l'espèce, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à la Chambre de surveillance uniquement pour qu'elle traite le grief soulevé par la recourante relatif au choix de l'expert. Le Tribunal fédéral ayant rejeté les griefs formulés devant lui par la recourante concernant le principe même de l'expertise, ainsi que la question de la représentation et de l’audition des enfants, ces sujets sont devenus définitifs et les griefs soulevés à nouveau à ce propos par la recourante dans ses écritures après renvoi devant la Chambre de surveillance sont irrecevables, de même que le sont les pièces produites à leur appui.

S'agissant des faits nouveaux allégués, à savoir le dépôt de deux plaintes pénales à l'encontre du père des mineurs, force est de constater que ces faits ne sont aucunement en relation avec la question de la personne de l'expert que la Chambre de surveillance doit trancher. Les faits nouveaux allégués sont donc irrecevables, au regard des principes jurisprudentiels sus-évoqués. A supposer même qu'ils soient recevables, ils n'ont aucune incidence sur l'objet du litige et ne sauraient justifier la suspension de la procédure, ce d'autant que la recourante n'a pas exposé les faits qui sont à l'origine des plaintes pénales déposées, la simple allégation du dépôt de plaintes pénales ne pouvant être considérée comme un fait nouveau, justifiant au surplus que l’on doive se pencher sur la question d’une éventuelle suspension de la procédure, dont les conditions ne sont au demeurant pas réunies, la procédure en désignation de l'expert chargé de l'expertise psychiatrique familiale étant sans lien avec des procédures pénales, quel qu'en soit l'objet. Par ailleurs l’on discerne mal en quoi la mise en œuvre de l’expertise mettrait en péril le bon déroulement d’une éventuelle audition des enfants au pénal, la question de l’influence du père sur ses enfants avancée par la recourante étant peu réaliste, compte tenu de l’absence de contacts entre eux. Ces interrogations regardent, quoi qu’il en soit, l’exécution de l’expertise, et non la question de la désignation de l’expert, seul point à trancher par la Chambre de surveillance.

Au vu de l’ensemble de ce qui précède, la recourante sera déboutée de ses conclusions visant à la suspension de la procédure.

2.             La recourante s'oppose à la désignation de l’expert retenu par le Tribunal de protection. Le Tribunal fédéral, au considérant 5.2 de son arrêt, a renvoyé la Chambre de surveillance à l'argumentation figurant en page 24, n° 98 du mémoire de recours cantonal, afin de qu'il soit statué sur le grief soulevé.

Sous n° 98 de son recours, intitulé "Le conflit d'intérêt de l'experte chargée de ce mandat", la recourante exposait in extenso : "L’institut de médecine légale reçoit exclusivement les expertises familiales de la part du TPAE, lui demander dans le contexte de la présente affaire de désavouer son principal mandant n'est pas réaliste et représente un manifeste conflit d'intérêt pour cette institution. Dès lors et dans tous les cas, seule une institution véritablement indépendante serait à même de réaliser une telle expertise ou au minimum de la faire superviser en contradictoire par un expert étranger à l'institution, reconnu au niveau international et idéalement étranger dans la mesure où la médecine connaît toujours un fort corporatisme local".

Elle a repris son argumentation dans les écritures après renvoi qu’elle a déposées devant la Chambre de surveillance, en insistant sur le lien de dépendance entre le CURML et le Tribunal de protection. Elle prétend au surplus qu’aucun médecin du CURML n’a le titre de psychiatre pour adultes.

2.1 Le Tribunal de protection a désigné le Prof. F______, CURML, Unité de psychiatrie légale auprès des HUG, en qualité d’experte, avec la précision que les diagnostics posés pour chacun des parents devront être dûment validés par un psychiatre pour adultes. Le choix final des experts chargés de l’expertise a ainsi été confié au Prof. F______, ______ [fonction au sein du] CURML, et réalisé par ses soins en fonction des compétences et des disponibilités des membres du service sous sa direction. La recourante ne conteste pas, à raison, les compétences de la personne à laquelle a été confiée la réalisation de l'expertise, soit le Prof. F______, mais soutient que l'ensemble des médecins du CURML manquerait d'indépendance face au Tribunal de protection, lequel confierait au CURML toutes les expertises familiales qu’il entend ordonner et serait son plus important mandant.

La recourante n'expose pas sur quels éléments elle se base pour affirmer que le Tribunal de protection confierait toutes les expertises familiales qu'il diligente au CURML. Elle n'explique pas non plus sur quels éléments elle se fonde pour affirmer péremptoirement que le Tribunal de protection serait le plus important mandant du CURML, oubliant en cela que le CURML réalise des expertises dans d’autres domaines que celui de la famille. Quand bien même ces deux affirmations seraient exactes, l'on discerne mal en quoi cela créerait un lien de dépendance de cette dernière institution envers le Tribunal de protection, la recourante ne se fondant sur aucun élément tangible. Les médecins qui travaillent au sein du CURML ont prêté serment de remplir leur mission avec toute l'éthique nécessaire et la suspicion que la recourante jette tant sur les médecins composant le CURML, que sur le Tribunal de protection, ne repose sur aucun fondement.

Il est par ailleurs pour le moins incongru de prétendre, comme le fait la recourante, que le CURML ne pourrait se distancier du Tribunal de protection, alors que ce dernier n'a encore pris aucune décision et fait précisément appel à des spécialistes dès lors qu'il ne dispose pas des connaissances nécessaires afin d'éclairer la future décision qu'il devra rendre. Le Tribunal de protection a d'ailleurs expressément exposé dans les considérants de son ordonnance qu'il souhaitait que les experts réalisent une analyse approfondie et actualisée de l'état psychique de chaque membre de la famille et le renseigne avec précision en lui adressant des préconisations ajustées aux besoins de chacun des enfants et aux capacités parentales des père et mère. L'indépendance du CURML par rapport au Tribunal de protection dans la réalisation de l'expertise ne saurait également être remise en question sur la base de cet argument, aucun élément ne le justifiant, le premier ayant reçu du second une mission totalement neutre et devant répondre à des questions précises au sujet desquelles les parties ont pu préalablement s'exprimer. Il n'existe ainsi, à l'évidence, aucun conflit d'intérêt entre le CURML et le Tribunal de protection qui nécessiterait de devoir confier à une autre institution ou d'autres experts, la réalisation de l'expertise.

Le Centre universitaire romand de médecine légale réunit des spécialistes rompus en matière d'expertise familiale ou psychiatrique, notamment des pédopsychiatres et des psychiatres pour adultes (contrairement à ce que soutient de manière erronée la recourante), dont la mise en œuvre des compétences cumulés doit permettre d'élaborer des expertises complètes dans le cadre de dynamiques familiales complexes. Les médecins du CURML répondent ainsi aux besoins de pluridisciplinarité et de compétences médicales indispensables à l'évaluation de la situation de la famille A______/B______. S'agissant de la supervision par un expert étranger à cette institution, elle est inutile, puisqu'elle était liée au grief de manque de partialité du CURML et des médecins le composant, qui a été rejeté. Le Tribunal de protection a par ailleurs d'ores et déjà spécifié dans son ordonnance que l'expertise devait être supervisée par un psychiatre pour adultes, ce qui permet d'offrir à la recourante toutes les garanties nécessaires sur les diagnostics qui pourraient être posés concernant les parents des mineurs. Quant au corporatisme médical dont fait état la recourante, à nouveau, il ne repose sur aucun élément tangible.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, les griefs formulés par la recourante concernant la désignation de l'expert mandaté seront rejetés et la lettre B de l'ordonnance contestée sera confirmée.

3.             S'agissant de mesures de protection des mineurs, la procédure est gratuite (art. 81 al. 1 LaCC).

Il n'est pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

Statuant sur renvoi du Tribunal fédéral :

Déclare recevable le recours formé le 3 février 2020 par A______ contre l'ordonnance DTAE/272/2020 du 17 janvier 2020 rendue par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/2070/2010.

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Dit que la procédure est gratuite et qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Mesdames Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.