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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/25363/2020

ACJC/1145/2023 du 11.09.2023 sur JTBL/297/2023 ( SBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/25363/2020 ACJC/1145/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 11 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 28 mars 2023, représenté par ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle il fait élection de domicile,

Et

B______ AG, sise c/o C______ SA, ______, intimée, comparant par Me Emmanuelle GUIGUET-BERTHOUZOZ, avocate, rue du Général-Dufour 11, 1204 Genève, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTBL/297/2023 du 28 mars 2023, expédié pour notification aux parties le 24 avril 2023, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec lui l'appartement n° 1______ de trois pièces situé au 6ème étage de l'immeuble sis rue 2______ no. ______ à Genève, et la cave no 30 qui en dépend (ch. 1), autorisé B______ AG à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et dit que la procédure était gratuite (ch. 4).

Le Tribunal a notamment prononcé l'exécution forcée de son jugement dès son entrée en force, en raison de l'importance de l'arriéré en cause, de la durée de la procédure et de l'absence de proposition concrète de rattrapage.

B.                        Par acte du 5 mai 2023, A______ a formé recours contre le chiffre 2 du dispositif du jugement précité. Il a conclu à l'annulation de celui-ci, cela fait à ce que B______ AG soit autorisée à requérir son évacuation par la force publique dès le 1er janvier 2024.

La requête d'effet suspensif que comportait le recours a été admise par décision de la Cour du 22 mai 2023.

B______ AG a conclu au rejet du recours.

Par avis du 12 juin 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.                       Il résulte de la procédure de première instance les faits pertinents suivants :

a.             Le 15 octobre 2019, les parties se sont liées par un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement n° 1______ de trois pièces situé au 6ème étage de l'immeuble sis rue 2______ no. ______ à Genève, et de la cave n° 30 qui en dépend.

Le montant du loyer et des charges a été fixé en dernier lieu à 2'510 fr. par mois.

b.             Par avis comminatoire du 14 septembre 2020, B______ AG a mis en demeure A______ de lui verser dans les trente jours 5'070 fr. correspondant à l'arriéré de loyer et de charges du 1er août au 30 septembre 2020 et l'a informé de son intention de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO à défaut de paiement, dans le délai imparti, du montant réclamé.

c.              Considérant que le montant dû n'avait pas été intégralement réglé dans ledit délai, B______ AG a, par avis officiel du ______ 2020 résilié le bail pour le 30 novembre 2020.

d.             Le 9 décembre 2020, B______ AG a saisi le Tribunal d'une requête formée par la voie de la protection du cas clair, dirigée contre A______, en évacuation, avec exécution directe.

A l'audience du Tribunal du 9 mars 2021, elle a fait connaître que l'arriéré était désormais de 2'670 fr. A______ a déclaré qu'il avait opéré la veille de l'audience un versement de 2'530 fr. et qu'il disposait des moyens nécessaires pour verser les indemnités courantes. La bailleresse a alors consenti à une reconvocation de la cause.

Sur quoi, le Tribunal a décidé de reconvoquer la cause ultérieurement.

e. A l'audience du Tribunal du 28 mars 2023, B______ AG a persisté dans ses conclusions, le montant de l'arriéré étant de 3'893 fr. 38. La mandataire de A______ a conclu à l'octroi d'un sursis humanitaire au 31 décembre 2023, en raison de la situation de santé de son mandant. Elle a produit un courriel de celui-ci, daté du 27 mars 2023, qui l'informait de ce qu'il avait été hospitalisé plus de six semaines à C______ (Tunisie) et de ce qu'il ne pouvait pas se rendre en Europe pour "encore quelques semaines". Elle a fait valoir que A______ voyageait pour son travail.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             La voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC). Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits, de sorte qu'il recevable (art. 321 al. 1 CPC).

2.             Le recourant soutient qu'un sursis humanitaire à l'exécution de son évacuation aurait dû lui être accordé, compte tenu de sa situation, telle qu'exposée aux premiers juges. Ceux-ci auraient ainsi violé le principe de la proportionnalité.

2.1         Selon l'art. 337 al. 1 CPC, la décision peut être exécutée directement si le Tribunal qui la rend ordonne les mesures d'exécution nécessaires. Le Tribunal peut d'ores et déjà, sur requête de l'une des parties, ordonner l'exécution de sa décision.

En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

L'art. 30 al. 4 LaCC concrétise le principe de la proportionnalité en cas d'évacuation d'un logement, en prévoyant que le Tribunal des baux et loyers peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties.

S'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.).

2.2         En l'espèce, le recourant a allégué, sans produire de pièces à ce propos, qu'il avait été hospitalisé en Tunisie durant six semaines, puis ne pouvait se rendre en Europe pour raisons de santé pendant une période non spécifiée. Il n'a pas clairement exprimé ce qui l'avait empêché, à tout le moins dès sa sortie d'hôpital, de régulariser ou faire régulariser sa dette d'indemnités pour occupation illicite vis-à-vis de l'intimée, alors qu'il avait affirmé au Tribunal, en mars 2021, qu'il disposait de moyens suffisants pour ce faire (et n'a pas fait part d'une modification à ce sujet).

Dans ces conditions, le Tribunal n'a pas manqué au principe de proportionnalité, en retenant que l'arriéré, l'absence de proposition de rattrapage et la durée de la procédure (initiée il y a plus deux ans et demi, à la suite d'une résiliation de bail au 30 novembre 2020) permettaient une exécution de l'évacuation dès l'entrée en force du jugement.

En tout état, en raison de la procédure devant la Cour, le recourant aura encore obtenu environ cinq mois de sursis supplémentaire pour trouver à se reloger.

Le recours est ainsi infondé, de sorte qu'il sera rejeté.

 

3.             A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 5 mai 2023 par A______ contre le jugement JTBL/297/2023 rendu le 28 mars 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/25363/2020.

Au fond :

Rejette ce recours.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.