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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/12508/2022

ACJC/811/2025 du 16.06.2025 sur JTPH/395/2023 ( OO ) , MODIFIE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12508/2022 ACJC/811/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU LUNDI 16 JUIN 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ (Portugal), appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 4 décembre 2023 (JTPH/395/2023), représenté par Me Lorenzo CROCE, avocat, CROCE & Associés SA, rue des Alpes 7, 1201 Genève,

 

Et

B______, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me Marc HÄSLER, avocat, H&B LAW, rue des Vignerons 1B, case postale 359, 1110 Morges 1.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/395/2023 du 4 décembre 2023, le Tribunal des prud’hommes a déclaré recevable la demande formée le 9 novembre 2022 par A______ contre B______ (chiffre 1 du dispositif), condamné B______ à verser à A______ les sommes nettes de 3'432.66 EUR et 663.30 USD, plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er janvier 2022 (ch. 2), condamné B______ à délivrer un certificat de travail complet à A______ (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B.            a. Par acte expédié le 18 janvier 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé appel de ce jugement, qu’il a reçu le 5 décembre 2023. Il a conclu à son annulation et à ce qu’il soit mis partiellement à néant et, cela fait, à ce que la Cour complète le chiffre 2 de son dispositif en ce sens que B______ soit condamnée en sus à lui payer la somme de 62'428.11 EUR avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2022 et la déboute de toutes autres ou contraires conclusions, sous suite de frais et dépens.

b. B______ a conclu, par acte expédié le 26 février 2024, au rejet de l'appel et a formé un appel joint, concluant à la réforme du jugement, en ce sens qu’aucun montant n’était dû par elle à A______, le jugement pouvant être confirmé pour le surplus, sous suite de frais et dépens.

c. A______ a conclu, par écritures expédiées le 12 avril 2024, au rejet de l’appel joint, sous suite de frais et dépens.

Il a déposé une pièce nouvelle.

d. B______ a répliqué, concluant à l’irrecevabilité de la pièce nouvelle produite à l’appui de la réplique, et a persisté dans ses conclusions.

e. A______ n’a pas déposé de duplique.

f. Par avis du greffe de la Cour du 3 juillet 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. B______ (ci-après : B______) est une fondation, sise à C______ (Genève), qui a pour but d’entreprendre toutes activités d’ordre juridique, politique et biologique, propre à assurer la protection et la survie des ______.

B______ est principalement active en Afrique et soumise à la surveillance de l’Autorité fédérale de surveillance des fondations (ASF).

D______ en est le président.

b. A______, de nationalité française et domicilié au Portugal, est un ingénieur agronome spécialisé dans les ______.

c. Par contrat de travail de durée déterminée d'une année conclu le
20 novembre 2017, B______ a engagé A______, en qualité de gestionnaire du projet du Parc E______ en Guinée.

Le contrat de travail prévoyait notamment des horaires de travail de 40 heures par semaine, une période d’essai d’un mois, ainsi que des congés payés.

Le salaire brut mensuel de l’employé s’élevait à 7'870 USD, se décomposant en un salaire de base de 6'970 USD, un forfait assurance de 400 USD et une prime de logement de 500 USD.

Le lieu principal de travail de l'employé se trouvait en Guinée, dans la zone du Parc E______.

d. Par avenant du 20 novembre 2018, le contrat de travail a été prolongé d’une année jusqu’au 20 novembre 2019.

En outre, il a été convenu que A______ exercerait désormais les fonctions de directeur Pays/ gestionnaire du projet du Parc E______ en Guinée et que son salaire mensuel brut s'élèverait à 8'420 USD (salaire de base de 6'970 USD ; forfait assurance de 400 USD et prime de logement de 1'050 USD).

e. Le 21 novembre 2019, les parties ont conclu un contrat de consultant pour une durée d’une année, à temps plein, dans le cadre duquel A______ devait agir en tant que superviseur projets de parcs ______ de la B______.

Le contrat débutait le 21 novembre 2019 et pouvait être interrompu à tout moment par le consultant ou par les membres du conseil de la B______ moyennant un préavis écrit de 2 mois pour la fin d’un mois. Le contrat était reconduit tacitement pour une année, sauf annonce contraire du consultant (art. 1).

Le consultant était engagé en tant que prestataire indépendant et n’était lié par aucune relation employé-employeur, ni par un partenariat, une co-entreprise ou un contrat d’agence de quelque nature avec B______ (art. 4.1).

Le consultant acceptait de se conformer à toutes les lois applicables, y compris toutes les lois locales sur le travail et les lois sociales (art. 4.4).

Sans aucune responsabilité de quelque nature que ce soit, B______ pouvait résilier le contrat par écrit en tout temps. Dans ce cas, B______ n'était pas tenue de payer le consultant pour le travail effectué, ou les frais engagés, après la date de résiliation indiquée (art. 11).

Les honoraires du consultant comprenaient un salaire mensuel de 6'970 USD, une contribution à l’assurance maladie de 400 USD et une contribution pour le logement en Guinée de 1'050 USD. B______ prenait également en charge le coût des billets d’avion G______ [Guinée]-F______ [Portugal] à raison de sept fois par an à hauteur de 4'200 EUR (annexe 1 au contrat).

Le consultant avait droit à quatre semaines de vacances (20 jours ouvrables) par an (annexe 1 au contrat).

En cas de litige, le contrat prévoyait un for à Genève et l'application du droit suisse (art. 13).

f. Selon le "Formulaire d'évaluation des employés" du 28 décembre 2020, la performance de "l'employé" A______ a été jugée exceptionnelle à huit reprises et "forte" une fois.

g. En fonction de leurs notes d’évaluation, les employés de B______ bénéficiaient d’un bonus variable : aucun en cas de performance faible, puis de 25%, 50%, 75% ou 100% du salaire mensuel selon que la performance était insuffisante, bonne, forte ou exceptionnelle.

h. Par contrat du 31 mars 2021, les parties ont signé un nouveau contrat de consultant pour une durée de deux ans dans le cadre duquel A______ endossait à plein-temps la responsabilité de superviseur régional des projets de B______ et de directeur pays (Guinée) de B______.

Le contrat devait débuter le 1er avril ou le 1er juin 2021. Il pouvait être interrompu à tout moment par le consultant ou par les membres du conseil de la B______ moyennant un préavis écrit de 2 mois pour la fin d’un mois. Le contrat était reconduit tacitement pour une année, sauf annonce contraire du consultant (art. 1).

Les articles 4.1, 4.4, 11 et 13 étaient identiques à ceux du contrat de consultant du 21 novembre 2019 (cf. let. C. e supra).

Les honoraires mensuels du consultant s’élevaient à 7'800 EUR, incluant 25% de participation aux assurances et au logement, étant précisé que l’intéressé était censé passer la plus grande partie de l'année en Guinée. Les coûts d'hôtel à G______ étaient à la charge du consultant (annexe 1 au contrat).

Les autres prestations contractuelles restaient inchangées, à savoir la prise en charge par B______ des frais de vol du consultant à concurrence de 4'200 EUR et quatre semaines (20 jours ouvrables) de vacances par an (annexe 1 au contrat).

i. A______ a pris à bail un appartement à G______ (Guinée) à compter du mois de juillet 2021 pour un loyer mensuel de 1'075.80 EUR, pouvant être résilié moyennant un préavis de trois mois.

j. Il est admis par les parties que jusqu'au mois de décembre 2021, B______ a versé les honoraires de A______ par l'intermédiaire de H______ (ci-après: H______), société de portage d'honoraires de droit mauricien.

H______ agissait comme intermédiaire entre les parties. Elle facturait à B______, sa "cliente", les honoraires de A______, son "employé", tels que convenus dans les contrats de consultant susmentionnés. B______ s'en acquittait auprès de H______, laquelle les reversait à A______, à titre de salaire, en prélevant des frais sur les honoraires perçus.

k. Il ressort d'un courriel du 21 février 2020 de A______ à D______ que cette structure a été adoptée en février 2020 à la demande du premier pour des raisons fiscales.

l. Le 11 octobre 2021, une réunion a eu lieu dans les bureaux de B______ à G______ (Guinée) en raison de divergences et désaccords intervenus durant l'été 2021 entre la présidence de B______, soit notamment D______, et A______, à propos de la gestion de "la Direction pays".

Il ressort du procès-verbal de cette réunion qu'à son issue les précités ont convenu d'un commun accord qu'ils "essayer(aient) de continuer à travailler ensemble". La direction de B______ Guinée serait réorganisée: il a notamment été décidé que A______ abandonnerait ses fonctions de directeur pays, mais continuerait à travailler en tant que superviseur régional "sur un contrat révisé" à un taux de 50% à partir de janvier 2022 "sur la base des termes de référence du contrat précédent".

Son salaire serait calculé "sur une base journalière venant de son salaire actuel". En outre, la B______ couvrirait les frais de voyage de l’intéressé "dans la proportion du forfait accordé précédemment".

m. Par courrier du 13 octobre 2021, D______ a exigé de A______ qu’il fasse contrôler et valider auprès de lui tout document destiné aux partenaires de la Fondation avant de les envoyer à ces derniers. Il lui demandait aussi de prendre avant la fin de l’année tous ses jours de congé restants conformément au "règlement d’ordre intérieur de la B______".

n. Par courrier du 18 octobre 2021, intitulé "Interruption du contrat de consultance signé le 31 mars 2021", D______ a indiqué à A______ que son contrat de consultance du 31 mars 2021 était interrompu au
31 décembre 2021, pour les motifs expliqués dans le document du
11 octobre 2021 "Réorganisation de la direction de la B______ Guinée", dont les membres du conseil de fondation de B______ avaient pris connaissance. Sur la base de ce document, un nouveau contrat de consultant, débutant le 1er janvier 2022, allait lui être présenté.

o. Par courrier du 22 octobre 2021, le Conseil de fondation de B______ a confirmé à A______ avoir donné son accord pour l’interruption de son contrat de consultance au 31 décembre 2021, comme déjà indiqué par D______ dans son courrier du 18 octobre 2021.

p. Par courriel du 2 novembre 2021, D______ a prié A______ de se "concentrer pour les jours du mois de novembre et décembre ou tu travailles encore puisqu'il te reste encore des vacances à prendre" sur la rédaction du rapport annuel 2021 pour les miniers qu'il devait lui remettre avant le 20 décembre 2021.

Il lui a encore indiqué que "comme ton contrat actuel s'arrête à la fin de l'année", il devait lui rendre son rapport final portant sur ses activités en tant que directeur pays depuis avril 2021, mais également en tant que superviseur régional B______-projets.

Afin qu'il se concentre sur la rédaction desdits rapports, A______ était prié de ne plus retourner en Guinée avant la fin de son contrat. Une proposition d'un nouveau contrat à compter de janvier 2022 était en cours d'établissement et il lui reviendrait rapidement sur ce point.

q. Dans deux courriels du même jour, A______ a répondu en indiquant qu'à teneur des accords [d'octobre 2021] (cf. let. C. l supra), il n'était pas question d'interrompre son contrat, ni qu'il ne retourne pas en Guinée. Il ne comprenait pas la raison pour laquelle un avenant n’avait pas été établi, comme cela avait été fait auparavant.

Il a aussi indiqué qu'il perdait la sécurité de son emploi à partir de janvier 2022 alors que son contrat "durait jusqu'en avril 2023" et ajouté que "la sécurité de mon contrat jusqu'en avril 2023 […] n'est plus garantie, sans faute grave de ma part". Il se retrouvait dans une position d’instabilité et d’insécurité qu’il considérait ne pas mériter.

A______ s’inquiétait, par ailleurs, du maintien de la prise en charge par B______ des frais qu’il avait engagés depuis le mois de mai 2021 relatifs à son appartement en Guinée, pour lequel il avait un préavis de trois mois.

r. Par courrier du 19 novembre 2021, B______ a fait parvenir à A______ un projet de nouveau contrat de consultant, selon lequel il exercerait en tant que consultant de projet B______ Guinée.

A teneur de l'art. 1 de ce projet, le contrat devait débuter le 1er janvier 2022 et pouvait être résilié à tout moment moyennant une notification écrite. A______ serait basé au Portugal et ses éventuels déplacements en Guinée devraient être approuvés par B______ sur la base d'un budget détaillé.

A______ serait payé sur une base d’honoraires de 260 EUR par jour, à condition qu'il produise chaque mois un rapport d’activités devant être validé par le président de la Fondation et un relevé détaillé attestant du nombre d’heures fournies par jour au profit de B______ (art. 2.1).

s. Par courriel du 1er décembre 2021 adressé à B______, A______ a en substance relevé que cette proposition ne correspondait pas aux termes de l’accord pris en octobre 2021.

Il a notamment indiqué que l'art. 1 de la proposition ne mentionnait plus les termes prévus dans les art. 1 des précédents contrats et qu'il avait compris que selon les accords convenus (i.e. en octobre 2021), il était supposé travailler à 50% en qualité de superviseur régional de janvier 2022 à avril 2023, ce qui n'apparaissait pas sur la proposition. De plus, il avait été discuté qu'il exécuterait son travail en Guinée, où il était résident et avait pris un appartement à bail depuis juin 2021. Le tarif journalier ne correspondait pas non plus à ce qui avait été discuté le 11 octobre 2021.

Il regrettait l'interruption de son contrat actuel et sollicitait que B______ lui rembourse les frais qu'il avait engagés sur la base dudit contrat, afin de le "clôturer" et de "commencer le nouveau contrat sur de bonnes bases".

t. Par courriel du lendemain, D______ a répondu que le contrat de A______ prenait fin au 31 décembre 2021 et que, tant qu’un nouveau contrat n’était pas signé, il n’avait pas droit de regard sur les évènements survenant après cette date.

u. Le 20 décembre 2021, D______ a transmis à A______ son formulaire d'évaluation des employés pour l'année 2021.

Ses performances y étaient qualifiées de "faible" (note la plus basse) et d'"insuffisante". Parmi les commentaires figuraient les points suivants : "absence de respect et de communication avec sa hiérarchie", "de par son statut basé au Portugal, il nous est impossible d’évaluer sa ponctualité; absence totale de communication concernant ces absences, ces congés et déplacement éventuels" (sic), "n’a fourni aucun rapport concernant ces activités de superviseur régional de sa propre initiative, et le seul rapport obtenu fut en grande partie rempli par sa hiérarchie".

Il était encore mentionné que "l’employé a déçu énormément dans sa performance par rapport à la dernière évaluation. Le niveau anormalement bas de sa performance a conduit la direction à décider en octobre 2021 de l’interruption de son contrat pour insuffisances et insubordinations. Malheureusement, les améliorations attendues après les nombreuses discussions en octobre sur sa performance n’ont pas eu lieu".

v. Par courriel du 29 décembre 2021, D______ a fait savoir à A______ que B______ retirait sa proposition de contrat de consultance pour l’année 2022 et lui souhaitait une bonne continuation pour la suite de sa carrière.

D______ indiquait notamment que "en tant que signataire d’un contrat, tu es tenu à certaines obligations de communications, de rapportages, de justifications comptables, de résultats et de respect envers ta hiérarchie. Malgré les discussions du mois d’octobre dernier et mes rappels, nous devons constater que tu ne remplis pas ces obligations […]".

w. Fin décembre 2021, A______ a résilié le bail de son appartement à G______.

x. B______ a versé le salaire de A______ jusqu'à fin décembre 2021.

y.a. S'agissant des frais liés à l'exécution du travail, le manuel de gestion comptable et financière de B______ du 21 février 2019, lequel est principalement adressé aux responsables de gestion de terrain/capitale/siège, indique que les dépenses doivent être justifiées par une facture et être autorisées (cf. art. 2.2 ch. 2).

L'annexe 4 "Standards de justification des dépenses à l'attention des partenaires de la B______" du manuel précise encore que les dépenses doivent être accompagnées de pièces justificatives. En particulier, pour les billets d'avion, il est nécessaire de présenter les souches, les cartes d'embarquement et la facture de la compagnie d'aviation.

y.b.a Le 14 décembre 2021, A______ a adressé à B______ une facture de remboursement de frais de billets d'avion et de voyage d'un total de 1'021.50 EUR.

Ladite facture concernait un vol aller-retour F______ [Portugal] - I______ [France] de 142.63 EUR en juillet 2021, un vol aller-retour F______ - G______ de 633.88 EUR en septembre/décembre 2021, trois tests COVID de 118.51 EUR au total en juillet, août et septembre 2021 et quatre trajets en taxi, entre juillet et octobre 2021, d'un total de 126.48 EUR.

A______ a joint à sa facture : le billet électronique ainsi que les cartes d'embarquement des vols F______ - I______; le billet électronique des vols F______ - G______ ainsi que la carte d'embarquement pour le trajet aller du 18 septembre 2021; une déclaration sur l'honneur qu'il avait bien effectué les trajets de taxi de sa maison au Portugal à l'aéroport de F______, dont il avait perdu les reçus; le test COVID du 13 juillet 2021, accompagné d'une déclaration sur l'honneur qu'il l'aurait payé 25.01 EUR; deux factures de 85 EUR et 8.50 EUR pour les tests COVID des 31 août et 16 septembre 2021.

y.b.b. Il ressort de plusieurs courriels de mai et juillet 2021 qu'il était prévu que D______ et A______ se rendent à I______ dans le cadre du travail en juillet 2021.

y.c. Le 14 décembre 2021, A______ a adressé à B______ une seconde facture de remboursement de frais de billets d'avion de la [compagnie aérienne] J______ (J______) F______ - G______ de septembre 2020 à novembre 2021, à hauteur de 1'047.49 EUR. Dans un courrier annexé à la facture, il a expliqué qu'il s'agissait en fait de vouchers, non remboursables, expirant en décembre 2021, émis à la suite de vol à destination de G______ annulés en raison du COVID, qu'il n'avait pas été en mesure d'utiliser avant la fin de son contrat.

y.d. Par courriel des 21 et 31 décembre 2021, B______ a informé A______ de ce que les frais de téléphonie n'étaient pas remboursés à moins d'être justifiés par une liste d'appels permettant de distinguer les appels privés des appels professionnels. De plus, selon son contrat, les frais d'hôtel à G______ n'étaient plus pris en charge depuis le mois d'avril 2021, dès lors qu'il percevait à la place une prime de logement. Un montant de 1'363.67 EUR, correspondant à 50% des frais de téléphonie non justifiés et d'hôtel à G______ en juin 2021, serait ainsi déduit de son salaire de décembre.

y.e. A______ a également produit dans le cadre de la présente procédure, un billet électronique pour un vol K______ [Sénégal] - F______ en octobre 2021 à hauteur de 663.50 USD.

z. Par courrier de son Conseil du 24 mars 2022, A______ a fait valoir que la résiliation de son contrat de travail n’était pas valable, le contrat du 31 mars 2021 ayant été conclu pour une durée déterminée, de sorte qu'il ne pouvait y être mis fin avant l'échéance de la durée convenue qu'en présence de justes motifs, non remplis en l'occurrence, ou accord entre les parties. La clause selon laquelle "le contrat pouvait être interrompu à tout moment par un membre du bureau de B______ avec un préavis écrit de deux mois pour la fin d’un mois" n’était pas conforme au droit suisse puisqu’une résiliation ordinaire ne pouvait s’appliquer qu’aux contrats de durée indéterminée. Or, la clause prévoyant expressément que "le contrat était tacitement reconduit pour une année sauf annonce contraire du consultant" démontrait que les parties avaient au contraire conclu un contrat de travail à durée déterminée avec reconduction tacite au sens de l’article 334 al. 2 CO. Il était ainsi en droit de réclamer le paiement de son salaire pour la période allant du 1er janvier 2022 au 1er avril 2024 (sic). Les frais engagés résultant dudit contrat devaient aussi lui être remboursés. Enfin, il sollicitait la délivrance de son certificat de travail, contestait la teneur de son formulaire d'évaluation de 2021 et réclamait le versement de son bonus.

D. a. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 juin 2022, non conciliée le
23 août 2022 et introduite le 9 novembre 2022, A______ a assigné B______ en paiement de 68'785.77 EUR bruts avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er janvier 2022 et de 663.50 USD bruts avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er janvier 2022. Il a aussi conclu à la délivrance d’un certificat de travail pour son activité déployée du 20 novembre 2017 au 31 décembre 2021 et à ce que B______ soit condamnée, à sa requête, à une amende d'ordre de 100 fr. au plus par jour d'inexécution, avec suite de frais et dépens.

A______ a fait valoir qu'il était lié à B______ par un contrat de travail et non par un contrat de consultant, contrairement aux termes stipulés dans le document du 31 mars 2021. Il avait été engagé en date du 31 mars 2021 en qualité de superviseur régional de projets et de directeur pays pour un salaire mensuel brut de 7'800 EUR. Le 11 octobre 2021, son contrat de travail avait été amendé comme suit: il travaillerait à 50% en tant que superviseur régional, abandonnant sa fonction de directeur pays et ce, avec effet au 1er janvier 2022. Toutefois, la proposition de contrat du 19 novembre 2021 ne correspondait pas aux accords intervenus le 11 octobre 2021.

Son contrat de travail a été conclu pour une durée déterminée de deux ans, arrivant à échéance le 31 mars 2023, de sorte qu'il ne pouvait être résilié avant l'expiration de la durée convenue. Il avait droit au paiement de son salaire pour la période allant du 1er janvier 2022 au 31 mars 2023, soit 58'500 EUR
([7'800 EUR/2] x 15 mois).

De plus, en raison de son licenciement et de l'interdiction de retourner en Guinée, il avait été contraint de résilier le bail de son appartement à G______ et avait dû s'acquitter du loyer pendant les trois mois de préavis. Il avait ainsi droit au remboursement des frais y relatifs, soit 3'928.11 EUR (1'075.80 EUR
de loyer x 3 mois + 700 EUR de charges).

B______ devait aussi lui rembourser ses frais de voyage, soit: 1'021.50 EUR correspondant à des frais de déplacement pour le compte de B______ en juillet, septembre et octobre 2021, ainsi que des tests liés au COVID; 1'047.49 EUR et 663.50 USD correspondant à des frais de déplacement en avion pour le compte de B______ et un montant de 1'363.67 EUR injustement déduit de son salaire de décembre 2021.

Enfin, ayant totalement rempli ses objectifs 2021, il avait encore droit à son bonus de 2'925 EUR (5'850 EUR [soit 75% de 7'800 EUR] x 50% x 100%), le rapport d'évaluation 2021 étant en effet mensonger et établi aux seules fins de justifier une rupture prématurée du contrat de travail et de le priver de son bonus.

b. Par réponse du 8 février 2023, B______ a conclu, principalement, à l’irrecevabilité de la demande en paiement et en délivrance de certificat de travail, subsidiairement à son rejet, sous suite de frais et dépens.

B______ a soulevé l'incompétence du Tribunal à raison de la matière au motif que les parties n'avaient pas été liées par un contrat de travail. Elle a soutenu que les parties étaient liées par un contrat de mandat, dès lors que A______ avait été engagé comme consultant en sa qualité d'expert et qu'il était libre d'organiser son travail comme il le souhaitait. Il avait, en outre, manifesté à plusieurs reprises sa volonté d'exécuter d'autres mandats. Le choix du contrat de mandat était en adéquation avec les projets de B______, lesquels étaient circonscrits dans le temps. Elle s’était bornée à adresser des instructions à A______ lorsqu’elle avait considéré que ce dernier ne respectait plus ses obligations contractuelles.

Le contrat de mandat pouvait être résilié à tout moment, sous réserve du respect du préavis contractuel de deux mois. Elle avait notifié la résiliation le
18 octobre 2021, prenant effet au 31 décembre 2021. Dès lors, la résiliation du contrat de mandat était parfaitement valable.

Si, par impossible le contrat liant les parties devait être qualifié de contrat de travail, ces dernières avaient la possibilité d’inclure une clause de résiliation anticipée d’un commun accord dans le cadre d'un contrat de travail de durée déterminée. En outre, conformément à l’article 337 CO, la résiliation était également valable compte tenu des manquements répétés de A______ à ses obligations notamment en septembre 2021 et à la fin de l’année 2021. Le précité n’avait, par ailleurs, jamais offert ses services à la suite de la résiliation du contrat.

B______ a contesté être tenue de rembourser les frais de loyer de A______. Elle a fait valoir que le loyer n'était pas une impense mais qu'il était compris dans le salaire de ce dernier, qui aurait dû résilier son bail en
octobre 2021 quand elle lui avait demandé de ne plus retourner en Guinée. Il n'y avait, en outre, plus de contrat entre les parties pour la période de janvier à
mars 2022.

Les frais de voyage n'étaient pas justifiés par pièce et il n'était pas non plus établi qu'il s'agisse de déplacements professionnels. Les tests COVID ne concordaient pas avec les dates de vol indiquées. Les frais de téléphonie dépourvus de justificatifs avaient en partie été déduits du salaire de A______.

c. Par écritures du 27 mars 2023, A______ s'est déterminé sur la compétence rationae materiae du Tribunal. Il a fait valoir que les parties étaient liées par un contrat de travail, dès lors que le contrat prévoyait un salaire, des vacances et un délai de congé. En outre, il existait un rapport de subordination entre B______ et lui. Il consacrait notamment l'entier de son temps à B______ depuis 2017, faisait l’objet d'évaluations annuelles, touchait un bonus en fonction de ses performances, utilisait le matériel de B______, se faisait rembourser ses frais, devait rendre des rapports périodiques d'activité et était tenu de respecter le règlement intérieur de B______.

d. Le 2 juin 2023, A______ s'est encore déterminé sur les allégués de la réponse de B______.

e. Lors de l'audience de débats principaux du 24 août 2023, le Tribunal a entendu les parties. A______ a déclaré qu'il ne pensait pas qu'il était nécessaire ou justifié d'offrir ses services après le 31 décembre 2021, étant donné qu'il avait été licencié.

Le témoin L______ de l'Autorité fédérale de ______ a été auditionnée par le Tribunal. Elle a déclaré que, selon elle, B______ occupait essentiellement du personnel à l'étranger. Elle n’avait pas le souvenir que la Fondation ait indiqué qu’elle ne concluait que des contrats de consultants. Tant que les agissements de B______ étaient légaux, elle pouvait conclure aussi bien des contrats de travail, de mandat ou encore utiliser des contrats de portage salarial.

A l’issue de l’audience, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que de 2017 à 2019 les parties étaient liées par un contrat qu'elles ont-elles-mêmes qualifié de contrat de travail à durée déterminée. Elles avaient ensuite conclu deux contrats de consultant en novembre 2019 puis en mars 2021, qui prévoyaient un salaire mensuel, un délai de résiliation de deux mois, 20 jours de vacances par an et un for à Genève en cas de litige. Les contrats avaient, en outre, été accompagnés de contrats de portage salarial entre une société de droit mauricien, B______ et A______ aux termes desquels ce dernier était clairement désigné comme employé. Ce terme était également clairement mentionné dans le formulaire d'évaluation de B______. En outre, à plusieurs reprises, la Fondation avait demandé à A______ de respecter sa hiérarchie et/ou avait déploré son insubordination et lui avait rappelé le règlement d'ordre intérieur. Le Tribunal a ainsi retenu qu'en dépit des dénominations utilisées depuis novembre 2019, les parties étaient liées par un contrat de travail. Il était donc compétent tant à raison de la matière que du lieu.

S'agissant du paiement du salaire, le Tribunal a retenu que les parties avaient convenu d’un contrat de durée maximale résiliable, moyennant un préavis de deux mois. Les discussions intervenues en octobre 2021 entre les parties n’ayant pas porté sur la durée du contrat, mais uniquement sur le changement de fonction de A______, il n’y avait pas lieu de retenir que le contrat avait pris fin en octobre 2021. En revanche, le contrat de travail du demandeur avait été valablement résilié le 29 décembre 2021. Compte tenu du délai de congé de deux mois, il aurait pu prendre fin le 28 février 2022. Toutefois, l'employé n’avait pas offert ses services au-delà du 31 décembre 2021 alors qu'il aurait dû le faire à partir du 1er janvier 2022. Il était ainsi débouté de ses conclusions visant à recevoir un salaire au-delà du 31 décembre 2021.

A______ n'avait pas non plus droit au versement d'un bonus pour 2021, dès lors qu'il n'avait pas démontré que sa performance pour l’année 2021 le rendait éligible au versement d’un quelconque bonus. L'évaluation de ses performances était mauvaise et il ne l'avait pas contesté avant la lettre de son Conseil du 22 mars 2022, ni prouvé qu'elle ne reflétait pas la réalité.

B______ devait rembourser les frais professionnels de l'employé de 3'432.66 EUR et de 663.50 USD, car elle ne les avait pas contestés. Elle n'était, en revanche, pas tenue de lui rembourser le loyer des mois de janvier à mars 2022, dès lors que n'ayant pas offert ses services au-delà du 31 décembre 2021, il ne saurait prétendre à quoi que ce soit après cette date au titre des relations de travail.

Enfin, B______ devait délivrer un certificat de travail.

EN DROIT

1.             1.1 Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

1.2 Interjeté contre une décision finale (art. 308 al. 1 let. a CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), dans le délai utile de trente jours et selon la forme écrite prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 3, 145 al. 1 let. c et art. 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

Formé dans la réponse à l'appel, laquelle a été déposée dans le délai de trente jours fixé à cette fin et dans le respect des formes énoncées ci-dessus (art. 312 al. 2 et 313 al. 1 CPC), l'appel joint est également recevable.

Par souci de simplification et pour respecter le rôle initial des parties en appel, l'employé sera ci-après désigné en qualité d'appelant et l'employeuse en qualité d'intimée.

1.3 La valeur litigieuse en première instance étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique et le procès est régi par la maxime des débats, qui prévoit que les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC, art. 243 et art. 247 al. 2 CPC a contrario).

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit. En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). Conformément à l’art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l’appelant estime entachés d’erreurs et qui ont fait l’objet d’une motivation suffisante – et, partant, recevable –, pour violation du droit
(art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413, consid. 2.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016, consid. 5.3).

2.             L'intimée fait valoir que la pièce produite par l'appelant avec sa réponse sur appel joint est irrecevable.

2.1 Selon l'article 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise.

2.2 En l'espèce, la pièce en question n'est pas une pièce nouvelle, contrairement à ce que soutiennent les parties, dès lors qu'elle avait déjà été produite par l'appelant devant le Tribunal dans son chargé daté du 16 août 2023 sous le n. 46.

Le grief de l'intimée est ainsi infondé.

3.             La Cour relève à titre liminaire que l'intimée ne remet plus en cause la qualification du contrat (de travail), bien qu'elle persiste à désigner le contrat que le Tribunal a qualifié, à juste titre, de contrat de travail, de " contrat de consultant ".

L'appelant fait grief au premier juge d'avoir considéré que le contrat de travail pouvait être résilié pendant la durée déterminée de celui-ci et que donc c’est à tort que le contrat a été qualifié de mixte par le Tribunal, ceci ne résultant pas de la commune et réelle intention des parties.

Il lui reproche également d'avoir retenu qu'il n'avait pas offert ses services à l'intimée au-delà du 31 décembre 2021.

3.1.1 En vertu de l'art. 334 al. 1 CO, le contrat de durée déterminée se définit comme celui qui prend fin sans qu'il soit nécessaire de donner congé. La durée déterminée du contrat résulte de la loi, de la nature du contrat ou de la convention des parties. Celles-ci peuvent fixer soit un terme, soit une durée, soit un laps de temps objectivement déterminable; la durée peut également résulter du but des rapports de travail. La caractéristique première d'un contrat de ce type est que les parties contractantes ne peuvent y mettre fin avant le terme convenu, à moins que celle qui en veut l'extinction prématurée puisse invoquer un juste motif de résiliation immédiate (arrêts du Tribunal fédéral 4A_470/2018 du
18 décembre 2018 consid. 5; 4A_89/2007 du 29 juin 2007 consid. 3.2; Wyler/Heinzer/Witzig, Droit du travail, 2024, p. 674-675; Carron, Commentaire du contrat de travail, 2022, n. 18 et 20 ad art. 334 CO).

3.1.2 Les parties peuvent convenir d'une durée maximale pendant laquelle elles peuvent résilier le contrat en observant les délais de résiliation légaux ou contractuels, tout en prévoyant que le contrat prendra fin au plus tard à l'expiration de la durée maximale. Il est donc de nature mixte, selon s’il prend fin par une résiliation ou par l’expiration du temps. Son extinction à l’échéance convenue entre les parties faute de résiliation anticipée par l’une d’elle, obéit aux règles applicables au contrat de durée déterminée. En revanche, sa résiliation antérieure est soumise aux règles applicables au contrat de durée indéterminée. Le Tribunal fédéral range un tel accord dans la catégorie des contrats de durée déterminée (ATF 114 II 349, c. 2a, JdT 1989 I 188; arrêt du Tribunal fédéral 8C_166/2011 du 13 juillet 2011 consid. 5.2.1; Wyler/Heinzer/Witzig, op. cit., p. 706; Carron, op. cit., n. 14 ad art. 334 CO).

Selon le Tribunal fédéral, une décision d'engagement, prévoyant des rapports de travail d'une durée d'un an avec une option de prolongation à quatre ans au total ainsi que la possibilité d'une résiliation anticipée, constitue un rapport de travail d'une durée maximale, à l'issue de laquelle les rapports de service prenaient automatiquement fin, mais qui pouvait être résilié avant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_166/2011 du 13 juillet 2011 consid. 5.2.1).

3.1.3 Selon l'art. 335 al. 1 CO, le contrat de durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties.

Après le temps d'essai et sauf disposition contractuelle contraire, le contrat peut être résilié pour la fin d’un mois moyennant un délai de congé d’un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service, de trois mois ultérieurement (art. 335c al. 1 CO).

3.1.4 Les contrats s'interprètent d'abord selon la volonté commune et réelle des parties (interprétation subjective; cf. ATF 131 III 606 consid. 4.1). Si cette volonté ne peut être établie en fait, le juge interprétera les déclarations et les comportements des parties selon le principe de la confiance, en recherchant comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances; il s'agit d'une question de droit (interprétation objective; cf. ATF 132 III 268 consid. 2.3.2). Pour l'interprétation selon le principe de la confiance, le moment décisif se situe lors de la conclusion du contrat (ATF 131 III 377 consid. 4.2.1). Les circonstances survenues postérieurement à celle-ci ne permettent pas de procéder à une telle interprétation; elles constituent, le cas échéant, un indice de la volonté réelle des parties
(ATF 129 III 675 consid. 2.3).

3.2.1 En l’espèce, contrairement à ce que plaide l’appelant, la commune et réelle intention des parties concernant la clause de résiliation n’a pas besoin d’être interprétée, tant la formulation ressortant du contrat de travail du 31 mars 2021est claire.

En effet, selon l'art. 1 dudit contrat, les rapports de travail ont été limités à une durée de deux ans avec une option de prolongation à trois ans au total, le contrat prévoyant une reconduction tacite du contrat pour une année supplémentaire, sauf annonce contraire du consultant. La possibilité d'une résiliation anticipée y était également inscrite moyennant le respect d'un délai de résiliation de deux mois. Il s'agissait donc, selon le libellé clair de cette clause, d'un rapport de travail d'une durée maximale, à l'issue de laquelle les rapports de service prenaient automatiquement fin, mais qui pouvait être résilié avant.

Ainsi, le texte est sans ambigüité et l’appelant ne pouvait ignorer que la relation contractuelle pouvait prendre fin pendant la durée déterminée du contrat si l’une ou l’autre des parties le résiliait moyennant un préavis de deux mois.

Qui plus est, l’appelant ne précise pas à quel témoignage, quelle circonstance ou quel document la Cour devrait se référer pour qu’une autre interprétation soit donnée à cette clause. Il se contente d’indiquer dans son appel que "ainsi que détaillé dans la partie en fait" – sans se référer à aucun fait particulier qui devrait retenir l’attention de la Cour – "il convient de retenir que nonobstant les termes contradictoires utilisés par les parties dans la formulation de leurs contrats, ces dernières ont convenu de conclure un contrat à durée déterminée" – sans attirer l’attention de la Cour sur les termes qu’il considérerait contradictoires. La motivation de l’appelant pour contester la qualification de contrat de durée maximale retenue par le Tribunal est ainsi insuffisante.

Quoi qu'il en soit, le contrat a été conclu pour une durée de deux ans avec possibilité de résiliation moyennant un préavis de deux mois pour la fin d’un mois. C’est ainsi à raison que le Tribunal l'a qualifié de contrat de nature mixte.

3.2.2 En ce qui concerne la date de résiliation du contrat, aucune des parties ne conteste expressément que le contrat ait été résilié le 29 décembre 2021 pour le
28 février 2022 comme retenu par le Tribunal.

Toutefois, l’appelant affirme en appel, comme en première instance, que la résiliation (contestée) de son contrat lui a été notifiée pour le 31 décembre 2021, et non pour le 28 février 2022. Quant à l’intimée, elle soutient que le contrat a été résilié "à tout le moins à compter du 29 décembre 2021, si l’on suit le raisonnement du Tribunal", laissant entendre que la résiliation pourrait être intervenue à une autre date.

Or, c'est de manière manifestement erronée que le Tribunal a retenu que le contrat de travail du 31 mars 2021 avait été résilié par courriel du 29 décembre 2021 pour le 28 février 2022 et qu'il n'a pas tenu compte du courrier de l'intimée du
18 octobre 2021 (cf. let. C. n supra).

En effet, bien qu'intitulé de manière maladroite "interruption de contrat" ledit courrier du 18 octobre 2021 de D______ indiquait clairement à l'appelant que son contrat du 31 mars 2021 avait été résilié ("interrompu") pour le 31 décembre 2021 et qu'un nouveau contrat, débutant le 1er janvier 2022, lui serait prochainement proposé. La teneur de ce courrier a encore été confirmée à l'appelant par le courrier du Conseil de fondation de B______ du 22 octobre 2021.

Ainsi, comme l'a soulevé l'intimée à juste titre en première instance, le contrat de travail du 31 mars 2021 a été résilié de manière anticipée par courrier du
18 octobre 2021 pour le 31 décembre 2021, dans le respect du délai de résiliation contractuel de deux mois.

Il résulte, en outre, du dossier, et en particulier des échanges de courriels des mois de novembre et décembre 2021, que l'appelant avait pleinement compris que son contrat du 31 mars 2021 prenait fin au 31 décembre 2021, dès lors qu'il a pris acte de son "interruption" pour cette date, qu'il a par ailleurs exprimé regretter à plusieurs reprises. Dans un courriel du 2 novembre 2021, il a également indiqué à l'intimée que conformément à ce qui avait été convenu lors de la réunion du
11 octobre 2021, son contrat n'aurait pas dû être résilié mais modifié par avenant.

La résiliation de son contrat au 31 décembre 2021, ainsi que l’échec des négociations concernant la conclusion d’un nouveau contrat à la fin de ce même mois, expliquent pourquoi, contrairement à ce que soutient vainement l’appelant sans l'étayer plus avant, il n’a pas offert ses services à l’intimée au-delà de cette date. Il a d’ailleurs confirmé cela explicitement lors de l’audience, où il a déclaré qu'il n’était pas tenu de se présenter au travail le 1er janvier 2022, puisque les rapports de travail étaient éteints à compter de cette date.

Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant, dont il n'est pas contesté que le salaire a été versé jusqu'en décembre 2021, ne pouvait plus faire valoir de prétentions relatives au contrat de travail au-delà de ce terme.

Infondé, le grief sera rejeté.

4.             L'appelant reproche au Tribunal de n'avoir pas condamné l'intimée au remboursement de ses trois mois de loyer. Il soutient qu'il s'agit d'un dommage que l'intimée est tenue de réparer en raison du licenciement qu'il estime injustifié.

4.1 La responsabilité résultant d'une culpa in contrahendo repose sur l'idée que, pendant les pourparlers, les parties doivent agir selon les règles de la bonne foi. L'ouverture des pourparlers crée déjà une relation juridique entre interlocuteurs et leur impose des devoirs réciproques. Ainsi, chaque partie est tenue de négocier sérieusement, conformément à ses véritables intentions; il lui appartient en outre de renseigner l'autre, dans une certaine mesure, sur les circonstances propres à influencer sa décision de conclure le contrat, ou de le conclure à des conditions déterminées (ATF 121 III 350 consid. 6c; 116 II 695 consid. 3; 105 II 75
consid. 2a et les arrêts cités).

Si chaque partie a, en principe, le droit de rompre les pourparlers sans être obligée d'en donner les raisons, une culpa in contrahendo sera toutefois retenue, dans certaines circonstances spéciales, si la partie qui rompt les négociations a violé les obligations sus-exposées et a, par son comportement, créé pour l'autre une situation de confiance qui mérite d'être protégée. Le comportement contraire aux règles de la bonne foi ne consiste pas dans le fait d'avoir rompu les pourparlers, mais d'avoir maintenu l'autre partie dans l'idée que le contrat serait certainement conclu ou de n'avoir pas dissipé cette illusion à temps. Il n'est pas nécessaire que la partie ait fait preuve d'astuce au cours de pourparlers; il suffit que son attitude ait été de quelque manière fautive, qu'il s'agisse de dol ou de négligence
(ATF 140 III 200 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 4C.152/2001 du
29 octobre 2001 consid. 3a, SJ 2002 I 164).

Celui qui répond d'une culpa in contrahendo doit des dommages-intérêts négatifs, p. ex. c'est-à-dire les frais et dépenses que la partie lésée a engagés dans la perspective du contrat à conclure (ATF 77 II 135, 137). Le lésé a droit à la réparation du dommage qu'il a subi pour avoir cru – en raison de la confiance inspirée par l'autre partie – qu'un contrat serait conclu (ATF 105 II 75 consid. 3, JdT 1980 I 66; ATF 130 III 345 consid. 1, JdT 2004 I 207; SJ 1999 I 113
consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_229/2014 du 19 septembre 2014
consid. 4.1).

4.2 En l'espèce, le 18 octobre 2021, l'intimée a résilié le contrat de travail du
31 mars 2021 de l'appelant tout en lui indiquant qu'un nouveau contrat "qui débutera le 1er janvier 2022" lui serait présenté. Ce courrier mentionnait également les échanges du 11 octobre 2021, dont le procès-verbal précise qu’à partir de janvier 2022, le contrat de l’appelant serait révisé "sur la base des termes de référence du contrat précédent". Par courriel de début novembre 2021, l'intimée a réitéré à l'appelant qu'une proposition de contrat "dès janvier 2022" lui serait prochainement présentée.

Le 19 novembre 2021, l'intimée a soumis à l'appelant une proposition de nouveau contrat à compter du 1er janvier 2022, laquelle prévoyait notamment que l'appelant ne serait plus basé en Guinée comme précédemment. Au cours du mois de décembre 2021, l’appelant a cherché à renégocier les termes de la proposition, en particulier concernant son lieu de travail en Guinée, conformément aux accords antérieurs, sans que l'intimée ne se prononce dans un sens ou dans l'autre. Les négociations ont finalement été rompues par l’intimée le 29 décembre 2021, date à laquelle l'appelant a résilié son bail à G______.

Dès lors que jusqu'à cette date, l'intimée n'avait pas laissé entendre qu'elle souhaitait rompre les négociations, il peut être retenu qu'au cours du mois de décembre 2021, elle a maintenu l'appelant dans l'illusion qu'un nouveau contrat serait conclu pour le début de l'année 2022, sans qu'il soit totalement exclu pour lui que le lieu de travail demeure en Guinée, comme auparavant. En conséquence, il ne peut être reproché à ce dernier de ne pas avoir résilié le bail de son appartement à G______ avant la fin des pourparlers.

Il en résulte que les trois mois de loyer constituent des dommages-intérêts-négatifs subi par l'appelant. L'intimée sera ainsi condamnée au paiement de la somme 3'928.11 EUR.

Le grief est ainsi fondé et le jugement sera modifié dans le sens de ce qui précède.

5.             Dans son appel joint, l’intimée reproche au Tribunal d'avoir retenu qu'elle devait payer à l'appelant ses frais de déplacement pour 2021.

5.1 A teneur de l'art. 327a al. 1 CO, l’employeur rembourse au travailleur tous les frais imposés par l’exécution du travail et, lorsque le travailleur est occupé en dehors de son lieu de travail, les dépenses nécessaires pour son entretien.

Il s'agit de toutes les dépenses encourues pour l'exécution du travail, tels que les frais de téléphone et frais de déplacement si le travail impose un déplacement du lieu de travail à un autre lieu que le lieu contractuel (Wyler/Heinzer/Witzig,
op. cit., p. 369).

Il appartient au travailleur d’apporter la preuve de l’existence des dépenses, et de leur nécessité, sans que l’employeur ne puisse poser d’exigences excessives à cet égard. Des quittances, factures, billets de train ou d’avion, etc. fourniront généralement la preuve nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral 4C.315/2004 du
13 décembre 2004 consid. 2.2; Witzig, CR CO I, 3ème éd., 2021, n. 1 ad art. 327a CO).

5.2 Il sied d'abord de relever que c'est à tort que le Tribunal a retenu que l'intimée n'avait pas contesté devant lui les frais de déplacement allégués par l'appelant. Il apparait au contraire qu'elle a contesté l'allégué de l'appelant y relatif (cf. ad allégué n. 45 de la réponse) puis qu'elle a formulé ses propres allégués sur pas moins de quatre pages (cf. allégués nos 129 à 150 de la réponse). L'intimée ne pouvait ainsi être condamnée au paiement de ces frais sans examen de leur bienfondé.

En l'occurrence, il ressort du contrat du 31 mars 2021 que les coûts d'hôtel à G______ étaient à la charge de l'appelant, de sorte qu'il ne peut prétendre à leur remboursement. N'ayant pas produit les justificatifs de ses frais de téléphone, leur remboursement ne pouvait pas non plus être retenu. Ainsi, il n'est pas justifié de condamner l'intimée à verser à l'appelant le montant de 1'363.67 EUR.

Il en va de même des quatre trajets en taxi de 126.48 EUR et du test COVID de juillet 2021 de 25.01 EUR, l'appelant n'ayant pas fourni les factures correspondantes. En revanche, les deux autres tests COVID de 85 EUR et 8.50 EUR lui seront remboursés, dès lors qu'il a produit les factures y relatives et que l'intimée n'a pas allégué que les tests effectués seraient sans lien avec le travail.

L'appelant n'a pas démontré que le vol K______ - F______ de 663.50 USD était en lien avec son contrat de travail alors que l'intimée soutient l'inverse. Il s'est contenté de produire la pièce n. 46, qui comporte une cinquantaine de page, sans alléguer ni pointer la partie de la pièce censée démontrer ce lien, ce qui n'est pas acceptable. Ce vol ne lui sera donc pas remboursé.

En revanche, l'appelant a valablement prouvé que les vols F______ - I______ et F______ - G______ étaient liés à son activité pour le compte de l'intimée. Il a, en outre, produit les factures, billets d'avion et cartes d'embarquement des vols. Seule la carte d'embarquement du vol retour G______ - F______ n'a pas été produite. Il serait toutefois excessif de ne pas accorder le remboursement pour ce motif vu les autres pièces produites. L'intimée sera ainsi condamnée à rembourser les montants de 633.88 EUR et de 142.63 EUR à l'appelant.

L'intimée sera aussi condamnée à rembourser à l'appelant les vouchers de la [compagnie d'aviation] J______ de 1'047.49 EUR, dès lors qu'elle n'a pas soutenu que ces frais ne seraient pas liés à l'activité professionnelle.

Il s'ensuit que c'est un montant de 1'917.50 EUR que l'intimée doit rembourser à l'appelant au titre de frais de déplacement.

En conséquence, le grief est partiellement fondé et le jugement sera modifié dans le sens de ce qui précède.

6. Les frais judiciaires seront arrêtés à 300 fr. au total pour l'appel et l'appel joint. Ils seront mis à la charge de l’appelant à raison de 200 fr. et de l'intimée à raison de 100 fr., aucun d'entre eux n'obtenant entièrement gain de cause (art. 95 et 106 al. 2 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC).

Ils seront compensés avec l’avance de frais de même montant versée par l'appelant, laquelle reste acquise à l’Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). L'intimée sera par conséquent condamnée à verser 100 fr. à l'appelant à titre de remboursement de sa part de frais judiciaires d'appel (art. 111 al. 2 CPC).

Il n’est pas alloué de dépens pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :

À la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 22 janvier 2024 par A______ contre le jugement JTPH/395/2023 rendu le 4 décembre 2023 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/12508/2022.

Au fond :

Annule le chiffre 2 du dispositif du jugement entrepris.

Condamne B______ à verser à A______ les sommes nettes de 3'928.11 EUR (trois mille neuf cent vingt-huit euros et onze centimes) et 1'917.05 EUR (mille neuf cent dix-sept euros et cinq centimes), plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er janvier 2022.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 300 fr., les compense avec l’avance de frais effectuée, laquelle reste acquise à l’Etat de Genève, les met à la charge de A______ à hauteur de 200 fr. et à la charge de B______ à hauteur de 100 fr.

Condamne B______ à verser à A______ 100 fr. à titre de remboursement de sa part de frais judiciaires d'appel.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Marie-Noëlle FAVARGER SCHMIDT, Monsieur Thierry ZEHNDER, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.