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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/1745/2017

ACJC/883/2023 du 30.06.2023 sur ACJC/418/2023 ( OBL ) , CONFIRME

Normes : CPC.334
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1745/2017 ACJC/883/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU VENDREDI 30 JUIN 2023

 

Entre

VILLE DE GENEVE, p.a. et représentée par la Gérance Immobilière Municipale, ayant son siège au 5, rue de l’Hôtel-de-Ville, case postale 3983, 1211 Genève, requérante en rectification de l'arrêt de la Cour de justice ACJC/418/2023 du 27 mars 2023 rendu dans la cause C/1745/2017, comparant en personne,

 

Et

A______, domicilié ______, cité, comparant par Me Vicky MARRO, avocats, 18, quai Gustave-Ador, case postale 1470, 1211 Genève 1, en l’étude de laquelle il fait élection de domicile.

 

 


Attendu, EN FAIT, que par jugement JTBL/552/2021 du 22 juin 2021, notifié aux parties le 24 juin 2021, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a ordonné à la VILLE DE GENEVE d’exécuter, dans un délai de trois mois à compter de l’entrée en force du jugement, dans l’atelier d’environ 442 m2 loué par A______ au rez-de-chaussée du bâtiment sis no.______, avenue 1______ à Genève, les travaux de remise en état de la chape suivants : - fixation de la chape au support dans toutes les zones de circulation par percement de trous jusque dans le support et injection de résine synthétique sous basse pression, avec écartement tous les 25 à 30 cm, - colmatage et scellement des fissures et des joints, - application d’un revêtement de sol à base de résine synthétique, selon système conforme à la norme SIA 2522, chapitre C, revêtement de sol à base de résine synthétique (ch. 1 du dispositif), réduit le loyer de l’atelier concerné de 12% du 27 janvier 2012 et jusqu’à complète exécution des travaux (ch. 2), condamné la VILLE DE GENEVE à verser à A______ la somme de 71'378 fr. 40, avec intérêts à 5% l’an dès le 16 février 2017 (ch. 3), validé la consignation de loyer opérée par A______ (ch. 4), ordonné aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de libérer les loyers consignés sur le compte n° 2______ à concurrence de la réduction octroyée sous chiffre 2 en faveur de A______ et à concurrence du solde en faveur de la VILLE DE GENEVE (ch. 5), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6) et dit que la procédure était gratuite (ch. 7);

Que, par arrêt ACJC/418/2023 du 27 mars 2023 notifié aux parties le 28 mars 2023, la Cour a annulé les chiffres 1 et 3 du dispositif du jugement précité et, statuant à nouveau sur ces points, a modifié les modalités d’exécution des travaux – point qui n’est pas remis en cause par les parties -, condamné la VILLE DE GENEVE à verser à A______ le trop-perçu découlant de la réduction de loyer de 12% allouée, soit la somme mensuelle de de 653 fr. 90, à compter du 27 janvier 2012 et jusqu’à l’entrée en force du jugement du 22 juin 2021, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 16 février 2017 et confirmé le jugement attaqué pour le surplus;

Que la VILLE DE GENEVE, par requête déposée le 28 avril 2023, a saisi la Cour d’une « demande d’interprétation et rectification »;

Qu’elle soutient que sa condamnation à verser à l’intimé le trop-perçu découlant de la réduction de loyer de 12% allouée, soit la somme mensuelle de 653 fr. 90, à compter du 27 janvier 2012 et jusqu’à l’entrée en force du jugement du 22 juin 2021, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 16 février 2017, serait contradictoire avec le chiffre 2 du dispositif du jugement du Tribunal réduisant le loyer de 12% du 27 janvier 2012 jusqu’à complète exécution des travaux;

Que la requérante voit une contradiction des dispositifs quant à la durée de la réduction accordée à l’intimé et conclut à la rectification de l’arrêt précité en ce sens que les chiffres 1 à 3 du dispositif du jugement du 22 juin 2021 devraient être annulés;

Qu’invité à se prononcer le 26 mai 2023 sur cette demande, A______ s’est déterminé le 31 mai 2023;

Qu’il relève que l’arrêt de la Cour indiquait explicitement que le chiffre 2 du dispositif du jugement, allouant une réduction de loyer de 12% jusqu’à complète exécution des travaux, était confirmé et que le paiement du trop-perçu de loyer concernait la question des intérêts moratoires qui devaient être pris en compte jusqu’à l’entrée en force du jugement;

Qu’ainsi, la Cour ne devait pas faire droit à la demande de la requérante, son arrêt étant suffisamment clair;

Considérant, EN DROIT, que l'art. 334 al. 1 CPC dispose que si le dispositif de la décision est peu clair, contradictoire ou incomplet, ou s'il ne correspond pas à la motivation, le tribunal procède, sur requête, ou d'office, à l'interprétation ou à la rectification de la décision;

Qu’en revanche, la correction d'erreurs qui procèdent d'une mauvaise application du droit ou d'une constatation inexacte des faits doit être effectuée par la voie d'un recours (HERZOG, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2017, n. 8 ad art. 334 CPC); que l'interprétation et la rectification ne tendent pas à modifier le jugement rendu (JEANDIN Commentaire romand CPC, 2019, n. 20 ad Intro art. 308-334 CPC), à la manière d'un appel déguisé; que le juge saisi d'une demande d'interprétation ou de rectification ne doit donc pas changer le fond du jugement (SPÜHLER/DOLGE/GEHIR, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2010, n. 101 p. 389);

Qu’en effet, en vertu du principe de dessaisissement, le juge ne peut corriger sa décision une fois celle-ci prononcée, même s'il a le sentiment de s'être trompé; qu’une erreur de fait ou de droit ne peut être corrigée que par les voies de recours; que la voie de l'interprétation ou de la rectification permet toutefois, exceptionnellement, au juge de corriger une décision déjà communiquée; qu’en principe, l'interprétation ou la rectification a uniquement pour objet la formulation du dispositif de l'arrêt qui serait peu claire, incomplète, équivoque ou contradictoire en elle-même ou avec les motifs; qu’un dispositif est peu clair, et doit être interprété, lorsque les parties ou les autorités qui doivent exécuter la décision risquent subjectivement de comprendre celle-ci autrement que ce que voulait le juge lorsqu'il s'est prononcé; qu’une requête d'interprétation ou de rectification n'a ainsi pour but que de clarifier ou rendre une décision conforme avec le contenu réellement voulu par le juge; que son objet est de permettre la correction des erreurs de rédaction ou de pures fautes de calcul dans le dispositif qui résultent à l'évidence du texte de la décision, soit des inadvertances ou omissions qui peuvent être corrigées sans hésitation sur la base de ce qui a déjà été décidé; qu’une requête en rectification ou en interprétation ne peut jamais tendre à une modification matérielle de la décision concernée; que pour cela, seules les voies de l'appel ou du recours sont ouvertes (ATF 143 III 520 consid. 6.1; 143 III 420 consid. 2.1 et 2.3; 139 III 379 consid. 2.1 et 2.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_776/2019 du 27 octobre 2020 consid. 3.1; 5A_79/2019 du 21 novembre 19 consid. 4.4.2 et 5D_192/2017 du 17 mai 2018 consid. 3.2; ACJC/387/2023 du 20 mars 2023 consid. 3.1);

Qu’en l’espèce, il n’existe aucune contradiction dans le dispositif de l’arrêt du 27 mars 2023; qu’en effet, dans les considérants de celui-ci, il est clairement indiqué que la réduction de loyer de 12% allouée est due jusqu’à la complète exécution des travaux;

Qu’en sollicitant l’annulation du chiffre 2 du dispositif du jugement, l’appelant cherche finalement à remettre en cause la quotité de réduction allouée et son exigibilité jusqu’à la complète exécution des travaux, points sur lesquels la Cour s’est dûment prononcée;

Qu’admettre la demande de rectification reviendrait à modifier matériellement le jugement, ce qui n’est pas admissible;

Qu’en outre, comme le relève à bon droit l’intimé, le paiement du trop-perçu de loyer et des intérêts moratoires doit être pris en compte jusqu’à l’entrée en force du jugement, ce que la Cour a retenu dans son arrêt, rectifiant ainsi la décision du Tribunal qui limitait le paiement du trop-perçu à une durée de 109 mois et 5 jours;

Qu’ainsi, il n’existe aucune contradiction entre les considérants et le dispositif de l’arrêt s’agissant de la condamnation au paiement du trop-perçu de loyer, qui est dû dès le 27 janvier 2012 jusqu’à l’entrée en force du jugement, avec un intérêt moratoire de 5% l’an dès le 16 février 2017;

Qu’il sera relevé que depuis l’entrée en force du jugement, l’intimé est redevable du loyer réduit jusqu’à la complète exécution des travaux, la question de la réduction de loyer allouée et celle de la condamnation à payer le trop-perçu de loyer en découlant étant distinctes;

Qu’à nouveau, admettre l’annulation du chiffre 2 du dispositif reviendrait à modifier le fond du jugement, en privant l’intimé d’une réduction de loyer dont la Cour a retenu sans confusion possible qu’elle était due jusqu’à l’exécution complète des travaux;

Que si la requérante estimait incorrectes ou contraires au droit les modalités de paiement du trop-perçu de loyer revenant à l’intimé et fixées dans l’arrêt de la Cour, la voie du recours lui était ouverte;

Que, partant, la requérante sera déboutée des fins de sa demande de rectification et d’interprétation;

Qu’en vertu de l’art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

Statuant sur requête en rectification :

Rejette la requête formée le 28 avril 2023 par la VILLE DE GENEVE, tendant à la rectification de l’arrêt ACJC/418/2023 rendu le 27 mars 2023 par la Cour de justice dans la cause C/1745/2017.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

 

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Pauline ERARD, Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ et Monsieur Grégoire CHAMBAZ, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies et délais de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss. de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF: RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure à 15'000 fr.