Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/299/2025 du 25.04.2025 ( PC ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/3122/2024 ATAS/299/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 25 avril 2025 Chambre 9 |
En la cause
A______,
| recourant |
contre
SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES | intimé |
A. a. A______, né le ______ 1996, a été mis au bénéfice d’une curatelle de représentation et de gestion du patrimoine le 25 juin 2018. Le service de protection de l’adulte (ci-après : SPAd) l’a pris en charge à partir du 28 mars 2019.
b. Par décision du 7 mars 2019, l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) lui a reconnu le droit à une rente d’invalidité entière dès le 1er novembre 2016.
c. Le 4 juin 2020, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) a confié sa curatelle à Me Pedro DA SILVA NEVES.
d. Par décision du 22 octobre 2020, il a été mis au bénéfice de prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC) et fédérales (ci-après : PCF) avec effet au 1er juillet 2020.
B. a. Le 1er juin 2022, l’État de Genève a conclu une « convention de règlement » avec l’assuré, laquelle prévoyait l’octroi en faveur de ce dernier d’une indemnité de CHF 97'305.70, dont CHF 39'991.- à la charge de l’assurance de responsabilité civile et CHF 57'314.70, à la charge de l’État de Genève. Cette indemnité était convenue « pour toutes les conséquences présentes et futures en relation avec les divers manquements de diligence dans l’exécution de certaines tâches comprises dans le mandat de curatelle instaurée en faveur de l’assuré du 28 mars 2019 au 4 juin 2020 ».
b. Le 13 septembre 2022, l’assuré, par l’intermédiaire de son curateur, a informé le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) du versement de cette indemnité. Il a expliqué que le SPAd avait omis de solliciter des prestations complémentaires pour la période du 1er novembre 2016 au 31 mars 2019, ce qui avait eu des répercussions sur les subsides d’assurance-maladie auxquels il aurait eu droit. Le solde de son compte d’épargne s’élevait ainsi à CHF 101'983.-. Or, ce montant ne résultait pas d’un enrichissement, mais de la réparation du dommage causé par le SPAd, étant précisé que la somme perçue aurait dû être étalée sur la période 2016-2019 pour lui permettre de couvrir son minimum vital. Il serait donc inéquitable de le pénaliser en raison d’un manquement du SPAd.
c. Par courrier du 24 octobre 2022, le SPC a informé l’assuré avoir repris le calcul de ses prestations complémentaires, avec effet au 1er juin 2022. Il avait procédé à la prise en compte d’un « capital pour tort moral » suite à l’indemnisation perçue de l’État de Genève pour un montant total de CHF 97'305.70, et ce uniquement pour les PCF. Pour les PCC, cette indemnité n’était pas prise en compte dans ses calculs en application de l’art. 5 let. c loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25). Le montant total des PCF/PCC demeurait ainsi identique. Dès le 1er novembre 2022, sa prestation mensuelle s’élèverait à CHF 2'021.-, hors réduction individuelle de primes d’assurance-maladie.
C. a. Par décision du 19 juin 2024, le SPC a recalculé le droit aux prestations complémentaires à la suite d’une révision du dossier. Il a exigé la restitution d’un montant de CHF 12'276.- à titre de PCF et PCC versées à tort entre le 1er janvier et le 30 juin 2024. Sa fortune nette était supérieure aux seuils prévus par l’art. 9a LPC, entré en vigueur le 1er janvier 2021, également applicable en vertu de l’art. 1A al. 1 LPCC. Il n’avait plus le droit aux prestations complémentaires à compter du 1er janvier 2024.
b. Le 26 juin 2024, l’assuré, par l’intermédiaire de son curateur, a formé opposition à cette décision. La quasi-totalité de sa fortune provenait d’une indemnité pour tort moral, laquelle ne devait pas être prise en compte dans le calcul de son droit aux prestations. Sa fortune était par ailleurs « récemment repassée sous le seuil des CHF 100'000.- ». Son droit aux PCF devait donc être rétabli à compter du 1er juillet 2024.
c. Par décision sur opposition du 22 août 2024, le SPC a maintenu sa position. Sa fortune était supérieure à CHF 100'000.- dès le 1er janvier 2024. Le montant de CHF 97'307.50 perçu par l’assuré de la part de l’État de Genève et l’assurance de responsabilité civile à titre d’indemnisation résultant d’une mauvaise gestion du SPAd ne constituait ni une indemnité en capital obtenue à titre de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice corporel, ni une indemnisation du tort moral. Il n’était ainsi pas concerné par l’art. 5 let. c ch. 2 LPCC.
D. a. Par acte du 23 septembre 2024, l’assuré, par l’intermédiaire de son curateur, a recouru devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant à son annulation.
La somme perçue par l’assuré aurait dû être étalée sur la période allant de 2016 à 2019 pour lui permettre de couvrir son minimum vital. Les divers manquements du SPAd l’avaient conduit à vivre dans la précarité, avec des ressources financières inférieures au minimum vital, et dans un logement inadapté. Le SPC avait été réceptif à cet élément puisqu’il avait décidé que cette indemnité ne serait pas prise en compte dans les calculs relatifs aux PCC, en application de la déduction de l’art. 5 let. c LPCC. En revanche, en l’absence de disposition semblable en droit fédéral, il devait tenir compte de l’indemnité dans les calculs relatifs aux PCF.
La décision contrevenait au principe de protection de la bonne foi. Le SPC était revenu sur le traitement qu’il avait initialement retenu pour l’indemnité perçue sur le plan du droit aux PCC. Cette décision avait influencé la gestion de ses avoirs. Dans la mesure où il lui avait été indiqué que l’indemnité perçue n’influencerait pas son droit aux PCC, le capital avait été conservé dans le but de concrétiser divers futurs projets, en sachant que son minimum vital restait couvert par les PCC. La décision entreprise l’amenait à devoir puiser dans cette indemnité pour couvrir son minimum vital, ce qui lui causait un préjudice de plusieurs milliers de francs, sans tenir compte du montant de CHF 12'276.- dont le SPC demandait la restitution.
b. Par réponse du 16 octobre 2024, le SPC a conclu au rejet du recours. Il n’était pas contesté qu’il était intervenu dans une situation concrète à l’égard du recourant, qu’il avait agi dans les limites de sa compétence et que la loi n’avait pas changé sur la question litigieuse depuis le moment où le renseignement erroné avait été donné. Cependant, son curateur aurait immanquablement dû s’étonner du fait que l’indemnisation résultant d’une mauvaise gestion du SPAd n’avait pas été prise en compte dans le calcul des PCC. Le recourant n’avait, au demeurant, pas établi qu’il se serait fondé sur l’erreur commise par le SPC pour prendre des dispositions qu’il ne saurait modifier sans préjudice. Il puisait déjà dans son capital pour subvenir en partie à ses besoins puisque ledit capital était pris en compte dans le calcul des PCF. Le SPC ne pouvait être contraint à persister dans son erreur sans limite dans le temps : d’une part, les PC étaient des prestations annuelles ; d’autre part, les art. 53 al. 2 LPGA, 10 al. 2 LPFC et 43A al. 2 LPCC autorisaient le SPC à reconsidérer des décisions formellement passées en force lorsqu’elles étaient manifestement erronées et que leur rectification revêtait une importance notable.
c. Par réplique du 25 novembre 2024, le recourant a relevé qu’il n’avait aucune raison de penser qu’il s’agissait d’une erreur de la part du SPC. Il avait notamment été relevé qu’il serait inéquitable de le pénaliser, dans la mesure où le capital aurait dû être étalé sur la période 2016 à 2019 pour lui permettre de couvrir son minimum vital. Il avait donc toutes les raisons de penser qu’il s’agissait d’une interprétation favorable de la part de l’autorité spécialisée, qui avait connaissance de tous les éléments nécessaires à son appréciation. S’il avait su que l’indemnisation influencerait son droit aux PCC, il l’aurait utilisée dans une proportion raisonnable afin d’élargir son minimum vital et avoir des conditions de vie plus confortables. Il serait donc sanctionné pour avoir privilégié l’épargne et le maintien d’un minimum vital restreint.
d. Cette écriture a été transmise à l’intimé.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 LPCC.
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 En matière de prestations complémentaires fédérales, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de trente jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA, applicable par le renvoi de l’art. 1 al. 1 LPC ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]) auprès du tribunal des assurances du canton de domicile de l'assuré (art. 58 al. 1 LPGA).
S'agissant des prestations complémentaires cantonales, l'art. 43 LPCC ouvre les mêmes voies de droit.
Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).
2. Le litige porte sur le bien-fondé de la demande de restitution du montant de CHF 12'276.- pour la période du 1er janvier au 30 juin 2024.
2.1 Aux termes de l'art. 24 al. 1 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées ; la restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Le service peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (art. 43A al. 2 LPCC).
Selon la jurisprudence relative à l'art. 25 al. 1 LPGA - dont le texte est identique à celui de l'art. 24 al. 1 LPCC -, l'ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu'il n'avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d'aucune intention malicieuse, mais aussi d'aucune négligence grave. Il s'ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 avec les renvois). Les comportements excluant la bonne foi ne sont pas limités aux violations du devoir d'annoncer ou de renseigner. Peuvent entrer en ligne de compte également d'autres comportements, notamment l'omission de se renseigner auprès de l'administration (arrêts du Tribunal fédéral 9C_318/2021 du 21 septembre 2021 consid. 3.1 ; 8C_535/2018 du 29 octobre 2018 consid. 5.1 ; 9C_184/2015 du 8 mai 2015 consid. 2 et la référence). Dans le contexte de calculs erronés de prestations complémentaires, la personne concernée ne peut pas se prévaloir de sa bonne foi si elle a omis de contrôler ou a contrôlé de manière peu précise la feuille de calcul et ne constate pas, de ce fait, une erreur facilement décelable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_318/2021 précité consid. 3.2 et les arrêts cités).
2.2 Le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant (art. 25 al. 2 dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2021).
3.
3.1
3.1.1 Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585).
Conformément à l’al. 1 des dispositions transitoires de ladite modification, l’ancien droit reste applicable trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle.
Par ailleurs, selon la circulaire concernant les dispositions transitoires de la réforme des PC (C-R PC), valable dès le 1er janvier 2021, il n’est nécessaire d’établir un calcul comparatif durant le délai transitoire que pour les cas dans lesquels le calcul de la prestation complémentaire se fonde sur l’ancien droit. Dès que le calcul est établi selon le nouveau droit, ce dernier reste applicable pour le reste de la période transitoire (ch. 3104).
3.1.2 En l’occurrence, le litige porte sur le droit aux PCC du recourant à compter du 1er janvier 2024. Partant, les dispositions applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.
3.2 Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC, ainsi que les conditions relatives à la fortune nette prévues à l’art. 9a LPC, ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-invalidité, conformément à l'art. 4 al. 1 let. c LPC.
Au plan fédéral, en vertu de l’art. 9 al. 1 LPC, le montant de la PC annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. À teneur de l’art. 11 al. 1 let. c, 1re phr., LPC, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2021, les revenus déterminants comprennent un quinzième de la fortune nette, dans la mesure où elle dépasse CHF 30'000.- pour les personnes seules.
Conformément à l’art. 9a al. 1 LPC, entré en vigueur le 1er janvier 2021, les personnes dont la fortune nette est inférieure aux seuils suivants ont droit à des prestations complémentaires : CHF 100’000.- pour les personnes seules (let. a). Il découle de cette nouvelle disposition légale, appliquée a contrario, que le droit même à des PCF est désormais exclu pour les personnes assurées dont la fortune nette dépasse l'un de ces seuils fixés à l'art. 9a LPC.
3.3 Sur le plan cantonal, selon l’art. 2 al. 1 let. a, b et d LPCC, ont droit aux PCC les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève (let. a) ; et qui sont au bénéfice d'une rente de l'assurance-vieillesse et survivants, d'une rente de l'assurance-invalidité, d'une allocation pour impotent de l'assurance-invalidité ou reçoivent sans interruption pendant au moins six mois une indemnité journalière de l'assurance-invalidité (let. b) ; et qui répondent aux autres conditions de la présente loi (let. d).
L’art. 5 let. c LPCC dispose que le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale – la LPC – et ses dispositions d'exécution, moyennant les adaptations suivantes, notamment : en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de un huitième, et ce après déduction : 1° des franchises prévues par cette disposition, 2° du montant des indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice corporel, y compris l'indemnisation éventuelle du tort moral.
Ainsi, en matière de prestations complémentaires cantonales, les indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice corporel, ne sont pas intégrées dans la fortune. Il s’agit là de toute évidence principalement des dommages-intérêts et du tort moral versés par une assurance responsabilité civile comme cela ressort de la terminologie utilisée et de la préconsultation (cf. ATAS/442/2022 du 18 mai 2022) et, en matière d’assurances sociales, de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, qui est une forme de réparation morale pour le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l’existence, etc.) subi par la personne atteinte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références).
3.4 Dans un arrêt de principe, la chambre de céans a retenu qu’en l’absence d’une révision législative de la LPCC suite à la réforme de la LPC, les nouveaux seuils d’entrée liés à la fortune prévus à l’art. 9a al. 1 LPC étaient également applicables, depuis le 1er janvier 2021, à l’octroi des PCC du fait du renvoi général qu'opère la LPCC à la LPC et du silence de la loi cantonale à ce sujet (cf. ATAS/521/2023 du 29 juin 2023, étant précisé qu’une opinion séparée a été jointe à l’arrêt).
3.5 En l’espèce, le recourant conteste uniquement la décision en tant qu’elle lui nie le droit aux PCC. Cette question est ainsi exclusivement régie par le droit cantonal. Il n’est pas contesté que l’intimé a agi dans le délai de prescription relatif de trois ans et que la demande en restitution n’était pas périmée pour la période du 1er janvier au 30 janvier 2024.
Se pose en revanche la question de savoir si le versement du montant de CHF 97'305.70 en raison des « divers manquements de diligence dans l’exécution de certaines tâches comprises dans le mandat de curatelle » peut être déduit de la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul déterminant en application de l’art. 5 let. c ch. 2 LPCC.
Il ressort certes de la jurisprudence, qui se réfère en cela aux travaux préparatoires, que cette disposition vise principalement le versement de dommages-intérêts et du tort moral par une assurance responsabilité civile. Il ressort toutefois de la lettre de l’art. 5 let. c ch. 2 LPCC que les montants obtenus à ce titre servent à réparer un préjudice corporel, pour lequel la victime peut éventuellement obtenir une indemnisation pour tort moral. Or, dans le cas présent, le capital versé par l’État de Genève, conjointement avec son assurance responsabilité civile, n’a pas pour vocation de réparer un préjudice corporel, mais vise à indemniser le recourant pour les manquements de diligence dans l’exécution du mandat de curatelle. Il s’ensuit que le montant obtenu à ce titre ne saurait bénéficier de la déduction prévue à l’art. 5 let. c ch. 2 LPCC. Le recourant ne le conteste d’ailleurs pas spécifiquement. Il se prévaut toutefois du principe de la protection de la bonne foi.
4.
4.1 Le principe de la protection de la bonne foi découlant de l'art. 9 Cst. protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après une décision, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration. En vertu de ce principe, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; 143 V 341 consid. 5.2.1 ; 131 V 472 consid. 5 ; 131 II 627 consid. 6.1 et les références citées).
Pour qu'une personne puisse se prévaloir de la protection de sa bonne foi, il faut que (a) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (b) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (c) que l’administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement (« ohne weiteres ») de l’inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu’il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (e) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; 143 V 341 consid. 5.2.1 ; 131 V 472 consid. 5 131 II 627 consid. 6.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_458/2021 du 25 janvier 2022 consid. 3.2, in SVR 2022 ALV n° 26 p. 92).
4.2 En l’occurrence, l’intimé ne conteste pas être intervenu dans une situation concrète à l’égard du recourant. Il ne remet pas non plus en cause le fait qu’il a agi dans les limites de sa compétence et que la loi n’a subi aucun changement depuis le moment où le renseignement a été donné. Il estime en revanche que le recourant, représenté par un curateur, aurait immanquablement dû s’étonner du fait que l’indemnisation résultant d’une mauvaise gestion du SPAd n’avait pas à être prise en compte dans le calcul des PCC. Or, comme le relève le recourant, dans son courrier du 24 octobre 2024, l’intimé a indiqué sans ambiguïté que la perception d’un « capital pour tort moral » n’était pas prise en compte dans les calculs de PCC, en application de l’art. 5 let. c LPCC. Sur la base de ces explications et compte tenu du texte de cette disposition, il n’apparait pas d’emblée évident de retenir que le recourant, même représenté par un curateur, aurait pu se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement obtenu. Ce point peut toutefois demeurer indécis, le recourant n’ayant, quoi qu’il en soit, pas démontré avoir pris des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice.
Dans ses écritures, le recourant fait valoir avoir conservé le capital dans le but de concrétiser des projets futurs, en sachant que son minimum vital resterait couvert, à tout le moins en partie, par les PCC. Il explique avoir décidé d’épargner la totalité de l’indemnisation afin de concrétiser divers futurs projets au lieu d’élargir son minimum vital. S’il avait su que l’indemnisation influencerait son droit aux PCC, il l’aurait utilisée dans une proportion raisonnable afin d’avoir des conditions de vie plus confortables. La décision entreprise l’obligeait enfin à puiser dans cette indemnité pour couvrir son minimum vital, ce qui lui causait un préjudice financier.
Or, outre le fait qu’il n’est pas démontré que le recourant se soit limité au « strict minimum vital » - les éléments au dossier démontrant d’ailleurs que le recourant, qui vit dans un studio dont le loyer s’élève à CHF 1'070.-, a pu régler ses dettes et effectuer des dépenses de loisirs (dont l’abonnement à un fitness, l’acquisition d’une moto, l’achat de cadeaux de Noël et de skis), cette argumentation s’inscrit en porte-à-faux avec la finalité des prestations complémentaires, qui n’est pas de permettre au bénéficiaire d’en tirer profit – en créant de l’épargne – mais, comme cela est précisé à l'art. 2 al. 1 LPC, de couvrir les besoins vitaux des bénéficiaires (prestations complémentaires fédérales) ou, selon l'art. 1 al. 1 LPCC, de bénéficier d’un revenu minimal cantonal d'aide sociale (ATAS/920/2024 du 25 novembre 2024 consid. 4.4.2 ; ATAS/45/2024 du 29 janvier 2024 consid. 6 ; ATAS/1004/2022 du 17 novembre 2022 consid. 11.5).
Les conditions du droit à la protection de la bonne foi ne sont ainsi pas réalisées.
5. Pour le reste, le recourant ne conteste pas l’évaluation de la fortune à laquelle a procédé l’intimé dans la décision sur opposition, soit CHF 106'123.15 (CHF 105'861.20 + CHF 261.95) au 31 décembre 2023 et CHF 108'044.20 (CHF 97'882.25 + CHF 261.95 + CHF 9'900.- [achat de la moto]) au 30 juin 2024. Or, ces montants étant supérieurs au seuil de CHF 100'000.- fixé par l’art. l’art. 9a LPC, également applicable aux PCC en vertu de l’art. 1A al. 1 LPCC (ATAS/521/2023), c’est à juste titre que l’intimé a nié le droit de l’assuré aux PCC dès le 1er janvier 2024 et qu’il a réclamé le montant de CHF 12'276.- à titre de prestations complémentaires perçues à tort entre le 1er janvier et le 30 juin 2024.
6. Compte tenu de ce qui précède, le recours est rejeté.
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Sylvie CARDINAUX |
| La présidente
Eleanor McGREGOR |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le