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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/25462/2018

CAPH/76/2022 du 30.05.2022 sur JTPH/391/2020 ( OO ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 08.07.2022, rendu le 20.01.2023, REJETE, 4A_307/2022
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/25462/2018-5 CAPH/76/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 30 mai 2022

 

Entre

A______, domicilié Ministère des affaires étrangères, ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 1er décembre 2020 (JTPH/391/2020), comparant par Me Sämi MEIER, avocat, Luegisland 34c, 5610 Wohlen, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, comparant par Me Zoé SEILER, avocate, c/o Etude Renold Gabus-Thorens, boulevard des Philosophes 15, 1205 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

 

 

 

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPH/391/2020 du 1er décembre 2020, reçu par les parties le 2 décembre 2020, le Tribunal des prud'hommes a, notamment, condamné A______ [pays] à verser à B______ la somme de 325'788 fr.10 avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er avril 2018 (chiffre 4 du dispositif), condamné A______ à remettre à B______ un certificat de travail dûment signé conforme au certificat de travail du 8 août 2019, soit à la pièce 7 défenderesse (ch. 5), condamné A______ à verser 3'520 fr. à l’Etat de Genève à titre de frais judiciaires (ch. 7 et 8), les a compensés partiellement avec l’avance de frais de 3'440 fr. effectuée par B______ qui restait acquise à l’Etat de Genève (ch. 9), condamné A______ à verser les sommes de 80 fr. aux Services financiers du pouvoir judiciaire et 3'440 fr. à B______ (ch. 10 et 11), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 12) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 13).

B. a. Le 18 janvier 2021, A______ a formé appel de ce jugement, concluant principalement à ce que la Cour l'annule et déboute B______ de toutes ses conclusions avec suite de frais et dépens, et subsidiairement, renvoie la cause au Tribunal des prud’hommes dans le sens des considérants. Il a également requis l'établissement d'une "expertise judiciaire du droit A______ par un expert neutre".

Il a déposé un chargé de 8 pièces, dont une pièce nouvelle, soit la pièce n° 7, les autres pièces faisant déjà partie de la procédure. La pièce n° 7 produite est un extrait du droit A______ en langue [A______] (Legislative Regulation 2______ selon l'appelant), avec traduction libre des articles 1 et 15.

b. Le 8 mars 2021, B______ a conclu à la confirmation du jugement querellé avec suite de frais et dépens. Elle a également conclu à ce que la demande d’expertise formulée par A______ ainsi que la pièce nouvelle 8 (recte : 7) produite soient déclarées irrecevables.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées le 26 mai 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. B______, de nationalité suisse, née le ______ 1956, a été engagée par A______, en qualité de secrétaire au sein de sa Mission permanente auprès de l'ONU en 1978.

La carte de légitimation qui lui a été délivrée indique qu'elle est membre du personnel administratif de ladite Mission permanente.

b. Les parties ont, au fil du temps, signé plusieurs nouveaux contrats de travail soit en 1989, 1992 et 1997.

L’article 15 du contrat de travail de 1997, intitulé "Employment contract contractors in the Representations Protocols et Offices abroad" prévoyait le versement d'une indemnité de fin de rapports de service équivalente à la moitié d’un salaire mensuel pour chaque année de service, selon le dernier salaire perçu, d’un montant maximum plafonné à 40'000 C______ [monnaie A______] (ci-après : "C______ 40'000").

c. Selon attestation du 26 janvier 2017 établie par la Mission permanente de A______, le salaire de B______ s'est élevé, pour l'année 2016, à 7'488 fr. 18.

d. L'Office cantonal des assurances sociales (OCAS) a attesté, en date du 13 mars 2019, de ce que B______ était affiliée en tant que salariée d'un employeur non soumis à cotisation, du 1er septembre 1995 au 31 janvier 2018. A______ a admis qu'il n'avait effectué aucun versement aux assurances sociales en faveur de B______.

e. Le 12 juin 2017, l'Ambassadeur de A______ a adressé un courrier à B______ en ces termes :

"Permettez-moi en mon nom et au nom de mes collègues de la Mission Permanente de A______ auprès de Nations Unies et autres organisations internationales à Genève de vous exprimer mes sincères remerciements et ma considération pour tout ce que vous avez donné au cours de votre riche parcours professionnel durant plus de trois décades, et pour votre fidélité, votre collaboration et votre dévouement pour votre travail à la Mission. Je suis très fier de vous et de votre participation au travail au sein de notre groupe de travail à la Mission. Nous vous avons accordé notre confiance et vous avez prouvé que vous êtes digne de notre confiance et grâce à votre collaboration vous avez réussi à affronter beaucoup de défis et d'obstacles administratifs et logiciels, ce qui a eu des conséquences positives et de bons résultats au sein de la Mission. Malheureusement j'ai le regret de vous informer que je viens de recevoir des directives de notre Ministère des Affaires Etrangères stipulant de mettre fin à vos services à la Mission. Ci-inclus une lettre de l'avocat de la Mission Permanente (..)."

f. Par courrier de son conseil du 13 juin 2017, A______ a résilié le contrat de travail le liant à B______, avec effet au 30 septembre 2017. Il était précisé que le congé respectait les termes du contrat de travail et les dispositions du droit suisse et n'avait pas besoin d'être motivé. Compte tenu de l'ancienneté de l'employée supérieure à vingt ans, en vertu des arts. 339b CO et des articles 15 et 16 de son contrat de travail, elle était "éligible" au versement d’une indemnité de départ. Le courrier précisait encore : "En reconnaissance de vos services accomplis, mon Client vous accorde l’intégralité de la somme convenue".

f. B______ a été en incapacité de travail du 19 juin 2017 au 4 mars 2018.

g. Par courrier du 25 septembre 2017, B______ s’est opposée à son licenciement. Elle a relevé qu'elle était en incapacité de travail et a demandé que son employeur respecte les obligations légales prévues par l'art. 324a CO. Elle a également sollicité des précisions concernant les modalités de versement de la somme contractuellement convenue à titre d’indemnité de départ, qui était évoquée, sans être chiffrée, par son employeur. Elle représentait selon l’art. 16 de son contrat de travail un montant correspondant à un mois de salaire par année de service, soit la somme de 292'039.- fr. (7'488 fr. 18 x 39 années de services). Elle réclamait également l'établissement d'un certificat de travail intermédiaire.

h. Le 26 février 2018, la Mission permanente a établi un certificat de travail intermédiaire en faveur de B______, certifiant qu'elle était sérieuse dans son travail, coopérative avec ses collègues et soucieuse de faire de son mieux pour réaliser les objectifs de travail.

i. Par requête déposée au greffe de l’autorité de conciliation des prud’hommes le 24 septembre 2018, B______ a assigné A______ en paiement de la somme de 344'457 fr. 30 avec intérêts à 5% dès le 1er avril 2018.

Les parties n’étant pas parvenues à s’entendre lors de l’audience du 19 décembre 2018, B______ a, par demande ordinaire déposée au greffe du Tribunal des prud’hommes le 19 mars 2019, assigné A______ en paiement de la somme totale de 344'457 fr. 30, avec intérêts à 5% l’an dès le 1er avril 2018, se décomposant en la somme de 44'929 fr. 10 à titre de licenciement abusif et de 299'527 fr. 20 (7'488 fr. 18 x 40) à titre d’indemnité de départ. Elle a également sollicité de se voir remettre un certificat de travail conforme au document qu’elle avait préparé et remis à son employeur (produit en pièce 19).

Elle a préalablement requis la production, en main de son employeur, des preuves de paiement des indemnités de départ versées aux employés D______, E______ et F______. B______ a indiqué avoir travaillé comme personnel administratif local de la Mission permanente de A______ auprès de l’ONU à Genève du 1er juillet 1978 au 31 mars 2018. Au cours de son activité, plusieurs contrats de travail lui avaient été soumis pour signature, comme cela avait été le cas pour l’ensemble des employés de G______ et de la Mission auprès des Nations Unies, A______ souhaitant un contrat de travail standardisé pour tous ses employés. La Mission permanente conservait les exemplaires originaux et ne remettait pas toujours les copies aux employés. Le dernier contrat qui lui avait été remis, dont elle produisait un modèle vierge sous pièce 2 de son chargé dès lors qu’elle ne l’avait pas reçu en retour signé de son employeur, datait, à l’instar de tous les employés, de 2006 et était applicable au moment de son licenciement intervenu en juin 2017. L'art. 16 du contrat prévoyait qu’elle avait droit, à la fin des rapports de service, à une indemnité correspondant à un salaire mensuel pour chaque année de service, calculée sur le salaire mensuel de base mentionné à l'art. 13 al. 1 du contrat, à condition que les rapports de service aient duré plus de trois ans, disposition qui était quasi similaire à l’art. 84 de la loi A______ sur le travail, laquelle prévoyait à titre d'indemnité de départ le versement d'un demi mois de salaire par année d'ancienneté durant les cinq premières années de travail, puis d'un mois de salaire par année d'ancienneté. Son salaire de base selon l'art. 13 al. 1 de son contrat s'élevait à 7'488 fr. 18, dès lors qu'elle ne percevait aucun des paiements complémentaires prévus à l'art. 13 al. 2, soit notamment aucun 13ème salaire, ni heures supplémentaires, et qu'elle cotisait elle-même aux assurance sociales. Son employeur devait donc lui verser l'indemnité de départ contractuellement convenue à raison des longs rapports de service et de la lacune en matière de prévoyance professionnelle, laquelle représentait quarante mensualités de son dernier salaire de base. Alors qu'il avait indiqué dans son courrier de licenciement que l’entier de l’indemnité de départ lui serait versé, elle n’avait rien reçu.

Elle avait été licenciée deux ans avant la retraite et après trente-neuf ans de service, selon les instructions du Ministère des affaires étrangères de A______, alors que son employeur reconnaissait le travail qu’elle avait accompli durant toutes ces années dans des courriers élogieux. Aucun manquement à ses obligations professionnelles ne lui avait été reproché. Compte tenu de son âge, de son ancienneté, des faibles expectatives de retrouver un emploi, des motifs organisationnels de pure convenance invoqués, de l’absence de tout avertissement et de toute alternative au licenciement, de même que de la disproportion des intérêts en présence, son licenciement était abusif et une indemnité équivalente à six mois de salaire devait lui être octroyée pour résiliation abusive.

Elle réclamait également la remise d'un certificat de travail conforme à l'art. 330a al. 1 CO, que son employeur ne lui avait toujours pas adressé.

j. Par virement du 26 mars 2019, la Mission permanente de A______ a versé à B______ la somme de 10'589 fr. 33 à titre d’indemnité de fin de rapports de service, somme qui lui a été retournée par l’intéressée le 2 avril 2019.

k. A______ a conclu le 12 juillet 2019 au déboutement de B______ de toutes ses conclusions.

Il a contesté la signature d'un nouveau contrat de travail en 2009 et a allégué que le contrat de travail de 1978 qui liait les parties avait certes été régularisé à plusieurs reprises mais qu'il avait toujours repris la teneur de l'article 15 du contrat de base, précisant qu’au terme de ses fonctions, la salariée était éligible à une prime équivalente à un demi mois de salaire par année d’ancienneté, calculée sur le dernier salaire mensuel perçu, mais plafonnée à C______ 40'000, soit environ 10'600 fr. Une somme de 10'589 fr. 33 avait d’ailleurs été versée à B______ à ce titre, laquelle avait renoncé au versement de toute indemnité en retournant cette somme. Le contrat produit par l'employée sous pièce 2 de son chargé n’avait jamais été régularisé et elle ne pouvait donc pas s'en prévaloir. Il a encore fait valoir que la Mission permanente à Genève et les Ambassades et Consulats étaient des entités parfaitement distinctes, la première étant rattachée à l’ONU, et que les contrats utilisés dans ces entités n'étaient pas identiques. Il a reconnu que les contrats des personnes engagées aux alentours de l’année 2012 prévoyaient effectivement des indemnités de départ d’un mois de salaire par année d’ancienneté, ce qui s’expliquait par un changement de politique interne à la Mission permanente, mais cette clause ne s’appliquait pas à B______ qui n’était pas partie à ces contrats. Il a contesté l’application du Décret [A______] no. 1______ sur lequel se fondait l'employée, qui était applicable uniquement dans le secteur privé en A______. Les relations de travail entre les missions à l'étranger et le personnel non A______ étaient, quant à elles, régies par la "Legislative Regulation 2______", laquelle prévoyait à son article 15, reproduit dans son écriture, que les indemnités de fin de service étaient plafonnées à C______ 40'000.

B______ avait reçu plusieurs avertissements pour retards et absences injustifiées. Elle avait accusé réception de ces avertissements en y apposant sa signature. Son licenciement ne pouvait en outre être qualifié d’abrupt dans la mesure où elle avait été licenciée le 13 juin 2017 et que son contrat avait pris fin le 31 mars 2018. L'employeur avait toujours respecté ses engagements.

Il en voulait pour preuve les attestations produites à l'appui de sa réponse, la première de J______, du 17 septembre 2018, lequel confirmait avoir reçu, suite à sa démission volontaire, la somme de 10'596 fr. 28 représentant toutes les prestations de fin de service, assurances sociales, assurance-maladie et heures supplémentaires incluses, et la seconde, de K______, du 9 janvier 2019, confirmant être employé de la Mission Permanente en qualité de chauffeur et être "éligible" à la fin de la relation contractuelle au versement d’une indemnité de départ d’un demi mois de salaire avec limitation prévue selon contrat à C______ 40'000. La situation des employés de G______ n'était pas identique à celle des employés de la Mission permanente. Compte tenu des arrêts de travail de l'employée, le congé avait pris effet le 31 mars 2018, date jusqu'à laquelle le salaire de celle-ci lui avait été versé. Un certificat de travail en bonne et due forme avait déjà été remis à B______ le 26 février 2018. A______ contestait le caractère abusif du licenciement, lequel était justifié par les nombreux retards et manques de ponctualité de l'intéressée et compte tenu de la décision prise par le Ministère des affaires étrangères de diminuer les effectifs de la Mission permanente. Il n'était pas tenu légalement à un entretien préalable de résiliation avec la salariée avant de notifier la résiliation de son contrat, de sorte que le congé n'était pas abusif.

l.
Le 20 août 2019, la Mission Permanente de A______ a adressé à B______ un certificat de travail daté du 8 août 2019, versé à la procédure.

m. Lors de l'audience de débats d'instruction du 30 septembre 2019, B______ a indiqué que la teneur du certificat de travail du 8 août 2019 lui convenait, mais qu'il n'était pas signé.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a notamment ordonné la production par A______ du dernier contrat de travail signé concernant B______ selon le modèle qu’elle avait produit en pièce n° 2 de son chargé, ainsi que les preuves de paiement des indemnités de départ de D______, E______ et F______.

n. Dans le délai imparti, A______ a indiqué être dans l’impossibilité de produire le contrat de travail sollicité, celui-ci n'ayant jamais été régularisé. Quant aux employés D______, E______ et F______, ils n’avaient jamais travaillé pour la Mission permanente de A______, mais pour G______ ou H______, soit des entités rattachées à [l'organisation internationale] J______ et non à l’ONU, de sorte que leurs contrats étaient différents de celui de B______. Il n'a pas produit les documents requis.

o. Entendue par le Tribunal le 3 février 2020, B______ a précisé avoir signé la dernière version de son contrat en 2009 ou 2010, laquelle était identique à celle produite en pièce n° 2 de son chargé, qui était un exemplaire obtenu auprès d’un collègue après son licenciement.

p. Plusieurs employés de A______ ont été entendus comme témoins par le Tribunal.

p.a. Le témoin L______ était en litige avec A______. Il avait quitté ses fonctions à l’âge de la retraite, fin septembre 2017. Le dernier contrat qu’il avait signé datait de 2009 et était identique à celui produit par B______. Avant cette date, il avait signé environ six contrats. En règle générale, l’employé signait en premier le contrat, puis il était envoyé au Ministère des affaires étrangères pour régularisation. L’employé recevait dans les trois à quatre mois une copie régularisée. Il avait reçu une copie de tous les contrats, sauf celui de 2009. Jusqu’en 2013, en sa qualité de secrétaire à la Mission permanente de A______, il avait connaissance des salaires des employés. Il avait entendu que D______, qui avait quitté la mission en 2013, avait perçu une indemnité de départ de 40'000 fr. à 45'000 fr. Quant à F______ et E______, qui avaient travaillé pour H______, ils avaient perçu des indemnités de l’ordre de 60'000 fr. H______ faisait partie de la Mission permanente et les employés avaient les mêmes contrats. Le contrat produit par B______ s’appliquait à tous les employés de la mission, dans la mesure où tout le monde l’avait reçu et signé en même temps.

p.b. Le témoin F______ avait travaillé de 2008 à 2016 en alternance pour H______ et pour la Mission de A______ auprès de I______. Elle avait signé un seul contrat de travail en 2008, puis un complément en 2015, lequel prévoyait une indemnité de départ équivalente à un salaire mensuel par année de service. Les deux entités faisaient partie du Ministère du commerce de A______. Une information avait été faite à tous les employés leur précisant qu’un complément à leur contrat allait leur être distribué et que l’indemnité ne serait plus plafonnée. Lorsqu’elle avait quitté la Mission en 2016, elle avait reçu l'indemnité convenue à son départ, à savoir huit mois de son dernier salaire, toutes indemnités comprises. Son collègue E______ qui avait travaillé pour H______ lui avait indiqué avoir également perçu une indemnité non plafonnée. Elle n’avait jamais travaillé pour la Mission de A______ auprès de l’ONU. Elle avait reçu une copie de son contrat de travail mais cela n’était pas une généralité et dépendait de l’Ambassadeur en place et du chef hiérarchique.

Elle a fait parvenir au Tribunal une copie vierge de son contrat de travail prévoyant à son article 16 une indemnité de fin de service correspondant à un mois de salaire par année de service, ainsi qu’un extrait de son compte bancaire du 1er avril 2016 faisant apparaître le versement d’une indemnité de fin de service de 58'968 fr. 78 en date du 16 mars 2016.

p.c. Le témoin M______ était employée auprès de la Mission de A______ auprès de l’ONU depuis 2001. Elle avait signé depuis son engagement deux contrats, dont le dernier en 2008 ou 2009. Elle n’avait jamais reçu copie de ce contrat signé. Tous les employés avaient signé ce contrat qui prévoyait une indemnité de départ non plafonnée. B______ qui travaillait à la mission à cette époque avait également dû signer cette version. Son collègue, D______, qui avait débuté en même temps qu’elle et qui avait quitté la Mission entre 2011 et 2013, avait perçu une indemnité de départ équivalente à un mois de salaire par année de service, soit un montant dépassant largement 10'000 fr. Elle avait été licenciée en 2013, à l’occasion de quoi une indemnité, dont elle ne connaissait pas le montant, lui avait été proposée. Son licenciement avait cependant été annulé mais elle n’avait pas signé de nouveau contrat par la suite.

p.d. Le témoin N______ était employée auprès de la Mission de A______ auprès de l’ONU depuis 1990. Elle avait signé plusieurs contrats, sans pouvoir être en mesure d’en préciser le nombre, dont le dernier une dizaine d’années auparavant, dont elle n’avait pas reçu copie. Elle se souvenait que le dernier contrat avait pour but de déplafonner les indemnités de départ qui étaient désormais d’un mois de salaire par année de service à partir de la cinquième année. Elle n’était pas en mesure de confirmer que le dernier contrat correspondait à celui produit par B______, dès lors qu’elle n’avait vu le document en question que cinq minutes avant sa signature. Elle ignorait la raison pour laquelle elle n’avait pas reçu copie de son dernier contrat, la régularisation prenant généralement quelques mois. Tous les employés de la Mission avaient cependant signé le nouveau contrat, identique, en même temps qu’elle. Elle avait été licenciée en 2013, puis réengagée sans signature d’un nouveau contrat. Elle n’avait pas quitté la Mission de sorte que la question d’une indemnité de départ ne s’était pas posée.

p.e. Le témoin O______ était employée de A______ auprès de l'ONU depuis 1989. Elle avait signé plusieurs contrats, sans pouvoir en préciser le nombre, et ne se souvenait plus de la date de signature du dernier, dont elle n’avait jamais reçu de copie, alors qu’elle avait reçu copie des précédents. Elle ignorait si les autres employés l’avaient signé en même temps qu’elle et en quoi il différait des précédents.

p.f.
Le témoin P______ était employé auprès de la Mission de A______ auprès de l’ONU depuis 1984. Il avait signé environ trois contrats depuis son engagement dont le dernier en 2008 ou 2009. La seule modification importante apportée par cette version était l’indemnité de départ d’un mois par année de service avec suppression du plafonnement. Tout le personnel présent à la Mission en 2008/2009 avait signé ce nouveau contrat. Il n’en avait jamais reçu la copie signée.

p.g. Le témoin Q______ était employé de la Mission de A______ auprès de l’ONU depuis 1985. Il avait signé deux contrats depuis son engagement, dont le dernier, il y avait plus de six ans. Il l’avait signé sans le lire mais son responsable lui avait indiqué qu’il prévoyait une indemnité de départ d’un mois de salaire par année de service. Il ne se souvenait pas s’il y avait un plafonnement. Tout le personnel avait signé ce nouveau contrat en même temps. Alors qu’il avait reçu la copie du premier contrat signé dans un délai de trois mois environ, cela n’avait pas été le cas du dernier.

q. Les parties ont déposé des plaidoiries écrites, respectivement les 11 et 13 septembre 2020, persistant dans leurs conclusions respectives. A______ a soutenu dans celles-ci, pour la première fois, que même si la signature d'un contrat en 2009 devait être admise, le salaire qui devait servir de base au calcul de l'indemnité de départ était donc celui qui prévalait en 2009, soit un salaire de 4'750 fr. et non le dernier salaire de l'employée.

r. B______ a déposé des déterminations le 8 octobre 2020, s'opposant notamment à ce nouvel allégué, suite à quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

D. Dans son jugement, le Tribunal a retenu que les relations entre les parties étaient soumises au droit suisse. L'employeur n'ayant pas produit le dernier contrat de travail de l'employée concernée, ni les autres documents requis par le Tribunal, le Tribunal était fondé à se baser sur le contrat de travail vierge versé à la procédure par l'employée, laquelle indiquait que l'exemplaire signé était demeuré en mains de son employeur. Les nombreux témoins entendus avaient attesté que l’employeur n’avait pas remis systématiquement à ses employés une copie de leur contrat de travail signé. Ils avaient également confirmé la teneur de l'art. 16 du contrat produit par B______, duquel il ressortait que l'employeur s’était engagé à verser une indemnité de départ équivalente à un mois de salaire pour chaque année de service rendue, sans limitation dans le temps. Le témoin F______ avait également remis au Tribunal un exemplaire vierge de son propre contrat de travail, contenant à son art. 16 la même disposition que celle figurant sur celui de la demanderesse, et confirmé avoir reçu, lors de son départ de la Mission en 2016, une indemnité équivalant à un mois de salaire par année de service. Le fait que certains témoins travaillaient pour des départements différents de celui de l'intimée n'était pas déterminant car leur employeur était le même à savoir l'Etat de A______. Le versement, le 26 mars 2019, d'une indemnité de départ de 10'596 fr. 28 par l'employeur n'était également pas pertinent, cette somme ayant été versée après le début de la procédure et pour les besoins de la cause. Il n'était pas contesté que l'employée, âgée de 62 ans, avait travaillé 39 ans et 6 mois au service de l'employeur et que son dernier salaire mensuel s'élevait à 7'488 fr. 18 net, de sorte que l'indemnité pour longs rapports de service due s'élevait, selon l’art. 16 du contrat de travail, à 295'783 fr. 10 (39.5 x 7'488 fr. 18).

S'agissant de l'indemnité pour licenciement abusif, le Tribunal a retenu que l'employée avait été licenciée à l'âge de 62 ans, soit deux ans avant la retraite, et après plus de 39 ans de service, sans qu'aucun motif en lien avec ses performances ou son comportement n'ait été avancé par l'employeur. Ce n'est qu'au cours de la procédure que ce dernier avait allégué que l'employée aurait reçu des avertissements pour retards et absence injustifiés, ce qu'il n'avait cependant aucunement prouvé et était en totale contradiction avec les pièces produites par l'employée qui relevaient qu'elle avait donné entière satisfaction et contenait des remerciements pour le travail qu'elle avait accompli. Son licenciement du 13 juin 2017, intervenu abruptement, sans aucun avertissement préalable et sans aucune tentative de reclassement, constituait ainsi un licenciement abusif. L'indemnité en découlant devait être fixée à 30'000 fr. net, montant qui tenait compte, d'une part, du caractère punitif de cette indemnité, de l'âge de l'employée, de son ancienneté, de l'absence de toute faute professionnelle et de la manière dont le licenciement s'était déroulée et, d'autre part, de l'indemnité de départ conséquente qui lui était allouée pour longs rapports de travail.


S'agissant de la délivrance d'un certificat de travail, le Tribunal a considéré que cette prétention était fondée, l'employée ayant reçu, en cours de procédure, un certificat daté du 8 août 2019, dont le contenu lui convenait, mais qui était dépourvu de la signature de son employeur. L'employée étant en droit de recevoir un certificat de travail signé, l'employeur devait être condamné à le lui remettre.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel, écrit et motivé, formé dans les trente jours, est recevable contre les décisions finales de première instance, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308, 311 CPC).

1.2 En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. de sorte que la voie de l'appel est ouverte. L'appel a été en outre interjeté dans le délai et selon les formes prévues par la loi (art. 311 CPC), de sorte qu'il est recevable.

1.3 La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2. 2.1 Selon l'article 317 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte dans le cadre d'un appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (al. 1). La demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies et si la modification repose sur des faits ou moyens de preuve nouveaux (al. 2).

A teneur de l'art. 227 al. 1 CPC, la demande peut être modifiée si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et que l'une des conditions suivantes est remplie : a. la prétention nouvelle ou modifiée présente un lien de connexité avec la dernière prétention; b. la partie adverse consent à la modification de la demande.

Selon l'art. 229 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont admis aux débats principaux que s'ils sont invoqués sans retard et qu'ils remplissent l'une des conditions suivantes : a. ils sont postérieurs à l'échange d'écritures ou à la dernière audience d'instruction (novas proprements dits); b. ils existaient avant la clôture de l'échange d'écritures ou la dernière audience d'instruction mais ne pouvaient être invoqués antérieurement bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (novas improprements dits) (al. 1).

S'il n'y a pas eu de second échange d'écritures ni de débats d'instruction, les faits et moyens de preuves nouveaux sont admis à l'ouverture des débats principaux (art. 229 al. 2 CPC).

2.2.1 En l'espèce, la pièce 7 nouvelle produite par l'appelant, soit un extrait de droit A______ (legislative Regulation 2______ selon ses allégués), est irrecevable car elle aurait déjà pu être produite en première instance. L'appelant n'explique d'ailleurs pas les raisons pour lesquelles il n'a pas produit cette pièce devant les premiers juges. Cette pièce est, quoi qu'il en soit, dénuée de toute pertinence pour l’issue du litige.

2.2.2 L'appelant formule pour la première fois devant la Cour une demande relative à l'ordonnance d'une expertise du droit A______. L’appelant ne peut être suivi lorsqu’il soutient dans sa réplique que sa requête d'expertise ne serait pas tardive puisqu’il ne pouvait pas savoir que le Tribunal appliquerait le Décret A______ no. 1______, même indirectement, à son raisonnement. Le Tribunal n’a en effet jamais appliqué le droit A______, mais au contraire le droit suisse, dont l’application n’a au demeurant jamais été contestée par l’appelant devant les premiers juges, et n’est pas remise en question devant la Cour.

La requête d'expertise, tardive au regard des exigences de l'art 317 CPC, est par conséquent irrecevable. Elle est par ailleurs dénuée de toute pertinence, compte tenu de l'application du droit suisse au litige opposant les parties.

2.2.3 Les allégations de l'appelant relatives au fait qu'il conviendrait de prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de départ de l'intimée son salaire mensuel de base de 2009, soit une somme de 4'750 fr., formulées, pour la première fois, respectivement dans ses plaidoiries finales devant le Tribunal et devant la Cour, sont également tardives et irrecevables car elles ne répondent pas aux conditions des articles 317, 227 et 229 CPC.

3. L'appelant reproche au Tribunal une mauvaise appréciation des faits, en violation de l'art. 8 CC, et des preuves administrées, concernant l'indemnité de départ applicable à la relation contractuelle. Il fait valoir que l’intimée n’a pas prouvé avoir signé en 2009 un contrat prévoyant une indemnité de départ équivalente à un mois de salaire par année de service. Les témoins L______ et P______ ont confirmé que le modèle de contrat versé à la procédure n’avait pas été contresigné par l’employeur, de sorte qu’il n’avait aucune valeur. Le Décret [A______] no. 1______ n'était pas applicable in casu car il régissait uniquement les relations de travail de nature privée en A______ et non celles de nature publique à l'étranger. Les relations entre les missions à l'étranger et le personnel non A______ étaient régies par la "Legislative Regulation 2______", prévoyant que les indemnités de fin de service sont plafonnées à C______ 40'000. Rien ne permettait de retenir que tous les employés des représentations A______ à l'étranger étaient soumis aux mêmes dispositions contractuelles. La situation du témoin F______ n'était pas la même que celle de l'intimée, car elle n'était pas employée par la Mission permanente auprès de l’ONU mais par G______ auprès de J______, et n'avait pas le même nombre d'années de service. Le témoignage L______ n’avait aucune valeur puisque cet employé était en litige avec l’appelant. L’indemnité arrêtée par le Tribunal était exorbitante et nullement justifiée au regard du très bon salaire de 7'488 fr. 18 perçu par l’intimée.

3.1.1 A teneur de l’article 339b al. 1 CO, si les rapports de travail d'un travailleur âgé d'au moins 50 ans prennent fin après vingt ans ou plus, l'employeur verse au travailleur une indemnité à raison de ces longs rapports de travail.

Selon l’article 339c al. 1 CO, le montant de l'indemnité peut être fixé par accord écrit, contrat-type de travail ou convention collective, mais ne doit pas être inférieur au montant du salaire pour deux mois.

L’indemnité de départ vise en premier lieu un but de prévoyance (ATF 115 II 30, JT 1989 I 601).

3.1.2 Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de rappeler dans un arrêt récent (4A_156/2021 du 16 juillet 2021 rendu dans une affaire connexe au présent cas, dans lequel il a reconnu l'existence d'un contrat de travail malgré l'absence de production de celui-ci par les parties), qu'il convenait en premier lieu de rechercher la réelle et commune volonté des parties, et en a rappelé les principes. En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 II 93 consid. 5.2.1 p. 97). Lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante (échange de manifestations de volonté concordantes), qu’elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait ; si au contraire, alors qu’elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s’entendre, ce dont elles étaient d’emblée conscientes, il y a un désaccord patent et le contrat n’est pas conclu.

Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante, mais que l’une d’elles, ou toutes deux n’ont pas compris la volonté interne de l’autre, ce dont elles n’étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent. Le contrat est alors conclu dans le sens objectif que l’on peut donner à leur déclarations de volonté selon le principe de la confiance ; en pareil cas, l’accord est de droit (ou normatif) (cf. ATF 144 III 93 consid. 5.2.1).

En procédure, le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales-, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu’il s’agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur


des parties établissant quelles étaient à l’époque les conceptions des contractants eux-mêmes.

L’appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. S’il ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties- parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes- ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté exprimée par l’autre à l’époque de la conclusion du contrat- ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu’elle l’affirme en procédure, mais doit résulter de l’administration des preuves-, le juge doit recourir à l’interprétation normative (ou subjective), c’est-à-dire rechercher leur volonté objective en déterminant le sens que, d’après les règles de la bonne foi, chacune d’elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l’autre. On parle d’une interprétation selon le principe de la confiance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_156/2021 du 16 juillet 2021 consid. 3.2; ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les arrêts cités).

3.1.3 En application de l'art. 157 CPC, le Tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées.

Selon la doctrine et la jurisprudence, le droit privé fédéral prescrit, dans son champ d’application, une certaine règle quant au degré de la preuve. Il en résulte qu’une preuve est considérée comme apportée lorsque le juge est convaincu de la réalité d’une allégation. Il doit être convaincu, d’un point de vue objectif, de l’existence du fait concerné. Cette existence ne doit cependant pas être établie avec certitude; il suffit que d’éventuels doutes paraissent insignifiants. En revanche, la simple vraisemblance prépondérante que le fait allégué s’est bien produit ne suffit pas. La fonction de la règle concernant le degré de la preuve est d’aider à la réalisation du droit matériel dans le procès. Des exigences trop élevées, ou inégales, quant au degré de la preuve, ne sauraient faire échec à l’application du droit. La loi elle-même, d’une part, et la jurisprudence et la doctrine, d’autre part, admettent des exceptions à la règle de la preuve, dans lesquelles la vraisemblance prépondérante ou la simple vraisemblance sont considérées comme suffisantes. Elles reposent sur l’idée que les difficultés de preuve qui se présentent typiquement dans certaines situations ne doivent pas faire échec à la réalisation du droit. Une réduction du degré de preuve exigible suppose toutefois qu’en raison de la nature même de la cause, une preuve stricte ne soit pas possible ou ne puisse être exigée. Dans son résultat, cette réduction ne doit pas conduire à un renversement du fardeau de la preuve. La partie chargée de la preuve doit alléguer et prouver, autant que possible et autant qu’on peut l’exiger, toutes les circonstances qui indiquent que les faits allégués se sont bien produits.

(ATF 128 III 271 consid. 2b/aa, JdT 2003 I 606).

3.1.4 Selon l'art. 164 CPC, si une partie refuse de collaborer sans motif valable, le tribunal en tient compte dans l'administration des preuves.

L'art. 164 CPC ne précise pas les conclusions que le tribunal doit tirer, dans l'appréciation des preuves, d'un refus de collaborer. Il n'est notamment pas prescrit que le tribunal devrait nécessairement en déduire que les allégués de la partie adverse sont véridiques. Au contraire, le refus injustifié de collaborer ne constitue qu'une circonstance parmi d'autres à prendre en considération dans la libre appréciation des preuves (ATF 140 III 264). consid. 2.3).

3.2.1 En l'espèce, il n'est pas contesté que le présent litige est soumis au droit suisse en application de l'art. 121 al. 1 LDIP, aucune élection de droit n'ayant été convenue entre les parties. Le Tribunal n'ayant pas appliqué le droit A______, les considérations de l'appelant à ce sujet sont sans pertinence, outre le fait qu'elles s'appuient sur des allégués non prouvés et pour certains tardifs, comme il a été examiné ci-avant.

3.2.2 Il convient de dégager, en application des principes rappelés supra, la réelle et commune volonté des parties concernant l’indemnité de départ de l’intimée. Bien que l’appelant conteste avoir signé un nouveau contrat avec l’intimée modifiant la clause concernant l’indemnité de fin de leurs rapports contractuels, laquelle n’est pas contestée dans son principe, l’intimée, contrairement à ce que l'appelant prétend, a bel et bien apporté la preuve de l'existence et de la teneur de la nouvelle clause figurant à son contrat de travail.

En premier lieu, les allégations de l'intimée selon lesquelles elle a signé en 2009, comme les autres employés de la Mission permanente de A______ auprès de l'ONU un nouveau contrat de travail dont elle n'a pas reçu copie, ont été confirmées par les témoins L______, F______, M______, N______, O______, P______ et Q______, soit par tous les témoins entendus par le Tribunal. Ceux-ci ont en effet déclaré que tous les employés de la mission avaient signé un nouveau contrat en 2009, mais qu’ils n’avaient jamais reçu la copie de ce contrat en retour signé par leur employeur. Le fait que le témoin L______ était en litige avec l'appelant au moment de son audition ne suffit pas à ôter toute crédibilité à son témoignage, qui est clair et cohérent, bien au contraire, son témoignage étant par ailleurs corroboré par les autres témoins, lesquels ne sont pas en litige avec leur employeur et pour bon nombre encore en place.

Dans la mesure où il est établi qu'un contrat, dont l'intimée n'a pas reçu copie, a été signé entre les parties en 2009, il incombait à l'appelant de déférer à l'injonction du Tribunal de produire ce contrat, ce qu'il n'a pas fait. Ce faisant, il a contrevenu à son obligation de collaboration, ce dont il convient de tenir compte dans l'appréciation des preuves.

En second lieu, les témoins L______, F______, M______, N______, P______ et Q______ ont confirmé les allégations de l'intimée, à savoir que le nouveau contrat de travail qu'ils avaient signé prévoyait le versement d’une indemnité de départ d’un mois de salaire par année de service, sans plafonnement. Les témoins L______, M______, N______, P______ et Q______ ont par ailleurs certifié que tout le personnel présent à cette période à la mission avait reçu et signé ce contrat. Ce qui précède est également corroboré par les déclarations du témoin F______ qui a affirmé avoir reçu, à la fin de son contrat, une indemnité correspondant à un mois de son dernier salaire pour chaque année de service effectuée. Ce témoin a, de surcroît, remis au Tribunal une copie (vierge) du contrat de travail qu’elle avait reçu de son employeur prévoyant à son article 16 le versement d’une indemnité de départ de fin de service correspondant à un mois de salaire par année de service, ainsi qu’un extrait de son compte bancaire faisant apparaître un versement reçu à ce titre de 58'968 fr. 68, soit un montant largement supérieur à la somme de C______ 40'000, correspondant à 10'600 fr environ, que l’appelant soutient être le montant plafonné de l'indemnité de départ. Les témoins L______, F______ et M______ ont également confirmé que les employés D______ et E______ avaient reçu des indemnités de départ supérieures à 10'000 fr., correspondant à un mois de salaire par année de service. L'ensemble des éléments du dossier, en particulier les nombreux témoignages concordants recueillis, permet de retenir que la teneur de la clause d'indemnité de départ contenue dans le nouveau contrat que l'appelant a fait signer à l'ensemble de ses employés, dont l'intimée, en 2009 est établie. Le degré de preuve exigé est atteint, le léger doute subsistant est insignifiant et ne suffit pas à renverser la conviction acquise par la Cour au vu des éléments recueillis dans la procédure.

La réelle et commune volonté des parties a donc pu être dégagée, à savoir qu’elles se sont entendues pour modifier en 2009 les conditions de travail en ce sens que l’indemnité de départ allouée à l’employée quittant la Mission permanente équivalait à un mois de salaire par année de service, sans aucun plafonnement. Il a également été prouvé que le contrat contenant cette nouvelle disposition n’a jamais été remis contresigné par l’appelant à l’intimée. L’appelant, qui a lui-même décidé de modifier le contrat des employés de la mission en leur soumettant à signature un exemplaire contenant la modification concernant l’indemnité de départ qu’il a lui-même rédigée, ne saurait, sous peine d’agir de mauvaise foi, prétendre qu’il ne serait pas d’accord avec son contenu, alors qu'il a manqué à son obligation de remettre à l’employé un exemplaire signé du nouveau contrat. Aucune violation de l’article 8 CC, ni aucune violation du droit à la preuve ne saurait par ailleurs être retenue en l’espèce, le Tribunal s’étant déclaré convaincu à l’issue de son instruction, à l’instar de la Cour, de la teneur de l’accord de 2009, en les termes exposés par l’intimée.

Le fait que certains témoins travaillaient pour la Mission auprès de I______ et [pour] H______ de l'appelant, et non pour sa Mission permanente auprès de l'ONU n'est pas déterminant. En effet, comme l'a relevé le Tribunal, toutes ces entités, qui représentent l'appelant, n'ont pas de personnalité juridique distincte de celle de ce dernier. Le témoin L______ a d’ailleurs confirmé que H______ faisait partie de la mission et que les employés avaient les mêmes contrats. H______ de l'appelant fait partie de la Mission permanente auprès des Nations unies de celui-ci, c’est en vain qu’elle tente de faire une distinction entre les deux. L'intitulé du contrat de 1997 produit mentionne qu'il s'agit d'un contrat de travail destiné aux employés des représentations de A______ à l'étranger, ce qui confirme également qu'aucune distinction du point de vue des contrats régissant les rapports de travail n'était faite par l'appelant entre les employés des différentes entités le représentant à Genève.

Le fait que certains témoins aient moins d'années d'ancienneté que l'intimée n'est également pas déterminant, puisqu’il ressort des enquêtes que l’indemnité n’est pas limitée dans le temps et que certains témoins, qui ont indiqué avoir reçu un contrat prévoyant la clause d’indemnité modifiée, ont une ancienneté équivalente, bien que de quelques années inférieures, à celle de l’intimée (N______, O______ et P______).

Quant au montant de l’indemnité, que l’appelant qualifie d’exorbitant « d’autant que les parties avaient convenu d’un très bon salaire de 7'488 fr. 18 », il n’explique pas pour quel motif il serait excessif, ni quelle conséquence il faudrait en tirer. Ce montant étant prévu contractuellement, il n’y a pas lieu de le réduire. Au demeurant, c’est à juste titre que le Tribunal a relevé que, dans la mesure où l’intimée n’avait pas cotisé à la prévoyance professionnelle pendant ses quarante années de service, le montant qui lui était accordé était adéquat au regard du but de prévoyance de l’indemnité de départ.

L'art. 16 du contrat de travail convenu entre les parties en 2009 prévoit que l'indemnité de départ de l'employée correspond à un mois du salaire pour chaque année de service. Comme relevé supra les allégations de l'appelant selon lesquelles le salaire à prendre en considération pour le calcul serait celui de 2009, en 5'410 fr. par mois, et non le dernier salaire versé, en 7'488 fr. 18 par mois, formulées pour la première fois dans ses plaidoiries finales et en appel, sont tardives. En tout état de cause, la réalité de ces allégations n'est étayée par aucun élément du dossier et, qui plus est, sont contredites par les déclarations du témoin F______ qui a indiqué avoir reçu une indemnité de départ calculée sur la base de son dernier salaire, toutes indemnités comprises.

Il est par ailleurs dénué de sens de prétendre que l'intimée aurait renoncé à ses droits en raison du fait qu'elle a retourné à l'appelant le montant de 10'589 fr. 33 qu'il lui a versé à titre d'indemnité de départ, alors qu'elle réclamait l'indemnité contractuelle convenue entre les parties dans le cadre de la procédure qu'elle a intentée et que le versement opéré a été fait en cours de procédure et pour les besoins de la cause. L'appelant n'a d'ailleurs pas formé de critique à l'égard du raisonnement tenu par le Tribunal qui a estimé que l'intimée n'avait pas renoncé à ses droits pour ces motifs. Son grief est donc infondé.
L'appelant n'a de même aucunement prouvé qu'il aurait changé de pratique en 2013 dans l'élaboration de ses contrats, ce qui serait au demeurant sans incidence sur le cas d'espèce puisque la réelle et commune volonté des parties en présence a été établie, comme exposé supra.

C'est ainsi à juste titre que le Tribunal a fixé l'indemnité de départ de l'intimée à 295'733 fr. 10, correspondant à 39 ans et demi de service auprès de son employeur (7'488 fr. 18 x 39,5).

4. L’appelant conteste le caractère abusif du congé notifié. Le licenciement de l’intimée n’était pas justifié par son âge mais par la qualité insuffisante de ses services et diverses mises en garde restées sans effet, et dans un contexte de réduction des effectifs de la Mission permanente. L'intimée n'a pas été licenciée abruptement, un entretien préalable au licenciement n'étant pas obligatoire.

4.1 Le contrat de travail conclu pour une durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties (art. 335 al. 1 CO). En droit suisse du travail prévaut la liberté de résiliation, de sorte que, pour être valable, un congé n’a en principe pas besoin de reposer sur un motif particulier. Le droit fondamental de chaque cocontractant de mettre unilatéralement fin au contrat est cependant limité par les dispositions sur le congé abusif (art. 336 ss CO, ATF 136 III 513 consid. 2.3 ; 131 III 535 consid. 4.1).

4.1.1 L'art. 336 al. 1 et 2 CO énumère des cas dans lesquels la résiliation est abusive. Cette liste n'est pas exhaustive; elle concrétise avant tout l'interdiction générale de l'abus de droit. Un congé peut donc se révéler abusif dans d'autre situations que celles énoncées par la loi; elles doivent toutefois apparaître comparables, par leur gravité, aux hypothèses expressément envisagées (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 132 III 115 consid. 2.1; 131 III 535 consid. 4.2).

Ainsi, le caractère abusif du congé peur résider dans le motif répréhensible qui le sous-tend, dans la manière dont il est donné, dans la disproportion évidente des intérêts en présence, ou encore dans l'utilisation d'une institution juridique de façon contraire à son but (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 132 III 115 consid. 2.2 et 2.4). Un licenciement pourra être abusif si l'employeur exploite de la sorte sa propre violation du devoir imposé par l'art. 328 CO de protéger la personnalité du travailleur (ATF 125 III 70 consid. 2a). Un licenciement peut également être tenu pour abusif lorsqu'il répond à un motif de simple convenance personnelle de l'employeur (ATF 132 III 115 consid. 2; 131 III 535 consid 4;
125 III 70 consid. 2).

4.1.2 Est en particulier abusif le congé donné par une partie pour une raison inhérente à la personnalité de l’autre, à moins que cette raison n’ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise (art. 336 al. 1 let. a CO). Ainsi, s’il est établi qu’une situation conflictuelle sur le lieu de travail due au caractère difficile d’un employé, nuit notablement au travail en commun dans l’entreprise, le congé donné à ce travailleur n’est pas abusif, à condition toutefois que l’employeur ait pris toutes les mesures que l’on pouvait attendre de lui pour désamorcer le conflit. Cette exigence repose sur le devoir de l'employeur de protéger et de respecter, dans les rapports de travail, la personnalité de ses travailleurs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_130/2016 du 25 août 2016 et les références citées; ATF 132 III 115 consid. 2.2; 125 III 70 consid. 2c).

4.1.3 En application de ces principes, le Tribunal fédéral a admis le caractère abusif du licenciement d’un monteur en chauffage âgé de 63 ans prononcé sans prévenir à quelques mois de la retraite, après 44 ans de loyaux services, au motif que cet employé, comme d'autres, avait des difficultés relationnelles avec un cadre qui n’était pas son supérieur direct et qu’il avait, comme d’autres, une position critique envers des mesures de rationalisation introduites dans l’entreprise. Il a reproché à l’employeur de ne pas avoir fait la moindre tentative pour désamorcer le conflit, a considéré que le fonctionnement de l’entreprise ne méritait pas une telle mesure et qu’une solution socialement plus supportable pour l’intéressé n’avait pas été recherchée et surtout a relevé le devoir d’assistance particulier de l’employeur envers un employé qui se trouvait à quelques mois de la retraite et avait travaillé 44 ans au service de la même entreprise en donnant satisfaction (ATF 132 III 115 consid. 5).

Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de relever que le cas de l’ATF 132 III 115 est exceptionnel, voire extrême, et qu’il faut tenir compte de toutes les circonstances du cas particulier et non s’en tenir au seul âge du collaborateur pour décider du caractère abusif ou non d’une résiliation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_60/2009 du 3 avril 2009 consid. 3.2 ; 4A_419/2007 du 29 janvier 2008 consid. 2.5).

Ainsi les principes découlant de l'ATF 132 III 115 ne sauraient faire systématiquement obstacle au licenciement d'un collaborateur d'un certain âge ayant œuvré durant de longues années au service du même employeur, lorsque le rendement du travailleur diminue à tel point qu'il n'est plus en mesure d'exécuter à satisfaction les tâches qui lui sont confiées, ni d'assumer une autre occupation compatible avec ses ressources (arrêts du Tribunal fédéral 4A_390/2021 du 1er février 2022 consid. 3.1.2; 4A_60/2009 précité consid. 3.2 et la référence citée; 4A_419/2007 précité consid. 2.6).

4.1.4 Pour pouvoir examiner si la résiliation ordinaire est abusive ou non (art. 336 CO), il faut déterminer quel est le motif de congé invoqué par la partie


qui a résilié (ATF 132 III 115 consid. 2; 131 III 535 consid. 4, 125 III 70 consid. 2).

Il incombe en principe au destinataire de la résiliation de démontrer que celle-ci est abusive. Le juge peut toutefois présumer en fait l'existence d'un congé abusif lorsque l'employé parvient à présenter des indices suffisants pour faire apparaître comme non réel le motif avancé par l'employeur. Ce dernier ne peut alors rester inactif, n'ayant d'autre issue que de fournir des preuves à l'appui de ses propres allégations quant au motif de congé (arrêt du Tribunal fédéral 4A_126/2020 du 30 octobre 2020 consid. 3; ATF 130 III 699 consid. 4.1; 123 III 24 consid. 4b).
4.1.5 Le droit des obligations ne prévoit pas d'obligation d'entendre l'autre partie avant de prononcer un licenciement ou de la mettre en garde au préalable. En droit privé du travail, il n’existe pas non plus d’obligation générale de soumettre le licenciement envisagé à un contrôle de proportionnalité, dans le sens où des mesures moins incisives devraient toujours être prises avant un licenciement. Pour les travailleurs âgés et fidèles, l’employeur a un devoir de protection particulier, qui se mesure selon les circonstances (arrêts du Tribunal fédéral 4A_44/2021 du 2 juin 2021 consid. 4.3.2 et les références citées; 4A_390/2021 du 1er février 2022 consid. 3.1.4).

4.1.6 En tout état de cause, les conséquences économiques du licenciement – qui peuvent aggraver les conséquences de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur – font partie des circonstances à examiner dans le cadre de la fixation de l'indemnité pour licenciement abusif (ATF 123 III 391 consid. 3c) mais n'apparaissent pas en tant que telles comme un critère susceptible de fonder le caractère abusif du licenciement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_419/2007 précité consid. 2.7).

Dans ce contexte, il faut toutefois examiner si l'on peut considérer qu'il existe une disproportion des intérêts en présence, pouvant faire apparaître le congé comme abusif. A cet égard, s'il est vrai qu'un licenciement entraîne inéluctablement une péjoration de la situation économique du travailleur, cette circonstance ne saurait à elle seule – sous le couvert de la protection sociale de l'employé – être déterminante, mais est susceptible de prévaloir lorsque le congé n'a pas de portée propre pour l'employeur (arrêt du Tribunal fédéral 4A_419/2007 précité consid. 2.7).

4.1.6 La partie qui résilie abusivement le contrat doit verser à l'autre une indemnité (art. 336a al. 1 CO). Celle-ci est fixée par le juge, compte tenu de toutes les circonstances; toutefois, elle ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur (art. 336a al. 2 CO). Le montant doit être évalué selon les règles du droit et de l'équité, conformément à l'art. 4 CC. Il faut notamment prendre en considération la gravité de la faute commise par l'employeur, une éventuelle faute concomitante du travailleur, la gravité de l'atteinte à sa personnalité, son âge, la durée et l'intensité de la relation de travail, les effets du licenciement et les difficultés de réinsertion dans sa vie économique (ATF 123 III 391 consid. 3).

Dans une cause où le travailleur était âgé de cinquante-huit ans lors du congé, le Tribunal fédéral a fixé l'indemnité à deux mois de salaire (arrêt 4A_401/2016 du 13 janvier 2017, consid. 6.2, SJ 2017 I 297). Dans une autre cause, un travailleur âgé de cinquante-neuf ans a obtenu une indemnité de même ampleur devant la juridiction cantonale (arrêt 4A_384/2014 du 12 novembre 2014).

Dans une autre affaire encore, un travailleur âgé de soixante-quatre ans a obtenu une indemnité de quatre mois de salaire (arrêt 4A_558/2012 du 18 février 2013). Dans une autre affaire, un employé de 60 ans a obtenu une indemnité de quatre mois (arrêt du Tribunal fédéral 4A_31/2017 du 17 janvier 2018 consid. 3).

4.2 En l'espèce, l'intimée était âgée de 62 ans au moment de son licenciement et avait travaillé plus de 39 ans auprès du même employeur. Le congé qui lui a été notifié le 13 juin 2017, par l'intermédiaire de l'avocat de A______, n'était aucunement motivé; bien au contraire, le courrier de licenciement précisait expressément à l'intimée qu'il n'avait pas besoin de l'être. Le licenciement n'a, par ailleurs, été précédé d'aucun entretien avec l'employeur.

Aucune réponse écrite n'a été apportée à l'intimée lorsqu'elle s'est opposée à son licenciement et a sollicité des précisions sur les modalités de versement de l'indemnité de départ évoquée par l'appelant dans la lettre de licenciement. Ce n'est qu'en cours de procédure, pour la première fois dans son mémoire de réponse du 12 juillet 2019, que l'appelant a allégué que l'intimée avait reçu plusieurs avertissements pour retards et absences injustifiées, sur lesquels elle avait apposé sa signature. L'appelant n'a cependant pas apporté la moindre preuve de ses allégués, que ce soit par la production de pièces - alors qu'il lui aurait été aisé de le faire puisqu'il prétend disposer de lettres d'avertissements dûment signés par l'intimée -, ou par l'audition de témoins. Le motif avancé par l'appelant pour justifier le licenciement de l'intimée n'apparaît donc pas réel. Il est par ailleurs en totale contradiction avec les pièces versées à la procédure soit notamment la lettre de l'Ambassadeur du 12 juin 2017 (cf supra EN FAIT sous C e) qui, semble-t-il, accompagnait le courrier de licenciement, et qui fait l'éloge du travail accompli par l'intimée durant les quasi quarante années de service passés auprès de son employeur, et dans le certificat de travail intermédiaire du 26 février 2018. Il ressort de la procédure que l'intimée a accompli de bons et loyaux services durant toute son activité professionnelle et qu'aucune faute ne lui est imputable dans la rupture des relations contractuelles, de sorte que le congé notifié, faussement motivé par certains manquements de sa part, est abusif, pour ce seul motif déjà.
Il ressort également des explications de l'appelant que A______ souhaitait voir l'effectif de son personnel diminué (son choix s'étant porté sur l'intimée en raison de ses prétendus manquements). Ce motif relève donc d'un pur choix organisationnel de l'appelant. Si certes, comme le relève ce dernier, le droit des obligations ne prévoit pas l'obligation d'entendre le travailleur avant son licenciement, le Tribunal fédéral relève que pour les travailleurs âgés et fidèles, l'employeur a un devoir de protection particulier, qui se mesure selon les circonstances. Or, en l'espèce, les circonstances sont favorables à l'intimée qui a fait preuve de loyauté et d'un travail irréprochable pendant près de quarante ans au service de l'appelant. Or, ce dernier n'a pris aucune mesure dans le cadre du devoir d'assistance particulier qui devait prévaloir dans pareille situation. Il a abruptement fait adresser à l'intimée, par l'intermédiaire de son avocat, la lettre de licenciement et lui a signifié qu'il ne lui en expliquerait pas les motifs, ce qui est contraire au devoir d'assistance des travailleurs âgés et fidèles. Il a ensuite prétendu en procédure que l'intimée aurait fait preuve de retards et d'absences injustifiés. Il n'a pas pris la peine d'avoir un entretien avec sa collaboratrice afin de lui exposer les raisons de son licenciement, ni tenté de la reconvertir dans un autre poste, compte tenu de son âge proche de la retraite et de sa fidélité.

Si certes, la liberté contractuelle permet la résiliation d'un contrat de travail et que le Tribunal fédéral a récemment atténué sa jurisprudence concernant le licenciement des personnes d'un certain âge, il a cependant rappelé qu'il convenait de prendre certains égards envers les travailleurs dont les rapports de travail sont de longue durée. Or, en l'espèce, non seulement l'appelant n'a pris aucun égard envers l'intimée, alors qu'elle était âgée et travaillait pour lui depuis près de quarante ans, mais l'a licenciée sans motivation aucune, par un courrier d'avocat, alors que l'intimée avait toujours donné satisfaction, ce qui ressort des attestations qu'elle a versées à la procédure. L'employeur n'a pas respecté le devoir d'assistance particulier qui peut être attendu de lui envers une employée qui se trouvait proche de l'âge de la retraite et avait travaillé près de quarante ans à son service en donnant satisfaction. Ce licenciement ne reposait au demeurant sur aucun impératif de l'employeur, notamment financier, mais était de pure convenance, alors qu'il avait des conséquences importantes en termes financiers pour l'employée, proche de la retraite, qui manifestement ne pouvait pas retrouver d'emploi à 62 ans.

L'appelant n'a par ailleurs pas prolongé la durée du contrat de l'intimée après son licenciement, comme il le sous-entend, mais a uniquement reporté les effets de celui-ci à l'issue de l'incapacité de travail de la concernée.

L'ensemble des circonstances du cas d'espèce examinées supra fait apparaître abusif le congé notifié à l'intimée, ce que le Tribunal a justement retenu.

L'indemnité allouée par le Tribunal à ce titre correspond par ailleurs aux indemnités que la jurisprudence rappelée supra retient à titre de licenciement abusif pour des personnes ayant l'âge et l'ancienneté de l'intimée. L'appelant se contente d'indiquer que l'indemnité de 30'000 fr. n'est pas justifiée, sans indiquer en quoi le Tribunal aurait mal appliqué le droit. Par ailleurs et contrairement à ce qu'il soutient, l'intimée n'avait pas à justifier l'ampleur du préjudice subi du fait de la rupture du contrat de travail.

Le montant de l'indemnité pour licenciement abusif fixé à approximativement quatre mois de salaire, correspondant à la somme de 30'000 fr. sera ainsi confirmé.

4.3 Le chiffre 4 du dispositif du jugement sera ainsi entièrement confirmé

5. L'appelant reproche une mauvaise constatation des faits par le Tribunal. Il sollicite l'annulation du chiffre 5 du dispositif du jugement querellé au motif qu'un certificat de travail a déjà été remis à l'intimée en février 2018.

5.1 En vertu de l'art. 330a al. 1 CO, le travailleur peut demander en tout temps à l'employeur un certificat portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité de son travail et sa conduite. On parle de certificat de travail complet ou qualifié (ATF 136 III 510 consid. 4.1).

Le certificat de travail doit mentionner le lieu de son établissement (locaux de l’employeur) et être daté. C’est a priori la date de l’établissement du document qui importe, conformément au principe de l’exactitude (cf. Portmann / Rudolph, BSK OR I, 2011, n° 6 ad art. 333a CO; Portmann / Holenstein, Aktuelle Rechtsprobleme bei Arbeitszeugnissen Eine kritische Betrachtung ausgewählter neuerer Urteile, in Regards croisés sur le droit du travail : Liber Amicorum pour Gabriel Aubert, p. 262 et note de bas de page 64), ce qui n'est en soi pas problématique.

5.2 En l'espèce, le Tribunal a condamné l'appelant à remettre à l'intimée un certificat de travail, dûment signé, conforme au certificat de travail du 8 août 2019 produit par l'appelant, relevant que ce dernier n'avait pas prouvé avoir remis à l'intimée un certificat signé. L'appelant ne critique pas le contenu du certificat de travail que le Tribunal a retenu comme conforme aux exigences légales, dont la teneur convenait d'ailleurs à l'intimée et qui a été produit par l'appelant dans le cadre de la procédure, ni ne prétend qu'il aurait remis ledit certificat de travail signé à celle-ci. Il soutient qu'il a déjà remis à l'intimée un certificat de travail le 26 février 2018. Il oublie cependant que ce certificat de travail était un certificat intermédiaire et que l'intimée a droit de se voir remettre un certificat de travail final, en langue française, dûment signé par son employeur.

Or, l'appelant n'établit pas, ni même ne soutient dans son appel, avoir remis à l'intimée le certificat de travail final signé dans sa version française conforme à celui du 8 août 2019, qui a été produit devant les premiers juges.

Le chiffre 5 du dispositif du jugement sera dès lors confirmé.

5. Les frais judiciaires seront mis à charge de l'appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Ils seront arrêtés à 2'500 fr. (art. 71 du RTFMC) et compensés avec l'avance versée par l'appelant, acquise à l'Etat de Genève.

Il ne sera pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 5 :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel formé par A______ contre le jugement JTPH/391/2020 rendu le 1er décembre 2020 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/25462/2018.

Au fond :

Confirme le jugement querellé.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met à charge de A______ les frais judiciaires d'appel arrêtés à 2'500 fr. et compensés avec l'avance versée, acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Anne-Christine GERMANIER, juge employeur; Madame Shirin HATAM, juge salariée; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.