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Décisions | Chambre de surveillance

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C/1665/2019

DAS/206/2021 du 12.11.2021 sur DTAE/3219/2021 ( PAE ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1665/2019-CS DAS/206/2021

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 8 NOVEMBRE 2021

 

Recours (C/1665/2019-CS) formé en date du 28 juin 2021 par Monsieur A______, domicilié ______, comparant par Me Andrea VON FLÜE, avocat, en l'Etude duquel il élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 15 novembre 2021 à :

- Monsieur A______
c/o Me Andrea VON FLÜE, avocat.
Rue de la Terrassière 9, 1207 Genève.

- Madame B______
______, ______.

- Maître C______
Curatrice de représentation de D______
______, ______.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           Par ordonnance DTAE/3219/2021 rendue le 14 juin 2021, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) a approuvé le rapport final du 12 novembre 2020 de C______ pour son activité de curatrice de représentation du mineur D______, né le ______ 2005 (ch. 1 du dispositif), arrêté les honoraires de la curatrice à 7'325 fr. 40 (ch. 2), qu'il a mis à la charge de A______ et de B______ à raison d'une moitié chacun (ch. 3) et rappelé que la procédure était gratuite (ch. 4).

B.            a) Par acte expédié à la Cour de justice le 28 juin 2021, A______ a recouru contre cette ordonnance, qu'il a reçue le 18 juin 2021. Il conclut à l'annulation du chiffre 3 du dispositif de cette ordonnance et à ce que la Chambre de surveillance dise que les honoraires de la curatrice seront prélevés sur la fortune du mineur D______, mette ces honoraires à la charge de l'Etat ou, subsidiairement, à la charge de B______, mette les frais judiciaires à la charge des parents par moitié et déboute les parties de toutes autres conclusions.

b) Le Tribunal de protection n'a pas souhaité reconsidérer sa décision.

c) Dans sa réponse, la curatrice de représentation de D______ a conclu au rejet du recours.

d) B______ ne s'est pas déterminée dans le délai imparti.

e) Par avis du greffe du 19 août 2021, les participants à la procédure ont été informés de ce que la Chambre de surveillance garderait la cause à juger à l'issue d'un délai de dix jours.

C.           a) A______ et B______ sont les parents du mineur D______, né le ______ 2005. Ils exercent conjointement l'autorité parentale sur leur enfant.

Ils vivent séparés depuis fin 2018.

b) Dans le cadre des mesures protectrices de l'union conjugale prononcées par jugement du Tribunal de première instance du 12 novembre 2020 et arrêt de la Cour du 1er juin 2021, une garde alternée de l'enfant a été instituée, et l'entretien de ce dernier a été réglé comme suit : la mère s'acquittait des charges courantes, chaque parent assumait les besoins courants lorsque l'enfant était sous sa garde et les parents se répartissaient par moitié la prise en charge des frais extraordinaires.

En ce qui concernait la situation financière des parents, il a été retenu que le père percevait des revenus effectifs de l'ordre de 2'400 fr. par mois, qu'un revenu hypothétique de 5'000 fr. par mois pouvait lui être imputé et que ses charges mensuelles représentaient 3'556 fr. Il détenait un montant de quelques 190'000 fr. sur un compte d'épargne, dont il a exposé qu'il provenait de la succession de son père et qu'il pouvait être amené à le restituer. La mère touchait un salaire de 8'144 fr. par mois et ses charges mensuelles se montaient à 4'796 fr.

c) E______, père de A______ et grand-père paternel de D______, est décédé le ______ 2018.

Par testament du 19 février 2012, E______ a attribué à ses deux fils, dont A______, les tableaux et objets de famille, collection de timbres, ordinateurs et appareils photos. Il a légué ses biens immobiliers à sa compagne et ses avoirs bancaires, de l'ordre de 500'000 fr. à ses deux petits-enfants, dont D______, à parts égales, avoirs qui devaient être utilisés pour leur éducation et leurs études jusqu'à leurs 28 ans.

d) Par ordonnance du 7 mars 2019, le Tribunal de protection a désigné C______, avocate, aux fonctions de curatrice de représentation du mineur dans la succession de son grand-père.

Le Tribunal de protection a considéré que le conflit entre les intérêts de l'enfant et ceux de son père, dans la succession du grand-père de l'enfant, justifiait d'instaurer une curatelle de représentation de l'enfant.

Cette décision n'a pas été communiquée à la mère du mineur.

e) Dans le cadre de la liquidation de la succession de E______, des pourparlers ont été menés, les deux fils du défunt réclamant que leur réserve successorale soit respectée.

En mars 2020, un montant de 30'000 fr. a été prélevé sur les avoirs de la succession et versé en faveur de l'enfant D______ en mains de sa curatrice de représentation.

A______ a ouvert une action en réduction dirigée contre la compagne du défunt, son neveu et son fils par devant les tribunaux valaisans.

f) Le 3 juillet 2020, la curatrice de représentation a requis des parents de son protégé le versement d'une provision de 5'000 fr.

Le 8 juillet 2020, B______ lui a répondu ne pas être au courant de l'existence d'une mesure de curatelle concernant son fils, en priant la curatrice de lui remettre les documents s'y rapportant et de l'informer de l'avancement de la procédure successorale impliquant son fils.

g) Le 5 octobre 2020, à la requête de la curatrice C______ proposant un changement de curateur au regard de la procédure judiciaire successorale ouverte devant les tribunaux à G______ [VS], le Tribunal de protection a relevé C______ de ses fonctions et désigné F______, avocate à G______ [VS], comme curatrice de représentation du mineur D______.

h) Le 12 novembre 2020, la curatrice C______ a transmis au Tribunal de protection sa note d'honoraires et de frais pour la représentation de D______ du 7 mars 2019 au 12 novembre 2020, s'élevant à 7'325 fr. 42 correspondant à 23 heures d'activité au taux de 300 fr. l'heure et 425 fr. 42 de débours.

i) Le 22 janvier 2021, le Tribunal de protection a informé les parents du mineur qu'il entendait taxer les honoraires de la curatrice et mettre ces derniers à leur charge en les répartissant par moitié entre eux.

j) Par courrier du 27 janvier 2021, A______ s'est opposé à ce que les honoraires de la curatrice soient mis à sa charge. Sa situation financière était difficile, il plaidait au bénéfice de l'assistance judiciaire dans la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale. Les frais de représentation de la curatrice de l'enfant devaient être prélevés sur la fortune de son fils, soit sur la somme de 30'000 fr. consignée auprès de la curatrice de celui-ci. Subsidiairement, les frais devaient être répartis par moitié entre les deux parents, la situation de la mère de l'enfant étant meilleure que la sienne.

k) Par courrier du 24 février 2021, B______ a relevé qu'elle n'avait jamais été informée ou consultée dans le cadre des procédures impliquant son fils. Elle acceptait son obligation d'entretien à l'égard de son enfant, qu'elle partageait avec le père de celui-ci, et s'acquitterait de son devoir pour autant que le père de l'enfant s'acquitte de sa part et qu'elle soit informée et consultée lors des différentes étapes de la procédure, ce qui n'avait jamais été le cas.

D. Sur quoi, le Tribunal de protection a rendu l'ordonnance querellée, en retenant que les parents n'avaient pas émis de critique s'agissant de l'activité menée par la curatrice ou du tarif horaire appliqué, de sorte que les honoraires de cette dernière étaient arrêtés à 7'325 fr. 40, et qu'il convenait de mettre ces honoraires à la charge des parents à raison de la moitié chacun en équité puisqu'il ne disposait d'aucune information quant à la répartition entre eux des frais extraordinaires du mineur.

EN DROIT

1.             1.1. Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 314 al. 1 et 450 al. 1 CC; art. 53 al. 1 LaCC).

Interjeté par une personne ayant qualité pour recourir, dans le délai utile de trente jours et suivant la forme prescrite, le recours est recevable (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC).

1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

2. Le recourant reproche au Tribunal de protection d'avoir mis à sa charge la moitié des honoraires de la curatrice de représentation de son fils, arguant de ce que ces frais de représentation devaient être prélevés sur la fortune de son fils ou mis à la charge de l'Etat ou de la mère.

2.1.1 Les père et mère sont, dans les limites de leur autorité parentale, les représentants légaux de leurs enfants à l'égard des tiers (art. 304 al. 1 CC).

Si les père et mère sont empêchés d'agir ou si, dans une affaire, leurs intérêts entrent en conflit avec ceux de l'enfant, l'autorité de protection de l'enfant nomme un curateur ou prend elle-même les mesures nécessaires (art. 306 al. 2 CC).

2.1.2 Les père et mère contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (art. 276 al. 1 CC). Ils sont déliés de leur obligation d'entretien dans la mesure où l'on peut attendre de l'enfant qu'il subvienne à son entretien par le produit de son travail ou par ses autres ressources (art. 276 al. 3 CC).

2.1.3 A teneur de l'art. 404 CC, le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée (al. 1). L'autorité de protection fixe la rémunération et tient compte en particulier de l'étendue et de la complexité des tâches confiées au curateur (al. 2).

L'art. 404 CC s'applique par analogie aux mineurs (art. 327c al. 2 CC) pour ce qui concerne le droit à la rémunération du curateur et la fixation de ses honoraires. Lorsque la curatelle concerne un mineur, il convient toutefois de tenir compte des spécificités du droit de l'enfant et par conséquent de tenir les parents principalement responsables de ces frais selon l'art. 276 al. 1 CC et de ne prendre en considération les biens de l'enfant que de manière subsidiaire, en application de l'art. 276 al. 3 CC (Lienhard/Affolter, Basler Kommentar Zivilgesetzbuch I (2018), n. 67a et ss ad art. 327c CC; Affolter, Berner Kommentar, Fringeli/Vogel (2016) ad art. 327c CC n. 69a et 69c).

2.2 En l'espèce, le Tribunal de protection a désigné une curatrice pour le mineur D______ afin de le représenter dans la succession de son grand-père en raison du conflit d'intérêts découlant de ce que le père de l'enfant était également héritier dans cette succession. Il a, dans la décision querellée, mis les honoraires de la curatrice de représentation à la charge des parents du mineur à raison d'une moitié chacun. Il résulte en effet des mesures protectrices de l'union conjugale prononcées le 12 novembre 2020 que l'entretien de D______ a été réglé et que les parents se répartissaient par moitié la prise en charge des frais extraordinaires de l'enfant. Le Tribunal de protection n'a en revanche pas tenu compte des biens du mineur qui a, au terme d'un partage partiel opéré dans le cadre de la liquidation de la succession de son grand-père, déjà perçu un montant de 30'000 fr. versé en main de sa curatrice de représentation. Cet élément de fortune de l'enfant, ses droits dans la succession de son grand-père ainsi que la situation financière de ses parents conduisent à retenir que dans le cas d'espèce, l'enfant est à même d'assumer ses frais de représentation au moyen de ses propres biens de sorte que ses parents n'ont pas à assumer ces frais en vertu de leur obligation générale d'entretien.

Le recours sera en conséquence admis et les frais de représentation de l'enfant, dont la quotité n'a pas été remise en cause devant la Chambre de surveillance, seront ainsi à prélever sur la somme de 30'000 fr. versée pour le compte du mineur en main de sa curatrice de représentation.

3. Les frais judiciaires de recours seront arrêtés à 400 fr., compensés avec l'avance fournie par le recourant et mis à la charge du mineur, qui succombe (art. 106 al. 1 et 111 al. 1 CPC; art. 67A du règlement fixant le tarif des frais en matière civile). Ce dernier sera condamné à rembourser 400 fr. au recourant.

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 28 juin 2021 par A______ contre l'ordonnance DTAE/3219/2021 rendue le 14 juin 2021 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/1665/2019.

Au fond :

L'admet et annule le chiffre 3 du dispositif de cette ordonnance et statuant à nouveau sur ce point :

Dit que les honoraires de la curatrice de représentation sont à prélever sur la fortune de D______.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 400 fr., les met à la charge de D______ et les compense avec l'avance de frais fournie par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne en conséquence D______ à rembourser 400 fr. à A______.

Dit qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :


Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; 
RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.