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Décisions | Chambre de surveillance

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C/1637/2013

DAS/100/2021 du 12.05.2021 sur DTAE/6341/2020 ( PAE ) , REJETE

Normes : CPC.47.al1.letf; CPC.49; CPC.50.al1; LaCC.13.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1637/2013-CS DAS/100/2021

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MERCREDI 12 MAI 2021

 

Recours (C/1637/2013-CS) formés en date du 16 novembre 2020 par Madame A______, domiciliée ______[GE], comparant en personne.

* * * * *

Décision communiquée par pli recommandé et plis internes du greffier du 19 mai 2021 à :

 

- Madame A______
______, Genève.

- Madame B______
Présidente et juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Madame C______
Vice-Présidente et juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Monsieur D______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Madame E______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Madame F______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Madame G______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Monsieur H______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- Madame I______
Juge
au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.                a. A______ est la grand-mère maternelle de l'enfant J______, né le ______ 2013 à Genève de la relation hors mariage entretenue par K______ et L______.

Après la naissance de son fils, K______ a été hospitalisée en psychiatrie et ce pendant plusieurs mois. L'enfant J______ a été confié à A______, après avoir été placé pendant quelques temps au sein d'une famille d'accueil.

b. Par ordonnance du 22 juillet 2013, le Tribunal de protection a retiré à K______ l'autorité parentale sur son fils J______ et instauré une mesure de tutelle en faveur de ce dernier, confiée au Service de protection des mineurs.

c. Le lieu de scolarité du mineur J______ a été à l'origine d'une situation conflictuelle entre A______ et le tuteur de l'enfant, la première souhaitant que le mineur soit scolarisé à l'école S______, laquelle applique la pédagogie Montessori, le second préconisant une inscription au sein de l'école de pédagogie spécialisée de T______, en raison des difficultés rencontrées par le mineur.

d. Lors d'une audience qui s'est tenue devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) le 19 février 2020, L______ a sollicité l'autorité parentale sur son fils.

Les tuteurs ont fait part des difficultés de collaboration avec A______ s'agissant de la scolarité de l'enfant, de l'organisation de ses relations personnelles avec sa famille paternelle, de son suivi médical et de sa prise en charge financière.

e. Le 14 mai 2020, le Tribunal de protection a ordonné, par une décision DTAE/2415/2020 rendue sur mesures superprovisionnelles, le placement du mineur J______ au sein d'un foyer.

L'enfant a depuis lors intégré le foyer U______.

f. Par décision du 15 mai 2020, le Service d'autorisation et de surveillance des lieux de placement a formellement retiré à A______ l'autorisation d'accueillir l'enfant J______.

g. Opposée au placement de son petit-fils, A______ a multiplié les procédures devant le Tribunal de protection, la Chambre de surveillance de la Cour de justice et le Tribunal fédéral.

h. Par courrier du 15 mai 2020 adressé au Tribunal de protection, A______ a relaté sa propre vision des faits, agrémentée de propos abscons faisant entre autre référence au "droit négatif du droit divin", à un prétendu "trust servant de gage pour l'Etat et les banques", au fait qu'elle était "un contrat dépendant du droit commercial" et que le "tribunal était donc une banque et le juge un banquier", le tout parsemé de références bibliques. Ce courrier ne contenait aucune conclusion intelligible.

i. Le 26 mai 2020, A______ a saisi le Tribunal de protection d'une demande intitulée "demande superprovisionnelle et demande de récusation". Elle a notamment conclu à la récusation de la juge E______, à l'annulation de la décision du 14 mai 2020 et à ce que le retour auprès d'elle de son petit-fils J______ soit ordonné.

j. Par décision DTAE/2711/2020 du 27 mai 2020, le Tribunal de protection a rejeté la requête de mesures superprovisionnelles formée par A______ le 26 mai 2020, aucun motif ne justifiant le prononcé de nouvelles mesures et la procédure suivant son cours.

k. La requête de récusation a quant à elle été déclarée irrecevable par décision DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020 rendue par le plenum du Tribunal de protection, exception faite de la magistrate mise en cause, lequel a considéré que la qualité de parent nourricier de A______ ne lui conférait pas celle de partie à la procédure en protection de l'enfant J______, mais uniquement le droit d'être consultée en prévision des décisions importantes dans la vie de l'enfant. Pour le surplus, le plenum du Tribunal de protection a relevé que les griefs soulevés par A______ ne permettaient pas de démontrer la prévention de la magistrate mise en cause. Dès lors, même si la requête avait été recevable, elle aurait dû être rejetée. Cette décision a été reçue par A______ le 12 octobre 2020.

Par décision DAS/20/2021 du 26 janvier 2021, la Chambre de surveillance de la Cour de justice a déclaré irrecevable le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020, en raison du non-versement de l'avance de frais requise.

l. Le 11 juin 2020, A______ a formé une nouvelle demande intitulée "demande superprovisionnelle et demande de récusation", laquelle reprenait les conclusions de la requête du 26 mai 2020, la demande de récusation concernant cette fois le juge H______, signataire de la décision du 27 mai 2020.

m. Par décision du 17 juillet 2020, la Présidente du Tribunal de protection a informé A______ de ce que sa demande de récusation concernant le juge H______ était sans objet, celui-ci n'étant intervenu qu'à une seule reprise dans la procédure et n'étant pas amené à l'instruire plus avant.

Pour le surplus, il n'a pas été donné suite à la demande de mesures superprovisionnelles.

n. Le 10 juillet 2020, A______ a saisi la Chambre de surveillance de la Cour de justice d'une demande intitulée "demande superprovisionnelle pour retard injustifié du tribunal".

La requête de mesures superprovisionnelles a été rejetée par décision DAS/117/2020 de la Chambre de surveillance du 13 juillet 2020.

Par décision DAS/150/2020 du 24 septembre 2020, la Chambre de surveillance a déclaré partiellement fondé le recours du 10 juillet 2020 formé par A______ pour déni de justice et a retourné la cause au Tribunal de protection en l'invitant à rendre sans délai une décision faisant suite à sa décision DTAE/2415/2020 du 14 mai 2020 sur mesures superprovisionnelles.

o. Par ordonnance DTAE/5738/2020 du 8 octobre 2020, le Tribunal de protection, statuant sur mesures provisionnelles, a rejeté les recours formés par A______ en date des 23 juillet 2019 et 15 mai 2020, confirmé M______, intervenant en protection de l'enfant, ainsi que N______, chef de groupe, aux fonctions de tuteurs de l'enfant J______, invité les tuteurs à poursuivre leurs démarches aux fins d'assurer la reprise, aussitôt que la situation le permettrait au regard du bien de leur protégé, de relations personnelles régulières entre ce dernier et sa grand-mère maternelle, dont les modalités seraient à définir en fonction des besoins spécifiques de l'enfant et des disponibilités des personnes et structures concernées, pris acte pour le surplus de ce que A______ avait entrepris un travail thérapeutique personnel et débouté les parties de toutes autres conclusions.

Par décision DAS/11/2021 du 22 janvier 2021, la Chambre de surveillance a rejeté le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/5738/2020 du 8 octobre 2020.

B. a. Le 22 octobre 2020, A______ a adressé au Tribunal de protection un acte comportant trente pages, inintelligible pour l'essentiel, intitulé "déterminations de la famille d'accueil et demande de récusation". Elle a formulé vingt-sept conclusions, difficilement compréhensibles pour la plupart, mentionnant notamment le fait qu'avant de poursuivre, il convenait "d'attendre l'issue de la demande de récusation de Madame E______ et de la récusation de la délégation du 7 octobre 2020". Elle a également "réitéré" la récusation de cette magistrate, lui reprochant de "prendre le parti des tuteurs", d'avoir protocolé "n'importe quoi" dans le procès-verbal du 9 septembre 2020 et de confondre "le droit administratif, le droit civil et le droit pénal concernant les mandats de tutelle. Selon A______, la juge E______ devait "se récuser elle-même en raison de cette procédure provisionnelle".

b. Le 22 octobre 2020 également, A______ a formé, dans un seul et même acte adressé tant au Tribunal de protection qu'à la Chambre de surveillance de la Cour de justice, une "demande de récusation" et une "demande de recours", considérant que les deux demandes étaient "intimement liées", de sorte qu'elles se trouvaient dans le même document. La demande de récusation visait tous les magistrats ayant participé à la prise de la décision DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020, laquelle avait déclaré irrecevable la requête de récusation dirigée à l'encontre de la juge E______. Le recours formé devant la Chambre de surveillance était dirigé contre cette même décision.

A______ a invoqué le fait que la décision litigieuse n'avait pas été prise par le nombre de juges prévu par la loi et que l'ensemble des magistrats ayant siégé était par ailleurs prévenu à son égard. Elle a par ailleurs présenté un tableau dans lequel elle a repris, en le morcelant, le texte de la décision DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020, chaque partie étant agrémentée des termes "refusé" ou "accepté", ainsi que de divers commentaires, appréciations et critiques portant pour certains sur le fond de la cause et sur le fait que c'était à tort que sa qualité de partie avait été niée et pour d'autres sur la manière dont la juge E______ instruisait la procédure.

c. Par ordonnance DTAE/6319/2020 du 2 novembre 2020, le Tribunal de protection, soit pour lui sa présidente, la juge B______, a déclaré irrecevable la requête en récusation formée par A______ le 22 octobre 2020 à l'encontre d'elle-même et des juges C______, I______, F______, G______ de O______, D______, H______ et P______ (soit tous les magistrats ayant siégé dans le cadre de la DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020) (chiffre 1 du dispositif).

A______ a par ailleurs été informée de ce que toute nouvelle demande de récusation abusive ou écriture analogue serait classée sans autre acte d'instruction et sans décision (ch. 2). Les frais judiciaires, en 300 fr., ont été mis à sa charge (ch. 3).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que A______ avait soulevé des griefs qui relevaient de la procédure de recours, de la même manière qu'elle l'avait fait dans ses requêtes de récusation à l'encontre de la juge E______. Une demande de récusation dirigée contre le plenum des juges visait manifestement à utiliser les institutions juridiques dans un but qui n'était pas le leur, ce qui était constitutif d'un abus de droit et ne pouvait être protégé. Le procédé utilisé par A______ avait pour effet de ralentir le bon fonctionnement de la juridiction, dont la mission consistait à assurer la protection de personnes en situation de vulnérabilité. La requête devait par conséquent être déclarée irrecevable.

d. Par ordonnance DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020, le Tribunal de protection, soit la juge E______, ainsi que Q______ et R______, juges assesseurs, a déclaré irrecevable la requête en récusation formée par A______ en date du 22 octobre 2020 à l'encontre de la présidente de la 9ème Chambre du Tribunal de protection, soit E______ (chiffre 1), informé pour le surplus A______ que toute nouvelle demande de récusation abusive ou écriture analogue serait classée sans instruction ni réponse (ch. 2), arrêté les frais à 300 fr. et les a mis à la charge de A______ (ch. 3).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que A______ avait développé, sans discernement et sans se prévaloir de faits nouveaux pertinents, différents griefs de type appellatoire, comme cela avait déjà été le cas précédemment. Lesdites démarches avaient pour conséquence de contribuer à ralentir le fonctionnement des juridictions, ce qui les détournait de leur mission principale. Il s'agissait dès lors d'un cas typique d'abus de droit. Le collège des juges de la 9ème Chambre du Tribunal de protection était, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, lui-même compétent pour se prononcer sur la demande de récusation abusive.

C.                a. Le 16 novembre 2020, A______ a formé un recours devant la Chambre de surveillance contre l'ordonnance DTAE/6319/2020 du 2 novembre 2020, reçue le 4 novembre 2020. La recourante a pris quatorze chefs de conclusions, portant notamment sur la constatation de la nullité de la décision entreprise. Elle a par ailleurs conclu à ce qu'une nouvelle délégation, constituée conformément à l'art. 13 al. 2 LaCC, soit formée, ne comprenant pas les membres qui auraient été récusés.

La recourante fait grief au Tribunal de protection, soit en l'occurrence à la juge B______, d'avoir rendu la décision attaquée alors qu'elle faisait partie des magistrats ayant fait l'objet de la demande de récusation du 22 octobre 2020, de sorte que son ordonnance était frappée de nullité.

b. Le Tribunal de protection n'a pas souhaité formuler d'observations.

c. La recourante a répliqué le 23 mars 2021.

D. a. Le 16 novembre 2020, A______ a formé un recours devant la Chambre de surveillance contre l'ordonnance DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020, reçue le 5 novembre 2020. La recourante a conclu à ce qu'il soit constaté que la demande de récusation du 22 octobre 2020 ne concernait nullement la magistrate E______ et que celle-ci ne pouvait pas statuer. L'ordonnance attaquée était dès lors nulle.

b. Le Tribunal de protection n'a pas souhaité faire usage des facultés prévues à l'art. 450d CC.

c. A______ a répliqué le 23 mars 2021.

EN DROIT

1.                  1.1 Les deux recours concernent des décisions rendues par le Tribunal de protection dans des causes de récusation; la Chambre de surveillance de la Cour de justice est compétente pour en connaître (art. 13 al. 1 in fine LaCC).

1.2 Les deux recours ont été formés dans le délai utile et il sera admis, la recourante agissant sans le concours d'un avocat, que la motivation et les conclusions sont suffisantes sous l'angle de l'admissibilité des recours, qui seront traités dans une seule et même décision.

2. 2.1 L'ordonnance DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020 a déclaré irrecevable la requête en récusation formée par A______ le 22 octobre 2020 à l'encontre de la juge E______. Or, dans son recours, A______ affirme n'avoir pas sollicité la récusation de cette magistrate le 22 octobre 2020.

2.2 Le 22 octobre 2020, A______ a adressé au Tribunal de protection un acte de trente pages, difficilement compréhensible. Son titre indiquait toutefois "demande de récusation" et il ressortait de son contenu que A______ entendait obtenir la récusation de la juge E______, à l'encontre de laquelle elle formulait divers reproches. Il ne saurait dès lors être fait grief au Tribunal de protection d'avoir considéré cet acte comme une demande de récusation à l'encontre de cette magistrate et d'avoir statué.

La Chambre de surveillance prendra toutefois acte du fait que dans son acte de recours A______ a indiqué n'avoir, le 22 octobre 2020, pas sollicité la récusation de la juge E______, de sorte que l'ordonnance DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020 est le fruit d'un malentendu, imputable au manque de clarté de l'écriture déposée par A______.

Au vu de ce qui précède, l'ordonnance attaquée sera toutefois purement et simplement annulée, sans qu'il soit nécessaire de trancher la question de la compétence de la composition du Tribunal de protection qui l'a rendue.

3.                  3.1.1 Les magistrats et les fonctionnaires judiciaires se récusent, outre les motifs figurant à l'art. 47 al. 1 let. a à e, également s'ils pourraient être prévenus de toute autre manière, notamment en raison d'un rapport d'amitié ou d'inimitié avec une partie ou son représentant (art. 47 al. 1 let. f CPC).

La partie qui entend obtenir la récusation d'un magistrat ou d'un fonctionnaire judiciaire la demande au tribunal aussitôt qu'elle a eu connaissance du motif de récusation. Elle doit rendre vraisemblables les faits qui motivent sa demande (art. 49 al. 1 CPC).

Si le motif de récusation invoqué est contesté, le tribunal statue (art. 50 al. 1 CPC).

Le collège des juges du Tribunal de protection statue sur les demandes de récusation dirigées contre l'un de ses membres ou l'un de ses fonctionnaires. (art. 13 al. 1 LaCC).

3.1.2 Dans un tel système, il est évident que le tribunal appelé à statuer ne peut comprendre la personne qui souhaite se récuser spontanément ou dont la récusation est demandée. (...).Une exception peut toutefois se justifier en cas de demande de récusation manifestement irrecevable ou abusive (Tappy, CR CPC 2ème éd. ad art. 50 n. 14).

Le CPC ne prévoit pas de récusation d'une juridiction en corps. Il est cependant possible que l'ensemble des juges d'un tribunal souhaite se récuser ou que leur récusation à tous soit demandée, ce qui arrive notamment, en dehors du cas de demandes chicanières (...) ou de rares cas de suspicion légitime frappant une juridiction comme telle (...), lorsque l'une des parties est un membre de l'autorité concernée (...). Il se justifierait que le droit cantonal prévoie pour ce cas une autorité de récusation extraordinaire, comme le tribunal neutre dans le canton de Vaud (Tappy, op. cit. ad art. 50 n. 16).

Le Tribunal fédéral considère cependant que le recours à une cour extraordinaire ne se justifie qu'en présence de motifs de récusation présentant une apparence de raison, et que les juges ou la cour récusée peuvent écarter eux-mêmes une demande de récusation irrecevable (notamment faute de motivation) ou abusive, voire manifestement mal fondée (ATF 114 Ia 278 c. 1; arrêts du Tribunal fédéral 1C_606/2012 du 5 juin 2013 c. 2 non publié aux ATF 139 II 303 rés. JdT 2014 I 29; 1C_187/2017 du 20 mars 2018 c. 4.2) (Tappy, op. cit. ad art. 50 n. 18 et les références citées). Cette solution peut, de l'avis de Tappy, être transposée dans le cadre de l'application des art. 47 ss (...), mais avec une certaine retenue: le Tribunal fédéral a ainsi jugé qu'il n'était pas manifestement abusif de demander la récusation de tous les juges d'un tribunal administratif au motif que le conseil d'une des parties en était juge suppléant, de telle sorte que la demande, sur le fond sans doute infondée, devait être examinée par l'autorité de récusation extraordinaire prévue par le droit cantonal et non par une cour dudit tribunal administratif elle-même (arrêt du Tribunal fédéral 8C_557/2011 du 1er février 2012) (Tappy, op. cit. ad art. 50 n. 18).

3.2.1 En l'espèce, A______ a, le 26 mai 2020, requis la récusation de la juge E______. Cette requête a donné lieu à la décision DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020 rendue par le plenum du Tribunal de protection, exception faite de la magistrate mise en cause et ce conformément à l'art. 13 al. 1 LaCC, contrairement à ce qu'allègue la recourante, qui fait une lecture manifestement erronée de cette disposition.

Le 22 octobre 2020, A______ a requis la récusation de l'ensemble des magistrats ayant rendu cette décision, requête ayant donné lieu à l'ordonnance DTAE/6319/2020 du 2 novembre 2020, rendue par la seule B______, présidente du Tribunal de protection. Se pose dès lors la question de la compétence de cette dernière pour rendre une telle décision.

Il sera tout d'abord relevé que la LaCC, qui règle à son art. 13 la compétence au sein des diverses juridictions pour statuer sur une requête de récusation, ne prévoit aucune autorité de récusation extraordinaire compétente pour trancher des requêtes visant, comme en l'espèce, l'ensemble des magistrats d'une juridiction. Il convient par conséquent de déterminer si le Tribunal de protection aurait dû solliciter la désignation d'une telle autorité de récusation extraordinaire ou s'il était admissible qu'il statue lui-même et si oui, dans quelle composition.

3.2.2 Conformément à la doctrine et à la jurisprudence citée ci-dessus, le recours à une cour extraordinaire ne se justifie qu'en présence de motifs de récusation présentant une apparence de raison. Il aurait donc fallu, pour que le Tribunal de protection sollicite la désignation d'une autorité de récusation extraordinaire, que la demande de récusation formée à son encontre par A______ ait eu quelques chances, mêmes infimes, d'aboutir. Or, tel n'était manifestement pas le cas.

Il résulte en effet de l'intitulé même de l'acte du 22 octobre 2020 ("demande de récusation et demande de recours"), adressé simultanément au Tribunal de protection et à la Cour de justice, que A______ n'opère aucune distinction entre les griefs pouvant être invoqués dans le cadre d'un recours contre une décision et ceux susceptibles de motiver une demande de récusation au sens des art. 47 ss CPC. Son écriture du 22 octobre 2020, au demeurant difficilement compréhensible, était ainsi un amalgame de critiques et d'appréciations personnelles qui concernaient, pour l'essentiel, le fond de la cause ou la manière dont celle-ci était instruite par la magistrate qui en avait la charge. En revanche, l'acte ne décrivait, en tant que tel, aucun élément concernant la supposée prévention de l'ensemble des juges du Tribunal de protection à l'encontre de la recourante. Autrement dit, l'acte ne permettait pas de comprendre les raisons pour lesquelles la recourante considérait qu'il y avait matière à récuser tous les juges ayant rendu la décision DTAE/5668/2020 du 7 octobre 2020 et ce même en faisant preuve d'indulgence à l'égard d'un justiciable non représenté par un avocat. Le seul fait que la décision du 7 octobre 2020 n'ait pas convenu à la recourante n'était pas un motif permettant de solliciter la récusation des magistrats l'ayant rendue. Pour le surplus, les griefs soulevés par la recourante, qui concernaient le fond, relevaient de la procédure de recours et non de la récusation.

Le Tribunal de protection pouvait par conséquent, vu l'absence de toute apparence de raison de la demande de récusation formée à son égard, statuer lui-même, sans solliciter la désignation d'une autorité de récusation extraordinaire. Compte tenu de l'absence de toute base légale réglementant ce point, le fait que la décision attaquée émane de la seule présidente du Tribunal de protection et non de tous les magistrats dont la récusation était sollicitée ne saurait conduire à son annulation, le sort de la demande de récusation étant, quoiqu'il en soit, scellé.

Au vu de ce qui précède, le recours, infondé en tant qu'il concerne l'ordonnance DTAE/6319/2020 du 2 novembre 2020, sera rejeté.

3.3 C'est enfin à raison que le Tribunal de protection a fait application de l'art. 132 al. 3 CPC, en informant la recourante de ce que, désormais, toute nouvelle demande de récusation abusive ou écriture analogue serait classée sans autre acte d'instruction et sans décision, la Chambre de surveillance se réservant la possibilité d'en faire de même.

4.                  Les frais de la procédure seront arrêtés à 400 fr., la Chambre de surveillance renonçant à prélever un émolument de décision relatif au recours formé contre la décision DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020, au vu de l'issue de la procédure de recours la concernant. Les frais seront mis à la charge de la recourante (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec l'avance de frais versée, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevables les recours formés par A______ contre l'ordonnance DTAE/6341/2020 et contre l'ordonnance DTAE/6319/2020 rendues toutes deux le 2 novembre 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/1637/2013.

Au fond :

Annule l'ordonnance DTAE/6341/2020 du 2 novembre 2020.

Rejette le recours dirigé contre l'ordonnance DTAE/6319/2020 du 2 novembre 2020.

Sur les frais :

Renonce à percevoir un émolument de décision s'agissant du recours dirigé contre l'ordonnance DTAE/6341/2020.

Arrête les frais de la procédure de recours relative à l'ordonnance DTAE/6319/2020 à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.