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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/2795/2023

ACST/13/2024 du 09.09.2024 ( ABST ) , REJETE

Recours TF déposé le 21.10.2024, 9C_606/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2795/2023-ABST ACST/13/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 9 septembre 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Christian DANDRÈS, avocat

contre

GRAND CONSEIL intimé

 


EN FAIT

A. a. A______ est propriétaire, depuis mars 2013, d'un logement en propriété par étages (ci-après : PPE), sis au B______.

b. Le 22 novembre 2018, le Grand Conseil a adopté la loi 12'403 sur les estimations fiscales de certains immeubles (LEFI - D 3 10 ; ci-après : LEFI 2018). Les art. 1 et 2 LEFI 2018, en vigueur depuis le 1er janvier 2019, ont la teneur suivante :

« Art. 1 Prorogation

La durée de validité des estimations de la valeur fiscale des immeubles visés à l’article 50, lettres b à e, de la loi sur l’imposition des personnes physiques est prorogée jusqu’au 31 décembre 2028.

 

Art. 2 Majoration

La valeur fiscale actuelle de ces immeubles au 31 décembre 2018 est majorée de 7% et reconduite jusqu’au 31 décembre 2028, sans nouvelle estimation par la commission d’experts. »

c. Par arrêt du 20 décembre 2019 (ACST/42/2019), la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) a partiellement admis le recours interjeté par A______ contre la LEFI 2018, constaté que son art. 2, en tant qu'il fixait la majoration de la valeur fiscale actuelle des immeubles à 7%, consacrait une violation du principe de l'égalité de traitement et de l'imposition selon la capacité contributive et invité le Grand Conseil à modifier cet article le plus rapidement possible.

B. a. Le 5 octobre 2021, des députés ont déposé auprès du Grand Conseil un projet de loi (ci-après : PL) 13'030 sur les estimations fiscales de certains immeubles, qui avait la teneur suivante :

« Chapitre I Prorogation des estimations

Art. 1 Principe

La durée de validité des estimations de la valeur fiscale des immeubles visés à l’article 50, lettres b à e, de la loi sur l'imposition des personnes physiques est prorogée pour une durée indéterminée.

 

Art. 2 Majoration

1 La valeur fiscale actuelle de ces immeubles au 31 décembre 2021 est majorée de 5% et reconduite jusqu’au 31 décembre 2022.

2 La valeur fiscale de ces immeubles au 31 décembre 2022 est indexée, chaque année, à l’indice genevois des prix à la consommation, dès le 1er janvier 2023. L’indexation annuelle ne peut toutefois pas excéder 1%.

Art. 3 Valeur fiscale actuelle

La valeur fiscale actuelle au sens de l’article 2, alinéa 1, est celle qui est déterminante au 31 décembre 2021. Elle comprend, le cas échéant, la majoration prévue par la loi prorogeant jusqu’à fin décembre 1984 la durée de validité des estimations actuelles de certains immeubles, du 21 mars 1974, et celles figurant dans les lois sur les estimations fiscales de certains immeubles, du 12 mars 1981, du 14 janvier 1993 et du 22 novembre 2018.

 

Art. 4 Exceptions

La majoration de l’article 2, alinéa 1, ne s’applique pas aux valeurs fiscales actuelles suivantes :

a) celles qui ont été estimées par expert à la valeur vénale après le 31 décembre 2011 ;

b) celles qui ont été fixées selon le coût de la construction, pour les constructions faites après le 31 décembre 2011 ;

c) celles qui ont été fixées en application de l’article 52, alinéa 3, de la loi sur l’imposition des personnes physiques, à la suite d’une aliénation ou d’une dévolution intervenues après le 31 décembre 2011 ;

d) celles dont l’adaptation au sens de la lettre c ci-dessus a été suspendue pour le reste de la période décennale en application de l’article 52, alinéa 4, de la loi sur l’imposition des personnes physiques.

 

Art. 5 Réclamation et recours

Lorsque la valeur de l’immeuble n’a pas augmenté de manière correspondante, le contribuable peut demander la réduction ou la suppression de la majoration visée à l’article 2 par la voie de la réclamation et des recours prévus aux articles 39 à 54 de la loi de procédure fiscale, du 4 octobre 2001.

 

Chapitre II Dispositions finales et transitoires

Art. 6 Clause abrogatoire

Sont abrogées :

a) la loi sur les estimations fiscales de certains immeubles, du 22 novembre 2018 ;

b) la loi relative à la préparation de l’estimation des immeubles (LPEI) (D 3 11), du 14 mars 2014.

 

Art. 7 Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur avec effet au 1er janvier 2022.

 

Art. 8 Modifications d'autres lois

 

1 La loi générale sur les contributions publiques (LCP) (D 3 05), du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit :

Art. 76, al. 5 (nouveau, les al. 5 à 7 anciens devenant les al. 6 à 8)

5 Il est également réduit à 0,2‰ pour les immeubles détenus par les personnes physiques et affectés à leur résidence principale.

Art. 84, al. 1, lettre g (nouvelle teneur)

g) 2% lorsqu’il l’a été pendant 25 ans et plus.

 

2 La loi sur l’imposition des personnes physiques (LIPP) (D 3 08), du 27 septembre 2009, est modifiée comme suit :

Art. 52, al. 2, 3, 4 et 6 (nouvelle teneur)

b) Immeubles estimés

2 L’évaluation des autres immeubles correspond à leur prix d’acquisition par le contribuable. Cette évaluation est indexée, chaque année, à l’indice genevois des prix à la consommation. L’indexation annuelle ne peut toutefois pas excéder 1%.

3 Lorsqu’un immeuble est aliéné à titre gratuit, ou dévolu pour cause de mort, la valeur d’aliénation ou la valeur de succession retenue par le département pour la perception des droits d’enregistrement et de succession se substitue à la valeur d’estimation.

4 L’adaptation de la valeur d’estimation selon l’alinéa 3 est suspendue :

a) pour les propriétés rurales, tant qu’elles sont exploitées à des fins exclusivement agricoles par le propriétaire ;

b) en cas de succession, pour le logement principal de la personne décédée, s’il est attribué en propriété ou en usufruit à un héritier qui faisait ménage commun avec elle, tant que cet héritier continue à occuper personnellement le logement comme résidence principale ;

c) en cas de liquidation du régime matrimonial, pour le logement principal du couple attribué en propriété ou en usufruit à l’un des conjoints, tant que celui-ci continue à l’occuper personnellement comme résidence principale.

c) Nouvelles constructions

6 Les nouvelles constructions peuvent être évaluées par experts, tant à la demande du propriétaire qu’à celle du département.

[…] ».

Le PL 13'030 prévoyait encore un nouvel art. 52A de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) et la modification de l'art. 59 al. 1 et 2 LIPP.

Selon l'exposé des motifs, sous réserve d’une réévaluation ponctuelle d’un cas exceptionnel et particulier, le PL 13'030 fixait notamment, sans marge réglementaire du Conseil d’État, la réévaluation périodique de ces immeubles à l’indice genevois des prix à la consommation (ci-après : IGPC), pour que ceux-ci soient évalués conformément à la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14). Ce projet avait donc clairement pour objectif de régler exhaustivement et à long terme la situation de l’évaluation fiscale des villas et PPE occupés par leurs propriétaires, à la fois de manière transparente et conforme à la législation fédérale (p. 6 et 12). Pour tenir compte de cet objectif ainsi que de l’invitation faite au législateur par la chambre constitutionnelle, « de modifier l’art. 2 LEFI le plus rapidement possible », le PL 13'030 proposait de modifier les valeurs fiscales, pour les augmenter sensiblement, à compter du 1er janvier 2022 (p. 12). En fixant une période d’estimation indéterminée, il s’agissait, en lien avec les autres modifications proposées par le PL 13'030, de régler la question de l’évaluation régulière des immeubles concernés de façon pérenne (p. 12). Le PL 13'030 proposait d’instaurer une nouvelle augmentation unique de la valeur fiscale des immeubles concernés de 5%, dès le 1er janvier 2022, puis, une deuxième, régulière, annuelle et systématique, dès le 1er janvier 2023. Cette dernière augmentation serait corrélée à l'IGPC mais plafonnée, pour des raisons évidentes de proportionnalité, à hauteur de 1% par année (p. 13). Aucune estimation décennale par une commission d’experts n’avait plus été effectuée depuis 1964. L’évaluation des immeubles étant prévue pour être basée sur leur coût d’acquisition, avec majoration périodique, la référence à une commission d’experts était supprimée (p. 16).

Selon la présentation du PL 13'030 figurant dans le rapport de la commission fiscale chargée d'étudier les PL 12'773-B, 12'774-B et 13'030-A (ci-après : la commission fiscale), le PL 13'030 proposait que, pour tous les propriétaires de plus de dix ans, il y ait une majoration supplémentaire de 5%, partant du principe que ceux qui avaient acheté durant les dix dernières années avaient un prix à peu près conforme à la valeur vénale et qu’il n’y avait pas besoin de revoir la fiscalité. La vraie innovation du PL était qu’il proposait une réévaluation du bien chaque année, dès la première année, sur sa valeur qui devait correspondre à l’IGPC plafonné à 1%. Il s’agissait de donner une certaine dynamique à ce PL et d’avoir une augmentation linéaire de rentrées fiscales. La période décennale disparaissait ainsi au profit de la réévaluation automatique et annuelle (p. 28 s.).

b. Le 18 août 2022, la commission fiscale a rendu son rapport. Elle a adopté différents amendements au PL initial.

Elle a ainsi opté pour une majoration de 12% (p. 84 et 132), au lieu des 5% prévus dans le PL initial, qui ne permettaient pas d'atteindre les prix du marché (p. 34). Le taux de 12% a été privilégié sur un taux de 13%, proposé par un autre amendement (p. 81 et 132). Le taux de 12% permettait d'atteindre une majoration d'environ 20% par rapport à la valeur fiscale à fin 2018 (p. 101 et 108).

Elle a par ailleurs décidé de revenir à une évaluation des immeubles par des experts, mais périodique et non décennale comme dans le système en vigueur. Le système de fixation de la valeur fiscale était maintenu en l'absence d'une telle évaluation (p. 98 et 142).

Elle a également adopté des amendements formels proposés par le département des finances et des ressources humaines (ci-après : DF).

L'amendement proposé pour prévoir une indexation à un autre indice que l'IGPC, soit l'indice des prix de l’immobilier résidentiel (ci-après : IMPI) de l'office fédéral de la statistique (ci-après : OFS) a été refusé (p. 81 s., 133 et 139).

c. Le 4 novembre 2022, le Grand Conseil a adopté la loi 13'030 sur les estimations fiscales de certains immeubles (LEFI - D 3 10 ; ci-après : LEFI 2022), dont la teneur finale est la suivante :

« Chapitre I Prorogation des estimations

Art. 1 Principe

La durée de validité des estimations de la valeur fiscale des immeubles visés à l’article 50, lettres b, d et e, de la loi sur l'imposition des personnes physiques est prorogée pour une durée indéterminée.

 

Art. 2 Majoration et indexation

Majoration

1 La valeur fiscale actuelle de ces immeubles au 31 décembre de l’année qui précède l’entrée en vigueur de la présente loi est majorée de 12% et reconduite pour la première période fiscale qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi.

Indexation

2 À compter de la deuxième période fiscale qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi, la valeur fiscale visée à l’alinéa 1 est indexée, chaque année, à l’indice genevois des prix à la consommation. L'indexation annuelle ne peut toutefois pas excéder 1%.

Art. 3 Valeur fiscale actuelle

La valeur fiscale actuelle au sens de l’article 2, alinéa 1 est celle qui est déterminante au 31 décembre de l’année qui précède l’entrée en vigueur de la présente loi. Elle comprend, le cas échéant, la majoration prévue par la loi prorogeant jusqu’à fin décembre 1984 la durée de validité des estimations actuelles de certains immeubles, du 21 mars 1974, et celles figurant dans les lois sur les estimations fiscales de certains immeubles, du 12 mars 1981, du 14 janvier 1993 et du 22 novembre 2018.

 

Art. 4 Exceptions

La majoration de l’article 2, alinéa 1, ne s’applique pas aux valeurs fiscales actuelles suivantes :

a) celles qui ont été estimées par expert à la valeur vénale après le 31 décembre de la 11année qui précède l’entrée en vigueur de la présente loi ;

b) celles qui ont été fixées selon le coût de la construction, pour les constructions faites après le 31 décembre de la 11e année qui précède l’entrée en vigueur de la présente loi ;

c) celles qui ont été fixées en application de l’article 52, alinéa 3, dans son ancienne teneur du 27 septembre 2009, de la loi sur l'imposition des personnes physiques, à la suite d’une aliénation ou d’une dévolution intervenues après le 31 décembre de la 11e année qui précède l’entrée en vigueur de la présente loi ,

d) celles dont l’adaptation au sens de la lettre c ci-dessus a été suspendue en application de l’article 52, alinéa 4, dans son ancienne teneur du 27 septembre 2009, de la loi sur l'imposition des personnes physiques.

 

Art. 5 Réclamation et recours

Majoration

1 Lorsque la valeur de l’immeuble n’a pas augmenté de manière correspondante, le contribuable peut demander la réduction ou la suppression de la majoration visée à l’article 2, alinéa 1 par la voie de la réclamation et des recours prévus aux articles 39 à 54 de la loi de procédure fiscale, du 4 octobre 2001.

2 Cette procédure doit être dirigée contre la première taxation fondée sur la valeur fiscale reconduite avec la majoration visée à l’article 2, alinéa 1, mais au plus tard contre la taxation portant sur l’impôt immobilier complémentaire calculé au 31 décembre de la première période fiscale qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi (art. 76 al. 7, de loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887).

Indexation

3 Lorsque la valeur de l’immeuble n’a pas augmenté de manière correspondante, le contribuable peut demander la réduction ou la suppression de l’indexation visée à l’article 2, alinéa 2, par la voie de la réclamation et des recours prévus aux articles 39 à 54 de la loi de procédure fiscale, du 4 octobre 2001.

4 Cette procédure doit être dirigée contre la première taxation fondée sur la valeur fiscale indexée, mais au plus tard contre la taxation portant sur l’impôt immobilier complémentaire calculé au 31 décembre de l’année de l’indexation (art. 76 al. 7, de loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887).

 

Chapitre II Dispositions finales et transitoire

Art. 6 Clause abrogatoire

Sont abrogées :

a) la loi sur les estimations fiscales de certains immeubles, du 22 novembre 2018 ;

b) la loi relative à la préparation de l’estimation des immeubles, du 14 mars 2014.

 

Art. 7 Entrée en vigueur

Le Conseil d’État fixe l’entrée en vigueur de la présente loi.

 

Art. 8 Modifications d'autres loi

1 […]

2 La loi sur l’imposition des personnes physiques, du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), est modifiée comme suit :

Art. 52, IV. Procédure d'estimation (nouvelle teneur)

[…]

c) Immeubles estimés

4 L’évaluation des autres immeubles est faite individuellement, périodiquement, de manière non échelonnée à l’échelle du canton par des commissions d’experts diplômés en matière d’évaluation immobilière, externes à l’administration. Les membres de ces commissions sont désignés par le Conseil d’État sur proposition pour moitié du département chargé de l’administration fiscale cantonale et pour moitié des groupements de propriétaires.

5 À défaut d’évaluation selon l’alinéa 4, l’évaluation des autres immeubles correspond à leur prix d’acquisition par le contribuable. Cette évaluation est indexée, chaque année, à l’indice genevois des prix à la consommation. L’indexation annuelle ne peut toutefois pas excéder 1%.

6 Lorsqu’un immeuble est aliéné à titre gratuit, ou dévolu pour cause de mort, la valeur d’aliénation ou la valeur de succession retenue par le département pour la perception des droits d’enregistrement et de succession correspond à la valeur fiscale jusqu’à la prochaine évaluation en vertu de l’alinéa 4. Cette valeur fiscale est indexée annuellement à l’indice genevois des prix à la consommation. L’indexation annuelle ne peut toutefois pas excéder 1%.

7 L’adaptation de la valeur d’estimation en vertu de l’alinéa 6 est suspendue jusqu’à la prochaine évaluation en vertu de l’alinéa 4 :

a) en cas de succession, pour le logement principal de la personne décédée, s’il est attribué en propriété ou en usufruit à un héritier qui faisait ménage commun avec elle, tant que cet héritier continue à occuper personnellement le logement comme résidence principale ;

b) en cas de liquidation du régime matrimonial, pour le logement principal du couple attribué en propriété ou en usufruit à l’un des conjoints, tant que celui-ci continue à l’occuper personnellement comme résidence principale.

c) en cas de donation, pour le logement principal du donateur, s’il est attribué en propriété ou en usufruit à un donataire qui faisait ménage commun avec lui, tant que ce donataire continue à occuper personnellement le logement comme résidence principale.

8 Le Conseil d’État, comme le contribuable, ont, en tout temps, la faculté de faire procéder à de nouvelles estimations si des changements importants dans la valeur des immeubles le justifient.

d) Nouvelles constructions

9 Pendant la période, les nouvelles constructions peuvent être évaluées par des experts, tant à la demande du propriétaire qu’à celle du département.

10 Pour les immeubles à l’étranger, la valeur en monnaie étrangère est convertie en francs suisses au 31 décembre de la période fiscale.

Art. 52A Évaluation (nouveau)

[…]

Art. 59, al. 1, tableau (nouvelle teneur)

[…]

Art. 59, al. 2, tableau (nouvelle teneur)

[…] ».

d. Lors de la votation du 18 juin 2023, le corps électoral a accepté la loi 13'030.

e. Par arrêté du 6 juillet 2023, publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) le 7 juillet 2023, le Conseil d'État a promulgué la loi 13'030 pour être exécutoire dans tout le canton dès le lendemain de la publication dudit arrêté (art. 1). L'entrée en vigueur de la loi devait être fixée ultérieurement par le Conseil d'État (art. 2).

C. a. Par acte du 6 septembre 2023, A______ a recouru auprès de la chambre constitutionnelle contre la LEFI 2022, concluant à l'octroi de l'effet suspensif à son recours, à la constatation que la LEFI 2022 était contraire au droit supérieur, à son annulation, à l'invitation du Grand Conseil à adopter une nouvelle loi garantissant le respect du droit fédéral, à l'invitation du Conseil d'État, dans l'intervalle, à mettre en œuvre une taxation des immeubles respectant le droit supérieur et à la condamnation de l'État en tous les dépens.

Sa qualité pour recourir avait été reconnue en 2019 et sa situation n'avait pas évolué.

La LEFI 2022 prévoyait comme base de valeur vénale pour les immeubles acquis après 1964 le prix d'acquisition, lequel ne correspondait pas forcément à la valeur vénale. La base de calcul prévue par l'art. 4 let. c LEFI 2022 n'était pas conforme à la LHID. La LEFI 2022 violait le principe de répartition des pouvoirs. En se basant sur la valeur d'acquisition indexée, la LEFI 2022 violait également la LIPP.

La réglementation genevoise ne tendait pas vers une évaluation réaliste de la valeur réelle du bien immobilier, mais vers un montant nettement inférieur. Un propriétaire ayant acquis son bien immobilier depuis longtemps disposant d'une capacité contributive semblable à un propriétaire ayant acquis récemment son bien ne serait pas imposé dans la même mesure. Le premier serait imposé sur la base d'une estimation ancienne, certes majorée mais nettement en deçà de la valeur du marché, d'autant plus compte tenu de l'abattement, alors que le second serait imposé sur une valeur qui se rapprochait de la valeur vénale. En 2012 et 2018, une majoration de 20% avait été proposée en fonction de critères objectifs basés sur la valeur vénale, avec pour but uniquement d'atténuer les inégalités de traitement, entre anciens et nouveaux propriétaires de villas et de PPE, de même qu'entre propriétaires de villas et PPE et détenteurs de fortune mobilière. Cette majoration était cependant déjà en dessous de l'évolution réelle des prix de l'immobilier de l'époque. Retenir en 2023 un taux de 12%, pour une durée illimitée, était arbitraire. Il y avait inégalité de traitement entre anciens et nouveaux propriétaires d'immeubles non locatifs. Le principe d'imposition selon la capacité contributive était également violé. La LEFI 2022 créait encore une forte inégalité de traitement entre propriétaires mobiliers et immobiliers.

L'IGPC ne reflétait pas la fluctuation des prix de l'immobilier, ce qui aurait pour conséquence de creuser l'écart entre valeur fiscale et valeur vénale. La limitation à 1% avait pour résultat de limiter artificiellement l'augmentation annuelle de la valeur fiscale, creusant encore l'écart avec la valeur vénale. Il s'agissait d'une sous-évaluation systématique des immeubles inadmissible. La LEFI 2022 prévoyait l'abrogation du système d'évaluation de l'ensemble du parc immobilier et proposait un système pérenne sans évaluation par un comité d'experts. L'indexation de la valeur fiscale figeait l'inégalité de traitement dans le temps et l'aggravait. Le nouveau système d'estimation de la valeur fiscale des immeubles mis en place par la LEFI 2022 était contraire au droit fédéral et la violation ne serait que renforcée avec le temps.

La LEFI avait été conçue comme un tout et devait être annulée dans son intégralité. L'annulation de l'art. 2 LEFI 2022 aurait soit pour effet de faire revivre une réglementation encore moins conforme au droit supérieur, soit de créer un vide juridique, ce qui créerait des inégalités encore plus importantes. Il y avait un intérêt fiscal à ce que la valeur fiscale des immeubles continue à être majorée. Il était justifié de former une conclusion plutôt constatatoire que cassatoire.

b. Par réponse du 13 octobre 2023, le Grand Conseil a conclu au rejet de la demande d'octroi de l'effet suspensif et du recours.

A______ n'avait pas démontré sa qualité pour recourir. Sa situation avait pu évoluer depuis la procédure de 2019, qui concernait la LEFI 2018 et remontait à près de quatre ans. Le renvoi à cette procédure ne démontrait pas l'existence d'un intérêt actuel.

D'ici la mise en œuvre d'une expertise individuelle, le système de majoration permettait d'adapter la valeur des biens immobiliers n'ayant pas fait l'objet d'aliénations récentes et n'ayant donc pas fait l'objet de négociations sur le marché libre. Il s'agissait d'une réalité dont il devait être tenu compte par le législateur cantonal afin d'éliminer autant que possible les disparités qui en résultaient nécessairement. La chambre constitutionnelle avait déjà pu constater que la majoration de 7% de la valeur fiscale des immeubles pour la période 2019-2028 telle que prévue par la loi 12'403 respectait le cadre défini par la LHID. Il en allait nécessairement de même de la loi 13'030 prévoyant une majoration supplémentaire de 12% assortie en outre d'une indexation annuelle, étant rappelé que le mécanisme prévu de la majoration de 12% n'était applicable qu'aussi longtemps que les commissions d'estimation n'auraient pas pu être mises en œuvre.

Un ancien et un nouveau propriétaire d'un logement identique ne se trouvaient pas dans une situation semblable. La capacité d'acquérir un bien immobilier à un moment déterminé dépendait de la valeur du bien à ce moment. Si tout à coup la valeur fiscale d'un bien acheté 20 ans auparavant augmentait de manière trop importante, il risquait de se retrouver dans une situation délicate et devoir vendre son bien. Un contribuable qui acquérait actuellement son bien le faisait à un autre prix et avec la possibilité de s'acquitter de ses impôts en fonction de cette acquisition. Si le recours était admis, le Grand Conseil devrait mettre sur un strict pied d'égalité tous les propriétaires immobiliers avec une méthode d'évaluation entraînant certes d'importantes recettes fiscales, mais mettant toute une série de contribuables dans une situation fiscale impossible, sans que leur capacité contributive n'ait évolué dans un sens permettant le paiement d'une telle augmentation d'impôt. L'augmentation de 12% permettait manifestement de réduire l'écart de fait entre la valeur des immeubles détenus par des anciens et des nouveaux propriétaires. L'écart n'était d'ailleurs plus aussi marqué, en raison du tassement du marché de l'immobilier et de la diminution des biens d'anciens propriétaires, non réévalués depuis l'estimation de 1964, en raison de ventes, donations et successions. Le système n'était que temporaire, jusqu'à la mise en œuvre des commissions d'estimation. La loi 13'030 respectait le principe de l'égalité de traitement.

En critiquant l'indexation à l'IGPC, A______ substituait simplement sa propre appréciation de l'évolution future de cet indice au choix opéré par le Grand Conseil. En critiquant le plafonnement à 1%, il oubliait que l'indexation restait dans le cadre d'une estimation schématique, que le Grand Conseil disposait d'une importante marge de manœuvre et que l'indexation n'était là que dans l'attente des estimations individuelles devant intervenir dès la création des commissions d'estimation. L'indexation permettait d'adapter annuellement la valeur des immeubles, évitant la stagnation, et s'appliquait à l'ensemble des immeubles devant être estimés, sans distinction aucune des anciens et nouveaux propriétaires. Elle n'était pas critiquable sous l'angle de l'égalité de traitement et était conforme à la LHID, l'intention du législateur étant de se rapprocher autant que possible de la valeur vénale des biens immobiliers soumis à l'impôt sur la fortune.

A______ demandait l'annulation de la LEFI 2022 dans son intégralité alors même que ses griefs se limitaient à critiquer le système d'évaluation des immeubles. Cette loi contenait bien d'autres dispositions, non contestées. Il tentait, par le biais d'un recours contre l'évaluation des biens immobiliers, de remettre en cause de manière abusive une baisse du barème de l'impôt sur la fortune. Si les règles d'évaluation fiscale des immeubles estimés devaient être considérées comme contraires au droit, cela ne devrait en aucun cas entraîner une annulation des autres dispositions de la LEFI, qui pouvaient exister indépendamment.

c. Le 21 novembre 2023, A______ a persisté dans ses conclusions.

La capacité contributive se déterminait toujours sur la base de tous les biens, à leur valeur vénale. Le type de bien détenu n'était pas pertinent, tout comme la date d'acquisition. Les anciens et nouveaux propriétaires d'un bien comparable disposaient d'une capacité contributive semblable.

Le but explicite de la LEFI 2022 était de favoriser les anciens propriétaires, en fixant la valeur fiscale des immeubles sensiblement au-dessous de la valeur vénale. L'objectif social avancé par le Grand Conseil, pour autant qu'il se justifie, pouvait être atteint par exemple par le mécanisme du bouclier fiscal et non pour une distinction prohibée comme celle prévue dans la LEFI 2022.

La LEFI 2022 était construite comme un système fiscal global et cohérent. Il s'agissait d'un tout. La baisse de l'impôt sur la fortune, tout comme les dispositions en matière d'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers, d'impôt immobilier complémentaire et d'estimation des immeubles à l'étranger, avait été conçue et adoptée dans le système d'évaluation fiscale des immeubles. L'inconstitutionnalité des dispositions relatives à l'appréciation de la valeur fiscale de certains immeubles devait emporter l'annulation de l'ensemble de la loi.

Même si la LEFI 2022 était présentée comme temporaire, aucune date butoir n'était fixée, de sorte que le système d'évaluation schématique était adopté pour une durée indéterminée.

Une application conforme à la LHID n'était pas envisageable.

d. Les 30 novembre et 14 décembre 2023, le Grand Conseil a maintenu sa position.

La LEFI 2022 avait précisément pour but de garantir l'égalité de traitement entre propriétaires en supprimant autant que possible l'écart de fait résultant de la valeur des biens immobiliers détenus par des anciens et des nouveaux propriétaires, dans l'attente de la mise sur pied des commissions d'estimation. La chambre constitutionnelle avait déjà confirmé qu'une mesure telle que la majoration de 12% était conforme à la LHID. Il ne s'agissait désormais que d'examiner le taux. Le taux de 12%, qui s'ajoutait à la précédente augmentation de 7%, tenait compte de la majoration de 20% proposée par le Conseil d'État dans le cadre de la loi 12'403, qui se fondait sur une étude d'experts du domaine.

e. Par décision du 21 décembre 2023, la chambre constitutionnelle a refusé l'octroi de l'effet suspensif au recours.

f. Le 19 février 2024, A______ a persisté dans son recours et a suggéré, vu le contexte ayant entouré les débats parlementaires, d'instruire la portée économique du mécanisme voulu par le Grand Conseil en diligentant une expertise judiciaire.

Si les cantons avaient une marge de manœuvre pour déterminer la méthode, ils ne pouvaient systématiquement volontairement sous-apprécier la valeur d'un bien en dessous de sa réalité économique. La majorité parlementaire souhaitait ménager un certain nombre de propriétaires anciens. Si le législateur souhaitait prendre des mesures sociales, il lui incombait de modifier le taux uniquement.

g. Le 28 mars 2024, le Grand Conseil a maintenu ses conclusions et s'est opposé à la conduite d'une expertise judiciaire.

Il n'appartenait pas à la chambre constitutionnelle de revoir les choix politiques effectués par le législatif.

La demande d'expertise était tardive et non motivée. Était en cause un débat d'experts, de sorte qu'aucune expertise judiciaire ne pouvait répondre à la question posée, consistant à déterminer la portée économique de la loi 13'030. Il ne pouvait être question de soumettre à un expert l'impact général des modifications législatives adoptées, qui résultaient pour la plupart de considérations juridiques et politiques. Une expertise engendrerait des frais importants non justifiés.

h. Le 22 avril 2024, A______ a persisté dans ses conclusions.

i. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             1.1 La chambre constitutionnelle est l’autorité compétente pour contrôler, sur requête, la conformité des normes cantonales au droit supérieur (art. 124 let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst‑GE ‑ A 2 00). Selon la législation d’application de cette disposition, il s’agit des lois constitutionnelles, des lois et des règlements du Conseil d’État (art. 130B al. 1 let. a de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05).

1.2 Le recours est formellement dirigé contre la loi 13'030, à savoir une loi cantonale, et ce en l’absence de cas d’application. Il a été interjeté dans le délai légal à compter de l’arrêté de promulgation de ladite loi, lequel a été publié dans la FAO du 7 juillet 2023 (art. 62 al. 1 let. d et al. 3 ainsi 63 al. 1 let. b LPA), et satisfait également aux exigences de forme et de contenu prévus aux art. 64 al. 1 et 65 LPA.

2.             2.1 A qualité pour recourir toute personne touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’État ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (art. 60 al. 1 let. b LPA). L’art. 60 al. 1 let. b LPA formule de la même manière la qualité pour recourir contre un acte normatif et en matière de recours ordinaire. Cette disposition ouvre ainsi largement la qualité pour recourir, tout en évitant l’action populaire, dès lors que le recourant doit démontrer qu’il est susceptible de tomber sous le coup de la loi constitutionnelle, de la loi ou du règlement attaqué (ACST/35/2023 du 12 octobre 2023 consid. 1.2 ; ACST/17/2023 du 26 avril 2023 consid. 2.1).

2.2 Lorsque le recours est dirigé contre un acte normatif, la qualité pour recourir est conçue de manière plus souple et il n’est pas exigé que le recourant soit particulièrement atteint par l’acte entrepris. Ainsi, toute personne dont les intérêts sont effectivement touchés directement par l’acte attaqué ou pourront l’être un jour a qualité pour recourir ; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition toutefois qu’il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les dispositions contestées (ATF 147 I 308 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_357/2021 du 19 mai 2022 consid. 2.2).

La qualité pour recourir suppose en outre un intérêt actuel à obtenir l’annulation de l’acte entrepris, cet intérêt devant exister tant au moment du dépôt du recours qu’au moment où l’arrêt est rendu (ATF 147 I 478 consid. 2.2).

A qualité pour recourir, au sens de l'art. 88 de l'ancienne loi fédérale du 16 décembre 1943 d'organisation judiciaire (aOJ), le particulier qui se plaint d'une inégalité de traitement en faisant valoir qu'un acte de portée générale privilégie des tiers d'une manière qui ne se justifie pas objectivement ; il suffit pour cela qu'il se trouve dans une situation comparable à celle des tiers en question et que l'avantage consenti à ces derniers apparaisse en même temps comme un désavantage pour lui-même (ATF 136 I 49 consid. 2.1 ; 131 I 198 consid. 2.6 ; 124 I 159 consid. 1e in RDAF 1999 I 451 ; 109 Ia 252 consid. 4c).

2.3 Dans l'ACST/42/2019 du 20 décembre 2019, la chambre constitutionnelle a admis la qualité pour recourir du recourant, qui était susceptible d'être touché par la LEFI 2018. Il était propriétaire d'un appartement en PPE, catégorie d'immeubles visée par les dispositions de la LEFI 2018 attaquées. Il faisait notamment valoir que les art. 1 et 2 LEFI consacraient une inégalité de traitement entre anciens et nouveaux propriétaires d'immeubles en copropriété par étages. Dans la mesure où les situations des anciens et nouveaux propriétaires d'immeubles étaient étroitement comparables, le recourant était autorisé à se plaindre de ce que les anciens propriétaires bénéficiaient d'un avantage injustifié constituant pour lui un désavantage (consid. 3c).

2.4 En l'espèce, le recourant est toujours propriétaire en PPE de son appartement à C______, catégorie d'immeubles à laquelle s'applique la LEFI 2022, dont l'art. 1 concerne notamment les immeubles visés à l'art. 50 al. 1 let. e LIPP. Le recourant fait par ailleurs à nouveau valoir, à l'encontre de la LEFI 2022, un grief d'inégalité de traitement entre propriétaires (anciens et nouveaux, mobiliers et immobiliers).

Néanmoins, le recourant se plaint de l'insuffisance de l'augmentation de la valeur fiscale pour les anciens propriétaires, jugeant que l'augmentation pour laquelle le législateur a opté ne suffirait pas à atteindre la valeur vénale et créerait une inégalité de traitement. Le recourant étant propriétaire de son bien immobilier depuis plus de 10 ans et devant selon la LEFI 2022 se voir appliquer la majoration de 12%, il se plaint ce faisant de l'augmentation insuffisante de la valeur fiscale de son immeuble et demande par conséquent une taxation plus élevée, ce qui peut faire douter de l'intérêt pratique du recourant à son recours.

Au vu de ce qui précède, la qualité pour recourir du recourant n'est pas évidente. La question peut cependant demeurer indécise, vu ce qui suit.

3.             Le recourant conclut à la conduite d'une expertise judiciaire.

3.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit, pour l’intéressé, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves, à condition qu’elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_8/2022 du 5 décembre 2022 consid. 2.2). Il ne comprend en principe pas le droit d’être entendu oralement ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2022 du 26 octobre 2022 consid. 4.2). Le droit d’être entendu n’empêche pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu’elles ne pourraient pas l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1).

3.2 En l'espèce, le recourant a suggéré à la chambre de céans de diligenter, le cas échéant, une expertise pour instruire la portée économique du mécanisme prévu par la LEFI 2022 au regard de la valeur vénale. Il n'indique pas en quoi une telle expertise serait nécessaire, ni même d'ailleurs n'affirme qu'elle le serait.

La chambre constitutionnelle dispose des écritures détaillées des parties, lesquelles citent largement les travaux préparatoires de la LEFI 2022, auxquels la chambre de céans a également accès. Par ailleurs, les griefs soulevés par le recourant relèvent du droit, qu'il revient à la chambre constitutionnelle de trancher, et non des questions de fait, qui seules peuvent être soumises à un expert. Celle-ci dispose par conséquent d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause.

Il ne sera pas donné suite à la requête du recourant.

4.             Le recours porte sur la conformité au droit de la LEFI 2022, en particulier de ses art. 1, 2, 3 et 4 let. c, en lien avec la modification qu'elle prévoit de l'art. 52 LIPP.

5.             Le recourant se plaint d'une violation de la LHID.

5.1 La chambre constitutionnelle, lorsqu’elle se prononce dans le cadre d’un contrôle abstrait des normes, s’impose une certaine retenue et n’annule les dispositions attaquées que si elles ne se prêtent à aucune interprétation conforme au droit ou si, en raison des circonstances, leur teneur fait craindre avec une certaine vraisemblance qu’elles soient interprétées ou appliquées de façon contraire au droit supérieur. Pour en juger, il lui faut notamment tenir compte de la portée de l’atteinte aux droits en cause, de la possibilité d’obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante et des circonstances dans lesquelles ladite norme serait appliquée. Le juge constitutionnel doit prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d’une application conforme – ou non – au droit supérieur. Les explications de l’autorité sur la manière dont elle applique ou envisage d’appliquer la disposition mise en cause doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard du droit supérieur dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l’éventualité que, dans certains cas, elle puisse se révéler inconstitutionnelle ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait (ATF 148 I 198 consid. 2.2 ; 147 I 308 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_810/2021 du 31 mars 2023 consid. 3.2 ; ACST/20/2023 du 9 mai 2023 consid. 3).

5.2 Selon l'art. 2 al. 1 let. a LHID, les cantons prélèvent un impôt sur la fortune des personnes physiques. L'impôt sur la fortune des personnes physiques a pour objet l'ensemble de la fortune nette (art. 13 al. 1 LHID). Celle-ci se détermine selon les règles d'évaluation prévues à l'art. 14 LHID, d'après son état à la fin de la période fiscale ou de l'assujettissement (art. 17 al. LHID). Selon l'art. 14 LHID, la fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée (al. 1). Les immeubles affectés à l'agriculture ou à la sylviculture sont estimés à leur valeur de rendement. Le droit cantonal peut prévoir que la valeur vénale doit être prise en compte lors de l'estimation ou que la différence entre la valeur vénale et la valeur de rendement fait l'objet d'une imposition complémentaire si l'immeuble est aliéné ou n'est plus affecté à l'agriculture ou à la sylviculture. L'imposition complémentaire ne peut excéder une durée de vingt ans (al. 2). Les biens immatériels et la fortune mobilière qui font partie de la fortune commerciale du contribuable sont estimés à la valeur déterminante pour l’impôt sur le revenu. Les cantons peuvent prévoir une réduction d’impôt pour le patrimoine afférent aux droits visés à l’art. 8a (al. 3).

La jurisprudence a précisé que la LHID ne prescrivait pas au législateur cantonal une méthode d'évaluation déterminée pour établir la valeur déterminante selon l'art. 14 al. 1 LHID. Les cantons disposent en la matière d'une marge de manœuvre importante pour élaborer et appliquer leur réglementation, aussi bien dans le choix de la méthode de calcul applicable que pour apprécier, compte tenu du caractère potestatif de l'art. 14 al. 1 2e phr. LHID, dans quelle mesure le rendement doit être pris en considération dans l'estimation (ATF 134 II 207 consid. 3.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 4.3). Il faut cependant ajouter qu'à l'exception des immeubles affectés à l'agriculture ou à la sylviculture (art. 14 al. 2 LHID), l'évaluation ne saurait se faire à l'aune du seul critère du rendement, sans prise en compte de la valeur vénale du bien considéré. Par ailleurs, la valeur de rendement ne peut, le cas échéant, être prise en considération que de manière appropriée ; elle ne saurait justifier n'importe quel écart avec la valeur vénale. Les cantons ne peuvent ainsi pas prévoir des règles d'évaluation tendant de manière générale à une sur- ou sous-estimation de la valeur vénale des immeubles. Il ne serait pas compatible avec le principe de l'art. 14 al. 1 LHID de limiter à un pourcentage déterminé de la valeur fiscale (estimée) la valeur déterminante pour l'impôt sur la fortune des biens immobiliers ou d'octroyer un abattement général sur la valeur vénale fondé, par exemple, uniquement sur des considérations de politique d'encouragement à l'accession à la propriété immobilière (ATF 148 I 210 consid. 4.4 in RDAF 2022 II 281 ; 134 II 207 consid. 3.6 ; 131 I 291 consid. 3.2.2 in RDAF 2005 II 275 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_722/2023 du 18 juillet 2024 consid. 5.2 ; 2C_442/2012 du 14 décembre 2012 consid. 4.1). Ainsi, un certain schématisme est admis en la matière, pourvu que l'évaluation ne soit pas fondée sur le seul critère du rendement et qu'elle n'aboutisse pas à des résultats qui s'écartent par trop de la valeur vénale (ATF 148 I 210 consid. 4.4 in RDAF 2022 II 281 ; 131 I 291 consid. 3.2.2 in RDAF 2005 p. 275).

L'art 14 LHID ne concerne que l'harmonisation des impôts entre les cantons. Il fait, en effet, partie du chapitre 4 relatif à l'impôt sur la fortune et ne touche donc pas – en l'absence d'impôt fédéral direct sur la fortune – l'harmonisation verticale, soit celle entre les impôts directs de la Confédération, des cantons et des communes. Les cantons ont, à cet égard, une certaine liberté d'appréciation, dans les limites toutefois des principes constitutionnels (ATF 128 I 240 consid. 3.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_38/2007 du 9 juillet 2007 consid. 5.1). Ainsi, une disposition cantonale, adoptée sur la base de l'art. 14 LHID, qui ne respecterait pas ces principes ne bénéficierait pas de l'immunité que l'art. 190 Cst. confère aux lois fédérales ou au droit international.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il résulte de l'art. 17 al. 1 LHID que la loi sur l'harmonisation fiscale des cantons n'autorise pas ces derniers à évaluer la fortune, respectivement à actualiser les valeurs fiscales établies à intervalle de longue durée (ATF 131 I 291 in RDAF 2005 II 275 consid. 2.5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_194/2021 du 23 décembre 2021 consid. 2.2.2 ; 2C_681/2020 du 25 juin 2021 consid. 4.1). Les réglementations cantonales qui prescrivent des valeurs fiscales pour l'impôt sur la fortune qui ne sont pas adaptées pendant plusieurs années et qui ne correspondent pas approximativement aux prix actuels du marché sont donc contraires à la LHID (arrêt du Tribunal fédéral 2C_681/2020 précité consid. 4.1).

5.3 Le canton de Genève a concrétisé ces principes dans la LIPP. L'art. 49 LIPP dispose que la fortune, établie au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû (al. 1), est en règle générale estimée à sa valeur vénale (al. 2), étant précisé que les immeubles situés dans le canton sont estimés d'après l'art. 50 LIPP, lequel pose des principes d'évaluation différents selon le type d'immeuble considéré. Ainsi, les autres immeubles, notamment les villas, parcs, jardins d'agrément, ainsi que les immeubles en PPE, sont estimés en tenant compte du coût de leur construction, de leur état de vétusté, de leur ancienneté, des nuisances éventuelles, de leur situation, des servitudes et autres charges foncières les grevant, de prix d'achats récents ou d'attribution ensuite de succession ou de donation et des prix obtenus pour d'autres propriétés de même nature qui se trouvent dans des conditions analogues, à l'exception des ventes effectuées à des prix de caractère spéculatif. Cette estimation est diminuée de 4% par année d'occupation continue par le même propriétaire ou usufruitier, jusqu'à concurrence de 40% (art. 50 let. e LIPP).

5.4 L'actuel art. 52 LIPP prévoit la procédure d'évaluation des biens immobiliers à taxer. Comme l'art. 7 de l'ancienne loi genevoise sur l'imposition des personnes physiques – impôt sur la fortune du 22 septembre 2000 (aLIPP-III), il traite de la façon dont les immeubles doivent être estimés, posant des principes d'évaluation différents selon le type d'immeuble considéré (ATA/394/2008 du 29 juillet 2008). L'évaluation des immeubles locatifs est faite par le contribuable lui-même, dans sa déclaration d'impôt (art. 52 al. 1 LIPP ; ATA/661/2015 du 23 juin 2015). Celle des autres immeubles est faite par des commissions d'experts et vaut pour une période de dix ans appelée période décennale (art. 52 al. 2 LIPP). Cette règle de l'estimation décennale des immeubles n'est toutefois pas immuable, puisque le législateur a expressément prévu plusieurs situations dans lesquelles l'estimation fiscale du bien immobilier doit ou peut être revue. En effet, lorsque, pendant cette période, un immeuble est aliéné à titre onéreux ou à titre gratuit, ou dévolu pour cause de mort, la valeur d'aliénation ou la valeur de succession retenue par le département pour la perception des droits d'enregistrement et de succession se substitue à la valeur d'estimation pour le reste de la période décennale (al. 3). Pour le reste de la période décennale, l'adaptation de la valeur d'estimation est suspendue en cas de succession, pour le logement principal de la personne décédée, s'il est attribué en propriété ou en usufruit à un héritier qui faisait ménage commun avec elle, tant que cet héritier continue à occuper personnellement le logement comme résidence principale (let. b) ou, en cas de liquidation du régime matrimonial, pour le logement principal du couple attribué en propriété ou en usufruit à l'un des conjoints, tant que celui-ci continue à l'occuper personnellement comme résidence principale (let. c ; al. 4).

5.5 Une expertise générale des immeubles du canton de Genève a eu lieu pour la dernière fois en 1964. Par souci d'économie, le Grand Conseil du canton de Genève a prorogé à différentes reprises, pour une période décennale, les estimations alors déterminées avec une majoration de 20%, sans nouvelle estimation par la commission d'experts. Il l'a notamment fait par le biais de la loi du 14 janvier 1993 sur les estimations fiscales de certains immeubles qui fixait les estimations pour une nouvelle période de dix ans arrivant à échéance le 31 décembre 2004. En vue de la période décennale 2005-2014, le Grand Conseil a, en 2004, prorogé une première fois sans majoration les valeurs fiscales déterminantes au 31 décembre 2004 pour une période plus courte de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2007 (art. 1 de l'ancienne loi sur les estimations fiscales de certains immeubles du 19 novembre 2004). Considérant l'envergure de la nouvelle estimation du parc immobilier à mettre en place, il a, le 30 novembre 2007, décidé de proroger une deuxième fois, sans aucune majoration, les valeurs fiscales déterminantes au 31 décembre 2007 pour une période de cinq ans, soit jusqu'au 31 décembre 2012 (art. 1 de l'ancienne loi sur les estimations fiscales de certains immeubles du 30 novembre 2007). Il a opéré de manière similaire le 29 novembre 2012 et prorogé les valeurs fiscales des immeubles pour une nouvelle période de deux ans, soit jusqu'en 2014 (art. 1 de l'ancienne loi sur les estimations fiscales de certains immeubles du 29 novembre 2012). Le 28 août 2014, il a à nouveau prorogé les valeurs fiscales des immeubles pour une période de quatre ans, soit jusqu'au 31 décembre 2018, sans majoration (art. 1 de l'ancienne loi sur les estimations fiscales de certains immeubles du 28 août 2014 ; rapport du Grand Conseil PL 11'020-A du 13 novembre 2012). Finalement, une dernière prorogation, avec majoration de 7%, a été opérée par la LEFI 2018, pour la valeur fiscale de l'année 2019, pour une période de dix ans, jusqu'au 31 décembre 2028 (art. 1 et 2 LEFI 2018).

5.6 Dans un arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018, le Tribunal fédéral a retenu qu'il n'apparaissait pas que le système prévu par le droit cantonal pour évaluer les immeubles sis dans le canton de Genève serait contraire aux exigences posées par l'art. 14 LHID. Les règles spécifiques prévues par le droit cantonal pour évaluer de tels immeubles, depuis l'expertise générale des immeubles de 1964 jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ancienne LEFI du 24 août 2014, respectaient a priori le cadre défini – largement – par l'art. 14 al. 1 LHID de sorte que la valeur fiscale des immeubles appartenant à des personnes physiques dans le canton de Genève pouvait, en principe, être établie conformément aux règles que le législateur avait édictées (consid. 5.3).

La chambre constitutionnelle a, dans l'ACST/42/2019 précité, retenu que la majoration de 7% des valeurs fiscales des immeubles non locatifs acquis (aliénation, dévolution), estimés ou construits avant le 31 décembre 2008 prévu par la LEFI actuellement en vigueur – étant précisé que la prorogation était valable pour une période de dix ans à compter du 1er janvier 2019, sous réserve de la mise en service du nouveau système d'estimation avant l'échéance des dix ans – était conforme à l'art. 14 al. 1 LHID en lien avec l'art. 17 al. 1 LHID, compte tenu de l'importante marge de manœuvre qui revenait aux cantons pour déterminer la méthode de calcul applicable pour évaluer les immeubles sis dans leur canton et comme le Tribunal fédéral avait récemment eu l'occasion de le rappeler pour la précédente prorogation, sous réserve du principe de l'égalité de traitement (consid. 7d).

5.7 En l'espèce, le recourant affirme que la LEFI 2022 prévoit une méthode de fixation de la valeur fiscale des immeubles qui ne correspondrait pas à la valeur vénale, emportant ainsi violation de la LHID. Il critique dans ce cadre la prorogation de l'art. 1 LEFI 2022 et la majoration de l'art. 2 LEFI 2022, en lien avec l'exception de l'art. 4 let. c LEFI 2022. Il remet également en cause l'indexation prévue par l'art. 2 al. 2 LEFI 2022 et la durée indéterminée de la prorogation prévue par l'art. 1 LEFI 2022.

L'art. 1 LEFI 2022 prévoit que l'estimation de la valeur fiscale des autres immeubles est prorogée pour une durée indéterminée. L'art. 2 al. 1 LEFI 2022, en lien avec l'art. 4, prévoit ensuite une majoration de 12% de la valeur fiscale au 31 décembre précédent son entrée en vigueur (soit au 31 décembre 2024 en prenant l'hypothèse d'une entrée en vigueur en 2025), pour les immeubles acquis (aliénation, dévolution), estimés ou construits jusqu'au 31 décembre de la 11e année précédant l'entrée en vigueur de la LEFI 2022 (soit jusqu'au 31 décembre 2014 selon l'hypothèse posée précédemment), cette nouvelle valeur fiscale devant s'appliquer pour la première année fiscale suivant l'entrée en vigueur de la loi (soit en 2025 toujours selon la même hypothèse). L'art. 2 al. 2 LEFI 2022 prévoit que, par la suite, dès la deuxième période fiscale suivant l'entrée en vigueur de la LEFI 2022 (soit en 2026 selon l'hypothèse d'entrée en vigueur en 2025), la valeur fiscale est indexée à l'IGPC, limité à 1%. Le nouvel art. 52 al. 4 LIPP maintient par ailleurs les commissions d'évaluation, qui interviennent périodiquement, sans précision de la durée des périodes.

5.7.1 En ce qui concerne la majoration de 12%, le recourant se plaint dans son recours de la baisse de la majoration proposée par le Conseil d'État en 2018 de 20% à 12%.

D’une part, cette argumentation dénote une mécompréhension du système, puisque la majoration de 12% vient s'ajouter à la précédente de 7%, qui s'était elle-même ajoutée aux précédentes, comme l'indique expressément l'art. 3 LEFI 2022. Les travaux préparatoires le confirment également : la valeur fiscale déterminante, au sens de l’art. 2 al. 1 LEFI 2022, dont l’origine peut remonter dans certains cas jusqu’à 1965, découle des évolutions législatives, ainsi que des majorations survenues en application des lois successives de prorogation des estimations fiscales (PL 13'030, exposé des motifs, p. 13).

Ce mécanisme mène ainsi précisément, pour les immeubles concernés à la fois par la majoration de 7% et celle de 12%, à une augmentation globale d'environ 20% par rapport à la valeur fiscale à fin 2018, de sorte qu'il n'y a pas de baisse de la majoration de 20% proposée par le Conseil d'État dans le cadre de la LEFI 2018, contrairement à ce qu'allègue le recourant.

En effet, initialement, le PL 13'030 prévoyait une majoration de 5%, ce qui ne permettait toutefois pas d'atteindre les prix du marché (rapport de la commission fiscale, p. 34). Deux amendements ont proposé de prévoir un taux de 12% et 13%, avec pour but de se rapprocher du taux de 20% de majoration par rapport à la situation antérieure à 2019, taux initialement proposé pour la LEFI 2018 et finalement arrêté à 7%. C'est finalement le taux de 12% qui a été retenu. Ainsi, un bien immobilier qui avait une valeur de 100 à fin 2018, a été majoré de 7% en 2019 pour avoir une valeur de 107, de sorte qu'avec la majoration de 12% par rapport à 107, cela mène à une valeur de 119.84, et donc à une majoration d’environ 20% par rapport à la valeur fiscale à fin 2018 (rapport de la commission fiscale, p. 81, 84, 101 et 108).

Ainsi, l'argumentation du recourant relative à la majoration de 12% tombe à faux.

D'autre part, tout comme la chambre de céans l'a retenu pour la précédente prorogation avec majoration, il n'existe aucune raison de considérer que les art. 1, 2 et 4 let. c LEFI 2022 ne respecteraient pas le cadre défini largement par l'art. 14 al. 1 LHID. En effet, non seulement les cantons bénéficient d'une importante marge de manœuvre pour déterminer la méthode de calcul applicable pour évaluer les immeubles sis dans leur canton, mais la précédente majoration, de 7% – s'éloignant donc plus de la valeur vénale – et applicable uniquement aux immeubles estimés, construits ou acquis par aliénation ou dévolution jusqu'en 2008, a été jugée conforme à l'art. 14 al. 1 LHID, sous réserve du principe de l'égalité de traitement. A fortiori, une nouvelle majoration de 12%, applicable aux immeubles estimés, construits ou acquis par aliénation ou dévolution jusqu'en 2014 dans l'hypothèse formulée précédemment, qui permet, pour les immeubles estimés, construits ou acquis par aliénation ou dévolution jusqu'en 2008, d'atteindre la majoration de 20% initialement préconisée par le Conseil d'État dans le cadre des travaux pour la LEFI 2018 pour se rapprocher au mieux de la valeur du marché (PL 12'403, exposé des motifs, ad art. 2), est, elle aussi, conforme à l'art. 14 al. 1 LHID.

Il convient donc de retenir que le principe de la prorogation et la majoration de 12% prévues par la LEFI 2022 respectent le cadre défini par l'art. 14 al. 1 LHID.

5.7.2 Le recourant critique encore l'indexation et sa limitation à 1% ainsi que le caractère indéterminé de la durée de la prorogation.

Il affirme que l'IGPC ne reflète pas la fluctuation des prix de l'immobilier et aura pour conséquence de creuser l'écart entre la valeur vénale et la valeur fiscale.

La question du choix de l'indice d'indexation a été abondamment discutée devant la commission fiscale et a également été abordée lors des débats du Grand Conseil. Devant la commission fiscale, un amendement a été proposé pour prévoir une indexation à un autre indice, soit l'IMPI, et a été refusé (rapport de la commission fiscale, p. 81 ss, 133 et 139).

Selon les explications de l'office cantonal de la statistique (ci-après : OCSTAT), l'IMPI est un indice trimestriel récent calculé depuis le 1er trimestre 2019. Il distingue les appartements en PPE et les maisons individuelles. Il n’est pas « cantonalisé », mais il est calculé pour cinq types de communes issues d’une typologie produite par l'OFS : commune urbaine d’une grande agglomération, commune urbaine d’une agglomération moyenne, commune urbaine d’une petite agglomération ou hors agglomération, commune intermédiaire et commune rurale), dont trois types uniquement existent à Genève (communes urbaines d'une grande agglomération, communes urbaines et communes intermédiaires ; rapport de la commission fiscale, p. 74 s.).

Lors des auditions et débats devant la commission fiscale, certains reprochaient à l'IGPC de ne pas refléter le marché de l'immobilier (rapport de la commission fiscale, p. 33, 51, 69, 72, 73, 76 et 82), ce qui revenait à « comparer des pommes et des poires » (p. 75), d'où la proposition d'opter plutôt pour l'IMPI. D'autres trouvaient au contraire l'IGPC plus adapté car plus représentatif de l’évolution générale du train de vie dans une société (rapport de la commission fiscale, p. 122) et plus stable (rapport de la commission fiscale, p. 81 s. et 109). En effet, l'IMPI était un indice qui pouvait fluctuer fortement (rapport de la commission fiscale, p. 73 et 82). Il a également été relevé qu'il s'agissait d'un indice qui s'inscrivait au niveau fédéral, mais qui cachait beaucoup de disparités cantonales et communales (rapport de la commission fiscale, p. 102 et 118) et qu'il s'agissait d'un indice des prix immobiliers résidentiels alors que le projet ne se limitait pas à l'immobilier résidentiel (p. 109).

En définitive, il ressort de ces éléments qu'aucun des deux indices n'est parfaitement adapté.

En regardant le graphique comparatif préparé par l'OCSTAT, il apparaît que l'indice des prix à la consommation a constamment augmenté pour arriver à 48% en 2020 par rapport à 1985 (indice 100), tandis que les appartements en PPE et les maisons individuelles (en application d'un autre indice que l'IMPI, qui n'existait pas avant 2019) ont augmenté de 136 et 133% pendant la même période, mais en ayant eu une période de baisse dans les années 1990 (rapport de la commission fiscale, p. 209). Ceci peut suggérer que l'application de l'IGPC pourrait conduire, à plus ou moins long terme, à une valeur fiscale sous-évaluée, d'autant plus en plafonnant l'augmentation à 1%.

C'est précisément l'argumentation du recourant, qui affirme que ce plafonnement constituerait une sous-évaluation systématique de l'estimation fiscale, contraire à la jurisprudence fédérale.

Cette position a également été soutenue devant la commission fiscale (rapport de la commission fiscale, p. 33, 51, 68, 166 et 168).

Toutefois, le droit fédéral admet une méthode schématique et exige seulement que la méthode ne s'éloigne pas trop de la valeur vénale, ce que l'indexation à l'IGPC, même avec plafonnement, est mieux à même d'assurer qu'un système fonctionnant uniquement (dans l'attente d'estimations décennales) sur des prorogations avec ou sans majoration, comme précédemment. Par ailleurs, le plafonnement ne pourra s'appliquer qu'en cas de dépassement du plafond par l'IGPC, l'indexation suivant cet indice tant que celui-ci demeure en dessous de 1%. Il n'y a donc aucune sous-estimation systématique comme l'affirme le recourant.

Au demeurant, si le système de l'indexation annuelle avec plafonnement à 1% avait certes initialement pour vocation d'être pérenne dans la première version du PL 13'030, qui abolissait toute estimation par des experts et prévoyait la prorogation pour une durée indéterminée, ce n'est plus le cas dans la LEFI 2022 adoptée. En effet, dans le PL initial, après, le cas échéant, la première majoration de 12% (pour les immeubles pour lesquels elle était applicable), l'adaptation de la valeur fiscale se faisait chaque année, pour tous les immeubles au sens de l'art. 50 let. b, d et e LIPP, uniquement par indexation à l'IGPC, limité à 1%. Dans la loi finale, si l'indication d'une prorogation pour une durée indéterminée est demeurée, la commission fiscale a amendé le projet pour réintroduire une évaluation périodique par des commissions d'experts à teneur du nouvel art. 52 al. 4 LIPP. La prorogation et l'indexation plafonnée ont ainsi pour vocation de ne s'appliquer qu'entre deux évaluations, et non comme unique mécanisme de fixation de la valeur fiscale, comme dans le projet initial.

Or, le Tribunal fédéral a validé le système pratiqué dans le canton de Genève ces dernières décennies, par prorogation, à intervalles plus ou moins longs, des valeurs fiscales avec majoration en fonction du marché pour s'approcher de la valeur vénale. A fortiori, le nouveau système est également conforme au droit fédéral, dans la mesure où il permet une adaptation chaque année et a vocation à ne s'appliquer qu'entre deux évaluations.

Néanmoins, alors que la LIPP actuelle fixe une échéance pour chaque estimation, soit un rythme décennal – qui n'a certes pas été respecté en l'absence de nouvelle estimation depuis 1964 –, le nouvel art. 52 al. 3 LIPP prévoit uniquement une évaluation périodique, sans indication de la période applicable.

En effet, afin de laisser une marge de manœuvre plus importante, les nouveaux immeubles sont évalués de manière périodique et non plus pour une durée de dix ans (rapport de la commission fiscale, p. 98 et 126 ; exposé des motifs de l'amendement, p. 235). Le DF a souligné que cela signifiait l'absence de durée de validité de l'évaluation par des commissions d'experts et que s’il existait une volonté politique, des commissions d’experts seraient mises en œuvre et si ce n'était pas le cas, on ne se retrouverait pas coincé par une stagnation de l’évaluation des immeubles, car il y aurait une augmentation annuelle fixée par rapport à l’indice des prix à la consommation (rapport de la commission fiscale, p. 128 s.).

Or, les discussions susmentionnées autour de l'IGPC ainsi que le plafonnement à 1% démontrent que l'application chaque année de cet indice plafonné ne garantit pas à elle seule le respect de la taxation de la valeur vénale, de sorte qu'une évaluation demeurerait nécessaire si les valeurs ainsi fixées devaient trop s'éloigner de l'évolution du marché de l'immobilier, la LHID s'opposant à des actualisations des valeurs fiscales à intervalles de longue durée.

Au vu de ce qui précède, le système prévu par la LEFI 2022 n'apparaît pas en tant que tel contraire à la LHID, mais pourrait le devenir si l'indexation limitée à 1% ne suffisait pas à suivre l'augmentation de valeur vénale réelle en l'absence d'évaluations périodiques à intervalles suffisamment rapprochés. La LEFI 2022 devra dès lors être appliquée de manière conforme à la LHID, faute de quoi le système risquerait de devenir contraire à celle-ci. Si une telle situation devait néanmoins se produire, c'est par la voie d'un contrôle concret des normes qu'elle devrait être dénoncée.

En définitive, la LEFI 2022, moyennant une interprétation conforme au droit fédéral pour fixer la durée de la période entre deux « évaluations périodiques », est conforme à la LHID, et le grief sera écarté.

6.             Le recourant se plaint d'une violation du principe de l'égalité de traitement.

6.1 Selon l'art. 8 al. 1 Cst., tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Un acte normatif viole le principe de l'égalité de traitement lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 143 I 361 consid. 5.1 ; 142 V 316 consid. 6.1.1 ; 141 I 153 consid. 5.1 ; 140 I 77 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_827/2018 du 21 mars 2019 consid. 6.1). Il y a notamment inégalité de traitement lorsque l'État accorde un privilège ou une prestation à une personne, mais dénie ceux-ci à une autre personne qui se trouve dans une situation comparable (s'agissant de l'usage accru du domaine public, ATF 140 I 201 consid. 6.5.1 et les références citées). La question de savoir s'il existe un motif raisonnable pour une distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et les idées dominantes. Le législateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de ces principes (ATF 137 I 167 consid. 3.4).

6.2 En droit fiscal, le principe d'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. est concrétisé par les principes de l'universalité, de l'égalité de l'imposition et de la capacité économique figurant à l'art. 127 al. 2 Cst. (ATF 137 I 145 consid. 2.1 ; 136 I 49 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_586/2013 du 7 octobre 2014 consid. 4 in Archives 83, p. 304 ; 2C_77/2013 du 6 mai 2013 consid. 4.1 in StE 2013 B 44.12.3 Nr. 7). En vertu des principes de l'égalité d'imposition et de l'imposition selon la capacité contributive, les contribuables qui sont dans la même situation économique doivent supporter une charge fiscale semblable ; lorsqu'ils sont dans des situations de faits différentes qui ont des effets sur leur capacité économique, leur charge fiscale doit en tenir compte et y être adaptée. Ainsi, d'après le principe de l'imposition selon la capacité contributive, tel qu'il est aussi nommé par la jurisprudence (Silvia Maria SENN, Die verfassungsrechtliche Verankerung von anerkannten Besteuerungsgrundsätzen : unter besonderer Berücksichtigung des Leistungsfähigkeitsprinzips, 1999, p. 149), chaque citoyen doit contribuer à la couverture des dépenses publiques compte tenu de sa situation personnelle et en proportion de ses moyens (ATF 133 I 206 consid. 6.1 et 7.1 ; 122 I 101 consid. 2 b/aa ; 122 I 305 consid. 6a ; 118 Ia 1 ; 114 Ia 321 consid. 3b).

On ne peut décider sur la base de critères formels si une loi fiscale satisfait aux exigences constitutionnelles précitées car cette question dépend de celle de savoir si la loi est juste. La réponse à cette question évolue avec les circonstances politiques, sociales et économiques (ATF 140 II 157 consid. 7.2 et les références citées). Il convient à cet égard d'éviter la tendance naturelle à n'examiner le respect d'un principe constitutionnel qu'isolément sans prendre en considération la pluralité des principes exprimés par la Constitution, qui ne valent jamais sans exception et entrent parfois en contradiction les uns avec les autres. L'interprétation de la Constitution se doit de ménager et d'aménager ces principes en créant entre eux une concordance pratique (ATF 140 II 157 consid. 7.2 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_735/2017 du 6 février 2018 consid. 7.2).

C'est, du point de vue démocratique, au législateur fiscal (art. 127 al. 1 Cst.) qu'il appartient d'aménager le système fiscal, d'arbitrer les conflits de valeurs et de concrétiser les principes d'imposition de façon à conférer précision, prévisibilité et sécurité à la réglementation fiscale. Le législateur dispose à cet égard d'un pouvoir d'appréciation étendu (ATF 140 II 157 consid. 7.3 et les références citées). Sous cet angle, la comparaison verticale, c'est-à-dire entre contribuables ayant une capacité économique différente est plus difficile à établir que ne l'est la comparaison horizontale, c'est-à-dire entre contribuables jouissant de la même capacité économique (ATF 140 II 157 consid. 7.3 ; 112 Ia 240 consid. 4b). Néanmoins, dans les rapports horizontaux, le principe de l'imposition selon la capacité économique n'exige pas une imposition absolument identique, la comparaison étant également limitée dans ce cas. Dans l'examen de dispositions légales inévitablement imparfaites, le juge constitutionnel doit par conséquent faire preuve d'une certaine retenue sous peine de courir le danger de créer une nouvelle inégalité alors qu'il cherche à obtenir l'égalité entre deux catégories de contribuables. Il ne peut pas s'écarter à la légère des règles légales édictées par le législateur (ATF 140 II 157 consid. 7.3 ; 132 I 157 consid. 4.1 et 4.2 ; 128 I 240 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_735/2017 précité consid. 7.3).

6.3 Dans un ATF 131 I 291 (in RDAF 2005 II 275), le Tribunal fédéral a retenu que la méthode d'évaluation adoptée par le canton de Schwyz, dont la réglementation instituait plusieurs paliers d'augmentation de 20%, 40% et 80% pour les immeubles qui n'avaient pas été ré-estimés depuis un certain temps, n'était certes pas parfaite, mais néanmoins admissible. Elle permettait en effet d'assurer, à tout le moins, que les grandes disparités soient éliminées. La grande fourchette des taux d'adaptation était destinée à supprimer les inégalités qui existaient parmi les anciennes évaluations en fonction du moment où elles avaient eu lieu.

6.4 Dans un arrêt plus ancien, publié aux ATF 124 I 159 (in RDAF 1999 I 451), le Tribunal fédéral a considéré que la loi tessinoise sur l'estimation officielle de la fortune immobilière, selon laquelle, pour toutes ses utilisations, la valeur d'estimation officielle des immeubles sis dans le canton du Tessin était prise en considération dans la proportion de 70%, portait atteinte à l'égalité de traitement qui devait prévaloir en matière fiscale entre les propriétaires de biens mobiliers et les propriétaires de biens immobiliers. Dans cette affaire, le législateur avait entendu éviter une augmentation substantielle de la charge fiscale de certains propriétaires d'immeubles (qui faisaient l'objet d'estimations très anciennes). Le Tribunal fédéral a relevé que, s'agissant d'un impôt sur la fortune, toute la substance imposable devait en principe être estimée de manière réaliste et uniforme, de façon à éviter que la charge fiscale dépende du type de bien possédé. Le principe de l'égalité de traitement tendait donc à exclure, pour ce genre d'impôt, les estimations privilégiées pour certaines catégories de biens. Une estimation prudente, de même que l'écoulement du temps depuis la dernière estimation, pouvaient conduire dans la pratique à admettre des valeurs qui s'écartaient de celles effectivement consenties, pour des biens analogues, sur le marché privé ; si elles se maintenaient dans certaines limites, de telles différences pouvaient s'appuyer sur des motifs objectifs et être admissibles sous l'angle constitutionnel. En revanche, des estimations sciemment basses, destinées à obtenir une estimation nettement inférieure à la réalité, comme c'était le cas en l'espèce, n'étaient pas conformes au principe de l'égalité de traitement (consid. 2).

6.5 Dans l'ACST/42/2019 précité, la chambre constitutionnelle a retenu que la LEFI actuellement en vigueur, qui prévoit une majoration de la valeur fiscale de 7% pour dix ans selon son art. 2, violait les principes d'égalité de traitement et d'imposition selon la capacité contributive. En effet, un propriétaire ayant acquis son bien immobilier depuis longtemps qui disposait d'une capacité contributive semblable à un propriétaire ayant récemment acquis son bien ne serait pas imposé dans la même mesure. Dans le premier cas, le propriétaire serait imposé sur la base d'une estimation ancienne, le cas échéant majorée, mais qui restait en général nettement en-deçà de la valeur du marché, d'autant plus compte tenu de l'abattement prévu par l'art. 50 let. e LIPP, alors que dans le deuxième cas, il serait imposé d'après une valeur qui se rapprochait de la valeur vénale. Le Conseil d'État avait proposé de majorer les valeurs fiscales des immeubles de 20% dans le but de corriger les estimations trop faibles des villas et PPE détenues de longue date. Ce pourcentage avait été déterminé en fonction de l'évolution du marché des dix dernières années au regard des indices des prix de l'immobilier pour les villas et les PPE situées en région lémanique. Abaisser la majoration de 20% à 7% avait pour effet de maintenir un écart nettement plus important entre la charge fiscale supportée par les anciens propriétaires et celle qui pèserait sur les nouveaux propriétaires. Un tel écart n'était justifié par aucun motif objectif et procédait d'une intention claire du législateur de favoriser un groupe de contribuables au détriment d'un autre (consid. 9).

6.6 En l'espèce, comme vu précédemment, la LEFI 2022 permet de rejoindre, pour les immeubles concernés par les deux majorations, la majoration de 20% proposée par le Conseil d'État mais baissée à 7% dans la précédente LEFI, ceci dans le but figurant dans les travaux préparatoires de répondre à l'arrêt de la chambre constitutionnelle ayant constaté une violation des principes d'égalité de traitement d'imposition selon la capacité contributive.

Le taux de 20% avait été proposé le 31 octobre 2018 par le Conseil d'État en fonction de l'augmentation des prix de l'immobilier entre 2008 et 2017 pour les villas et PPE, arrêtée à 19.3% pour les villas et 25.9% pour les PPE (PL 12'403, exposé des motifs, ad art. 2).

La nouvelle majoration de 12%, applicable pour les immeubles acquis ou estimés depuis plus de dix ans, aura ainsi pour effet, lors de la première année fiscale suivant l'entrée en vigueur de la LEFI 2022, de rapprocher les valeurs fiscales concernées de la valeur vénale, et donc d'assurer une meilleure égalité entre les différents propriétaires immobiliers, anciens et nouveaux, ainsi qu'entre propriétaires immobiliers et mobiliers.

Par ailleurs, s'agissant de l'indexation, après la première majoration permettant d'approcher pour tous la valeur vénale, tous les propriétaires seront ensuite soumis chaque année à la même indexation, plafonnée à 1%, quelle que soit la manière dont la valeur fiscale de leur bien a été fixée (estimation de 1964 avec toutes les prorogations et majorations, acquisition ultérieure avec les seules prorogations ou majorations applicables, acquisition récente sans aucune prorogation ou majoration, etc. ; art. 2 al. 2 LEFI 2022 et art. 52 al. 5 et 6 LIPP tel que prévu par la LEFI 2022). L'indexation en tant que telle ne peut dès lors emporter violation du principe de l'égalité de traitement entre les différents propriétaires immobiliers. L'adaptation chaque année permettra également une augmentation plus régulière de la valeur fiscale, assurant ainsi également une meilleure égalité entre propriétaires immobiliers et mobiliers.

Finalement, avec une interprétation conforme à la LHID, dictant une évaluation périodique suffisamment rapprochée, il ne devrait pas y avoir d’augmentation de l’écart avec la valeur vénale en raison de l'adoption de l'IGPC et non d'un indice spécifique au marché immobilier genevois, ainsi que du fait du plafonnement de l'IGPC, tel qu'il consacre une violation du principe de l'égalité de traitement, entre anciens propriétaires soumis depuis plusieurs années à l'indexation plafonnée et nouveaux propriétaires n'y ayant pas encore été soumis ou venant d'y être soumis, ou entre propriétaires immobiliers et mobiliers. Si un tel cas devait toutefois se produire, en raison de l'absence d'une évaluation suffisamment rapprochée, la voie du contrôle concret des normes devrait être suivie pour se plaindre de la situation.

En définitive et au regard de la possibilité d'une interprétation conforme à la LHID, la LEFI 2022, contrairement à la précédente LEFI, n'emporte pas d'emblée et en tant que telle de violation du principe de l'égalité de traitement.

Le grief sera écarté.

Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

7.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

rejette, en tant qu'il est recevable, le recours interjeté le 6 septembre 2023 par A______ contre la loi 13'030 sur les estimations fiscales de certains immeubles (LEFI - D 3 10), promulguée par arrêté du Conseil d’État du 6 juillet 2023 publié dans la FAO du 7 juillet 2023 ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian DANDRÈS, avocat du recourant, ainsi qu'au Grand Conseil.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Blaise PAGAN, Patrick CHENAUX, Philippe KNUPFER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre constitutionnelle :

la secrétaire-juriste :

 

 

 

J. BALZLI

 

le président :

 

 

 

J.-M. VERNIORY

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :