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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/134/2023

ACJC/1268/2023 du 02.10.2023 sur JTBL/462/2023 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 02.11.2023, rendu le 13.11.2023, IRRECEVABLE, 4A_534/2023
Normes : CPC.311
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/134/2023 ACJC/1268/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 2 OCTOBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 8 juin 2023, comparant en personne,

et

LA FONDATION B______, intimée, représentée par le SECRETARIAT DES FONDATIONS IMMOBILIERES DE DROIT PUBLIC, rue Gourgas 23bis, case postale 12, 1211 Genève 8, en les bureaux duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/462/2023 du 8 juin 2023, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens, ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec lui, l'appartement de 2 pièces n° 2______ situé au 2ème étage de l'immeuble sis route 1______ no. ______, [code postal] C______ [GE], ainsi que la cave n° 2______ qui en dépend (ch. 1 du dispositif), autorisé LA FONDATION B______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______, dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

B. a. Par acte déposé le 26 juin 2023 à la Cour de justice, A______ a formé appel contre ce jugement, sans formellement prendre de conclusions, indiquant uniquement que la Cour soit "trouve une faille juridique" dans le jugement attaqué, soit "qu'elle demande une non évacuation".

b. Dans sa réponse du 10 juillet 2023, LA FONDATION B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris.

c. A______ s'est encore déterminé les 21 et 28 juillet 2023.

d. Les parties ont été avisées le 15 août 2023 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Le 16 septembre 2019, A______, locataire, a conclu avec LA FONDATION B______, bailleresse, un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 2 pièces n° 2______ situé au 2ème étage de l'immeuble sis route 1______ no. ______, [code postal] C______, ainsi que la cave n° 2______ qui en dépend.

Le montant du loyer, charges comprises, a été fixé en dernier lieu à 606 fr. par mois.

b. Par avis comminatoire du 20 septembre 2022, la bailleresse a mis en demeure le locataire de lui régler dans les 30 jours le montant de 903 fr. à titre d'arriéré de loyers et charges pour les mois d'août et septembre 2022, y compris frais de rappel et de mise en demeure, acompte de 259 fr. déduit, et l'a informé de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.

c. Un versement de 571 fr. a été effectué dans le délai comminatoire.

d. Considérant que la somme réclamée n'avait pas été entièrement réglée dans le délai imparti, la bailleresse a, par avis officiel du 25 octobre 2022, résilié le bail pour le 30 novembre 2022.

e. Par requête du 5 janvier 2023, la partie requérante a introduit action devant le Tribunal et a sollicité l'évacuation du locataire, avec exécution directe.

f. Lors de l'audience du 9 mars 2022, pour laquelle le locataire a excusé son absence par certificat médical, la bailleresse a exposé que l'arriéré se montait à 5'427 fr. 45. Le dernier versement remontait au mois d'octobre 2022, le locataire, dont elle savait que l'état de santé se péjorait, les avait contactés le 24 janvier 2023 pour proposer un arrangement de paiement de 350 fr. par mois dès le mois de mars 2023. Il avait également annoncé qu'il reprendrait le versement des indemnités courantes dès le mois de février, ce qu'il n'avait toutefois pas fait. Vu les circonstances, la bailleresse était d'accord de reconvoquer la cause pour laisser au locataire une chance de respecter son engagement.

Sur quoi, le Tribunal a reconvoqué la cause à la prochaine audience utile.

g. Lors de l'audience du 30 mars 2023, la bailleresse a exposé que l'arriéré était toujours de 5'427 fr. 45, y compris 1'755 fr. 20 de frais de participation pour travaux.

Le locataire, pour sa part, a déclaré qu'il estimait qu'il y avait une cabale contre lui. Il souffrait de diabète et d'hypertension et avait à charge deux enfants de 11 et 13 ans qui vivaient au Sénégal et dont la mère s'était suicidée. Après la pandémie, il avait connu dépression sur dépression, mais s'était peu à peu repris en main et bénéficiait de la visite quotidienne de l'IMAD. Avant de loger dans cet appartement, il avait été sans abri. Il s'engageait à payer 350 fr. par mois en plus de l'indemnité courante et à mettre en place un ordre permanant avec l'aide d'un ami qui travaillait à la banque D______. Il contestait les frais de participation aux travaux compris dans l'arriéré.

Sur quoi, la bailleresse a donné son accord, vu les circonstances, pour reconvoquer la cause à brève échéance pour faire le point de la situation.

h. Lors de l'audience du 8 juin 2023, la bailleresse a exposé que le solde dû était de 7'245 fr. 45, décompte à l'appui, y compris 1'755 fr. 20 de frais de participation pour travaux. Il n'y avait eu aucun versement depuis la dernière audience.

Le locataire ne s'est pas présenté à l'audience; il s'est excusé par certificat médical adressé au Tribunal par pli du 2 juin 2023.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

i. Dans son jugement du 8 juin 2023, le Tribunal a considéré que les conditions d'une résiliation de bail selon l'art. 257d al. 1 CO étaient manifestement réunies en l'espèce et que la bailleresse était ainsi fondée à donner congé, ce qu'elle avait fait en respectant les conditions de l'art. 257d al. 2 CO. Il s'ensuivait que, depuis l'expiration du terme fixé, le locataire ne disposait plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux. Son évacuation devait dès lors être prononcée. La bailleresse avait par ailleurs requis l'exécution de cette évacuation, ce à quoi le Tribunal a fait droit.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle.

S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche la résiliation des rapports de bail est également contestée, la valeur litigieuse est égale au loyer pour la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle une nouvelle résiliation peut être signifiée; comme il faut prendre en considération la période de protection de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1 let. e CO, la valeur litigieuse correspondra en principe au montant du loyer brut (charges et frais accessoires compris) pendant trois ans (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1; LACHAT, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2019, pp. 69-70).

En l'espèce, il ressort des explications du locataire, à bien les comprendre, qu'il conteste la résiliation de son bail. Au vu du montant du loyer, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. La voie de l'appel est dès lors ouverte en ce qui concerne le prononcé de l'évacuation.

1.2 L'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1 CPC).

L'appel a été interjeté dans le délai prescrit par la loi (art. 311 al. 1 CPC). La question de sa recevabilité se pose en revanche eu égard à sa motivation.

1.3 En vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Ainsi, si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêts du Tribunal fédéral 4A_621/202130 août 2022, consid. 3.1, 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2; 4A_97/2014 précité consid. 3.3).

Lorsqu'elle examine un acte déposé par une partie non assistée ne disposant pas d'une formation juridique, l'autorité d'appel ne doit pas se montrer trop stricte s'agissant de l'exigence de motivation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_117/2022 du 8 avril 2022 consid. 2.1.1; 4A_56/2021 du 30 avril 2021 consid. 5.1; 5A_577/2020 du 16 décembre 2020 consid. 5). Même rédigé par un non-juriste, l'appel doit néanmoins permettre de comprendre sur quels points la décision attaquée serait erronée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_577/2020 précité consid. 6).

1.3.2 En l'espèce, le locataire expose avoir 70 ans, connaître divers problèmes de santé, vivre avec une rente AI et un complément SPC et entretenir ses deux enfants de 13 et 15 ans qui vivent au Sénégal. Il soutient que son droit d'être entendu aurait été violé car s'il avait été présent à l'audience du 8 juin 2023, il aurait pu exposer sa situation et proposer un arrangement de paiement. Son bail avait été résilié car il entretenait mal son appartement, mais il l'avait fait remettre en ordre par une entreprise de nettoyage. Il avait effectivement cessé de payer son loyer "suite à l'envoi au Tribunal des baux et loyers", ce qu'il regrettait avec le recul. Il contestait que certains travaux doivent être mis à sa charge, précisant que l'immeuble était ancien et nécessitait une rénovation.

Par une telle argumentation, l'appelant ne remet pas en cause de manière motivée le jugement attaqué en tant qu'il a considéré, à bon droit, que les conditions pour résilier le bail en application de l'art. 257d CO étaient remplies. Il indique d'ailleurs lui-même avoir cessé de payer son loyer et il ne soutient pas s'être acquitté du montant réclamé dans l'avis comminatoire dans le délai imparti par celui-ci. L'appel ne comporte dès lors aucune critique motivée du jugement d'évacuation attaqué.

L'appelant soutient également que son droit d'être entendu aurait été violé. Il est toutefois rappelé que l'admission de la violation du droit d'être entendu suppose que, dans sa motivation, le recourant expose quels arguments il aurait fait valoir dans la procédure cantonale et en quoi ceux-ci auraient été pertinents. A défaut, le renvoi de la cause au juge précédent, en raison de la seule violation du droit d'être entendu, risquerait de conduire à une vaine formalité et à prolonger inutilement la procédure (arrêts 5A_70/2021 du 18 octobre 2021 consid. 3.1 et les références; 4A_593/2020 du 23 juin 2021 consid. 7.2). Or, en l'espèce, l'appelant n'expose pas quels documents il aurait produit à l'audience du 8 juin 2023, ni quels arguments il aurait invoqué, ni en quoi ceux-ci permettraient de considérer que son évacuation n'est pas fondée. Il convient par ailleurs de rappeler qu'il s'était engagé lors de l'audience du 30 mars 2023 à verser un montant mensuel de 350 fr. afin de résorber l'arriéré, ce qu'il n'a toutefois pas fait, de sorte qu'un nouvel engagement de l'appelant à cet égard aurait été peu convaincant.

Il ne ressort enfin pas des explications fournies par l'appelant, qui demande sa "non-évacuation", qu'il remettrait en cause l'exécution de l'évacuation.

En définitive, au vu de ce qui précède, l'appel formé le 26 juin 2023 ne comporte pas une motivation suffisante, même en tenant compte du fait que l'appel a été déposé par une partie non assistée ne disposant pas d'une formation juridique, de sorte qu'il sera déclaré irrecevable.

2. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable l'appel interjeté le 26 juin 2023 par A______ contre le jugement JTBL/462/2023 rendu le 8 juin 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/134/2023-6-SE.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.