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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/4511/2023

CAPH/49/2023 du 15.05.2023 sur JTPH/125/2023 ( SS )

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4511/2023-CT CAPH/49/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU LUNDI 15 MAI 2023

 

Entre

A______, sise ______, recourante contre un jugement sur mesures provisionnelles rendu par le Tribunal des prud'hommes le 24 avril 2023 (JTPH/125/2023), comparant par Me Charles PIGUET, avocat, Green Avocats, Rue Ferdinand-Hodler 9, 1207 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile

et

B______ SA, ______, intimée, comparant par Me Michaël BIOT, avocat, BMJ Avocats SA, Rue de Berne 3, 1201 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.


Attendu, EN FAIT, que [le syndicat] A______ a formé le 13 mars 2023 une requête dirigée contre B______ SA, concluant notamment, sur mesures provisionnelles et superprovisionnelles, à ce que le Tribunal des prud'hommes l'autorise à participer aux négociations en cours relative à la conclusion de la nouvelle Convention collective de travail (ci-après : CCT) débutant en avril 2023 et ordonne à B______ SA de l'inclure dans les négociations en cours, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP;

Que, par ordonnance JTPH/69/2023 du 14 mars 2023, le Tribunal a fait droit à la requête de mesures superprovisionnelles;

Que, par jugement JPTH/125/2023 du 24 avril 2023, reçu par A______ le lendemain, le Tribunal a notamment rejeté la requête de mesures provisionnelle (ch. 2 du dispositif) et a révoqué avec effet immédiat l'ordonnance de mesures superprovisionnelles du 14 mars 2023 (ch. 3);

Que, le 5 mai 2023, A______ a formé recours contre ce jugement, concluant notamment à ce que la Cour de justice l'annule, l'autorise à participer aux négociations en cours relatives à la conclusion de la nouvelle CCT ayant débuté en avril 2023 et ordonne à B______ SA de l'inclure dans les négociations;

Qu'elle a requis l'octroi de l'octroi de l'effet suspensif à son recours, faisant valoir qu'à défaut elle subirait un préjudice difficilement réparable en ce sens qu'elle ne pourrait pas sauvegarder les intérêts de ses membres dans le cadre de la conclusion de cette nouvelle CCT, étant précisé qu'elle était le syndicat le plus représenté au sein de l'intimée;

Qu'elle allègue que les négociations en question ont débuté en avril 2023 et sont toujours en cours;

Qu'elle fait valoir qu'elle ne pouvait pas déposer sa requête de mesures provisionnelles plus tôt, en raison du fait, d'une part, qu'elle n'a appris qu'à fin janvier 2023 que l'intimée avait définitivement décidé de ne pas la reconnaître comme partenaire social et, d'autre part, qu'elle ignorait jusqu'en mars 2023 que les négociations relatives à la nouvelle CCT débuteraient en avril 2023;

Que l'intimée a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif, faisant valoir que sa partie adverse a tardé à agir, ce qui attestait de l'absence d'urgence à statuer;

Qu'en tout état de cause la recourante était isolée parmi les autres syndicats de sorte qu'elle ne pourrait que négocier "en bilatéral" avec elle, ce qu'elle pouvait faire en tout temps;

Considérant, EN DROIT, que selon l'art. 325 CPC le recours ne suspend pas la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision entreprise (al. 1), l'instance de recours pouvant cependant suspendre le caractère exécutoire en ordonnant au besoin des mesures conservatoires ou le dépôt de sûretés (al. 2);

Qu'il appartient à la partie recourante d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision querellée lui cause un préjudice difficilement réparable (ATF 134 III 426 consid. 1.2), à moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 136 IV 92 consid. 4; 133 III 629 consid. 2.3.1 in fine);

Que, saisie d'une demande d'effet suspensif au sens de l'art. 315 al. 5 CPC, l'autorité cantonale de seconde instance doit procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références citées; 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_514/2012 du 4 septembre 2012 consid. 3.2.2);

Que si, avant le rejet de la requête de mesures provisionnelles, des mesures superprovisionnelles ont été prononcées, l’effet suspensif peut être requis. S’il est octroyé, les mesures superprovisionnelles renaissent (BSK ZPO-Sprecher art. 265 N 46);

Que l'autorité de recours jouit d'un large pouvoir d'appréciation (Brunner, in Kurzkommentar zur ZPO, Oberhammer et al. [éd.], n. 4 ad art. 325 CPC, Freiburghaus/Afheldt, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, Sutter-Somme et al. [éd.], n. 6 ad art. 325 CPC, Jeandin, Commentaire romand, n. 6 ad art. 325 CPC);

Qu'en l'espèce, le recours n'apparaît pas, prima facie, manifestement dénué de chances de succès;

Que, puisqu'il ressort du dossier que les négociations relatives à la nouvelles CCT ont déjà débuté et sont toujours en cours, la recourante subirait un préjudice difficilement réparable si elle n'était pas autorisée à y participer dès maintenant, dans l'hypothèse où le droit qu'elle allègue lui était reconnu à l'issue de la procédure devant la Cour;

Que le fait de savoir si la recourante a fautivement tardé à agir ou non n'est pas déterminant à ce stade;

Qu'en tout état de cause, les allégations de la recourante selon lesquelles ce n'est que fin janvier 2023 qu'elle a appris de manière définitive qu'elle ne serait pas admise à participer aux négociations et qu'elle ignorait que celles-ci débuteraient en avril 2023 ne sont pas prima facie, dénuées de vraisemblance;

Que l'intimée ne rend par ailleurs pas vraisemblable qu'elle subirait un dommage difficilement réparable en cas d'octroi de l'effet suspensif;

Qu'un tel dommage est d'autant moins vraisemblable au regard du fait que la présente procédure est régie par la procédure sommaire et que, partant, sa durée sera limitée;

Qu'à cela s'ajoute que si, comme elle l'allègue, la recourante est isolée parmi les autres syndicats, sa participation temporaire aux négociations ne devrait pas influencer celles-ci de manière significative;

Qu'il sera dès lors fait droit à la requête d'octroi de l'effet suspensif en ce qu'elle concerne les chiffres 2 et 3 du dispositif du jugement querellé, avec la conséquence que l'ordonnance de mesures superprovisionnelles du Tribunal du 14 mars 2023 restera en vigueur pour toute la durée de la procédure devant la Cour, sauf décision ultérieure en sens contraire ;

Qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt rendu sur le fond (art. 104 al. 3 CC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes,


Statuant sur requête de suspension de l'effet exécutoire du jugement entrepris :

*Rectification d'erreur matérielle (art. 334 CPC)

Admet la requête de A______ tendant à suspendre l'effet exécutoire attaché aux chiffres 2 et 3 du dispositif du jugement JTPH/125/2022 JTPH/125/2023* rendu le 24 avril 2023 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/4511/2023.

*Rectification d'erreur matérielle (art. 334 CPC)

Dit que l'ordonnance de mesures provisionnelles superprovisionnelles* JTPH/69/2023 du 14 mars 2023 restera en vigueur pour toute la durée de la procédure devant la Cour, sous réserve d'une décision ultérieure en sens contraire.

Dit qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec l'arrêt rendu au fond.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Monsieur
Javier BARBEITO, greffier.

 

 

 

 

 

 

Indications des voies de recours :

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF – RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.