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Décisions | Chambre de surveillance

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C/16447/2020

DAS/88/2021 du 12.04.2021 sur DTAE/7691/2020 ( PAE ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16447/2020-CS DAS/88/2021

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 12 AVRIL 2021

 

Recours (C/16447/2020-CS) formé en date du 19 février 2021 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève) comparant par Me I______, avocat, en l'Etude duquel il élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 15 avril 2021 à :

- Monsieur A______
c/o Me I______, avocat.
Rue ______, Genève.

- Professeur B______
Département ______
Chemin ______, ______ [GE].

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           a) Par courrier du 23 août 2020 adressé au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection), C______ déclarait se faire beaucoup de soucis pour son fils A______ (né le ______ 1983, célibataire, sans enfant). Il n'arrivait plus à avoir un contact "normal" avec lui et il espérait que le Tribunal de protection puisse l'aider et le diriger "vers des professionnels formés". A______, qui était très doué scolairement, s'était, à compter de ses années au Cycle d'orientation, isolé socialement, passant beaucoup de temps devant son ordinateur. Il avait développé une façon de penser très marginale, se disait royaliste, n'admettait pas ses difficultés (angoisse, tendance paranoïaque) et ne voulait accepter aucune aide. Après avoir obtenu un bachelor en physique et en biologie, il n'avait rien fait, était resté longtemps chez ses parents (sa mère étant désormais décédée) et s'était arrangé pour vivre avec peu d'argent, obtenu en réalisant des travaux informatiques pour des connaissances. Au décès de son grand-père paternel, en 2014, A______ avait proposé d'aller vivre avec sa grand-mère, D______. Il était ensuite demeuré dans la maison de cette dernière, sise à H______ [GE], même lorsque celle-ci avait été placée dans un EMS, entre novembre 2016 et août 2019, date à laquelle, sur insistance de A______, elle avait regagné son domicile, deux aides-soignantes ayant été engagées. A______ avait géré l'encadrement de sa grand-mère, ce qui était devenu sa raison de vivre; son attitude avait engendré des conflits avec les aides-soignantes. D______ était décédée le ______ 2020, à l'âge de 99 ans, alors qu'elle se trouvait à l'hôpital à la suite d'une infection. C______  avait transmis à l'hôpital les directives anticipées de sa mère, laquelle ne souhaitait aucun acharnement thérapeutique. Depuis le décès de sa grand-mère, A______ en voulait "à presque tout le monde" et plus particulièrement à son père, estimant ne pas avoir été soutenu et n'ayant pas accepté la transmission à l'hôpital des directives anticipées de sa grand-mère. C______ a joint à son courrier à l'attention du Tribunal de protection divers courriels, ainsi qu'un courrier manuscrit que son fils A______ lui avait envoyés de mai à août 2020, précisant s'inquiéter pour sa santé mentale.

Les écrits de A______, pour la plupart très longs et fastidieux à lire, font notamment référence aux divergences de vues avec son père et d'autres membres de la famille sur les soins qui auraient peut-être pu et dû être prodigués à D______ peu avant son décès. Ils contiennent également des références bibliques, à la reine Elizabeth et au Commonwealth, ainsi que des théories absconses sur la vie et la morale. Pour le surplus, A______ alléguait avoir "tellement donné pour sa famille" qu'il en était devenu malade; il n'entendait pas travailler dans l'informatique comme le lui suggérait son oncle E______, ou "comme un esclave", mais devait pouvoir bénéficier de temps pour s'occuper de sa santé physique. A______ déclarait en outre vouloir son "million d'héritage" et prétendait que son père et son oncle avaient dilapidé les liquidités de la succession de sa grand-mère et qu'ils devaient renoncer à leur part d'héritage à son profit, afin qu'il "en administre la juste répartition" et qu'un projet immobilier puisse voir le jour sur une partie de la parcelle de sa grand-mère. Le courriel du 28 juillet 2020 adressé à son père se terminait par ces mots: "Je te pourrirai l'existence dans les limites de la loi si tu joues à me spolier". Dans un courrier du 3 août 2020, A______ a fixé un ultimatum à son père, "jusqu'à samedi", pour lui remettre 20'000 fr. en liquide et organiser la remise de 50'000 fr. supplémentaires dans un délai fixé au 11 août.

b) Le Tribunal de protection a sollicité un extrait du registre des poursuites concernant A______, dont il ressort qu'il fait l'objet de vingt-neuf actes de défaut de biens délivrés à la suite de poursuites initiées depuis 2016 notamment par F______ et les autorités fiscales.

c) Par décision du 23 septembre 2020, le Tribunal de protection a désigné I______, avocat, en qualité de curateur d'office dans l'intérêt de A______, le mandat étant limité à la représentation de ce dernier dans la procédure civile pendante devant lui.

d) Par courrier du 27 octobre 2020, le curateur d'office a fait part au Tribunal de protection des observations de A______. Selon ce dernier, le signalement de C______ procédait d'une démarche malveillante. Ce dernier tentait de soutenir que son fils souffrait de troubles psychiatriques dans le but de discréditer les allégations de ce dernier relatives à des prélèvements indus sur les comptes bancaires de D______. Le conflit familial semblait, de l'avis du curateur, assez virulent. Pour le surplus, aucune mesure urgente n'était nécessaire. A______ vivait dans la maison de feue sa grand-mère, propriété indivise de son père et de son oncle. Il avait reçu l'assurance de pouvoir y demeurer au moins jusqu'au mois de mai 2021, sans avoir à payer de loyer. A______ n'entretenait aucune relation avec ses deux soeurs et il échangeait parfois des courriels avec son oncle E______, domicilié en France. Il voyait encore ses grands-parents maternels, domiciliés aux J______ [quartier de Genève], avait un large réseau d'amis et bénéficiait des conseils d'un avocat, G______. Il n'avait jamais été hospitalisé, notamment en psychiatrie et n'était suivi par aucun médecin; il ne recevait aucune aide de l'assistance publique. Selon le curateur, A______ était un homme intelligent et cultivé, dont le discours était cohérent; il revendiquait une attitude critique à l'égard du fonctionnement de la société, du monde politique, ainsi que des médias. Il paraissait capable de gérer ses affaires administratives, juridiques, sociales et financières, ainsi que sa santé. Sa situation était le résultat d'un choix de vie relevant de son autonomie personnelle, même s'il pouvait être réprouvé par son cercle familial. Avant 2015, il s'occupait de l'entretien du site internet "K______.ch", ce qui lui procurait des revenus de l'ordre de 4'000 fr. par mois. Ses revenus avaient diminué à compter de 2015, mais il avait pu vivre grâce à ses économies et avait bénéficié, à de rares occasions, de virements de la part de son père. Dès 2016, il s'était entièrement dédié à l'assistance, à l'accompagnement et aux soins en faveur de sa grand-mère paternelle et n'avait par conséquent plus eu de revenus, raison pour laquelle il avait accumulé des dettes. Il était désormais à la recherche de mandats ponctuels dans le domaine informatique et avait le projet de valoriser, par des constructions nouvelles, avec l'accord de son oncle et de son père, la propriété de H______ [GE] ayant appartenu à sa grand-mère. Il avait peu de charges (frais de téléphone, frais d'un véhicule automobile) et sollicitait son réseau d'entraide qui lui permettait notamment d'avoir accès à des invendus de supermarchés encore consommables. A______ s'opposait au prononcé d'une mesure de protection, dont il estimait ne pas avoir besoin. Sa situation actuelle était transitoire et il n'était pas empêché d'assurer lui-même la sauvegarde de ses intérêts. Le curateur proposait par conséquent le classement de la procédure.

e) Le Tribunal de protection (composé d'un président et de deux juges assesseurs) a tenu une audience le 9 décembre 2020, lors de laquelle A______ n'a pas souhaité être directement confronté à son père.

Ce dernier a expliqué que son fils avait une attitude hostile à son égard et lui interdisait d'accéder à la propriété de H______ [GE]; il lui réclamait en outre un montant d'environ 500'000 fr. pour le travail qu'il avait effectué en faveur de sa grand-mère. Selon lui, la maison de H______ [GE] allait vraisemblablement être vendue, afin de permettre notamment à son frère E______ de couvrir ses dettes fiscales. A______ avait toujours été quelqu'un de secret; il ne participait plus aux réunions de famille, n'avait aucun contact avec ses deux soeurs et n'avait jamais eu de travail régulier. C______ a confirmé qu'en accord avec son frère E______, il avait été convenu que A______ pourrait rester dans la maison de H______ [GE], à bien plaire, jusqu'au mois de mai 2021. Ils l'avaient par ailleurs informé de ce qu'ils allaient lui remettre une somme de 20'000 fr. pour le travail effectué; la moitié lui avait déjà été versée.

Pour sa part, A______ a déclaré ne pas avoir besoin d'aide et ne pas comprendre que l'on puisse douter de sa santé mentale. Il travaillait, sur mandat et sans être déclaré, dans le domaine de l'informatique et de l'électricité. Il allait prochainement soumettre à son père et à son oncle un projet de convention pour le partage de l'hoirie de sa grand-mère, incluant le rachat de la maison. Il agissait par le biais de l'avocat qu'il avait mandaté avec ses dernières économies et ses "partenaires" allaient le soutenir dans ce cadre. Selon lui, son père avait signalé sa situation au Tribunal de protection car il savait que son fils était prêt à agir civilement contre lui devant les tribunaux.

A l'issue de l'audience, A______ a pris note de ce qu'une expertise psychiatrique allait être ordonnée; il a déclaré, de même que son curateur, n'avoir aucune question particulière à poser à l'expert.

B.            a) Par ordonnance DTAE/7691/2020 du 16 décembre 2020, le Tribunal de protection (soit le seul président), statuant sur mesures préparatoires, a ordonné l'expertise psychiatrique de A______ (chiffre 1 du dispositif), commis le Dr B______, médecin chef du Département ______ des Hôpitaux universitaires de Genève, aux fonctions d'expert unique, l'autorisant, sous sa propre responsabilité, à désigner un médecin de son choix pour réaliser l'expertise en ses lieu et place (ch. 2), invité l'expert à prendre connaissance du dossier, entendre la personne concernée, s'entourer de tout renseignement utile et dire si la personne concernée souffre de déficience mentale, de troubles psychiques ou d'un autre état de faiblesse affectant sa condition personnelle et si cet état est durable ou non; dire, dans l'affirmative, quelles en sont les conséquences sur les actes de la vie quotidienne, en matière administrative (...), financière (...), personnelle (...), médicale (...) et politique (...); dire si la personne est capable d'apprécier le sens, la nécessité, les effets de ses actes et d'agir en conséquence (...); dire si la personne concernée risque d'être facilement influencée ou d'agir volontairement contre ses intérêts; (...) (ch. 3), imparti à l'expert un délai au 30 mars 2021 pour déposer son rapport écrit (...) (ch. 4), rendu attentif l'expert aux conséquences de la violation des art. 307 et 320 du Code pénal, ainsi que de l'art. 48 de la LaCC (ch. 5) et réservé le sort des frais judiciaires (ch. 6).

En substance, le Tribunal de protection a considéré qu'il n'était en possession d'aucun avis médical permettant de déterminer la cause de la situation dans laquelle se trouvait A______, telle que l'avait décrite son père, et si cette situation traduisait l'existence d'un besoin de protection, ce qui justifiait de recourir à une expertise psychiatrique.

C.           a) Par acte du 19 février 2021, A______, représenté par son curateur de représentation, a recouru contre l'ordonnance du 16 décembre 2020, reçue le 10 février 2021, concluant à ce que sa nullité soit constatée, subsidiairement à son annulation, et à ce qu'il soit constaté qu'aucune mesure de protection n'était nécessaire.

Préalablement, le recourant a conclu à l'octroi de l'effet suspensif, requête admise par décision de la Chambre de surveillance du 22 février 2021.

En substance, le recourant a soutenu que l'ordonnance attaquée avait été rendue par le seul Président de la 3ème chambre du Tribunal de protection, sans assesseurs, ce qui était contraire aux art. 104 al. 1 et 105 al. 1 LOJ, 446 al. 2 CC et 44 al. 1 LaCC. Pour le surplus, le recourant a également fait grief au Tribunal de protection d'avoir ordonné une expertise psychiatrique "sans être déjà capable d'entrevoir quelle serait la mesure de protection dont le recourant pourrait vraisemblablement avoir besoin". Or, son état de santé ne nécessitait pas un placement à des fins d'assistance; s'il fallait admettre la nécessité, contestée, d'un suivi médical, une curatelle n'aurait aucune utilité, puisqu'elle ne permettrait pas de le contraindre à se soumettre à un traitement. Par ailleurs, la démarche entreprise par le père du recourant auprès du Tribunal de protection était motivée par son besoin d'obtenir de l'aide pour renouer avec son fils. Le recourant n'était toutefois ni dangereux pour lui-même, ni pour autrui, mais au contraire généreux et attentionné. Il avait prouvé être en mesure de s'occuper de lui-même, puisqu'à défaut il n'aurait jamais pu prendre soin de sa grand-mère comme il l'avait fait. Pour le surplus, les conflits intrafamiliaux étaient sur le point de se résoudre, puisque le recourant, son père et son oncle s'apprêtaient à signer une convention portant notamment sur la réalisation d'un projet de valorisation de l'immeuble actuellement occupé par le recourant. Ce dernier avait donc un logement, qui lui était à tout le moins garanti jusqu'au mois de mai 2021, voire au-delà, et les relations au sein de la famille s'étaient améliorées. Enfin, le recourant a contesté être isolé socialement, mais a allégué bénéficier du soutien étroit d'un large réseau d'amis et être assisté par Me G______ dans le conflit l'opposant à son père et pour les tractations relatives à la valorisation du bien immobilier mentionné ci-dessus. Il percevait de surcroît l'aide de l'Hospice général depuis le 18 décembre 2020, le paiement des primes d'assurance maladie notamment étant désormais assuré. L'existence de poursuites n'était pas, à elle seule, un motif d'instauration d'une mesure de curatelle.

Le recourant a joint à son recours un courrier de C______ du 15 février 2021, lequel indiquait être stupéfait de la tournure prise par la procédure, qui lui semblait "aller beaucoup trop loin", alors qu'il cherchait seulement à renouer le contact avec son fils A______, à un moment où il ne parvenait plus à entrer en communication avec lui. Or, ses propos manquaient d'objectivité et il avait "trop de charge émotionnelle", ce dont il s'était rendu compte après l'intervention de son frère, lequel avait fait en sorte que le dialogue puisse être renoué entre les différents membres de la famille. C______ déclarait "retirer intégralement" son signalement et se dissocier de la procédure.

Le recourant a également produit un courrier de son oncle, E______, du 14 février 2021, lequel indiquait suivre de près les difficultés relationnelles entre son frère et le fils de ce dernier, A______. Or, leurs relations s'étaient améliorées; A______ était par ailleurs une personne très intelligente, "intelligence qui engendre une conscience aigüe". Une convention allait très probablement être signée entre tous et son neveu pourrait continuer de vivre dans la maison sise à H______ [GE] jusqu'à ce que la nouvelle construction ne débute.

Une décision d'octroi de prestations de l'Hospice général, du 18 décembre 2020, figure également en annexe au recours, faisant état d'une aide financière de 977 fr. par mois allouée à A______ dès le mois de décembre 2020. Ladite décision mentionne ce qui suit s'agissant de l'assurance maladie de A______: "non renseignée 0.00", la somme de 977 fr. correspondant au seul entretien de base.

En annexe au recours figure enfin une lettre du 15 février 2021 de A______ à l'attention de la Chambre de surveillance, ce dernier indiquant souhaiter préciser ses déclarations figurant sur le procès-verbal de l'audience tenue par le Tribunal de protection. Le recourant a souligné, en substance et notamment, le fait qu'il n'avait de problèmes relationnels qu'avec son père, ce qui ne le handicapait nullement dans la conduite de sa vie; les différends familiaux étaient par ailleurs en train de se résorber. Sa situation professionnelle et économique était transitoire, avec la précision que la période actuelle, compte tenu de la crise sanitaire, rendait la recherche d'un emploi passablement compliquée. Quant aux lettres échangées avec son père, que ce dernier avait envoyées au Tribunal de protection, elles mêlaient "le relationnel et des considérations politiques et généralistes, toutefois écrites sous l'émotion". Il pensait être à même de régler ses problèmes avec son père, notamment s'agissant du partage des biens familiaux et un accord était sur le point d'être trouvé pour la valorisation immobilière de la propriété ayant appartenu à sa grand-mère, ce qui lui permettrait de régler ses dettes.

b) Le Tribunal de protection a relevé, dans ses observations du 2 mars 2021, que l'ordonnance d'expertise était une ordonnance préparatoire, rendue par le juge unique, conformément à l'art. 5 al. 1 let. s LaCC. Le Tribunal de protection a par ailleurs expliqué qu'une procédure avait été ouverte concernant D______, grand-mère de A______, dont ce dernier était le proche aidant à son domicile de H______ [GE], à réception d'un signalement d'une aide-soignante pour une suspicion de mauvais traitements à son égard. A la suite de signalements complémentaires de médecins, une procédure pénale avait été ouverte à l'encontre de A______. Pour le surplus, la procédure pendante devant le Tribunal de protection ne visait qu'à établir si A______ nécessitait une mesure de protection et il avait été décidé, en formation pluridisciplinaire et à l'issue d'une audience, qu'il y avait lieu de recourir à l'avis d'un expert pour déterminer si les conditions pour prononcer une mesure de protection au sens de l'art. 390 al. 1 ch. 1 CC étaient remplies, sachant que A______ n'était suivi par aucun médecin depuis des années. Enfin, les prestations versées par l'Hospice général plaçaient l'intéressé en dessous du minimum vital et ce dernier n'était toujours pas couvert par une assurance maladie. La question à laquelle l'expertise devait permettre de répondre était celle de savoir si l'inertie administrative de A______ découlait d'un choix de vie délibéré ou était d'origine pathologique.

c) Par avis du greffe de la Chambre de surveillance du 8 mars 2021, reçu le 10 mars par le recourant, les déterminations du Tribunal de protection lui ont été transmises. Le recourant a par ailleurs été informé de ce que la cause serait mise en délibération à l'issue d'un délai de dix jours.

d) Par pli du 22 mars 2021, le recourant a répliqué.


 

EN DROIT

1.             1.1 Les ordonnances d'instruction se rapportent à la préparation et à la conduite des débats; elles statuent en particulier sur l'opportunité et les modalités de l'administration des preuves, ne déploient ni autorité, ni force de chose jugée et peuvent en conséquence être modifiées ou complétées en tous temps (Jeandin, CPC commenté, 2ème éd. 2019, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/ Tappy ad art. 319 n. 14).

L'ordonnance querellée, qui ordonne l'expertise psychiatrique du recourant, est une ordonnance d'instruction selon la définition rappelée ci-dessus.

1.2 Le Code civil ne prévoit aucune disposition particulière concernant les recours dirigés contre les ordonnances d'instruction rendues par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, de sorte qu'il convient de se référer au Code de procédure civile (CPC), à moins que les cantons aient fait usage de leur compétence de légiférer en la matière (Reusser, Basler Kommentar, Erwachsenenschutz, Geiser/Reusser ad art. 450b CC n. 8).

Les ordonnances d'instruction sont susceptibles d'un recours dans les dix jours (DAS/43/2015; art. 31 al. 1 let. c LaCC; 321 al. 2 CPC).

Le recours doit être formé devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 53 al. 1 LaCC).

En l'espèce, le recours a été formé par la personne concernée par l'ordonnance attaquée, représentée par son curateur de représentation, dans le délai utile, selon les formes prévues par la loi et devant l'autorité compétente; il est, de ce point de vue, recevable.

1.3 Contre les ordonnances d'instruction, le recours n'est recevable que lorsque la décision peut causer un préjudice difficilement réparable (art. 319 let. b ch. 2 CPC, par renvoi de l'art. 450f CC; arrêts du Tribunal fédéral 5A_171/2015 du 20 avril 2015 consid. 6.1 et 5D_100/2014 du 19 septembre 2014 consid. 1.1; DAS/19/2016 du 21 janvier 2016).

Dans un arrêt 5A_655/2013 du 29 octobre 2013 consid. 2.3, le Tribunal fédéral a retenu qu'une ordonnance d'expertise psychiatrique était toujours susceptible de causer un préjudice difficilement réparable.

Au vu de ce qui précède, le recours, en tant qu'il est dirigé contre une ordonnance d'instruction qui ordonne une expertise psychiatrique, est recevable.

1.4 La recevabilité de l'écriture de réplique du recourant, parvenue au Tribunal de protection après l'échéance du délai de dix jours au terme de laquelle la cause a été mise en délibération, peut demeurer indécise, compte tenu de ce qui va suivre.

1.5 Selon l'art. 45 al. 1 LaCC, lorsqu'une expertise paraît nécessaire, le Tribunal de protection désigne l'expert et fixe l'objet de sa mission.

L'art. 5 al. 1 let. s LaCC prévoit pour sa part que le juge du Tribunal de protection est compétent pour statuer en matière de décisions d'instruction nécessaires (art. 124 CPC) et de décisions incidentes (art. 237 CPC).

Dans le cas d'espèce et compte tenu de l'issue du recours, il n'apparaît pas nécessaire de déterminer si le président du Tribunal de protection était fondé à prononcer seul l'ordonnance attaquée. Il sera néanmoins relevé que la décision de recourir à l'expertise psychiatrique du recourant a été prise non seulement par le président du Tribunal de protection, mais également par les deux juges assesseurs, comme cela ressort clairement du procès-verbal de l'audience du 9 décembre 2020.

2. 2.1.1 Selon l'art. 446 al. 1 CC, l'autorité de protection de l'adulte établit les faits d'office. Elle procède à la recherche et à l'administration des preuves nécessaires (al. 2). Elle peut charger une tierce personne ou un service d'effectuer une enquête. Si nécessaire elle ordonnera un rapport d'expertise. Elle n'est pas liée par les conclusions des personnes parties à la procédure (al. 3) et elle applique le droit d'office (al. 4).

Selon l'art 44 al. 1 LaCC, pour s'éclairer sur une question de fait qui requiert l'avis d'un spécialiste, le Tribunal de protection peut ordonner une expertise confiée à un ou à plusieurs experts.

2.1.2 Les mesures prises par l'autorité de protection de l'adulte garantissent l'assistance et la protection de la personne qui a besoin d'aide (art. 388 al. 1 CC).

L'autorité de protection de l'adulte ordonne une mesure lorsque l'appui fourni à la personne ayant besoin d'aide par les membres de sa famille, par d'autres proches ou par des services privés ou publics ne suffit pas ou semble a priori insuffisant (art. 389 al. 1 CC). Une mesure de protection de l'adulte n'est ordonnée par l'autorité que si elle est nécessaire et appropriée (art. 389 al. 2).

L'autorité de protection de l'adulte institue une curatelle lorsqu'une personne majeure est partiellement ou totalement empêchée d'assurer elle-même la sauvegarde de ses intérêts en raison d'une déficience mentale, de troubles psychiques ou d'un autre état de faiblesse qui affecte sa condition personnelle (art. 390 al. 1 ch. 1 CC).

2.2 En l'espèce, les éléments qui figurent à la procédure permettent de retenir que le recourant, âgé de trente-sept ans, est en conflit avec son père et dans une moindre mesure avec son oncle; il n'a par ailleurs aucun contact avec ses deux soeurs. Bien que titulaire de deux titres universitaires, il n'a jamais exercé une activité régulière et a vécu avec peu de moyens, étant relevé qu'il n'a que très récemment sollicité l'aide de l'Hospice général. Il a accumulé un certain nombre de dettes depuis 2016, date à partir de laquelle il s'est exclusivement dédié aux soins et à l'accompagnement de sa grand-mère. Les écrits que le recourant a adressés à son père durant le printemps et l'été 2020 interpellent et pourraient, en raison notamment de leur longueur, des références bibliques qu'ils contiennent, ainsi que de leur contenu moralisateur, voire menaçant, laisser supposer que leur auteur souffre d'un quelconque trouble psychiatrique.

Cela étant, ces quelques éléments sont contrebalancés par le fait que le recourant n'a jamais été hospitalisé en psychiatrie, ne s'est, jusqu'à présent, montré dangereux ni pour lui-même ni pour autrui (sous réserve d'éventuelles maltraitances à l'égard de sa grand-mère, qui font, semble-t-il, l'objet d'une procédure pénale dont l'évolution et le résultat ne sont pas connus), ne se trouve, pour l'heure, pas dépourvu de toit et a été en mesure de solliciter l'aide de l'Hospice général lorsqu'il en a éprouvé le besoin. Certes, le mode de vie du recourant demeure marginal et l'on ignore s'il est couvert par une assurance maladie au vu du contenu de la décision d'aide de l'Hospice général. Cela étant, ces éléments ne paraissent pas alarmants au point qu'il faille s'interroger sur l'éventuelle nécessité de le pourvoir d'une curatelle, dont la Chambre de surveillance peine à voir quelle pourrait être, pour l'heure, l'utilité. Il découle par conséquent de ce qui précède qu'il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner l'expertise psychiatrique du recourant. Ce n'est que si sa situation personnelle devait s'aggraver à l'avenir, s'il devait, par exemple, se retrouver sans logement et se montrer incapable d'accomplir seul les démarches administratives nécessaires pour trouver un appartement ou solliciter les aides nécessaires, qu'il conviendrait d'ordonner une telle mesure afin de déterminer si le recourant souffre effectivement d'un trouble psychiatrique et si oui, quel type d'aide pourrait lui être bénéfique. Le père du recourant ayant été en mesure de signaler la situation de son fils au Tribunal de protection, il y a lieu de considérer qu'il sera à même de réitérer cette démarche si d'autres difficultés, plus importantes, devaient survenir.

Au vu de ce qui précède, l'ordonnance attaquée sera annulée.

3.             Les frais de la procédure, arrêtés à 400 fr. (art. 67A et 67B RTFMC), seront laissés à la charge de l'Etat, vu l'issue du recours. Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/7691/2020 du 16 décembre 2020 rendue par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/16447/2020.

Au fond :

Annule l'ordonnance attaquée.

Sur les frais :

Laisse les frais du recours, arrêtés à 400 fr., à la charge de l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.