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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2806/2023

ATAS/531/2025 du 30.06.2025 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2806/2023 ATAS/531/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 juin 2025

Chambre 3

 

En la cause

A______

représenté par Me Thierry STICHER, avocat

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’assuré), né en ______ 1969 au Kosovo, est en Suisse depuis 1990.

b. Le 20 septembre 2002, l’assuré a été victime d’un accident dont les suites ont été prises en charge par la CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : SUVA). L’intéressé a été mis au bénéfice d’une rente d’invalidité de 29% (décision de la SUVA du 9 décembre 2005).

c. Dans le cadre d’une première demande de prestations déposée par l’assuré le 18 août 2004 auprès de l’Office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI), le Service médical régional AI (ci-après : SMR) a retenu que l’intéressé disposait d’une capacité de travail de 25% dans son activité habituelle (ouvrier de la construction) et de 100%, depuis mai 2004, dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, c'est-à-dire n’impliquant, ni port de charges lourdes, ni mouvements répétitifs du poignet gauche ou vibrations (avis du 1er février 2005).

d. Par décision du 23 mai 2005, confirmée sur opposition le 3 août 2005, l’OAI a rejeté la demande de l’assuré au motif que le degré d’invalidité – évalué à 16% - était insuffisant pour ouvrir droit à des prestations.

e. Par arrêt du 18 octobre 2007, la Cour de céans a admis partiellement le recours interjeté par l’assuré, annulé la décision du 3 août 2005 et renvoyé la cause à l’OAI pour examiner la nécessité d’un reclassement et rendre une nouvelle décision. En effet, la Cour de céans avait pour sa part évalué le degré d’invalidité à 27.8%, de sorte que les conditions permettant l’octroi d’un reclassement étaient réunies. Il appartenait à l’OAI de déterminer si l’invalidité de l’assuré rendait une telle mesure nécessaire (ATAS/1135/2007).

f. Dans le cadre de la procédure de reclassement mise en œuvre par l’OAI, l’assuré a obtenu le permis de conduire catégorie professionnelle D1. En exerçant en tant que chauffeur professionnel à plein temps, son degré d’invalidité s’établissait à 27% (rapport de réadaptation professionnelle du 2 septembre 2010).

g. Par décision du 31 mars 2011, entrée en force, l’OAI a mis fin aux mesures professionnelles et nié à l’assuré le droit à une rente.

B. a. Le 30 novembre 2020, l’assuré, qui exerçait à plein temps en tant que chauffeur privé dans le cadre de son entreprise individuelle « B______ », inscrite depuis le 15 janvier 2018 au Registre du commerce, a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’OAI, en faisant état de problèmes dorsaux nécessitant une intervention chirurgicale et d’une incapacité de travail totale depuis le 1er juin 2020.

b. Le 25 janvier 2021, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a attesté l’existence de discopathies étagées lombaires, suite à un accident survenu en décembre 2019 et à une hernie discale. L’assuré souffrait également de douleurs à la cuisse et aux mollets. Les diagnostics retenus étaient ceux de claudication neurogène sur canal lombaire étroit et rétrécissement foraminal bilatéral L4-L5 et L5-S1 résistant au traitement conservateur. Une intervention par le docteur D______, spécialiste FMH en neurochirurgie, était prévue. Il était décrit que l’assuré n’arrivait plus à marcher, ni à rester debout longtemps, ni à porter des charges importantes, ni à conserver une position assise prolongée. L’incapacité de travail était totale dans toute activité. La situation devrait être réexaminée après l’intervention chirurgicale.

c. Le 23 février 2021, le docteur E_____, spécialiste FMH médecin praticien, a précisé notamment que la capacité de travail dans l’activité de chauffeur était désormais nulle et qu’il y avait également d’importantes répercussions sur la tenue du ménage, le port de charges étant limité à 2 kg.

d. Le 29 avril 2021, l’OAI a estimé que des mesures de réadaptation n’étaient pas indiquées.

e. Les 14 mai et 21 octobre 2021, le Dr C______ a confirmé la nécessité d’une intervention chirurgicale ; une reprise de travail dans une activité adaptée n’était pas envisageable et devrait être réévaluée après l’intervention.

f. Le 26 janvier 2022, le Dr E_____ a confirmé son rapport précédent, tout en mentionnant une infiltration lombaire en date du 17 janvier 2022.

g. Dans un rapport du 3 mars 2022, le Dr D______ a diagnostiqué une lombosciatalgie bilatérale sur canal lombaire étroit et, surtout, une sténose récessale bilatérale L4-L5 et L5-S1, une sténose foraminale L5-S1 bilatérale et une discarthrose marquée L5-S1. Une nouvelle imagerie par résonnance magnétique (IRM) lombaire du 21 février 2022 montrait une péjoration de la discarthrose L5-S1 par rapport à celle effectuée en août 2021, ce qui engendrait, au niveau L5-S1, une sténose récessale et foraminale bilatérale, combinée à une micro-instabilité et au niveau L4-L5 une sténose récessale marquée.

h. Le 31 mai 2022, le droit de l’assuré aux indemnités journalières perte de gain maladie a pris fin.

i. Le 17 octobre 2022, le SMR a relevé que l’assuré présentait des lombosciatalgies droites, une méniscopathie de grade III du genou gauche et des signes d’arthrose débutante à ce genou. Il convenait d’interroger les Drs C______ et D______.

j. Le 1er novembre 2022, le Dr C______ a diagnostiqué des discopathies et discarthroses lombaires et cervicales sévères, ajoutant qu’un accident par coup du lapin était survenu le 28 octobre 2021. Pour le surplus, l’assuré avait également heurté son genou gauche en ouvrant la porte de son véhicule, le 26 octobre 2022. Il était mentionné que « normalement » l’évolution serait favorable, avec une reprise du travail prévue pour le 15 novembre 2022. Un bilan radiologique était toutefois en cours pour éclaircir les suites du dernier accident. L’assuré ne pouvait ni rester longtemps debout, ni effectuer de longs trajets à pied, ni monter et descendre les escaliers. La capacité à exercer une activité adaptée était entière dès le 15 novembre 2022. L’assuré avait repris son activité habituelle le 1er octobre 2022.

k. Interpellé par l’OAI, le Dr D______ ne s’est pas prononcé sur la capacité fonctionnelle de l’assuré, ni sur son potentiel de réadaptation.

l. Depuis le 17 novembre 2022, l’assuré est associé-gérant et président de F______ ayant pour but l’exploitation d’une entreprise de transport.

m. Le 21 novembre 2022, le SMR a considéré que l’assuré présentait des lombosciatalgies droites sur canal lombaire étroit L4-L5 et L5-S1 associées à un rétrécissement foraminal bilatéral ainsi que des cervicalgies sur coup du lapin (le 28 octobre 2021). L’assuré était en incapacité totale de travail depuis juin 2020 dans son activité habituelle de chauffeur privé. En revanche, il avait recouvré une capacité de travail entière dès le 1er octobre 2022 dans une activité adaptée (permettant d’éviter la position statique assise et debout prolongée, le port de charges de plus de 10 kg, le port de charges répété de plus de 5 kg et la position en porte-à-faux du rachis). Selon les pièces, l’état de l’assuré s’était suffisamment amélioré pour lui permettre de reprendre son activité habituelle le 1er octobre 2022. Celle-ci n’était pas adaptée à la pathologie de l’assuré en raison de la position assise prolongée et du port de charges. En revanche, une activité adaptée d’épargne du rachis lombaire était exigible dès qu’il avait repris son activité habituelle en octobre 2022.

n. Le 3 mars 2023, l’OAI a établi un rapport d’enquête pour activité professionnelle indépendante, sur la base d’un entretien réalisé avec l’assuré le 26 janvier 2023. L’intéressé avait expliqué qu’il avait repris son activité habituelle de chauffeur dès décembre 2020, avec des périodes d’incapacités de travail, en fonction de son état de santé. Depuis octobre 2022, il exerçait à plein temps cette activité, qu’il pouvait adapter à sa convenance. Selon l’OAI, entre l’ouverture du droit à la rente en juin 2021 et le 1er octobre 2022, date à partir de laquelle l’assuré avait une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, l’intéressé avait pu maintenir une capacité de travail partielle dans son activité habituelle. Il résultait des calculs effectués qu’il subissait un préjudice économique de 50%. En comparant le revenu avant invalidité, fixé à CHF 71'993.- (selon le revenu retenu par la Cour de céans dans son arrêt du 18 octobre 2007, indexé à 2021), à celui après invalidité, de CHF 35'656.- (selon la moyenne des bénéfices d’exploitation corrigés pour les années 2021-2022), la perte de gain était de 50% de juin 2021 à septembre 2022. Dès octobre 2022, dès lors que l’assuré présentait une capacité de travail entière dans une activité adaptée et que son activité habituelle n’était pas exigible, il y avait lieu de déterminer son invalidité en appliquant la comparaison des revenus.

o. Le 24 mars 2023, l’OAI a procédé au calcul du degré d’invalidité pour la période débutant en octobre 2022. Le revenu statistique fondé sur l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2020 (TA1 ligne totale, niveau de compétence 1, indexé à 2022) s’établissait à CHF 65'322.- pour une activité à plein temps. Comparé au revenu sans invalidité, tel que ressortant de l’arrêt de la Cour de céans, réévalué, il en découlait un degré d’invalidité de 9.27%.

p. Par décision du 15 août 2023, l’OAI a reconnu à l’assuré le droit à une demi-rente d’invalidité sur la base d’un degré d’invalidité de 50%, du 1er juin 2021 au 30 septembre 2022, et nié le droit à des mesures professionnelles.

 

L’incapacité de travail de l’assuré avait été de 100% dans l’activité habituelle dès le 1er juin 2020, mais, dans une activité adaptée à son état de santé, l’assuré avait recouvré une capacité de travail de 100% dès le 1er octobre 2022.

Se basant sur l’enquête effectuée, l’OAI a retenu qu’entre l’ouverture du droit en juin 2021 et le recouvrement d’une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, le 1er octobre 2022, l’assuré avait pu conserver une capacité de travail partielle dans son activité de chauffeur, malgré l’absence d’exigibilité de celle-ci. Il a comparé le revenu avant invalidité, fixé à CHF 71'993.-, à celui après invalidité, de CHF 35'656.-, aboutissant ainsi à une perte de gain de CHF 36'337.- correspondant à un degré d’invalidité de 50%.

 

S’agissant de la période débutant le 1er octobre 2022, date à partir de laquelle l’assuré avait recouvré une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, la comparaison des revenus avant et après invalidité aboutissait à un degré d’invalidité de 9%, insuffisant pour ouvrir droit à des prestations.

 

L’assuré ayant repris son activité habituelle à plein temps depuis le 1er octobre 2022, bien que celle-ci ne soit plus exigible, la rente était supprimée avec effet au 30 septembre 2022.

 

C. a. Par écriture du 8 septembre 2023, l’assuré a interjeté recours contre cette décision, en faisant grief à l’intimé de ne pas avoir mis en œuvre une expertise ou un examen médical.

Il argue que la décision de l’OAI ne correspond pas à la réalité, puisque sa capacité de travail est amoindrie et en constante diminution. Certes, il a repris son activité de chauffeur à plein temps, mais son rendement est réduit. Qui plus est, s’il a repris cette activité, c’est contraint et forcé, au prix d’efforts très importants qui ne pourront être maintenus dans le temps. Il souffre en effet d’atteintes multiples au niveau de la colonne vertébrale, tant au niveau cervical qu’au niveau lombaire, mais aussi au niveau du poignet, du coude (arthrose débutante) et du genou gauche.

Á l’appui de son recours, le recourant a produit, notamment, un rapport d’IRM du coude gauche du 24 mars 2023, un rapport de radiographie du poignet gauche du 24 mars 2023, un rapport d’IRM de la colonne lombo-sacrée du 31 août 2023 et un rapport de radiographie de la colonne lombaire du 4 septembre 2023.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 3 octobre 2023, a conclu au rejet du recours.

c. Par écriture du 16 septembre 2023 (recte : octobre 2023), le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. L’intimé, par écriture du 8 novembre 2023, a fait de même, en se référant à l’avis du SMR du 30 octobre 2023.

Selon le SMR, il existe de nouveaux éléments médicaux, dans la mesure où l’IRM lombaire du 31 août 2023 rèvèle en L4-L5 une hernie discale extra-foraminale droite luxée vers le haut en conflit avec la racine L4 droite et où la radiographie du poignet gauche du 24 mars 2023 montre une arthrose du premier rayon. Cela étant, il n’y a aucune description d’un examen clinique. Le SMR rappelle que l’assuré a repris son activité habituelle de chauffeur alors que celle-ci n’était plus exigible.

e. Le recourant, en date du 11 mars 2024, a demandé l’audition du Dr C______, la mise sur pied d’une expertise médicale et d’une observation professionnelle judiciaire et, quant au fond, l’octroi d’une rente entière dès le 1er mai 2021.

Il a produit un rapport complémentaire du Dr C______ du 19 février 2024, selon lequel sa capacité de travail est limitée à 50% dans toute activité. Même s’il s’astreint à travailler plus dans son activité habituelle, cela n’est pas exigible de sa part, l’effort effectué étant bien supérieur à ses limites physiques, compte tenu de ses nombreuses limitations fonctionnelles.

Sur le plan économique, le recourant ne conteste pas le revenu avant invalidité retenu par l’intimé. En revanche, il n’est pas d’accord avec les revenus après invalidité pris en compte.

S’agissant de la période antérieure au 1er octobre 2022, l’intimé s’est fondé sur ses comptes d’exploitation 2021 et 2022 corrigés pour établir une moyenne, alors qu’il convenait plutôt, selon le recourant, de prendre en considération les comptes d’exploitation 2018 et 2019, antérieurs à l’aggravation de son état de santé, tout en réduisant le chiffre d’affaires réalisé pour tenir compte de l’incapacité de travail de 50% attestée par le Dr C______.

S’agissant de la période débutant le 1er octobre 2022, l’intimé a effectué un calcul sur une base statistique, en se fondant sur une prétendue amélioration de son état de santé qui n’a en réalité jamais eu lieu.

Le recourant a produit également un rapport du 22 décembre 2023 du docteur G_____, spécialiste FMH en radiologie auprès du Centre H______. Il en ressort que, depuis une prise en charge par deux sessions infiltratives, l’état du recourant s’est amélioré de 70%, avec un bénéfice important pour les lombalgies et un effet plus modeste sur la sciatalgie droite.

f. Par écriture du 9 avril 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

Il se réfère à un nouvel avis du SMR. Celui-ci après avoir pris connaissance de l’attestation du Dr C______ du 19 février 2024, rappelle qu’en novembre 2022, ce même médecin retenait une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles d’épargne du rachis, avis auquel le SMR avait souscrit. Dans son rapport actualisé, le médecin conclut désormais à une capacité de travail de 50% en constatant que son patient exerce au-dessus de ses forces son activité habituelle. Il retient des limitations fonctionnelles d’épargne du rachis, que le SMR a également admises, tout comme le fait que l’activité habituelle n’était plus exigible. Le SMR relève que le seul document médical nouveau est le rapport d’IRM lombo-sacrée du 31 août 2023 qui met en évidence une inflammation de type Modic 1 en L5-S1 (nouvelle) et une hernie discale en L4-L5 (nouvelle également). Cependant, si une aggravation de l’état de santé du recourant est possible au niveau lombaire, en l’absence de descriptions cliniques, elle ne peut être objectivée, raison pour laquelle le SMR maintient sa précédente appréciation.

g. Par courrier du 11 avril 2024, la Cour de céans a demandé au recourant de requérir de son médecin traitant une description clinique attestant son aggravation de santé telle que réclamée par le SMR.

h. Le 2 mai 2024, le recourant a produit un courrier du Dr C______ du 29 avril 2024, tout en s’étonnant que le SMR n’ait pas conclu à une instruction complémentaire. Le Dr C______ mentionne que son patient, qui souffre de la colonne lombaire, est en traitement auprès du Centre H______ et que la symptomatologie évolue en s’aggravant.

i. Par écriture du 4 juin 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

Selon un nouvel avis du SMR, le rapport du Dr C______ n’apporte pas de nouvel élément médical objectif, les limitations fonctionnelles décrites ayant déjà été admises par le SMR, lequel a également admis que l’activité habituelle n’était plus exigible. Quant au rapport de consultation du Dr G_____, il fait état d’une amélioration de 70% des lombalgies et sciatalgies, suite à deux infiltrations et n’amène pas de nouvel élément médical objectif, les douleurs péritendineuses évoquées accompagnant souvent les problèmes de rachis lombaire et les limitations fonctionnelles d’épargne du rachis lombaire demeurant valables.

j. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans la forme et en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA et 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).

2.             Le litige porte sur le taux d’invalidité du recourant à compter du 1er juin 2021 et son droit au versement d’une rente au-delà du 30 septembre 2022.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705), y compris les ordonnances correspondantes, sont entrées en vigueur. Dans le cadre de cette révision, l'art. 17 LPGA a notamment été adapté.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2 et les références).

Dans les cas de révision selon l'art. 17 LPGA, conformément aux principes généraux du droit intertemporel (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), il convient d’évaluer, selon la situation juridique en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, si une modification déterminante est intervenue jusqu’à cette date. Si tel est le cas, les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables. Si la modification déterminante est intervenue après cette date, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. La date pertinente de la modification est déterminée par l'art. 88a RAI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2 ; 8C_644/2022 du 8 février 2023 consid. 2.2.3).

Si un droit à la rente a pris naissance jusqu’au 31 décembre 2021, un éventuel passage au nouveau système de rentes linéaire s'effectue, selon l'âge du bénéficiaire de rente, conformément aux let. b et c des dispositions transitoires de la LAI relatives à la modification du 19 juin 2020. Selon la let. b al. 1, les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente a pris naissance avant l'entrée en vigueur de cette modification et qui, à l'entrée en vigueur de la modification, ont certes 30 ans révolus, mais pas encore 55 ans, conservent la quotité de la rente tant que leur taux d'invalidité ne subit pas de modification au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C _499/2022 du 29 juin 2023 consid. 4.1).

3.2 En l’occurrence, le litige porte sur la quotité de la rente d'invalidité dont il n'est pas contesté que le droit est né antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables.

Dans la mesure où le recourant avait, au 1er janvier 2022, 30 ans révolus mais moins de 55 ans, la quotité de sa rente subsistera tant que son taux d'invalidité ne subira pas de modification au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA. Si une modification déterminante du taux d'invalidité se produit après le 31 décembre 2021, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. Toutefois, cette question peut demeurer en l'occurrence indécise au vu du sort réservé au recours.

4.              

4.1 Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA, applicable par analogie (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références ; 125 V 413 consid. 2d et les références).

Selon l'art. 17 al. 1 LPGA, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2022, la rente d’invalidité est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d’invalidité de l’assuré : subit une modification d’au moins 5 points de pourcentage (let. a) ou atteint 100% (let. b).

Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA (ATF 149 V 91 consid. 7.5 et les références). La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et les références).

4.2 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable.

4.3 A droit à une rente d’invalidité, l’assuré dont la capacité de gain ou la capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, qui a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et qui, au terme de cette année, est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (art. 28 al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral I.654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

5.              

5.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

5.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

5.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

5.3.1 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

5.3.2 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

5.3.3 Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères : s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références).

5.3.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

5.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

5.5 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

6.              

6.1 En l’espèce, dans le cadre d’une première demande de prestations déposée en août 2004 en raison d’une atteinte au poignet gauche, le recourant, qui était alors ouvrier dans le bâtiment, a bénéficié d’un reclassement dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles en tant que chauffeur professionnel qu’il pouvait exercer à 100%. Á l’issue de ce reclassement, son degré d’invalidité a été évalué à 27%. Par décision du 31 mars 2011, entrée en force, l’intimée a mis fin aux mesures professionnelles et nié le droit à une rente d’invalidité.

Le 30 novembre 2020, le recourant a déposé une nouvelle demande de prestations, en invoquant des problèmes dorsaux.

Par décision litigieuse du 15 août 2023, l’intimé lui a reconnu le droit à une demi-rente du 1er juin 2021 au 30 septembre 2022. Se fondant sur l’avis du SMR du 21 novembre 2022, l’intimé a admis une incapacité totale de travail dans toute activité à compter de juin 2020, mais considéré qu'une amélioration était intervenue le 1er octobre 2022, date à compter de laquelle l'intéressé avait recouvré une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, sans baisse de rendement.

S’agissant de la période antérieure au 1er octobre 2022, quand bien même le recourant présentait une incapacité de travail totale dans toute activité, admise par le SMR, et partant, par l’intimé, le recourant a tout de même exercé à temps partiel son activité habituelle de chauffeur, ce qui n’est pas contesté, ni contestable.

L’intéressé conteste toutefois avoir recouvré une capacité de travail entière dans une activité adaptée, sans baisse de rendement, dès le 1er octobre 2022.

Il convient dès lors d’examiner si les conclusions du SMR du 21 novembre 2022, en tant qu’elles retiennent une amélioration de l’état de santé à compter du 1er octobre 2022, ont valeur probante.

Dans son avis, le SMR a considéré que le recourant présentait des lombosciatalgies droites sur canal lombaire étroit L4-L5 et L5-S1 associées à un rétrécissement foraminal bilatéral ainsi que des cervicalgies sur coup du lapin, entraînant les limitations fonctionnelles suivantes : la position statique assise et debout prolongée, le port de charges de plus de 10 kg, le port de charges répété de plus de 5 kg et la position en porte-à-faux du rachis. Depuis juin 2020, l’incapacité de travail était totale, mais entière dès le 1er octobre 2022 dans une activité adaptée. Selon les pièces, l’état du recourant s’était suffisamment amélioré pour lui permettre de reprendre son activité habituelle le 1er octobre 2022, laquelle n’était pas adaptée à la pathologie en raison de la position assise prolongée et du port de charges.

La Cour de céans relève que l'avis du 21 novembre 2022 du SMR ne repose pas sur des observations cliniques auxquelles un médecin de ce service aurait personnellement procédé, mais sur une appréciation fondée exclusivement sur une analyse des documents médicaux versés au dossier. Le résultat de cette appréciation - soit l'existence d'une capacité de travail entière dans une activité adaptée dès le 1er octobre 2022 - n'est corroboré par aucune pièce du dossier. Si, à compter de cette date, le recourant s’est certes astreint à reprendre son activité habituelle à plein temps, malgré l’existence d’une incapacité de travail totale en tant que chauffeur, on ne saurait en déduire, comme l’a fait le SMR, l’existence d’une amélioration de son état de santé et d’une capacité de travail totale dans une activité adaptée, sans baisse de rendement, dès le 1er octobre 2022. En procédant de la sorte, le SMR a pris de nouvelles conclusions, alors qu'il doit se limiter à apprécier celles déjà existantes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_518/2007 du 14 juillet 2008 consid. 3.2 et les références).

Certes, le Dr C______ a-t-il retenu une capacité de travail totale dans une activité adaptée dès le 15 novembre 2022 (rapport du 1er novembre 2022), alors qu’elle était précédemment nulle en raison des troubles lombaires (rapport du 25 janvier 2021). Cependant, le rapport du Dr C______ du 1er novembre 2022, succinct et peu étayé, ne fournit aucune explication permettant de comprendre les raisons d’une telle amélioration à compter du 15 novembre 2022, d’autant moins que ce médecin y fait état de discopathies et discarthroses lombaires « sévères », ainsi que de nouveaux troubles à la colonne cervicale et au genou gauche venant s’ajouter aux atteintes lombaires. Le recouvrement d’une capacité de travail totale dans une activité adaptée à compter du 15 novembre 2022 ne s’explique pas non plus par le rapport du 19 avril 2024, pourtant détaillé, du Dr C______.

Par ailleurs, les autres rapports versés au dossier ne permettent pas non plus de retenir que le recourant aurait recouvré une pleine capacité de travail dans une activité adaptée sans baisse de rendement, que ce soit le 1er octobre 2022, comme l’a retenu le SMR, ou postérieurement.

En outre, alors que le SMR avait estimé, dans son avis du 17 octobre 2022, nécessaire d’interroger le Dr D______ avant de rendre ses conclusions finales, force est de constater que ce médecin ne s’est jamais prononcé ni sur les limitations fonctionnelles du recourant, ni sur sa capacité de travail et son rendement, alors que ce spécialiste a fait remarquer notamment que l’IRM lombaire du 21 février 2022 montrait une péjoration de la discarthrose L5-S1 par rapport à l’IRM d’août 2021 (rapport du 3 mars 2022). Qui plus est, les conclusions finales du SMR du 21 novembre 2022, sur lesquelles s’est fondé l’intimé pour rendre sa décision litigieuse, apparaissent incomplètes dans la mesure où, comme le fait valoir le recourant à juste titre, elles ne mentionnent pas l’atteinte au poignet gauche retenue dans le cadre de la première demande de prestations, ni les limitations fonctionnelles qui y sont liées. De surcroît, à teneur des avis du SMR des 30 octobre 2023 et 25 mars 2024, il est possible que le recourant ait présenté une aggravation - antérieure à la date de la décision litigieuse -, de ses troubles lombaires (une inflammation de type Modic 1 en L5-S1 et une hernie discale en L4-L5 ; cf. rapport d’IRM du 31 août 2023) et du poignet gauche (arthrose du premier rayon ; cf. rapport de radiographie du 24 mars 2023), laquelle devrait faire l’objet d’une instruction médicale.

Enfin, la Cour de céans ne saurait se fonder, sans autre instruction, sur les rapports du Dr G_____ du 22 décembre 2023 et du Dr C______ du 19 février 2024, établis postérieurement à la décision litigieuse et faisant notamment état d’une amélioration des lombalgies et de la sciatalgie droite, respectivement, d’une capacité de travail de 50% dans toute activité, dès lors que ces médecins ne précisent pas à quelle date remontent leurs constatations.

Il ressort de ce qui précède que les pièces versées au dossier ne permettent pas de confirmer qu'à compter du 1er octobre 2022, le recourant présentait, au degré de la vraisemblance prépondérante, une capacité de travail entière dans une activité adaptée, sans baisse de rendement.

Force est ainsi de constater que l'intimé ne pouvait se fonder sur les conclusions du SMR pour rendre sa décision litigieuse d’octroi de rente d’invalidité limitée au 30 septembre 2022.

Dans ces conditions, en l'absence d'une appréciation suffisamment convaincante et circonstanciée permettant de déterminer si et dans quelle mesure la capacité de travail du recourant s'est améliorée à compter du 1er octobre 2022, la Cour de céans n'est pas en mesure d'apprécier de manière adéquate sa situation médicale et de déterminer s'il a présenté un changement important au sens de l'art. 17 LPGA. Il se justifie par conséquent de renvoyer la cause à l'office intimé pour qu'il procède à une instruction complémentaire, sous la forme d'une expertise indépendante, au sens de l'art. 44 LPGA. Un renvoi à l'administration se justifie, en l'occurrence, vu l'absence d’une expertise mise en œuvre par l'intimé.

6.2 Il convient à présent d’examiner le calcul du degré d’invalidité effectué par l'intimé pour la période antérieure au 1er octobre 2022.

6.2.1 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

6.2.2 Pour évaluer le taux d’invalidité d’un assuré exerçant une activité lucrative, le revenu qu’il aurait pu obtenir, s’il n’était pas invalide, est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré. Le Conseil fédéral fixe les revenus déterminants pour l’évaluation du taux d’invalidité ainsi que les facteurs de correction applicables (art. 16 LPGA et 28a al. 1 LAI).

6.2.3 Pour évaluer le taux d’invalidité, il existe principalement trois méthodes - la méthode générale de comparaison des revenus, la méthode spécifique et la méthode mixte - dont l'application dépend du statut du bénéficiaire potentiel de la rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré sans activité lucrative, assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel (ATF 137 V 334 consid. 3.1). La détermination du taux d'invalidité ne saurait reposer sur la simple évaluation médico-théorique de la capacité de travail de l'assuré car cela revient à déduire de manière abstraite le degré d'invalidité de l'incapacité de travail, sans tenir compte de l'incidence économique de l'atteinte à la santé (ATF 114 V 281 consid. 1c et 310 consid. 3c ; RAMA 1996 n° U 237 p. 36 consid. 3b).

Chez les assurés qui exerçaient une activité lucrative à plein temps avant d'être atteints dans leur santé physique, mentale ou psychique, il y a lieu de déterminer l'ampleur de la diminution des possibilités de gain de l'assuré, en comparant le revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré ; c'est la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 1 LAI en corrélation avec l'art. 16 LPGA) et ses sous-variantes, la méthode de comparaison en pour-cent et la méthode extraordinaire de comparaison des revenus (ATF 137 V 334 consid. 3.1.1 et les références).

Dans le cas d’un indépendant, le degré d’invalidité ne saurait être déterminé en appliquant la méthode de la comparaison en pour-cent, cette méthode ne prenant pas en considération le fait que la gestion d'une structure commerciale engendre des charges fixes et incompressibles, telles que loyer, mobilier ou assurances, qui sont indépendantes de la variation du degré d'activité. Une diminution du chiffre d'affaires ne se traduit donc pas par une diminution proportionnelle du bénéfice. De telles circonstances nécessitent bien plutôt l'examen concret de la situation de la personne assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_44/2011 du 1er septembre 2011 consid. 4.2 et 4.3).

Lorsque l’assuré est une personne de condition indépendante, la comparaison porte sur les résultats d’exploitation réalisés dans son entreprise avant et après la survenance de l’invalidité. Ce n’est que si ces données comptables ne permettent pas de tirer des conclusions valables sur la diminution de la capacité de gain due à l’invalidité – ce qui est le cas lorsque les résultats de l’exploitation ont été influencés par des facteurs étrangers à l’invalidité – que le taux d’invalidité doit être évalué en application de la méthode extraordinaire (consistant à évaluer le taux d’invalidité d’après l’incidence de la capacité de rendement amoindrie sur la situation économique concrète). Les résultats d’exploitation d’une entreprise dépendent en effet souvent de nombreux paramètres difficiles à apprécier, tels que la situation conjoncturelle, la concurrence, l’aide ponctuelle des membres de la famille, des personnes intéressées dans l’entreprise ou des collaborateurs, lesquels constituent des facteurs étrangers à l’invalidité. Ainsi, il convient, dans chaque cas, afin de déterminer la méthode d’évaluation applicable, d’examiner si les documents comptables permettent ou non de distinguer la part du revenu qu’il faut attribuer aux facteurs étrangers à l’invalidité de celle qui revient à la propre prestation de travail de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_2/2023 du 7 septembre 2023 et les références).

Si l'on ne peut déterminer ou évaluer sûrement les deux revenus en cause, il faut, en s'inspirant de la méthode spécifique pour personnes sans activité lucrative (art. 28a al. 2 LAI en corrélation avec les art. 27 RAI et 8 al. 3 LPGA), procéder à une comparaison des activités et évaluer le degré d'invalidité d'après l'incidence de la capacité de rendement amoindrie sur la situation économique concrète (procédure extraordinaire d'évaluation de l'invalidité ; ATF 128 V 29 consid. 1 et les références). La méthode extraordinaire ne devra pas être appliquée non seulement lorsque les données comptables permettent de tirer des conclusions valables sur la diminution de la capacité de gain due à l’invalidité, mais aussi lorsque, en raison d’un changement important survenu dans l’exploitation d’un indépendant, les répercussions économiques de la baisse de rendement sur les divers champs d’activité ne peuvent plus être établies de manière réaliste (arrêt du Tribunal fédéral I 499/02 du 17 juin 2003 consid. 6 ; Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité, 2018, n. 138 ad art. 28a).

6.3 En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA.

6.4 On relèvera tout d’abord que l’incapacité de travail durable ayant débuté en juin 2020, c’est à bon droit que l’intimé a fixé le début du droit à la rente d’invalidité au 1er juin 2021, soit à l’issue du délai d’attente d’une année (art. 28 al. 1 let. c LAI).

S’agissant de la période du 1er juin 2021 au 30 septembre 2022, l’intimé s’est fondé le rapport d’enquête économique du 3 mars 2023 pour retenir un degré d’invalidité de 50%.

En l’occurrence, le service des enquêtes de l’intimé n’a pas déterminé le taux d’invalidité du recourant en application de la méthode extraordinaire, mais ordinaire, soit en comparant le revenu tiré de son activité indépendante avec invalidité et le revenu sans invalidité provenant de son activité d’ouvrier dans la construction qui était la sienne avant l’accident dont il a été victime le 20 septembre 2002 (CHF 62'335.- en 2004, indexé à 2021, soit CHF 71'993.-). Á juste titre, le recourant ne conteste pas le revenu sans invalidité retenu par l’intimé.

S’agissant de la détermination du revenu avec invalidité, on rappellera que quand bien même le recourant présentait une incapacité de travail totale dans toute activité, admise par le SMR, et partant, par l’intimé, le recourant a tout de même exercé à temps partiel son activité habituelle de chauffeur dès décembre 2020, ce qui n’est pas contesté par ce dernier.

Le service des enquêtes de l’intimé s’est procuré les pièces comptables du recourant pour les années 2019 à 2022, qu’il a corrigés pour porter en déduction notamment les indemnités journalières perte de gain maladie et les allocations COVID-19 ou des dépenses non pertinentes pour la comparaison des revenus, tel que le loyer pour l’occupation d’une pièce. Aussi faut-il admettre qu’après les correctifs apportés aux bénéfices d’exploitation, la moyenne des bénéfices 2021-2022 ainsi corrigés, soit CHF 35'656.-, correspond à la part de revenu résultant de la prestation de travail du recourant pendant cette période, de sorte que le recours à une méthode autre que la méthode de comparaison des revenus mise en œuvre par l’intimé ne s’impose pas.

Le recourant, qui ne conteste pas les bénéfices d’exploitation ainsi corrigés, fait valoir que les comptes 2021 et 2022 ne peuvent être utilisés dès lors qu’il effectue son activité au-delà de ce qui est exigible « au prix d’un effort bien supérieur à ses limites physiques dues à sa santé » selon le Dr C______ (rapport du 19 février 2024) et qu’il convient plutôt de se fonder sur les comptes d’exploitation 2018-2019, tout en réduisant les chiffres d’affaires réalisés pour tenir compte de son incapacité de travail.

Or, la chambre de céans ne saurait suivre le raisonnement du recourant et se fonder sur les bénéfices obtenus avant le début de son incapacité de travail. On rappellera en effet que dans le cadre de la méthode de la comparaison des revenus, lorsque l’assuré est une personne de condition indépendante, le revenu avec invalidité se détermine sur les résultats d’exploitation réalisés dans son entreprise après la survenance de l’invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_2/2023 du 7 septembre 2023 consid. 3.3), soit, en l’occurrence, dès 2021.

Partant, c’est à juste titre que l’intimé a comparé la moyenne des bénéfices d’exploitation 2021-2022, soit CHF 35'656.-, au revenu sans invalidité de CHF 71'993.- en 2021, et obtenu une perte de gain de CHF 36'337.- correspondant à un degré d’invalidité de 50%, et ouvrant droit à une demi-rente dès le 1er juin 2021.

La question d’une amélioration de la capacité de travail à compter du 1er octobre 2022 devant être instruite, il n'est pas nécessaire, à ce stade de la procédure, d'examiner les griefs du recourant sur les modalités du calcul d'invalidité opéré par l'intimé pour la période postérieure au 30 septembre 2022.

7.             En conséquence, le recours est partiellement admis, la décision litigieuse annulée en tant qu’elle limite le droit du recourant à une rente d’invalidité au 30 septembre 2022 et confirmée pour le surplus, la cause étant renvoyée à l'intimé pour instruction complémentaire, sous la forme d’une expertise indépendante, au sens de l’art. 44 LPGA. À l'issue de cette instruction, l'intimé rendra, dans les meilleurs délais, une nouvelle décision quant au droit du recourant à une rente d'invalidité dès le 1er octobre 2022.

Le recourant a droit à des dépens, qui seront fixés à CHF 3'000.- (art. 61 let. g LPGA ; 89H al. 3 LPA et 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

La procédure en matière d'octroi de prestations de l'assurance-invalidité n'étant pas gratuite et au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimé du 15 août 2023 en tant qu’elle limite le droit du recourant à une rente d’invalidité au 30 septembre 2022.

4.        La confirme pour le surplus.

5.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

6.        Condamne l’intimé à verser au recourant une indemnité de dépens de CHF 3'000.-.

7.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Pascale HUGI

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le