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Décisions | Chambre de surveillance

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C/13675/2015

DAS/46/2022 du 22.02.2022 sur DTAE/4535/2021 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13675/2015-CS DAS/46/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 22 FEVRIER 2022

 

Recours (C/13675/2015-CS) formé en date du 16 août 2021 par Madame A______, domiciliée ______[GE], comparant en personne.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 23 février 2022 à :

- Madame A______
Rue ______ Genève.

- Monsieur B______
c/o Me Philippe KITSOS, avocat
Rue Saint-Léger 8, 1205 Genève.

- Monsieur C______
Monsieur D______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. a) A______ et B______ sont les parents non mariés de E______, née le ______ 2011.

b) Ils s'opposent depuis 2016 dans le cadre d'une procédure civile portant sur l'attribution de la garde de leur fille, son entretien et le droit de visite.

c) Dans le cadre de cette procédure, le Tribunal de première instance a, par ordonnance provisoire du 3 mai 2017, réservé un droit de visite au père et instauré une curatelle d'organisation et de surveillance de ces relations personnelles.

Le 10 mai 2017, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: Tribunal de protection) a désigné deux intervenants en protection de l'enfant aux fonctions de curateurs chargés de l'organisation et de la surveillance de ces relations personnelles. Le 30 janvier 2018, D______ a été désigné aux fonctions de curateur en remplacement de l'un des deux curateurs nommés en mai 2017.

d) Statuant le 12 décembre 2018 sur mesures superprovisionnelles, le Tribunal de première instance a accordé la garde de l'enfant au père, ordonné que le transfert de garde s'effectue sous la supervision et avec l'accompagnement du Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi) sous la forme d'une curatelle ad hoc, réservé un droit de visite à la mère et instauré une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles entre l'enfant et sa mère.

Par ordonnance du 14 décembre 2018, le Tribunal de protection a confié ces missions aux curateurs déjà désignés les 10 mai 2017 et 30 janvier 2018.

e) Le 12 avril 2019, le Tribunal de première instance a, sur mesures provisionnelles, maintenu la garde de l'enfant auprès de son père et suspendu tout droit à des relations personnelles de la mère jusqu'à la mise sur pieds d'un droit de visite encadré par un thérapeute, lequel devrait s'exercer à un rythme hebdomadaire de quelques heures par semaine, afin de préserver E______ de toute tentative d'aliénation parentale.

f) Par jugement rendu le 29 avril 2021, le Tribunal de première instance a notamment maintenu l'autorité parentale conjointe des père et mère sur leur fille E______, attribué la garde de la mineure au père, réservé à la mère un droit de visite devant s'exercer, sauf avis contraire des curateurs, les mercredis de la sortie de l'école jusqu'à 20h00, retour au domicile du père, étant précisé que le droit de visite ne s'exercera pas, et ce sans remplacement, durant les petites vacances scolaires en cas d'absence de l'enfant; durant les vacances scolaires d'été, le droit de visite s'exercera les mercredis de 10h00 à 20h00, retour au domicile du père, à l'exception des périodes d'absence de l'enfant, durant lesquelles il ne sera pas remplacé, ordonné le maintien de la curatelle d'organisation et de surveillance du droit de visite existante et, enfin, levé l'interdiction faite à la mère de quitter le territoire suisse avec l'enfant.

g) A______ a interjeté appel contre ce jugement le 27 mai 2021, en sollicitant l'instauration d'une garde alternée ou, subsidiairement, la réserve en sa faveur d'un droit de visite plus étendu.

B. a) Par actes des 12 mai et 18 mai 2021, A______ a saisi le Tribunal de protection d'une requête en remplacement du curateur D______.

Elle lui a reproché de s'occuper lui-même du dossier pour couvrir un dysfonctionnement initial et grave dans la représentation de son enfant survenu en décembre 2018, d'avoir fait preuve d'un comportement inacceptable le 11 mai 2021, d'avoir eu la volonté de couvrir encore un dysfonctionnement au lieu de le corriger, de s'être énervé contre elle après qu'elle ait cité F______, d'avoir un comportement privilégiant la grand-mère paternelle de l'enfant, et encore de ne pas protéger E______. Elle lui a également fait grief de ne pas transmettre au juge civil et à l'autorité de protection des informations importantes, mais aussi d'en dissimuler d'autres en permettant un transfert totalement hors règles et sans attendre la décision de l'autorité de protection, tout en s'abstenant de mettre en place immédiatement le droit de visite prévu par le Tribunal de première instance.

A l'appui de sa requête, elle a produit diverses pièces ayant trait à la procédure en cours devant le Tribunal de première instance, ainsi qu'une attestation médicale de la Dre G______ du 11 janvier 2018 et d'un certificat médical du pédiatre de l'enfant du 22 janvier 2019, ces deux documents mettant en cause la décision provisionnelle du Tribunal de première instance visant à confier la garde de l'enfant à son père.

b) D______ a conclu au rejet de la requête. Il a indiqué que les doléances de A______ étaient sans fondement, qu'elles reflétaient le fonctionnement habituel de cette dernière, qui consistait à accuser et à disqualifier les personnes ne partageant pas son point de vue ou lui rappelant le cadre en vigueur.

c) A______ a saisi le Tribunal de protection d'une nouvelle requête le 2 juin 2021, concluant à titre provisionnel et superprovisionnel à ce que son droit de visite soit étendu, qu'une audience soit tenue et qu'interdiction soit faite au père d'envoyer la mineure seule et pour la nuit chez sa grand-mère paternelle.

d) B______ s'en est rapporté à justice.

e) Lors de l'audience tenue le 6 juillet 2021, le Tribunal de protection a entendu A______, assistée de son conseil, et le curateur D______.

A______ a reproché au curateur d'avoir procédé à l'exécution du changement de garde prononcé par le Tribunal de première instance avant même que cette décision n'arrive au Tribunal de protection. Il avait par ailleurs négligé d'écouter à ce moment-là les médecins, notamment la Dre G______ ou le pédiatre de sa fille. Il avait omis de produire le rapport du Point rencontre, qui faisait mention du souhait d'une garde partagée exprimé par sa fille. Le curateur lui avait pris sa fille du jour au lendemain en décembre 2018 et avait bloqué la reprise des liens pendant cinq mois. Il pensait que c'était bien pour un enfant d'être coupé de sa mère, qu'un enfant n'avait pas besoin de sa mère. Elle n'avait aucune confiance en ce curateur, puisque sa fille était en danger et qu'il ne savait rien sur celle-ci et ne lui témoignait aucun intérêt, négligeant par exemple d'exprimer l'envie de sa protégée d'une garde alternée.

Le conseil ayant assisté la requérante devant le Tribunal de protection a souligné qu'il n'avait pas grand-chose à reprocher au curateur. Il était en revanche difficilement compréhensible qu'il n'ait pas requis l'élargissement du droit de visite auprès du juge civil.

D______ a indiqué que la mère de la mineure présentait une grande incapacité à se remettre en question, que lorsqu'un intervenant n'allait pas dans son sens, lorsqu'il s'opposait ou émettait des doutes quant à son analyse et à ses actes, le conflit surgissait, de sorte que toute une série d'intervenants de tout milieu avaient fait l'objet des mêmes critiques. C'est parce que la mère avait adressé des accusations insistantes à l'encontre du précédent curateur qu'il avait lui-même repris une partie du suivi du dossier, étant souligné que A______ reprochait à cet intervenant en protection de l'enfant de n'être qu'un assistant social, tandis que selon elle, le SPMi devait pouvoir rééquilibrer la situation face aux manquements des autres parties, qu'elle considérait comme des ennemis. Le curateur a encore relevé que depuis lors et jusqu'à récemment, ils avaient pu maintenir un certain niveau de dialogue et avancer, même s'ils avaient certains différends, si bien qu'il ne comprenait pas la décision de A______ de rompre ce dialogue. Son propre investissement dans ce dossier était énorme, à la fois en temps et en énergie, et ce depuis des mois. Un tel mandat était donc lourd et était d'autant plus compliqué qu'il ne donnait que très peu de résultats, étant rappelé que A______ avait affirmé qu'elle était irréprochable et qu'elle n'allait pas cesser ses agissements aussi longtemps qu'elle n'aurait pas obtenu la garde, à tout le moins partagée, de sa fille E______. Par ailleurs, le mandat des curateurs était d'exécuter les décisions de justice en matière de relations personnelles, mais A______ leur demandait tout le temps d'aller au-delà. Depuis l'ordonnance du Tribunal de première instance du 12 décembre 2018, les curateurs avaient joué un rôle actif dans l'évolution des relations personnelles entre E______ et sa maman, par exemple en sollicitant, en lieu et place du Point rencontre, la consultation I______, puis celle du Docteur H______ pour intervenir en tant que tiers garant des visites, mais très vite, cela n'avait pas marché. Ils s'étaient ensuite engagés pour organiser certaines visites hors de ce cadre thérapeutique, par exemple en médiatisant deux visites qui avaient permis d'observer que la mère se montrait correcte durant les rencontres avec sa fille. Ce constat les avait amenés à proposer des visites sans la présence d'un tiers. Ils avaient également relayé diverses demandes de visites ponctuelles formulées par la mère lorsqu'ils estimaient que c'était dans l'intérêt de E______, tout en soulignant qu'il leur serait difficile de préaviser favorablement des visites exceptionnelles de manière répétée, puisqu'il apparaissait que pour le bien de leur protégée, le cadre des rencontres devait rester stable et leurs modalités juridiques ne devaient pas être remises en question de manière incessante.

C. Par ordonnance DTAE/4535/2021 rendue le 6 juillet 2021, le Tribunal de protection a rejeté la demande de A______ tendant à la libération de D______ de ses fonctions de curateur de la mineure E______ (ch. 1 du dispositif), confirmé en conséquence ledit curateur dans ses fonctions (ch. 2), exhorté A______ à effectuer un suivi thérapeutique individuel sérieux et régulier auprès d'un psychiatre pour adultes (ch. 3), lui a rappelé son devoir de collaborer avec les curateurs de sa fille (ch. 4) et s'est déclaré incompétent pour le surplus (ch. 5).

Le Tribunal de protection a considéré que le curateur désigné n'avait pas failli dans l'accomplissement de sa mission. Aucun élément au dossier ne permettait de retenir qu'il se serait départi de son rôle de faire valoir en priorité l'intérêt de l'enfant qu'il avait pour mission de protéger dans le cadre de ses relations personnelles avec sa mère.

D. a) Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 16 août 2021, A______ a recouru contre cette ordonnance, qu'elle a reçue le 13 août 2021 et dont elle requiert l'annulation et la révocation du curateur D______.

Elle considère que ce dernier, assistant social de formation, ne disposait pas des aptitudes nécessaires dans le domaine de la santé. Elle lui reproche par ailleurs de n'avoir pas respecté les procédures et d'avoir agi à l'encontre des professionnels de la santé, de la représentation de la Suisse à l'ONU pour les droits de l'enfant et des directives officielles. Le curateur manquait enfin des compétences personnelles lui permettant de se remettre en question.

b) Le Tribunal de protection n'a pas souhaité reconsidérer sa décision.

c) D______ ne s'est pas déterminé sur le recours.

d) B______ a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, avec suite de frais et dépens.

EN DROIT

1. 1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (450 al. 1 CC; art. 53 al. 1 LaCC; art. 126 al. let. b LOJ). Ont qualité pour recourir les personnes parties à la procédure (art. 450 al. 2 ch. 1 CC). Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit auprès du juge (art. 450 al. 3 CC). Le délai de recours est de trente jours à compter de la notification de la décision (art. 450b al. 1 CC).

1.2 En l'espèce, le recours a été formé par la mère de l'enfant par écrit et dans le délai prescrit. Il répond aux exigences de motivation prescrites par la jurisprudence pour une partie plaidant en personne, dans la mesure où il permet de reconnaître les raisons pour lesquelles la recourante reproche au Tribunal de protection de ne pas avoir révoqué le curateur désigné (arrêt du Tribunal fédéral 5A_922/2015 consid. 5.1).

Son recours est ainsi recevable.

2. La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

3. La recourante demande à la Chambre de surveillance d'annuler la décision attaquée et de libérer le curateur de ses fonctions.

3.1 L'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les aptitudes et les connaissances nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui seront confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne; elle libère le curateur de ses fonctions notamment s'il n'est plus apte à remplir les tâches qui lui sont confiées ou s'il existe un autre juste motif (art. 400 al. 1 et 423 ch. 1 et 2 CC, applicables à la protection des mineurs par renvoi de l'art. 327c CC).

L'application de l'art. 423 CC est gouvernée par le principe de proportionnalité, et les autorités de protection doivent exiger une sérieuse mise en danger des intérêts ou du bien-être de la personne protégée pour prononcer la libération du curateur (cf. DAS/228/2017, consid. 3.1).

Les collaborateurs du SPMi désignés curateur remplissent les conditions d'aptitudes nécessaires à leur fonction puisqu'ils sont des collaborateurs d'un service étatique spécifiquement chargé de la protection des mineurs. A défaut de griefs formulés remettant spécifiquement en cause leur aptitude, un simple procès d'intention à leur égard n'est pas recevable (DAS/222/2019 du 21 novembre 2019, consid. 2.2.1).

3.2 En l'espèce, la recourante reproche au curateur de ne disposer d'aucune compétence dans le domaine de la santé. Dans la mesure où ce dernier a été chargé de la surveillance des relations personnelles et de la supervision et de l'accompagnement du transfert de la garde confiée au père, sa fonction ne requiert pas de compétences médicales spécifiques. Au regard de sa formation d'assistant social et de sa fonction de collaborateur au sein du SPMi, il dispose des aptitudes professionnelles nécessaires à la mission qui lui a été confiée.

C'est par ailleurs à tort que la recourante fait grief au curateur de n'avoir pas respecté les procédures et d'avoir agi à l'encontre des professionnels de la santé, de la représentation de la Suisse à l'ONU pour les droits de l'enfant et des directives officielles. Comme le Tribunal de protection l'a relevé à juste titre, le curateur est tenu de se conformer aux décisions rendues par les autorités judiciaires. Ainsi, contrairement à ce que soutient la recourante, il n'avait pas à s'écarter des décisions judiciaires prononcées pour tenir compte d'avis de professionnels ou d'autres organismes. Le curateur n'a ainsi pas failli à sa mission en agissant en conformité des décisions judiciaires prononcées.

Aucun élément ne permet enfin de retenir que le curateur ne dispose pas des compétences personnelles requises pour l'accomplissement de ses fonctions: le grief que la recourante soulève en soutenant que le curateur n'est pas en mesure de se remettre en question n'est ainsi pas fondé.

Il résulte des éléments qui précèdent qu'aucun élément au dossier ne permet de retenir que le curateur désigné pour surveiller les relations personnelles, superviser et accompagner le transfert de garde a failli à sa mission ou qu'il ne dispose pas des aptitudes nécessaires à l'accomplissement de celle-ci.

Le recours doit en conséquence être rejeté.

4. S'agissant d'une mesure de protection, la procédure est gratuite (art. 81 LaCC).

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 16 août 2021 par A______ contre l'ordonnance DTAE/4535/2021 rendue le 6 juillet 2021 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/13675/2015.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Dit que la procédure est gratuite et qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Verena PEDRAZZINI RIZZI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.