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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/4938/2020

CAPH/96/2022 du 14.06.2022 sur JTPH/485/2021 ( SS ) , ARRET/CONTRA

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4938/2020-5 CAPH/96/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 14 JUIN 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______[GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 21 décembre 2021 (JTPH/485/2021), comparant par Me Vanja MEGEVAND, avocate, chemin de Kermély, case postale 473, 1211 Genève 12, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

B______, sise ______, Genève, intimée, comparant par c/o F______, ______, Genève, dans les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           a. A______ a été engagée par B______ Sàrl, société ayant son siège à Genève active dans le domaine des services de conciergerie de luxe et d'assistance personnelle, en tant que "Business Developer & Client Relations" à compter du 1er octobre 2017, pour un salaire mensuel de base brut de 3'000 fr. par mois (taux d'activité à 50%).

L'art. 6 du contrat de travail conclu entre les parties et daté du 9 novembre 2017, mentionnait une clause de non-concurrence, assortie d'une pénalité de 36'000 fr. en cas de violation de la clause par l'employée dans l'année suivant la fin des rapports de travail.

b. Par courrier postal et électronique du 29 janvier 2019, B______ Sàrl a résilié les rapports de travail pour le 31 mars 2019.

c. Le 25 février 2020, B______ Sàrl a déposé devant l'Autorité de conciliation du Tribunal des Prud'hommes une requête dirigée contre A______, rue 2_____ [GE], à laquelle elle réclamait le paiement de la pénalité de 36'000 fr. pour avoir violé la clause de non-concurrence contractuelle. B______ Sàrl reprochait à son ancienne employée de travailler pour l'entreprise concurrente C______ Sàrl.

d. La convocation à l'audience de conciliation, fixée initialement au 22 avril 2020, a été communiquée à A______, rue 2______, Genève, par pli recommandé du 10 mars 2020. Cet envoi a été retourné par la Poste avec l'indication "le destinataire est introuvable à l'adresse indiquée". L'avis d'annulation de l'audience, également envoyé à cette adresse, a aussi été retourné par la Poste avec l'indication "le destinataire est introuvable à l'adresse indiquée".

e. Par courrier du 23 mars 2020, l'Autorité de conciliation du Tribunal des Prud'hommes a invité B______ Sàrl à fournir une adresse valable de A______.

f. Par courrier du 7 mai 2020, B______ Sàrl a transmis à l'Autorité de conciliation du Tribunal des Prud'hommes une attestation de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) du 5 mai 2020, à teneur de laquelle A______ était domiciliée, à cette date, "p.a. M. D______, rue 2______, Genève".

g. Le 11 mai 2020, la citation à comparaître à l'audience de conciliation fixée au 4 juin 2020 a été communiquée à A______, p.a. M. D______, 2______, Genève. Cet envoi a été retourné par la Poste avec l'indication que la destinataire était introuvable à cette adresse.

h. Le ______ 2020, l'Autorité de conciliation du Tribunal des Prud'hommes a fait procéder à la publication de la convocation de A______ à l'audience de conciliation dans la Feuille d'avis officielle du canton de Genève (FAO).

i. A l'audience de conciliation du 4 juin 2020, A______ n'était ni présente ni représentée. A l'issue de celle-ci, l'Autorité de conciliation du Tribunal des Prud'hommes a remis à B______ Sàrl une autorisation de procéder.

B. a. Par acte porté le 23 septembre 2020 devant le Tribunal des Prud'hommes, B______ Sàrl a réclamé à A______ le paiement de 36'000 fr., plus intérêts, à titre de peine conventionnelle pour violation de la clause de prohibition de faire concurrence. Cette écriture indiquait que A______ était domiciliée p.a E______, chemin 3______, Genève, conformément à une attestation de l'OCPM du 28 août 2020.

Sur les titres joints à la demande, figuraient l'adresse e-mail de A______ auprès de la société C______Sàrl (A______@C______.com), le numéro de téléphone portable privé de l'intéressée (4______), correspondant au numéro de portable de la société C______ Sàrl (cf. pièces 6 et 7), ainsi que son adresse e-mail privée (A______@______.com).

b. Par ordonnance du 9 octobre 2020, le Tribunal des Prud'hommes a transmis à A______, à l'adresse du 3______, la demande en paiement de B______ Sàrl et l'a invitée à déposer sa réponse dans les 30 jours.

Le pli contenant l'ordonnance du 9 octobre 2020 n'a pas été distribué à A______ et a été retourné par la Poste avec l'indication que l'intéressée était partie.

c. Par ordonnance du 20 octobre 2020, B______ Sàrl a été invitée par le Tribunal des Prud'hommes à fournir l'adresse complète et exacte de l'intéressée, qui était introuvable à l'adresse indiquée dans la demande.

d. B______ Sàrl a répondu au Tribunal des Prud'hommes, par courrier du 22 octobre 2020, que la seule adresse connue de A______ était celle qui résultait de l'attestation de l'OCPM du 28 août 2020.

e. Le ______ 2020, le Tribunal des Prud'hommes a fait procéder à la publication de l'ordonnance du 9 octobre 2020 dans la FAO.

f. Le 8 février 2021, le Tribunal des Prud'hommes a prononcé un jugement non motivé (JTPH/80/2021) condamnant A______, qui n'avait pas répondu à la demande, à payer à B______ Sàrl 36'000 fr., plus intérêts à 5% dès le 31 mars 2019.

g. Le 16 février 2021, B______ Sàrl a informé le Tribunal des Prud'hommes de ce que A______ était désormais inscrite au registre du commerce en tant qu'associée gérante présidente de la société C______ Sàrl. Selon l'extrait du registre du commerce joint à cette lettre, daté du 15 février 2021, A______ était domiciliée à G______.

h. Le ______ 2021, le Tribunal des Prud'hommes a fait publier le jugement JTPH/80/2021 du 8 février 2021 dans la FAO, sans avoir préalablement tenté de le notifier par voie postale.

i. Par courrier du 5 juillet 2021, A______ a demandé au Tribunal des Prud'hommes, par l'entremise de son conseil, de lui transmettre une copie du jugement du 8 février 2021, dont elle avait eu connaissance à réception d'un commandement de payer, poursuite n° 1______, que lui avait fait notifier B______ Sàrl à son adresse située 5______[GE].

j. Par pli simple du 19 juillet 2021, le Tribunal des Prud'hommes a communiqué au conseil de A______ le jugement du 8 février 2021.

B. a. Par acte posté le 15 septembre 2021, A______ a introduit une demande tendant à la nullité et à l'annulation du jugement du 8 février 2021, subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal. Elle a fait valoir une violation de son droit d'être entendue par le Tribunal, lequel ne l'avait pas tenue informée de la procédure et ne lui avait pas communiqué le jugement à la bonne adresse, alors qu'elle avait valablement annoncé son changement de domicile à l'OCPM le 29 septembre 2020. Le motif de révision avait été découvert le 2 juillet 2021 (à réception du commandement de payer). A______ a joint à sa demande une photocopie d'une annonce de changement d'adresse adressée à l'OCPM le 29 septembre 2020 selon laquelle elle était domiciliée 5______[GE], depuis le 24 septembre 2020.

b. Dans sa réponse du 18 octobre 2021, B______ Sàrl a conclu à l'irrecevabilité de la demande en révision, subsidiairement à son rejet. Les conditions pour demander la révision du jugement n'étaient pas réunies. A______ aurait dû agir en restitution de délai dans les dix jours dès la connaissance du jugement, le 2 juillet 2021, conformément à l'art. 148 al. 2 CPC. La demandé formée le 15 septembre 2021 était de toute évidence tardive.

c. Par jugement JTPH/485/2021 du 21 décembre 2021, le Tribunal des Prud'hommes a déclaré irrecevable la demande de restitution formée le 15 septembre 2021 par A______ contre B______ Sàrl.

Le Tribunal a en substance considéré que les conditions pour agir en révision n'étaient pas réunies, la requérante ne faisant pas valoir des faits ou moyens de preuve nouveaux au sens de l'art. 328 CPC. La demande devait par conséquent être comprise comme étant une requête de restitution de délai au sens de l'art. 148 CPC, laquelle était toutefois tardive, le délai pour agir ayant expiré au plus tard le 2 août 2021, la suspension des délais pendant les féries ne trouvant pas application en procédure sommaire.

C. a. Par acte posté le 29 décembre 2021, A______ a formé appel de ce jugement, dont elle a requis l'annulation.

b. Aux termes de sa réponse à l'appel, du 13 janvier 2022, B______ Sàrl a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

c. A______ n'ayant pas fait usage de son droit à la réplique, les parties ont été avisées le 24 février 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

1.1.2 Selon l'art. 149 in fine CPC, le tribunal statue définitivement sur la requête de restitution. Cela exclut en principe tout appel ou recours sur l'admission ou le rejet de cette requête (Tappy, in CR CPC, 2ème éd. 2019, n. 12 ad art. 149 CPC).

Selon la doctrine, l'art. 149 CPC doit être compris en ce sens qu'une décision concernant la restitution n'est jamais susceptible d'un recours immédiat (au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC), mais qu'elle peut être attaquée avec la décision finale intervenant plus tard, dès lors que la contestation n'entraîne alors plus aucun retard. L'octroi ou le refus d'une restitution n'est cependant envisagé que comme une décision ou ordonnance de procédure qui sera suivie d'une décision finale. Le refus de la restitution est en revanche une décision finale lorsque l'autorité de conciliation ou le tribunal de première instance a déjà clos la procédure et que la requête de la partie défaillante tend à la faire rouvrir. Lorsque le refus de la restitution entraîne en outre la perte définitive de l'action, la possibilité d'un appel ou d'un recours est nécessaire à la protection juridique de la partie requérante et ne porte en outre aucune atteinte au principe de célérité évoqué par le législateur. Il s'impose donc d'interpréter l'art. 149 CPC en ce sens que dans ce contexte caractérisé par la conséquence du refus de la restitution, l'exclusion de toute voie de recours n'est pas opposable à la partie requérante. Le refus de la restitution met fin à une instance spécifique, ouverte par la demande de restitution; il est donc une décision finale aux termes de l'art. 308 al. 1 let. a CPC comme de l'art. 90 LTF. L'appel est ainsi recevable si la valeur litigieuse minimale est atteinte (ATF 139 III 478 consid. 4 à 7).

1.2 Dans le cas d'espèce, le Tribunal a rendu le jugement attaqué postérieurement au prononcé du jugement JTPH/80/2021 du 8 février 2021, lequel a condamné l'appelante à payer à l'intimée la somme nette de 36'000 fr., intérêts moratoires en sus. Au vu de la jurisprudence citée supra, la décision entreprise doit être considérée comme une décision finale, laquelle peut être attaquée par la voie de l'appel, les conditions de l'art. 308 al. 2 CPC étant par ailleurs remplies compte tenu des conclusions formulées par l'intimée dans sa demande en paiement.

L'appel, interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), en temps utile et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 311 CPC), est donc recevable.

2.             Dans un premier moyen, l'appelante reproche au Tribunal d'avoir traité sa demande formée le 15 septembre 2021 comme étant une requête en restitution de délai, au sens de l'art. 148 CPC, et non pas comme une demande en révision, au sens de l'art. 328 CPC, du jugement du Tribunal des Prud'hommes du 8 février 2021.

2.1.1 D'après l'art. 328 CPC, la révision d'un jugement entré en force peut notamment être demandée lorsqu'une partie découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'elle n'avait pu invoquer dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits et moyens de preuve postérieurs à la décision (art. 328 al. 1 let. a CPC), ou encore lorsqu'il est établi - en principe par une procédure pénale - que la décision a été influencée au préjudice du requérant par un crime ou un délit (art. 328 al. 1 let. b CPC).

2.1.2. Un jugement entré en force est revêtu de l'autorité de chose jugée même s'il repose sur des fondements erronés (ATF 115 II 187 consid. 3b p. 191). Tel n'est en revanche pas le cas des jugements nuls, qui sont dépourvus de tout effet juridique (ATF 129 I 361 consid. 2.3 p. 364; Zingg, in Berner Kommentar I, 2012, n° 98 ad art. 59 CPC; Bohnet, in Code de procédure civile commenté, 2011, n° 106 ad art. 59 CPC).

La nullité d'un jugement doit être relevée d'office, en tout temps et par toutes les autorités chargées d'appliquer le droit (ATF 122 I 97 c. 3a; 115 Ia 1, JdT 1991 I 396 et les références). Elle peut également être invoquée dans un recours - et même encore dans la procédure d'exécution (ATF 129 I 361 consid. 2).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, des décisions entachées d'erreurs sont nulles si le vice qui les affecte est particulièrement grave, s'il est manifeste ou du moins facilement décelable et si, de surcroît, la sécurité du droit n'est pas sérieusement mise en danger par l'admission de la nullité (cf. ATF 117 Ia 202 c. 8 pp. 220 s. et les références à la jurisprudence, JdT 1993 I 264; ATF 122 I 97 c. 3a/aa p. 99; 127 II 32 c. 3g pp. 47 s. et les références à la doctrine). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 138 II 501 consid. 3.1; 137 I 273 consid. 3.1). Des vices de procédure qui tiennent à des violations du droit d'être entendu sont en soi guérissables et ne conduisent en règle générale qu'à l'annulabilité de la décision entachée du vice. S'il s'agit cependant d'un manquement particulièrement grave aux droits essentiels des parties, les violations du droit d'être entendu entraînent aussi la nullité (ATF 129 I 361 consid. 2.1). Le fait d'utiliser la voie édictale alors que ses conditions ne sont pas réalisées constitue un motif de nullité (ATF 129 I 361 consid. 2.2; 136 III 571 consid. 6.3), tout comme l'absence de notification d'une décision: tant qu'un jugement n'a pas été communiqué, il est inexistant et n'entre pas en force (ATF 141 I 97 consid. 7.1 p. 102). C'est en particulier le cas quand la personne concernée par une décision, à défaut d'avoir été citée, ignore tout de la procédure ouverte à son encontre et, partant, n'a pas eu l'occasion d'y prendre part (ATF 129 I 361 consid. 2.1).

2.1.3 La notification est effectuée par publication dans la feuille officielle cantonale ou dans la feuille officielle suisse du commerce notamment lorsque le lieu de séjour du destinataire est inconnu et n’a pu être déterminé en dépit des recherches qui peuvent raisonnablement être exigées (art. 141 al. 1 let. a CPC).

Un lieu de séjour inconnu, ou l'impossibilité de la notification, au sens de l'art. 141 al. 1 lit. a et b CPC, ne peut être retenu que lorsque toutes les recherches utiles que l'on peut raisonnablement attendre ont été entreprises sans succès. Savoir s’il a été suffisamment satisfait à ce devoir de recherches s’apprécie selon la situation de fait concrète (arrêt du Tribunal fédéral 4A_646/2020 du 12 avril 2021 consid. 3.2 et 4).

2.2. Il convient en l'espèce de rechercher en premier lieu si le jugement du 8 février 2021 est entaché d'un éventuel motif de nullité. Celle-ci peut en effet être constatée d'office et en tout temps (ATF 138 II 501 consid. 3.1; 129 I 361 consid. 2 p. 363).

Bien que régulièrement domiciliée dans le canton de Genève, l'appelante, défenderesse à la procédure de première instance, n'a pris part ni à la procédure devant l'Autorité de conciliation ni à la procédure devant le Tribunal des Prud'hommes engagée par l'intimée. La convocation à l'audience de conciliation, envoyée par voie postale, a été retournée par la Poste avec l'indication que la destinataire était introuvable à l'adresse indiquée, de sorte que l'Autorité de conciliation a procédé par voie édictale. Quant à la demande en paiement déposée par l'intimée le 23 septembre 2020, elle n'a pas pu être notifiée à l'appelante (art. 222 CPC), le pli recommandé du Tribunal des Prud'hommes du 9 octobre 2020 transmettant cette écriture ayant été retourné par la Poste avec l'indication que la destinataire était partie. Le Tribunal des Prud'hommes a alors procédé par voie édictale, se contentant de l'affirmation de la partie demanderesse selon laquelle l'adresse indiquée dans la demande en paiement était la bonne, dès lors qu'elle ressortait d'une attestation de l'OCPM du mois d'août 2020. Or, cette attestation étant antérieure à la tentative de notification du mois d'octobre 2020, le Tribunal ne pouvait s'y satisfaire, ce d'autant moins qu'il avait eu connaissance du fait que l'intéressée était – d'après les indications de la Poste – partie de cette adresse. Le Tribunal aurait dû à tout le moins exiger qu'on lui soumette une attestation plus récente, postérieure à l'envoi recommandé non distribué. D'autres recherches utiles étaient par ailleurs raisonnablement exigibles pour localiser l'appelante, d'autant plus aisées à obtenir dans le cas d'espèce que les coordonnées de celle-ci (e-mail, numéro de téléphone portable) figuraient au dossier. Or, selon les éléments à la procédure, ni l'intimée, ni le Tribunal n'ont entrepris des démarches pour tenter de localiser l'appelante, après avoir appris que cette dernière avait quitté l'adresse indiquée dans la demande en paiement. Pour ces motifs, la notification par voie édictale, par avis dans la FAO du ______ 2020, de l'ordonnance du 9 octobre 2020 était viciée.

Le Tribunal a de plus notifié son jugement du 8 février 2021 directement par voie édictale, sans procéder à de nouvelles vérifications ni tenter une notification postale. Ce procédé est d'autant moins justifié qu'à la date de la publication dans la FAO, le ______ 2021, le Tribunal avait reçu de l'intimée un extrait du registre du commerce de la société dont l'appelante était l'associée gérante, indiquant que cette dernière était domiciliée à G______. Cette information justifiait d'autant plus qu'il soit procédé à des vérifications supplémentaires et à une tentative de notification par voie postale.

Il résulte de ces considérations que les notifications effectuées par le Tribunal par voie édictale (de la demande en paiement et du jugement) n'ont pas respecté les conditions posées par l'art. 141 CPC, de sorte que l'appelante a été condamnée au paiement d'un montant de 36'000 fr., plus intérêts, alors qu'elle n'a pas du tout pris part à la procédure de première instance. Cette procédure est donc entièrement viciée et, partant, nulle, l'appelante ayant eu connaissance de son existence bien après le prononcé du jugement, à réception du commandement de payer que l'intimée lui a fait notifier.

Dans la mesure où la nullité doit être relevée en tout temps, la personne concernée peut aussi l'invoquer en tout temps, dans le respect des règles de la bonne foi (art. 52 CPC), qui fixent une limite à l'invocation d'un vice de forme (arrêt du Tribunal fédéral 5A_699/2019 du 30 mars 2020 consid. 5.1). A cet égard, l'appelante a reçu une copie du jugement du 8 février 2021 par pli simple du Tribunal des Prud'hommes du 19 juillet 2021. Compte tenu de la suspension des délais du 15 juillet au 15 août (art. 145 CPC), il faut retenir que l'appelante a agi dans un délai raisonnable en invoquant la nullité du jugement par acte posté le 15 septembre 2021.

Au vu de ce qui précède, la Cour constate la nullité du jugement du 8 février 2021 et renvoie la cause au Tribunal des Prud'hommes pour nouvelle instruction de la demande en paiement déposée le 23 septembre 2020 par l'intimée et nouveau jugement. Le Tribunal devra reprendre l'instruction dès le début, en fixant à l'appelante un délai pour déposer une réponse écrite à la demande, au sens de l'art. 222 CPC.

La nullité du jugement du 8 février 2021 prive d'objet l'appel dirigé contre le jugement du 21 décembre 2021 déclarant irrecevable la demande de restitution formée le 15 septembre 2021.

3.             Compte tenu de la valeur litigieuse inférieure à 50'000 fr., il n'est pas perçu de frais judiciaires d'appel (art. 71 RTFMC).

Il n'est pas alloué de dépens devant le Chambre d'appel des prud'hommes (art. 22 al. 2 LACC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 5 :

Constate la nullité du jugement JTPH/80/2021 rendu le 8 février 2021 par le Tribunal des Prud'hommes dans la cause C/4938/2020.

Renvoie la cause au Tribunal des Prud'hommes pour nouvelle instruction et jugement dans le sens des considérants.

Constate que l'appel dirigé contre le jugement JTPH/485/2021 rendu le 21 décembre 2021 par le Tribunal des Prud'hommes dans la cause C/4938/2020 est devenu sans objet.

Dit qu'il n'est pas prélevé de frais judiciaires ni alloué de dépens.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Anne-Christine  GERMANIER, juge employeur; Monsieur Willy KNOPFEL, juge salarié; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.