Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des prud'hommes

1 resultats
C/5970/2023

CAPH/75/2024 du 25.09.2024 sur OTPH/80/2024 ( OO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5970/2023 CAPH/75/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MERCREDI 25 SEPTEMBRE 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant de deux ordonnances rendues par le Tribunal des prud'hommes les 16 janvier et 5 février 2024 (OTPH/80/2024 et OTPH/192/2024), représenté par Me Vanessa MARAIA-ROSSEL, avocate, Gillioz Dorsaz & Associés, rue du Général-Dufour 11, 1204 Genève,

et

B______, sise ______ [ZH], intimée, représentée par Me Kevin GUILLET, avocat, Proxima legal Sarl, rue des Terreaux 10, 1003 Lausanne.

.


EN FAIT

A.           a. Le 23 mars 2023, A______ a déposé une requête de conciliation auprès de l'autorité de conciliation du Tribunal des prud'hommes à l'encontre de son ancienne employeuse, C______ (ci-après: l'employeuse ou la banque), requête qui a été notifiée à cette dernière à son siège social à Zurich.

b. Une audience de conciliation s'est tenue le 11 mai 2023, à laquelle ont comparu A______ et C______, la banque étant représentée par une juriste interne, D______ (titulaire du brevet d'avocat et spécialiste en droit du travail), sans l'assistance d'un avocat externe, et à l'issue de laquelle l'autorisation de procéder a été délivrée.

c. Par acte déposé le 12 septembre 2023 au Tribunal des prud’hommes (ci-après: le Tribunal), A______ a agi à l'encontre de C______, notamment en paiement de la somme totale de plus de 200'000 fr. à titre de licenciement abusif (résultant, entre autres, d'une situation de mobbing), de tort moral, de dommages subis en raison de l'incapacité causée par des atteintes à sa personnalité, de bonus, et de rémunération pour des heures supplémentaires, ainsi que de jours de vacances.

Dans son écriture, qui comporte 117 pages, 407 allégués et 114 pièces, il a offert la preuve de ses allégués par pièces, par la production de pièces par sa partie adverse, ainsi que par l'audition des parties et de témoins.

d. Par courrier du 29 septembre 2023, le Tribunal a informé la banque du dépôt de cette action et lui a fait parvenir l'avis de taxation adressé le même jour à A______.

e. A la suite du paiement de l'avance de frais par ce dernier, le Tribunal a, par ordonnance OTPH/1612/2023 du 5 octobre 2023 adressée à C______, à l'adresse de son siège social à Zurich, par colis postal à remettre contre signature (suivi Track et Trace de la Poste 1______), transmis un exemplaire de la demande et des pièces y relatives et imparti un délai de 30 jours dès réception pour répondre à la demande.

Cet envoi postal a été distribué le 9 octobre 2023 à la banque et a fait l'objet d'une attestation de réception reçue par la Poste le 18 octobre 2023.

f. Le 27 octobre 2023, ledit colis (portant l'indication de provenance "CH-2______", soit un code postal exclusif au groupe C______) a été retourné – sans explications – au Tribunal au moyen d'un nouvel envoi postal contre signature (suivi Track et Trace de la Poste 3______), et non par un retour à l'expéditeur opéré par la Poste en raison d'une distribution infructueuse.

Cet envoi a été distribué le 30 octobre suivant au Tribunal, lequel a considéré que le colis avait été retourné "sans raison".

g. Ce dernier a, le jour même, réexpédié au siège de C______ le colis par un nouvel envoi postal (suivi Track et Trace de la Poste 4______), lequel a été distribué le 1er novembre 2023 à la banque, distribution qui a été confirmée par attestation de réception du 3 novembre 2023.

Cette seconde expédition n'a pas fait l'objet d'une nouvelle ordonnance, le colis ayant le même contenu que le premier.

A______ n'a pas été informé de ce second envoi.

h. Par courrier adressé le 13 novembre 2023 au Tribunal, le conseil de la banque s'est constitué pour la défense des intérêts de cette dernière dans la présente procédure au moyen d'une procuration signée le 10 novembre 2023 par deux représentants de celle-ci, dont D______. Il a, à cette occasion, indiqué que, référence faite à l'entretien qu'il avait eu quelques jours auparavant avec le greffe du Tribunal qui lui avait dit que le colis avait été distribué le 1er novembre 2023, sa mandante n'avait pas de "trace de [cette] livraison (…) de son service postale interne", que des investigations étaient en cours et qu'il réservait les droits de sa cliente quant au délai de réponse, "dans l'hypothèse où cette notification devait ne pas encore avoir eu lieu".

i. Le 20 novembre 2023, le Tribunal a envoyé une copie des actes de procédure, y compris de la demande, au conseil de C______, envoi qui a été distribué le 22 novembre suivant.

A______ n'en a pas été informé.

j. Vu l'expiration du délai de réponse initial octroyé à C______ et en l'absence de nouvelles du Tribunal, A______ a pris contact avec le greffe de celui-ci, le 22 novembre 2023.

Par courrier du même jour, il a sollicité une copie intégrale de la correspondance intervenue depuis le 5 octobre 2023 entre le Tribunal et C______, respectivement le conseil de cette dernière, ainsi que la consultation du dossier. Il ressort de son courrier qu'à cette date, il avait été informé par le greffe du fait que la demande avait été expédiée une seconde fois à C______.

Les documents sollicités (comprenant les suivis Track et Trace de la Poste) lui sont parvenus les jours suivants (ainsi qu'en copie à C______) et il a consulté le dossier de la procédure au greffe du Tribunal le 30 novembre 2023.

k. Par courrier du 29 novembre 2023, le conseil de C______ a sollicité du Tribunal une prolongation d'un mois, tenant compte des féries judiciaires, du délai octroyé dans l'ordonnance OTPH/1612/2023 du 5 octobre 2023, qui lui avait été notifiée le 1er novembre 2023, au motif qu'il n'avait pu s'entretenir avec sa mandante sur tous les éléments de la demande.

l. Le Tribunal a accordé cette prolongation par "n'empêche" le 30 novembre 2023.

Une copie de la demande de prolongation du 29 novembre 2023, assortie du "n'empêche", a été adressée le jour même à A______, qui l'a reçue le 1er décembre 2023.

m.a Le 1er décembre 2023, A______ a fait valoir que C______ n'avait pas déposé de réponse dans le délai imparti, ni requis à temps la prolongation de ce délai, lequel était arrivé à échéance le 8 novembre 2023 vu la notification valablement intervenue le 9 octobre 2023 et que le colis (qui avait été ouvert selon ce qu'elle avait pu observer en consultant les pièces du dossier au greffe du Tribunal) avait été retourné par C______ sans explication le 27 octobre 2023 afin de gagner du temps, soit de manière contraire à la bonne foi, de sorte qu'aucun délai de grâce ne devait lui être accordé. De plus, dans les faits, la banque avait déjà bénéficié d'un premier délai de grâce depuis le 9 octobre 2023 et un second délai n'était pas admissible.

A______ sollicitait dès lors que la cause soit déclarée en état d'être jugée et fasse l'objet d'un jugement rendu par défaut au sens de l'art. 223 al. 2 CPC et que le Tribunal refuse d'octroyer la prolongation requise le 29 novembre 2023, respectivement annule toute ordonnance d'octroi de prolongation qui aurait été rendue.

m.b Le 19 décembre 2023, C______ s'est opposée à cette requête et a conclu au maintien du délai pour répondre au 16 janvier 2024. Elle a affirmé n'avoir eu connaissance des notifications des 9 octobre et 1er novembre 2023 que le 9 novembre 2023 lorsque D______, sans nouvelles de la part du Tribunal, avait téléphoné au greffe de celui-ci. La banque avait ensuite immédiatement mandaté un avocat, qui s'était à son tour renseigné auprès du greffe, lequel lui avait indiqué que la notification avait eu lieu le 1er novembre 2023, ce qui avait déclenché un nouveau délai de trente jours (lequel ne constituait pas un délai de grâce). Quand bien même ce délai aurait dû être considéré comme un délai de grâce, il était raisonnable et sujet à prolongation.

m.c Par réplique et duplique des 9 et 25 janvier 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives concernant la requête de A______ du 1er décembre 2023.

n. Par courrier du 15 janvier 2024, le conseil du C______ a sollicité du Tribunal une seconde prolongation du délai pour répondre au 29 février 2024, prenant pour motif la longueur et la complexité de la demande du 12 septembre 2023, ainsi que le fait qu'il avait dû, entre temps, se déterminer sur la requête du 1er décembre 2023.

B. a. Par ordonnance OTPH/80/2024 du 16 janvier 2024, notifiée le lendemain à A______, le Tribunal a admis la requête de prolongation de délai du 15 janvier 2024 (ch. 1 du dispositif), prolongé le délai partiellement octroyé au 16 février 2024 (ch. 2) et dit qu'il s'agissait d'un ultime délai (ch. 3).

b. Par acte expédié le 29 janvier 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a recouru contre cette ordonnance, dont il a sollicité l'annulation.

Il a conclu, avec suite de frais judiciaires, à ce que la requête de prolongation de délai du 15 janvier 2024 du C______ soit rejetée et à ce que soit constaté le défaut de la banque à la suite de l'absence du dépôt d'une réponse, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal.

Préalablement, A______ a sollicité la suspension de la procédure de recours jusqu'à droit jugé par le Tribunal sur sa requête du 1er décembre 2023 et au plus tôt jusqu'au dépôt de la réponse de C______ à la demande.

A l'appui de son recours, il a produit une pièce nouvelle (pièce 115), soit un décompte de l'assurance-chômage pour le mois de décembre 2023.

c. Par réponse du 21 mars 2024, C______ a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours, avec suite de frais judiciaires et dépens.

d. Par réplique et duplique des 2 et 12 avril 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

e. Le 3 mai 2023, elles ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. a. Par ordonnance OTPH/192/2024 du 5 février 2024, notifiée le lendemain à A______, le Tribunal, après avoir ordonné la transmission à ce dernier des déterminations de C______ du 25 janvier 2024 (ch. 1 du dispositif), a rejeté la requête de A______ du 1er décembre 2023 tendant à ce qu'un jugement par défaut soit rendu en application de l'art. 223 al. 2 CPC (ch. 2), maintenu le délai imparti à C______ pour répondre à la demande (ch. 3) et réservé la suite de la procédure (ch. 4).

Le Tribunal a retenu qu'aucun comportement contraire à la bonne foi ne pouvait être reproché à l'intimée. En effet, elle n'avait eu aucun intérêt à renvoyer le colis avant l'échéance du délai de réponse pour gagner du temps, dès lors qu'elle risquait la forclusion ou l'application d'un délai de grâce selon l'art. 223 al. 1 CPC (généralement de 10 jours), alors qu'elle aurait pu obtenir une prolongation de délai (généralement de 30 jours et prolongeable). Une erreur s'était manifestement produite et une nouvelle notification s'était imposée. Après avoir appris les deux notifications successives, l'intimée avait immédiatement mandaté un avocat, lequel s'était renseigné auprès du greffe, qui lui avait indiqué que le délai de 30 jours avait été déclenché par la notification du 1er novembre 2023. Se fiant de bonne foi aux indications reçues du Tribunal, l'intimée avait sollicité deux demandes de prolongation de délai avant l'échéance de celui-ci. Le Tribunal a ainsi considéré qu'un nouveau délai de trente jours avait commencé à courir le 1er novembre 2023 et avait été valablement prolongé au 16 janvier 2024, puis au 16 février 2024 et qu'admettre le contraire relèverait du formalisme excessif et serait disproportionné, dès lors que l'intimée se serait vu privée d'exercer son droit d'être entendue, alors qu'elle s'était fiée de bonne foi aux indications données par le Tribunal et qu'aucun intérêt digne de protection à l'application stricte des règles de procédure ne se justifiait. Le délai de réponse était en tout état prolongeable et la nouvelle notification avait eu lieu avant l'échéance du premier délai déclenché par la notification du 9 octobre 2023. Par ailleurs, ce délai ne pouvait constituer un bref délai supplémentaire au sens de l'art. 223 al. 1 CPC, dans la mesure où le Tribunal n'avait pas donné d'indication en ce sens et qu'il avait été accordé avant même l'échéance du premier délai.

b. Par acte expédié le 16 février 2024 à la Cour, A______ a recouru contre cette ordonnance, dont il a sollicité l'annulation.

Il a conclu, avec suite de frais judiciaires, à ce que soit constaté le défaut de C______ à la suite de l'absence de dépôt d'une réponse à la demande du 12 septembre 2023 dans le délai de 30 jours suivant la notification survenue le 9 octobre 2023, à ce que soit déclarée irrecevable toute réponse déposée, laquelle devrait être écartée du dossier de procédure, à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal pour la suite de la procédure par défaut au sens de l'art. 223 al. 2 CPC et, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal pour décision dans le sens des considérants.

Préalablement, il a sollicité la suspension de l'effet exécutoire attaché au chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance OTPH/192/2024, requête qui a été admise par la Cour par arrêt CAPH/27/2024 du 22 mars 2024, et la jonction de ses deux recours.

Il a produit une pièce nouvelle, soit la même pièce que celle produite à l'appui de son recours du 29 janvier 2024 (pièce 115).

c. Par réponse du 21 mars 2024, C______ a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours, avec suite de frais judiciaires et dépens.

d. Par réplique et duplique des 2 et 12 avril 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

e. Le 3 mai 2024, elles ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Compte tenu de leur connexité, les deux recours seront traités dans le même arrêt (art. 125 let. c CPC).

1.2 Le conseil de C______ a informé la Cour le 3 juillet 2024 de ce que les actifs et passifs de la banque avaient été repris par B______ et il a joint une procuration signée par cette dernière en sa faveur.

1.2.1 En l’absence d’aliénation de l’objet du litige, la substitution de partie est subordonnée au consentement de la partie adverse; les dispositions spéciales prévoyant la succession d’un tiers aux droits ou obligations des parties sont réservées (art. 83 al. 4 CPC).

La substitution de partie ex lege intervient lorsque le changement de légitimation survient de façon originaire, c'est-à-dire indépendamment de la volonté de celui qui perd la légitimation, laquelle volonté ne s'exprime pas (décès ou faillite) ou porte sur un acte qui, en lui-même, provoque la succession à titre universel, à l'instar de l'ouverture de la succession d'un plaideur (art. 560 al. 1 CC) ou d'une fusion (art. 22 de la loi fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine [Loi sur la fusion, LFus; RS 221.301]). Selon l'art. 22 LFus, la fusion déploie ses effets dès son inscription au registre du commerce. À cette date, l’ensemble des actifs et passifs de la société transférante sont transférés de par la loi à la société reprenante.

Sous l'angle procédural, la fusion a pour conséquence la substitution de par le droit fédéral. Dans ce cas, la succession légale de l'ayant droit reprenant dans la position de partie au procès civil de l'ayant droit cédant intervient automatiquement (arrêts du Tribunal fédéral 4A_610/2014 du 30 mars 2015 consid. 4.2.2; 5A_256/2016 du 9 juin 2017 consid. 3.2 et 3.6).

1.2.2 En l'espèce, selon publication à la Feuille officielle suisse du commerce du ______ 2024, B______ a repris, suite à une fusion, l'intégralité des actifs et des passifs de C______, laquelle a été radiée du registre du commerce selon publication du même jour.

Même si la fusion a eu lieu après que la cause a été gardée à juger par la Cour, la substitution intervient ex lege, de sorte que B______ se substituera à C______ dans le cadre de la présente procédure.

1.3 Le recours est recevable contre des décisions et ordonnances d'instruction de première instance, dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (art. 319 let. b ch. 2 CPC).

1.3.1 Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (Jeandin, CR-CPC, 2019, n. 11 ad art. 319 CPC; Freiburghaus/Afheldt, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2016, n. 11 ad art. 319 ZPO).

Dans le cadre des décisions querellées, le Tribunal a admis la requête de seconde prolongation de délai de l'intimée, transmis des écritures au recourant, rejeté la requête de ce dernier tendant à ce qu'un jugement par défaut soit rendu et maintenu le délai imparti à l'intimée pour répondre. Il a ainsi rendu des ordonnances d'instruction, par lesquelles il a statué sur le déroulement de la conduite de la procédure. Lesdites ordonnances peuvent ainsi faire l'objet de recours au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC, dès lors que les hypothèses visées par l'art. 319 let. b ch.1 CPC ne sont pas réalisées.

1.3.2 Interjetés dans les délais impartis et suivant la forme prévue par la loi (art. 130, 131 et 321 al. 1 et 2 CPC), les recours sont recevables sous cet angle.

1.4 Il convient encore d'examiner si la décision attaquée est susceptible de causer un préjudice difficilement réparable au recourant.

Le recourant soutient à cet égard que la mise en œuvre des décisions entreprises lui causerait un préjudice difficilement réparable en ce sens que les recours portent sur une question de nature à changer intégralement la suite de la procédure, qui en est à ses débuts. Il soutient, en effet, que sa situation procédurale serait rendue notablement plus difficile et péjorée si la procédure devant le Tribunal devait se poursuivre en contradictoire avec le dépôt de la réponse de l'intimée, laquelle aurait disposé de plusieurs mois pour ce faire, serait placée dans une situation plus favorable et se verrait récompensée par son comportement, selon lui, contraire à la bonne foi. Il est d'avis que l'application de la procédure par défaut permettrait au Tribunal de rendre rapidement une décision finale, alors que le cas contraire entraînerait des frais de représentation en justice vraisemblablement inutiles à sa charge, frais qu'il ne pourrait pas recouvrer vu la procédure applicable devant la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC). N'étant pas parvenu à retrouver un emploi et ne disposant que de 110 jours d'indemnités journalière de l'assurance-chômage au 18 décembre 2023, ces frais injustifiés et inutiles auraient des conséquences désastreuses sur sa situation personnelle et lui causeraient un préjudice financier subjectivement et objectivement important, alors qu'il ne serait pas à l'origine de cette situation.

Il relève également qu'un examen immédiat des conséquences du défaut de l'intimée ne retarderait pas la procédure, puisqu'il serait susceptible d'aboutir rapidement au prononcé d'une décision finale et simplifier notablement la procédure de première instance. L'avantage en découlant demeurerait ainsi supérieur à celui de ne pas retarder la procédure par les présents recours. De plus, un tel examen ne causerait pas de préjudice à l'intimée, dès lors qu'elle aurait également intérêt à ce que le défaut soit tranché d'entrée de cause afin d'échapper à des frais inutiles.

L'intimée conteste l'existence d'un préjudice difficilement réparable. Elle considère, notamment, que l'accroissement des frais de représentation n'est pas suffisant, que la procédure est plutôt rendue compliquée par le caractère prolixe de la demande, que les frais encourus correspondraient en tout état aux frais auxquels les parties auraient été exposées (et le recourant devait s'attendre en déposant sa demande) si la procédure avait débuté sans encombres et que les mesures d'instruction ne devraient pas être nombreuses et coûteuses (le recourant sollicitant tout au plus l'audition de témoins résidant tous en Suisse).

Elle souligne que, quand bien même il devrait être retenu qu'elle n'avait pas répondu à la demande, le Tribunal se prononcerait vraisemblablement en faveur de débats d'instruction d'office (art. 153 al. 2 CPC), compte tenu de la complexité et de la longueur de la demande, du nombre important d'allégués destinés à être prouvés par témoignages ou par production de pièces de la partie adverse et de la réserve faite par le recourant de modifier ses conclusions sur la base des pièces dont il requiert la production.

1.4.1 Constitue un préjudice difficilement réparable au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, qui ne peut être que difficilement réparée dans le cours ultérieur de la procédure. L'instance supérieure devra se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre l'accomplissement de cette dernière condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu : il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (parmi d'autres : ACJC/1609/2023 du 5 décembre 2023 consid. 2.1; ACJC/1458/2022 du 3 novembre 2022 consid. 2.1; Jeandin, CR-CPC, 2019, n. 22 ad art. 319 CPC).

La notion de préjudice difficilement réparable doit être interprétée restrictivement, puisque la personne touchée disposera le moment venu de la faculté de remettre en cause la décision ou ordonnance en même temps que la décision au fond. On retiendra l'existence d'un préjudice difficilement réparable lorsque ledit préjudice ne pourra plus être réparé par un jugement au fond favorable au recourant, ce qui surviendra par exemple lorsque des secrets d'affaires sont révélés ou qu'il y a atteinte à des droits absolus à l'instar de la réputation, de la propriété et du droit à la sphère privée. L’ordonnance de preuve qui admettrait simultanément l’audition de 25 témoins, dont une dizaine par voie de commissions rogatoires, en vue d’instruire sur un fait mineur et de surcroît dans un pays connu pour sa lenteur en matière d’entraide (art. 154), serait susceptible d’entrer dans le champ de l’art. 319 let. b ch. 2 (Jeandin, op. cit., n. 22a et 23 ad art. 319 CPC).

Il incombe au recourant d’établir que sa situation procédurale serait rendue notablement plus difficile et péjorée si la décision querellée était mise en œuvre (par analogie : ATF 142 III 798 consid. 2.2; 133 III 629 consid. 2.3.1), étant relevé qu'une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne suffisent pas (Jeandin, op. cit., n. 22a ad art. 319 CPC).

Si la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, le recours est irrecevable et la partie doit attaquer la décision incidente avec la décision finale sur le fond (ACJC/1609/2023 précité consid. 2.1; ACJC/580/2017 du 19 mai 2017 consid. 1.2; Message du Conseil fédéral relatif au CPC, FF 2006 6841, p. 6984; Brunner, Schweizerische Zivilprozessordnung, n. 13 ad art. 319 CPC).

1.4.2 En l'espèce, par ordonnance OTPH/80/2024 du 16 janvier 2024, le Tribunal a brièvement prolongé le délai octroyé pour répondre à la demande au 16 février 2024. En elle-même, une telle prolongation, qui retarde le dépôt de la réponse de quelques semaines seulement, n'est pas susceptible de causer un préjudice difficilement réparable au recourant; le recourant, qui développe une argumentation identique à cet égard dans ses deux recours, ne le soutient d'ailleurs pas. Le recours dirigé contre cette ordonnance est dès lors irrecevable.

En lien avec l'ordonnance OTPH/192/2024, l'appelant invoque un allongement de la procédure et un accroissement des frais, soit des circonstances qui ne sont en principe pas de nature à causer un préjudice difficilement réparable au recourant. Cela étant, la question de l'existence d'un préjudice difficilement réparable dans le cas d'espèce n'a pas besoin d'être tranchée, dès lors qu'il résulte de ce qui suit que le recours contre cette ordonnance est en tout état infondé.

1.5 Le recourant a produit une pièce nouvelle à l'appui de ses recours, laquelle serait, selon lui, susceptible d'établir l'existence d'un préjudice difficilement réparable.

1.5.1 Dans le cadre du recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

1.5.2 La question de la recevabilité de la pièce nouvelle produite par le recourant se pose. Cette question souffrira néanmoins de rester indécise, compte tenu du fait que ladite pièce n'est pas pertinente pour l'issue du litige.

1.6 La cognition de la Cour est limitée à la constatation manifestement inexacte des faits et à la violation du droit (art. 320 CPC).

La notion de "faits établis de façon manifestement inexacte" se recoupe avec celle d'arbitraire dans l'appréciation des preuves ou d'arbitraire dans l'établissement des faits (ATF 138 III 232 consid. 4.1.2, JdT 2012 II 511).

L'appréciation des preuves n'est pas déjà arbitraire du fait qu'elle ne coïncide pas avec la présentation des faits de la partie recourante, mais seulement lorsqu'elle est manifestement insoutenable. Tel est en particulier le cas lorsque le juge du fond ignore des moyens de preuves pertinents, se trompe manifestement sur leur sens ou leur portée ou les néglige sans motifs, ou lorsqu'il tire des constatations insoutenables des preuves administrées (ATF 140 III 264 consid. 2.3). Il faut démontrer clairement et en détails, dans le recours, en quoi l'appréciation des preuves est arbitraire (ATF 134 II 244 consid. 2.2, in JdT 2009 I 716; arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

2. Le recourant reproche au Tribunal d'avoir violé son droit d'être entendu au motif que la décision d'octroyer un nouveau délai de 30 jours à la suite de la seconde notification lui aurait été communiquée pour la première fois par le biais de l'ordonnance entreprise. En effet, le Tribunal ne l'avait pas informé de l'hypothétique octroi d'office d'un nouveau délai pour répondre et aucune nouvelle ordonnance en ce sens n'avait été prononcée, de sorte qu'il aurait considéré que le Tribunal n'aurait pas eu l'intention d'octroyer un nouveau délai de réponse expirant le 1er décembre 2023. Selon le recourant, il se justifie dès lors d'annuler la décision du Tribunal d'octroyer un nouveau délai de réponse de 30 jours déclenché par la notification du 1er novembre 2023.

2.1 Selon l'art. 53 al. 1 CPC, les parties ont le droit d'être entendues. Elles ont notamment le droit de consulter le dossier et de s'en faire délivrer une copie (art. 53 al. 2 CPC).

Le droit d'être entendu ancré à l'art. 29 al. 2 Cst et à l'art. 53 CPC garantit au justiciable le droit d'être informé et de s'exprimer sur les éléments pertinents du litige avant qu'une décision touchant sa situation juridique ne soit prise, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, dans la mesure où il l'estime nécessaire, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1).

La condition à l'exercice du droit de participation des parties est qu'elles aient suffisamment connaissance du cours de la procédure; pour cette raison, elles doivent être préalablement orientées, de manière appropriée, sur les opérations et les éléments déterminants pour la décision (ATF 140 I 99 consid. 3.4, in JdT 2014 I 211).

2.2 En l'occurrence, le recourant sollicite l'annulation de la décision du Tribunal d'octroyer un nouveau délai de réponse de 30 jours déclenché par la notification du 1er novembre 2023, soit une décision antérieure et distincte des ordonnances entreprises. Il est par ailleurs douteux qu'un tribunal doive entendre les parties avant de fixer un délai judiciaire.

En tout état de cause, le recourant a pris contact avec le greffe du Tribunal, le 22 novembre 2023. A sa demande, une copie intégrale de la correspondance intervenue depuis le 5 octobre 2023 entre le Tribunal et C______, respectivement le conseil de cette dernière, lui est parvenue les jours suivants. Il a consulté le dossier de la procédure au greffe le 30 novembre 2023. Il a donc eu connaissance, entre le 22 et le 30 novembre 2023, de la seconde notification de la demande à l'intimée.

En date du 1er décembre 2023, le recourant s'est vu notifier la première demande de prolongation du délai de réponse, munie du "n'empêche" du Tribunal. Compte tenu du fait que le délai de réponse imparti par la première notification de la demande était déjà échu et du fait que le Tribunal a accordé la prolongation de délai sollicitée, sans constater l'existence d'un défaut ou l'octroi d'un délai de grâce au sens de l'art. 223 al. 1 CPC, il convient de considérer que le recourant a eu connaissance, à la date du 1er décembre 2023, de la décision du Tribunal de faire courir un nouveau délai de réponse à compter de la seconde notification du 1er novembre 2023. Quand bien même il en aurait été informé qu'après avoir adressé sa requête du 1er décembre 2023 au Tribunal, il a eu la possibilité de se déterminer sur cette question dans ses déterminations du 9 janvier 2024 ou à tout moment avant le prononcé des ordonnances entreprises des 16 janvier et 5 février 2024.

L'on ne saurait, dès lors, admettre une violation du droit d'être entendu du recourant à cet égard, de sorte que le grief y relatif est en tout état mal fondé.

3. Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir constaté les faits de manière manifestement inexacte en retenant qu'une erreur se serait produite lors de la première notification, qu'une seconde notification s'imposait et qu'aucun comportement contraire à la bonne foi ne pouvait être reproché à l'intimée, qui n'avait aucun intérêt à renvoyer le premier colis pour gagner du temps. Il relève que la banque n'a jamais allégué d'élément factuel ni fourni d'explication au sujet du retour de colis litigieux, de sorte que rien ne permettait de retenir qu'il s'agissait d'une "erreur". La demande avait été valablement notifiée à l'intimée le 6 octobre 2023; elle avait pu saisir l'occasion de prendre connaissance du contenu de la demande et d'en effectuer une copie avant de remballer le colis et de le renvoyer. Elle avait volontairement omis de déposer une réponse dans le délai imparti. Cette manière de procéder de mauvaise foi lui aurait procuré un avantage puisque le Tribunal lui avait octroyé un nouveau délai de réponse.

Il conteste, par ailleurs, l'octroi d'un nouveau délai de 30 jours dès la seconde notification du 1er novembre 2023 et fait grief au Tribunal d'avoir violé les art. 52, 144 al. 2 et 148 CPC. Il fait, en particulier, valoir que, sur la base de l'art. 144 al. 2 CPC, le Tribunal ne pouvait prolonger d'office le délai de réponse déclenché par la première notification du 9 octobre 2023.

Il soutient également que, dès lors que la demande avait été valablement notifiée le 9 octobre 2023, le délai de réponse avait expiré le 8 novembre suivant sans qu'aucun acte n'ait été entrepris par l'intimée, à l'exception du retour du colis du 27 octobre 2023 de sa propre initiative. Cette dernière se serait donc trouvée dans un cas de défaut au sens de l'art. 147 al. 1 CPC et n'avait pas requis de restitution de délai manqué prévue à l'art. 148 CPC. Le recourant considère, dès lors, que le Tribunal a violé l'art. 148 CPC "en octroyant un délai supplémentaire (…) en lieu et place d'un "bref délai supplémentaire au sens de l'art. 223 al. 1 CPC"".

Il considère enfin que le Tribunal a violé l'art. 52 CPC en motivant sa décision en considérant que l'intimée s'était fiée de bonne foi aux indications qu'il lui avait données, alors qu'aucune indication n'avait été donnée par le Tribunal à l'intimée avant l'expiration du premier délai de réponse qui avait expiré le 8 novembre 2023 et que la banque n'avait donc pas pu prendre de disposition défavorable sur cette base.

3.1
3.1.1 Le tribunal notifie aux personnes concernées notamment les ordonnances et les décisions (art. 136 let. b CPC). Elles sont notifiées par envoi recommandé ou d'une autre manière contre accusé de réception (art. 138 al. 1 CPC).

Les délais fixés judiciairement peuvent être prolongés pour des motifs suffisants, lorsque la demande en est faite avant leur expiration (art. 144 al. 2 CPC).

Selon l'art. 147 CPC, une partie est défaillante lorsqu’elle omet d’accomplir un acte de procédure dans le délai prescrit ou ne se présente pas lorsqu’elle est citée à comparaître (al. 1); la procédure suit son cours sans qu’il soit tenu compte du défaut, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 2); le tribunal rend les parties attentives aux conséquences du défaut (al. 3).

Le tribunal peut accorder un délai supplémentaire ou citer les parties à une nouvelle audience lorsque la partie défaillante en fait la requête et rend vraisemblable que le défaut ne lui est pas imputable ou n’est imputable qu’à une faute légère (art. 148 al. 1 CPC).

3.1.2 Dans les procédures régies par la maxime de disposition, la partie défenderesse doit exposer dans la réponse quels faits allégués dans la demande sont reconnus ou contestés (art. 222 al. 2 CPC). Dans la mesure où la preuve n'a pour objet que les faits pertinents et contestés (art. 150 al. 1 CPC) ou ceux qui ne sont pas contestés mais pour lesquels le juge nourrit des doutes sérieux sur leur véracité (art. 153 al. 2 CPC), l'absence de contestation a en principe pour conséquence de libérer la partie demanderesse de l'obligation de prouver les faits qu'elle a allégués dans son action. La partie défenderesse qui ne présente pas de réponse court ainsi le risque que le juge rende une décision finale qui se fonderait sur les seuls faits allégués par la partie demanderesse (arrêt du Tribunal fédéral 4A_381/2018 du 7 juin 2019 consid. 2.3).

3.1.3 Selon l'art. 223 CPC, si la réponse n’est pas déposée dans le délai imparti, le tribunal fixe au défendeur un bref délai supplémentaire (al. 1); si la réponse n’est pas déposée à l’échéance du délai, le tribunal rend la décision finale si la cause est en état d’être jugée; sinon, la cause est citée aux débats principaux (al. 2).

L'art. 223 CPC constitue une exception au principe général prévu à l’art. 147 al. 2 CPC selon lequel la procédure suit son cours quand bien même une partie est défaillante. Ce délai doit être accordé d'office (Tappy, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 3 ad art. 223 CPC).

La cause est en état d'être jugée lorsque le tribunal dispose de toutes les bases de décision pour statuer sur le bien-fondé ou le mal-fondé de la prétention invoquée ou pour rendre une décision de non-entrée en matière. Cela suppose, pour l'admission des conclusions, que le demandeur ait motivé sa demande de manière concluante, c'est-à-dire qu'il ait allégué tous les faits juridiquement pertinents dont résulte la prétention invoquée. La cause n'est pas en état d'être jugée, notamment, lorsque les allégués du demandeur ne sont pas clairs, ou sont contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets, de sorte qu'il y a lieu d'exercer le devoir d'interpellation du juge (art. 56 CPC), ou lorsque le juge a des doutes sérieux sur l'exactitude d’un fait allégué par le demandeur et demeuré non contesté, de sorte qu'il doit en administrer la preuve d'office selon l'art. 153 al. 2 CPC. Les doutes peuvent par exemple résulter du fait que la présentation du demandeur est contredite par les pièces produites. Le tribunal décide, en exerçant son pouvoir d'appréciation, sur le caractère sérieux des doutes, qui nécessite une certaine intensité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_545/2021 du 8 février 2022 consid. 4.2).

3.1.4 Aux termes de l'art. 5 al. 3 Cst., les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. De ce principe général découle notamment le droit fondamental du particulier à la protection de sa bonne foi dans ses relations avec l'État, consacré à l'art. 9 in fine Cst. (ATF 144 IV 189 consid. 5.1; 138 I 49 consid. 8.3.1; 136 I 254 consid. 5.2; 135 IV 212 consid. 2.6). Une partie ne peut toutefois se prévaloir de cette protection que si elle se fie de bonne foi à cette indication. Tel n'est pas le cas de celle qui s'est aperçue de l'erreur, ou aurait dû s'en apercevoir en prêtant l'attention commandée par les circonstances. Seule une négligence procédurale grossière peut faire échec à la protection de la bonne foi.

3.1.5 Selon l'art. 52 CPC, quiconque participe à la procédure doit se conformer aux règles de la bonne foi.

Le principe de la bonne foi accorde notamment à une personne un droit à la protection de sa confiance fondée en un renseignement ou une assurance même inexacts de l’autorité. La condition en est que la personne qui se prévaut de la protection de la confiance ait pu légitimement se fier à ces indications et que sur leur fondement, elle ait pris des dispositions désavantageuses pour elle, sur lesquelles elle ne peut plus revenir (ATF 143 V 95 consid. 3.6.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_226/2014 du 6 août 2014 consid. 4.2).

Le formalisme excessif est un aspect particulier du déni de justice prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst. Il est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (arrêt du Tribunal fédéral 4A_44/2019 du 20 septembre 2019 consid. 4 non publié in ATF 145 III 428).

3.2 En l'espèce, selon les explications du Tribunal, celui-ci n'a pas prolongé le premier délai de réponse octroyé à l'intimée, mais lui a – spontanément et avant l'expiration du premier délai pour répondre – imparti un nouveau délai depuis la seconde notification de la demande intervenue le 1er novembre 2023, de sorte que les griefs du recourant en lien avec les art. 144 al. 2 et 148 CPC tombent à faux.

Pour le surplus, il doit être considéré que l'ordonnance du Tribunal du 5 octobre 2023 a été valablement notifiée à l'intimée le 9 octobre suivant, comme en atteste le suivi des envois de la poste, même si elle l'a retournée au Tribunal par la suite. L'envoi est entré dans sa sphère d'influence et dans ce contexte une éventuelle erreur de l'un des services de l'intimée, sa bonne ou sa mauvaise foi ou les motifs pour lesquels elle a retourné l'envoi qui lui avait été adressé ne sont pas pertinents.

Cela étant, selon les explications fournies par le Tribunal, celui-ci a procédé le 30 octobre 2023 à une nouvelle notification de son ordonnance du 5 octobre 2023. Celle-ci n'était certes pas nécessaire et ne se justifiait pas vu que l'ordonnance précitée avait déjà été précédemment notifiée. En l'absence de mention du Tribunal selon laquelle ce nouvel envoi ne l'était qu'à titre informatif, l'intimée pouvait cependant considérer qu'il s'agissait d'une nouvelle notification, laquelle faisait partir un nouveau délai pour qu'elle dépose sa réponse. Un nouveau délai de 30 jours a donc commencé à courir dès la notification du 1er novembre 2023, lequel n'était pas échu lorsque l'intimée en a requis la prolongation et le délai a été valablement prolongé au 16 janvier, puis au 16 février 2024. Il sera encore relevé que par son argumentation de nature essentiellement appellatoire, le recourant ne démontre pas l'arbitraire des constatations du Tribunal selon lesquelles, au moment de la première notification, l'intimée n'avait aucun intérêt à renvoyer le colis et qu'une erreur s'était produite. Il ne peut donc être retenu que l'intimée était de mauvaise foi en soutenant que le délai de réponse a débuté à réception de la seconde notification.

3.3 En tout état de cause, l'admission de la bonne foi de l'intimée, et par conséquent la protection dont elle bénéficie au regard de la manière dont le Tribunal a procédé en procédant à une nouvelle notification, ne porte pas préjudice au recourant. En d'autres termes, même s'il fallait considérer que le délai de réponse a débuté à réception de la première notification, le recourant ne pourrait pas obtenir gain de cause.

En effet, même s'il fallait admettre que l'intimée n'a pas déposé de réponse dans le délai dont elle disposait venant à échéance le 8 novembre 2023, le Tribunal devait lui impartir un délai supplémentaire en application de l'art. 223 al. 1 CPC, ce qui n'a pas été le cas. Dans la mesure où il a été retenu, sans arbitraire, que le premier envoi du Tribunal avait été renvoyé par l'intimée par erreur, ce renvoi ne peut être qualifié de procédé dilatoire qui aurait dispensé le Tribunal de fixer un délai supplémentaire. Par conséquent, le Tribunal ne pourrait pas rendre une décision finale selon l'art. 223 al. 2 CPC. Les conditions pour qu'une telle décision soit rendue, à savoir que la cause soit en état d'être jugée, ne seraient, quoi qu'il en soit, pas réunies. En effet, la demande comporte plus de 117 pages et 407 allégués ainsi qu'une conclusion préalable tendant à ce que l'intimée produise une multitude de documents, ce qui permet de penser que le recourant considère que des éléments de preuve supplémentaires doivent encore être apportés. Il ne peut dès lors être retenu, pour cette raison également, qu'une décision finale pourrait être rendue en application de l'art. 223 al. 2 CPC.

3.4 En définitive, au vu de ce qui précède, le recours contre l'ordonnance OTPH/192/2024 du 16 janvier 2024 n'est pas fondé, de sorte qu'il sera rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

3.5 Les considérations qui précédent relatives au recours contre l'ordonnance OTPH/192/2024 du 5 février 2024 épuisent les griefs dirigés contre l'ordonnance OTPH/80/2023 du 16 janvier 2024, qui, s'il avait été recevable, aurait donc dû être rejeté.

4. En raison de la valeur litigieuse supérieure à 50'000 fr., des frais judiciaires doivent être perçus pour les procédures de recours (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC).

Ceux-ci seront arrêtés à 800 fr. (art. 41 et 71 RTFMC) et mis à charge du recourant vu l'issue du litige (art. 106 al. 1 CPC). Ces frais seront compensés avec les avances de frais fournies par ce dernier, acquises à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

Il n'est pas alloué de dépens dans les causes soumises à la juridiction des prud’hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


Ordonne la substitution de la partie intimée en ce sens que la société B______ s'est substituée à la société C______.

Déclare irrecevable le recours interjeté le 29 janvier 2024 par A______ contre l'ordonnance OTPH/80/2024 rendue le 16 janvier 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/5970/2023.

Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 16 février 2023 par A______ contre l'ordonnance rendue le 5 février 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/5970/2023.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Arrête les frais judiciaires des deux recours à 800 fr. au total, les mets à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec les avances versées, qui restent acquises à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Marie-Noëlle FAVARGER SCHMIDT, Monsieur Thierry ZEHNDER, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.