Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des prud'hommes

1 resultats
C/12634/2020

CAPH/41/2022 du 14.03.2022 ( SS ) , IRRECEVABLE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12634/2020-4 CAPH/42/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

du LUNDI 14 MARS 2022

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], recourante contre une ordonnance d'instruction rendue par le Tribunal des prud'hommes le 27 janvier 2022, comparant par
Me Romanos SKANDAMIS, avocat, rue du Marché 18, 1204 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [VD], intimé, comparant par
Me Christian BRUCHEZ, avocat, rue Verdaine 12, case postale 3647, 1211 Genève 3, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 


Attendu, EN FAIT, que A______ SA a licencié B______ avec effet immédiat, le soupçonnant d'avoir commis des actes pénalement répréhensibles à son préjudice, et qu'elle a déposé plainte pénale contre lui; qu'en substance, elle lui reproche d'avoir favorisé le transfert de clients de A______ SA à la société C______ (SUISSE) SA;

Que le Ministère public a ouvert une instruction pénale par ordonnance du 24 juin 2020, à teneur de laquelle B______ était prévenu de gestion déloyale au préjudice de A______ SA (procédure pénale P/1______/2020);

Que, le 17 novembre 2020, B______ a formé devant le Tribunal des Prud'hommes (ci-après : le Tribunal) une demande à l'encontre de A______ SA tendant à ce que cette dernière soit condamnée à lui payer, notamment en raison d'un licenciement avec effet immédiat injustifié, les sommes brutes de 12'222 fr. 20 et 21'944 fr. 45, avec intérêts à 5% l'an dès le 22 avril 2020 et les sommes nettes de 4'543 fr. 80 et 30'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 22 avril 2020, ainsi qu'à lui délivrer un certificat de travail complet, sous la menace de la peine de l'art. 292 CP;

Que A______ SA a requis à plusieurs reprises le report du délai pour répondre à la demande fixé initialement au 15 janvier 2021;

Qu'elle a également sollicité la suspension de la procédure prud'homale jusqu'à droit jugé dans la procédure pénale au motif que les preuves qui seraient administrées dans la procédure pénale auraient un impact décisif sur la procédure prud'homale;

Que B______ s'est opposé à la suspension de la procédure au motif que A______ SA tentait par ce procédé abusif, de ralentir la procédure prud'homale, ce qui portait atteinte au principe de célérité;

Que le Tribunal a rejeté la requête de suspension, par ordonnance du 30 mars 2021;

Que A______ SA a sollicitée derechef la suspension de la procédure le 12 avril 2021, pour une durée de 12 mois, et s'est à nouveau vue opposer un refus par ordonnance du 22 juin 2021, annulée et remplacée par une nouvelle ordonnance du 10 août 2021;

Que A______ SA a saisi la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice (ci-après : la Chambre des prud'hommes) de recours contre les ordonnances des 30 mars et 10 août 2021, lesquels ont été joints et déclarés irrecevables, faute de préjudice difficilement réparable, par arrêt du 5 décembre 2021;

Que la Chambre des prud'hommes avait alors notamment retenu que :

·      A______ SA se prévalait du risque d'affaiblir l'action pénale par la poursuite de l'instruction de la cause prud'homale et soutenait que l'administration de preuves par le Tribunal des Prud'hommes pouvait mettre en péril le sort de la procédure pénale.

·      Or, il s'agissait d'arguments présentés de manière toute générale et qui n'étaient accompagnés d'aucune explication précise permettant de comprendre en quoi notamment l'audition de témoins par le Tribunal des Prud'hommes, qui n'auraient pas encore été entendus par le Ministère public, serait préjudiciable pour la procédure pénale.

·      La recourante n'exposait pas non plus quel préjudice difficilement réparable elle risquait de subir dans la procédure prud'homale dans l'hypothèse où elle ne serait admise à remettre en cause le refus de suspension qu'à l'issue de la procédure avec le jugement sur le fond.

·      En particulier, elle ne rendait pas vraisemblable qu'elle ne pourrait pas obtenir la prise en compte d'éléments ou de moyens de preuve qu'elle aurait, par hypothèse, été empêchée de faire valoir en raison du refus de suspendre la procédure.

Que la défenderesse ayant déposé sa réponse à la demande dans l'intervalle, le Tribunal a tenu une audience de débats d'instruction le 27 janvier 2022 au cours de laquelle B______ s'est déterminé sur les allégués de la réponse et a complété ses allégués à titre de réplique; que A______ SA a produit à l'audience les trois plaintes pénales qu'elle avait déposées et "fait siens" les quelque 230 allégués qu'elles contenaient à titre de duplique dans le cadre de la procédure prud'homale; que A______ SA a encore complété ces allégués oralement dans le cadre des débats d'instruction; qu'un incident a surgi s'agissant de la recevabilité des allégués de A______ SA sous cette forme; que B______ s'est notamment dit incapable de se déterminer dans le cadre de l'audience sur les 232 nouveaux allégués de A______ SA; que cette dernière a soutenu que B______ connaissait ces plaintes et les pièces qui les accompagnaient depuis plusieurs mois; que le Tribunal les a admises, excluant toutefois tout échange d'écritures ultérieur;

Que A______ SA a également requis une nouvelle fois la suspension de la procédure prud'homale dans l'attente de l'issue de la procédure pénale dans laquelle le procureur allait commencer à entendre des témoins sur les mêmes faits que ceux pertinents pour la procédure civile; que B______ a persisté à s'y opposer; que le Tribunal a refusé d'y donner suite vu le récent arrêt de la Chambre des prud'hommes, ce qui a été mentionné en fin de procès-verbal;

Qu'à l'issue de l'audience le Tribunal a émis une ordonnance d'instruction, également mentionnée en fin de procès-verbal, dont le chiffre 3 du dispositif "imparti[ssai]t aux parties un délai au 25 février 2022 pour traduire, au moins les passages pertinents, de leurs pièces en langue étrangère, faute de quoi elles ne [seraient] pas prises en compte";

Que par courrier adressé le 2 février 2022 au Tribunal, A______ SA a demandé une rectification du procès-verbal afin qu'il reflète le déroulement réel de la fin de l'audience; qu'elle souhaitait notamment que soit précisé le fait que le chiffre 3 du dispositif de l'ordonnance avait été ajouté dans un second temps, suite à une intervention de B______ qui avait exigé la traduction en français des pièces en anglais produites par A______ SA; qu'elle avait souhaité s'opposer à cette modification de l'ordonnance au cours de l'audience, mais le Tribunal avait refusé qu'elle s'exprime, provoquant le départ du conseil de A______ SA à titre de protestation;

Que A______ SA a parallèlement déposé, le 7 février 2022, auprès de la Chambre des prud'hommes, un recours contre les ordonnances figurant au procès-verbal du 27 janvier 2022, concluant à leur annulation en tant qu'elles refusaient à nouveau de suspendre la procédure civile dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et en tant qu'elles exigeaient la traduction des pièces en langue étrangère;

Qu'elle considérait que ces deux décisions lui causaient un préjudice irréparable :

·      S'agissant de la suspension de la procédure, elle relevait que la procédure pénale allait de l'avant, notamment avec l'audition de témoins, et que les circonstances avaient donc changé depuis l'arrêt du 5 décembre 2021 de la Chambre des prud'hommes; qu'il convenait qu'elle puisse se réserver d'alléguer dans la procédure civile toutes les circonstances que la procédure pénale permettrait de découvrir, raison pour laquelle il convenait de repousser la clôture de la phase de l'allégation dans la procédure civile;

·      S'agissant de la traduction des pièces, elle chiffrait le coût de la traduction des quelque 300 pages des pièces en anglais qu'elle avait déposées à 16'727 fr. 55 (devis d'une entreprise de traduction), montant qu'elle ne pourrait jamais récupérer, aucun dépens n'étant alloué en matière prud'homale (art. 22 al. 2 LACC);

Que A______ SA a préalablement requis, à titre provisionnel et superprovisionnel, la suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance en raison des délais fixés au 25 février 2022 pour déposer la traduction des pièces et au 25 mars 2022 à B______ pour se prononcer sur les allégués en duplique de A______ SA;

Que la Chambre des prud'hommes a refusé d'octroyer la suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance par arrêt du 9 février 2022, notamment au motif que le préjudice difficilement réparable découlant de l'obligation de traduire des passages pertinents de pièces était douteux et que le délai fixé par le Tribunal pouvait être prolongé en cas de besoin;

Qu'invité à se déterminer sur la requête de suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance, l'intimé a pris position tant sur ladite suspension que sur le fond du recours, concluant à leur rejet; qu'il a en substance conclu à l'absence de préjudice difficilement réparable engendré par les décisions entreprises au détriment de la recourante, s'agissant essentiellement d'un préjudice financier; qu'il concluait également à ce qu'une amende pour procédé téméraire soit infligée à la recourante qui multipliait les incidents en vue de ralentir l'avancement de la procédure;

Que le greffe de la Chambre des prud'hommes a informé les parties par courrier du 15 février 2022 que la cause était gardée à juger sur la requête d'effet suspensif;

Considérant, EN DROIT, que le recours est recevable contre les décisions finales, incidentes et provisionnelles de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC) et contre les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

Que la décision de refus de suspension (art. 126 CPC) ne peut faire l'objet que du recours de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC, le recourant devant démontrer le préjudice difficilement réparable résultant du refus de suspendre, à l'inverse de la décision ordonnant la suspension de la procédure qui peut faire l'objet d'un recours inconditionnel au sens de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (Haldy, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 9 ad art. 126 CPC; Gschwend, Basler Kommentar, ZPO, 2017, n° 17a ad art. 126 CPC).

Que le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours, contre une ordonnance d'instruction, dans les dix jours à compter de sa notification (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

Que l'instance de recours peut statuer sur le seul vu de l'acte de recours si celui-ci est manifestement irrecevable ou infondé (art. 322 al. 1 CPC).

Qu'en l'espèce, le recours est recevable pour avoir été formé dans le délai et selon les formes prévues par la loi;

Que la cause n'a été retenue à juger que sur suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise; que le Chambre de céans statuera toutefois directement sur le fond du recours, l'intimé ayant déjà répondu tant sur effet suspensif que sur le fond et le recours est manifestement irrecevable pour les motifs qui suivent;

Que la notion de préjudice difficilement réparable ouvrant la voie du recours contre les ordonnances d'instruction et les décisions rejetant une requête de suspension ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, pourvu qu'elle soit difficilement réparable; que l'instance supérieure doit se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre la réalisation de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu; qu'il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (Colombini, Code de procédure civile, condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, n° 4.1.3 ad art. 319 CPC; Blickenstorfer, Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], n. 39 ad art. 319 CPC; Jeandin, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 22 ad art. 319 CPC); que la question de savoir s’il existe un préjudice difficilement réparable s’apprécie par rapport aux effets de la décision incidente sur la cause principale, respectivement la procédure principale (ATF 137 III 380 consid. 1.2.2; v. aussi arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2011 du 11 janvier 2012 consid. 2.2);

Qu'une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne constitue ainsi pas un préjudice difficilement réparable (Spühler, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, n° 7 ad art. 319 CPC; Hoffmann-Nowotny, ZPO-Rechtsmittel, Berufung und Beschwerde, n° 25 ad art. 319 CPC);

Qu'il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 134 III 426 consid. 1.2 par analogie; Haldy, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 9 ad art. 126 CPC; Spühler, op.cit., n° 14 ad art. 319 CPC);

Que lorsque la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, le recours est irrecevable et la partie doit attaquer la décision incidente avec la décision finale sur le fond (Message du Conseil fédéral relatif au CPC, FF 2006 6841, p. 6984; Blickenstorfer, op. cit., n. 40 ad art. 319 CPC);

Que dans un premier grief, la recourante reproche au Tribunal d'avoir exigé d'elle la traduction de près de 300 pages de pièces rédigées en anglais, ce qui impliquerait un coût de traduction de l'ordre de 17'000 fr., représentant un préjudice irréparable, faute de pouvoir les répercuter sur la partie adverse au travers des dépens en cas de succès de l'action, en application de l'art. 22a LACC;

Que selon l'art. 129 CPC, la procédure est conduite dans la langue officielle du canton dans lequel l'affaire est jugée, soit le français à Genève (art. 5 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - RS/GE A 2 00; art. 16 LACC);

Que si une partie procède dans une autre langue, un délai doit lui être imparti en vertu de l'art. 132 CPC pour procéder dans la langue officielle (arrêt du Tribunal fédéral 4A_246/2013 du 8 juillet 2013); que l’obligation de traduction pour les pièces peut être limitée aux passages topiques, pour autant naturellement qu’il ne s’agisse pas d'une traduction orientée dénaturant le sens général du texte (ATF 138 III 520 ATF 128 I 273; Haldy, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 4 ad art. 129 CPC);

Qu'en l'espèce, la recourante a été invitée, en application de ces principes, à traduire les passages topiques des très nombreuses pièces produites;

Que contrairement à ce qu'elle prétend, il ne lui a pas été demandé de faire traduire l'intégralité des pièces produites par un traducteur professionnel, pour un coût de l'ordre de celui susmentionné;

Que seuls les passages pertinents en lien avec l'allégué à l'appui duquel la pièce est produite doit être traduit et une traduction par la partie elle-même ou son conseil est possible, sans passer par les services d'un traducteur professionnel;

Que la recourante ne peut donc soutenir subir un préjudice difficilement réparable de l'ordre de celui qu'elle allègue;

Que le recours doit par conséquent être déclaré irrecevable sur cet objet, faute pour la recourante d'établir un préjudice irréparable engendré par la traduction des pièces telle qu'exigée par le Tribunal;

Que dans un second grief, la recourante reproche au Tribunal d'avoir refusé la suspension de la procédure;

Que le Tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d'opportunité le commandent; que la procédure peut notamment être suspendue lorsque la décision dépend du sort d'un autre procès (art. 126 CPC);

Que le Tribunal a déjà par deux fois rejeté les requêtes de suspension de la recourante, dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale visant l'intimé; que ces deux décisions ont fait l'objet de recours, déclarés irrecevables faute de préjudice difficilement réparable par arrêt de la Chambre des prud'hommes du 5 décembre 2021;

Que compte tenu de la motivation de cet arrêt, la recourante ne se prévaut plus, de manière toute générale, du fait que l'instruction de la présente cause nuirait à l'instruction de la cause pénale, mais qu'en l'absence de suspension elle ne serait plus en mesure d'alléguer et de produire à temps, dans la procédure prud'homale, les faits nouveaux et les moyens de preuves qu'elle pourrait découvrir au travers de la procédure pénale;

Que le litige porte, dans le cadre de la présente procédure, sur le caractère justifié ou injustifié d'un licenciement avec effet immédiat;

Que dans ce contexte, les circonstances pertinentes sont celles connues de l'employeur au moment du licenciement et non celles découvertes ultérieurement, qui ne sont qu'exceptionnellement admissibles au titre d'éléments additionnels, mais ne sauraient constituer le motif de licenciement (Wyler, Heinzer, Droit du travail, 4ème édition 2019, p. 746 ss);

Que les éléments de faits, surgis dans le cadre d'une procédure pénale, que la recourante souhaiterait introduire dans la procédure prud'homale, ne sont ainsi pas pertinents pour juger des motivations du congé immédiat; qu'elle ne peut donc se prévaloir d'un préjudice lié au fait qu'elle ne pourra alléguer des faits découverts à l'occasion de la procédure pénale;

Que la recourante a d'ailleurs déjà épuisé les deux possibilités de s'exprimer dans la phase de l'allégation en déposant les plaintes pénales pour valoir mémoire de duplique, complétées par des allégués dictés au procès-verbal (ATF 144 III 67; ATF 140 III 312 consid. 6.3.2, JdT 2016 II 257; arrêt du Tribunal fédéral 4A_494/2017 consid. 2.4.1 et 2.4.2); que le fait de suspendre la procédure au moment où elle l'a demandé à l'audience du 27 janvier 2022, soit après avoir procédé au dépôt de ses allégués de duplique, n'aurait ainsi plus aucune incidence sur son droit à encore compléter ses allégués dans le cadre ordinaire de l'échange d'écritures et des débats d'instruction;

Qu'en tout état, des faits et moyens de preuve nouveaux et pertinents apparus dans le cadre de la procédure pénale pourront toujours être introduits dans les débats civils jusqu'aux délibérations en première instance et même en appel aux conditions des art. 229 al. 1 et 317 al. 1 CPC (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_436/2020 du 5 février 2021 consid. 4.3; 5A_16/2016 du 26 mai 2016; Heinzmann, Pasquier, Petit Commentaire CPC, 2020, n° 15 et ss ad art. 229 CPC; Tappy, Commentaire Romand CPC, 2019, n° 9 et ss ad art. 229 CPC);

Que la recourante ne subit donc aucun préjudice difficilement réparable, en termes de possibilité de procéder à des allégués, découlant du refus de suspension litigieux;

Qu'enfin, la recourante estime que l'élucidation des faits par la procédure pénale ainsi que la condamnation de B______ pour gestion déloyale permettraient d'éviter toute l'instruction dans la procédure prud'homale et, partant, les frais de traduction des pièces, ce qui justifierait également la suspension afin d'éviter des frais inutiles;

Qu'à ce grief, il convient d'opposer, à l'instar de ce qui a été dit plus haut, que la recourante n'a pas établi que la traduction des pièces constituait un préjudice difficilement réparable;

Que la décision de refus de suspension de la procédure n'entraîne ainsi aucun préjudice difficilement réparable pour la recourante;

Que le recours, en tant qu'il porte sur cet objet, est par conséquent également irrecevable;

Qu'en conclusion, le recours est intégralement irrecevable;

Que selon l'art. 114 let. c CPC, il n'est pas perçu de frais judiciaires dans les litiges portant sur un contrat de travail lorsque la valeur litigieuse n'excède pas 30'000 fr.; que les cantons peuvent toutefois prévoir des dispenses de frais plus larges (art. 116 al. 1 CPC); que selon l'art. 19 al. 3 LACC, devant la Chambre des prud'hommes, l'émolument de décision est fixé entre 200 fr. et 10'000 fr. lorsque la valeur litigieuse excède 50'000 fr;

Qu'en l'occurrence, vu la valeur litigieuse, qui dépasse le seuil de 50'000 fr. précité, les frais judiciaires seront arrêtés à 600 fr. et mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 106 al. 2 CPC); qu'ils seront partiellement compensés avec l'avance de 300 fr. versée par la recourante, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC); que la recourante sera condamnée à verser le solde des frais mis à sa charge en 300 fr.;

Que la procédure de recours ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LACC);

Que la Chambre des prud'hommes renoncera à infliger un blâme ou une amende pour des procédés abusifs ou téméraires à la recourante, nonobstant la requête de l'intimé en ce sens;

Que la partie recourante sera néanmoins avertie au vu de son insistance à vouloir obtenir la suspension de la procédure et à recourir contre les décisions du Tribunal rejetant ses requêtes, qu'elle ne saurait abuser de ce procédé pour ralentir la procédure au point d'obtenir de facto la suspension qu'elle requiert, alors que le Tribunal a opté, sans que ce choix ne prête le flanc à la critique, pour un avancement de la procédure, en respect du principe de célérité.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 4 :


Déclare irrecevable le recours formé le 7 février 2022 par A______ SA contre les ordonnances du Tribunal des prud'hommes, figurant au procès-verbal d'audience du 27 janvier 2022 dans la cause C/12634/2020-4.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 600 fr. et les met à la charge de A______ SA.

Les compense partiellement avec l'avance de frais de 300 fr. versée par A______ SA, laquelle est acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à verser à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, la somme de 300 fr. à titre de solde de frais judiciaires.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président ad interim; Madame Nadia FAVRE, juge employeur; Monsieur Thierry ZEHNDER, juge salarié; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 


 

Indications des voies de recours :

 

La présente décision est susceptible d'un recours en matière civile, les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 à 119 et 90 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse supérieure à 30'000 fr.