Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/230/2025 du 01.04.2025 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/2798/2024 ATAS/230/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 1er avril 2025 Chambre 10 |
En la cause
A______ Représentée par Maître Guy ZWAHLEN
| recourante |
contre
SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES | intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’intéressée), née le ______ 1944, est mariée depuis 2005 avec B______, né le ______ 1952, lequel bénéficie d’une curatelle de représentation et de gestion.
b. Le 21 novembre 2023, le service de protection de l’adulte (ci-après : SPAd) a envoyé au service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) une demande de prestations complémentaires concernant l’intéressée, signée par son conjoint.
c. Le 11 décembre 2023, le SPC a sollicité plusieurs pièces du SPAd, dont la copie du justificatif de l’encaissement de la prestation en capital du 2ème pilier et des comptes de libre passage en 2015 concernant l’époux de l’intéressée, et a demandé des informations quant à l’utilisation qui avait été faite du capital encaissé.
Copie de cette correspondance a été adressée à l’intéressée.
d. 18 décembre 2023, le SPAd a transmis au SPC un courrier de la Caisse
Inter-Entreprises de Prévoyance professionnelle (ci-après : CIEPP) du
27 juillet 2015 faisant état du versement prochain d’un capital de
CHF 514'675.55, ainsi que du versement d’une rente mensuelle de vieillesse anticipée viagère de CHF 1'244.- et d’une rente mensuelle de vieillesse supplémentaire temporaire de CHF 2'350.- (jusqu’au 30 juin 2017).
e. En date des 11 janvier et 12 février 2024, le SPC a envoyé des rappels au SPAd, faute d’avoir reçu les informations concernant l’utilisation qui avait été faite du capital versé par la CIEPP à l’époux de l’intéressée. Un délai était octroyé au 24 février 2024 et les conséquences en cas de non remise des justificatifs précisées.
Copies de ces lettres ont été envoyées à l’intéressée.
f. Le 16 février 2024, le SPAd a sollicité l’octroi d’un délai supplémentaire.
B. a. Par décision du 15 avril 2024, le SPC a nié le droit aux prestations complémentaires de l’intéressée dès le 1er août 2023, constatant que les revenus déterminants étaient supérieurs aux dépenses reconnues. Il ressort des plans de calcul que le SPC a additionné les dépenses et les revenus du couple et pris en considération, entre autres, des biens dessaisis (CHF 39'730.40 dès le
1er août 2023 et CHF 29'730.40 dès le 1er janvier 2024), une rente du 2ème pilier (CHF 6'924.-), une rente du 2ème pilier hypothétique (CHF 32'467.89) et une rente viagère (CHF 16'172.- dès août 2023 et CHF 14'928.- dès janvier 2024).
b. Par courrier du 16 mai 2024 co-signé avec une assistante sociale, l’intéressée a formé opposition à l’encontre de cette décision. Elle a notamment contesté le montant de la fortune et le bien dessaisi imputé en raison de la diminution des avoirs, ainsi que les montants de la rente hypothétique et de la rente viagère.
c. Le 17 mai 2024, le SPAd a également contesté la décision du 15 avril 2024, relevant que les montants retenus à titre d’épargne et de rente viagère étaient incorrects.
d. En date du 13 juin 2024, le SPAd a considéré que le montant de l’épargne pris en considération par le SPC était erroné, étant précisé qu’il ignorait le montant exact de l’épargne de l’intéressée avec laquelle il rencontrait des difficultés de collaboration. Il a joint plusieurs extraits de comptes bancaires de son protégé et a sollicité que le SPC lui communique le montant retenu à titre d’épargne de l’intéressée.
e. Par courrier daté du 20 juin 2024, reçu le 28 juin 2024, l’assurée et son assistante sociale ont requis du SPC qu’il reprenne certains éléments du calcul, dont le montant des biens dessaisis et la rente hypothétique. Elle a indiqué annexer les justificatifs.
f. Sous pli du 25 juin 2024, également reçu le 28 juin 2024, le SPAd a transmis au SPC une demande d’aide sociale pour son protégé, accompagnée de plusieurs documents, dont une lettre de soins de maintien des HUG du 22 mai 2024 invitant son protégé à engager des démarches en vue de son transfert dans un EMS, et une attestation faisant état de poursuites à hauteur de CHF 9'412.25 en 2024.
g. Dans sa décision sur opposition du 28 juin 2024, le SPC a partiellement admis l’opposition et corrigé certains montants des plans de calcul, étant précisé que les modifications accordées ne permettaient pas le versement de prestations complémentaires, les revenus déterminants demeurant supérieurs aux dépenses reconnues.
Il a rappelé à l’intéressée que son mari avait encaissé un capital de retraite de CHF 514'675.55 en 2015, soit un montant de CHF 477'469.- après déduction de l'impôt, avoir qui avait été placé dans le portefeuille de titres
UBS 1______, et qu’il percevait également une rente viagère mensuelle de CHF 1'244.- de la CIEPP.
Le dessaisissement retenu était directement lié à l'utilisation du capital LPP, puisque la fortune était principalement constituée dudit capital. Selon le calcul de la consommation excessive, deux diminutions de fortune non justifiées étaient apparues, la première de CHF 60'737.90 pour l'année 2017 et la seconde de
CHF 28'992.50 pour l'année 2018, soit la somme de CHF 89'730.40 au
31 décembre 2018, à laquelle il avait appliqué l’amortissement légal de
CHF 10'000.- par année à partir du 1er janvier 2019, ce qui avait conduit à la prise en considération d'un bien dessaisi amorti de CHF 39'730.40 dès le
1er janvier 2023 et de CHF 29'730.40 dès le 1er janvier 2024. Il a détaillé les calculs de la « consommation excessive » pour ces deux années.
La rente viagère servie par la CIEPP en faveur de l’époux de l’intéressée ne pouvait être que confirmée, dès lors qu'elle correspondait aux montants versés selon les attestations au dossier.
S’agissant de la rente hypothétique imputée dans le calcul des prestations cantonales, elle correspondait à la rente qui aurait été perçue si l'avoir de prévoyance n'avait pas été versé en capital mais sous forme de rente. Elle représentait 6.8% du capital net après déduction de l'impôt. L'avoir de prévoyance ne serait à ce jour pas épuisé s'il avait été employé à la couverture des besoins depuis son encaissement. Il était donc correct de retenir la rente LPP qui aurait été versée à son époux s'il n'avait pas choisi le versement en capital. Par contre, si une rente hypothétique devait bien être retenue dans le calcul des prestations cantonales, il ne pouvait être tenu compte du solde du capital dans la fortune déterminante, ni du dessaisissement relatif à l'utilisation de ce capital car cela reviendrait à prendre deux fois en compte la prestation du 2ème pilier, soit une fois en tant que capital/bien dessaisi et une fois en tant que rente hypothétique.
Par conséquent, le solde du portefeuille de titres et le bien dessaisi amorti devaient être uniquement pris en compte dans le calcul des prestations fédérales. Pour des « raisons purement techniques », ces montants apparaissaient sous le libellé « capital tort moral » dans les plans de calcul.
Pour le calcul des prestations fédérales, l’épargne, les biens dessaisis et le « total fortune PCF » étaient fixés à CHF 61'169.-, CHF 39'730.40 et CHF 142'369.58 pour 2023, respectivement à CHF 22'350.-, CHF 29'730.40 et CHF 94'641.61 pour 2024. Le « total fortune PCC » était arrêté à CHF 41'470.18 pour 2023 et à CHF 42'561.21 pour 2024.
Pour le reste, le dossier était transmis au secteur compétent pour qu'il procède à la mise à jour de sa situation suite à la lettre de soins de maintien adressée à son époux par les HUG le 22 mai 2024 (fin de l'hospitalisation à la charge de l'assurance-maladie et début de la période dite « en attente de placement »).
Selon les plans de calcul annexés, les revenus déterminants comprenaient notamment une fortune composée d’une épargne de CHF 41'470.18 pour 2023 et CHF 42'561.23 pour 2024 et d’un « capital tort moral » de CHF 100'899.40 pour 2023 et CHF 52'080.40 pour 2024, ainsi que des rentes, dont celle du 2ème pilier hypothétique de CHF 32'467.89 pour 2023 et 2024.
h. Le 1er juillet 2024, le SPC a reçu un décompte de la situation du couple entre 2015 et 2024, daté du 20 juin 2024, faisant état de dépenses à titre de frais médicaux (dentiste, IMAD, transport, clinique, factures d’assurance à la charge du couple et primes d’assurance complémentaire), de montants payés pour les impôts, de frais de fiduciaire, de poursuites, d’avocats, d’aide-ménagère, de restaurant ou encore d’alcool, étant précisé que le mari de l’intéressée souffrait d’alcoolisme. La somme des dépenses alléguées s’élevait à plus de
CHF 450'000.-, sans tenir compte des dépenses courantes. De nombreuses pièces justificatives étaient jointes à ce décompte.
i. Le 23 juillet 2024, le SPC a rendu une nouvelle décision de prestations complémentaires à compter du 1er avril 2024, suite à l’entrée en institution de l’époux de l’intéressée.
C. a. Par acte du 19 août 2024, l’intéressée, représentée par un avocat, a interjeté recours contre la décision sur opposition du 28 juin 2024 par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi du dossier à l’intimé pour nouvelle décision ne tenant pas compte d’une rente du 2ème pilier hypothétique. En substance, la recourante a fait valoir qu’elle n’était pas la bénéficiaire du versement du capital, de sorte que ce dernier ne pouvait pas être retenu dans le calcul de son droit aux prestations complémentaires.
b. Dans sa réponse du 30 septembre 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours, au motif qu’il ne pouvait pas être renoncé à la prise en compte de la rente hypothétique, puisque les époux vivaient ensemble et que le calcul devait être effectué globalement. Postérieurement à la décision litigieuse, il avait rendu de nouvelles décisions le 23 juillet 2024 faisant des calculs séparés pour tenir compte de l’hospitalisation de longue durée de l’époux de la recourante en vue de son entrée en EMS.
c. Le 19 novembre 2024, la recourante a fait grief à l’intimé de ne pas avoir tenu compte des frais d’avocat liés à des procédures que son mari et elle avaient dû conduire depuis 2015, en particulier pour des questions de litiges d’assurance. Un montant total de CHF 39'534.- avait dû être dépensé et pris sur le capital de retraite versé à son époux en 2015. De telles dépenses ne pouvaient être assimilées à un dessaisissement de fortune et auraient dû être prises en considération par l’intimé et déduites du calcul de la rente théorique sur la base d’un taux de 6.8%. Pour le surplus, elle confirmait les termes de son recours.
Elle a produit les notes d’honoraires d’avocat auxquelles elle s’est référée.
d. Par duplique du 10 décembre 2024, l’intimé a également persisté dans ses conclusions. La recourante demandait que ses frais d'honoraires d'avocat à hauteur de CHF 39'534.- soient portés en déduction du montant retenu à titre de biens dessaisis en prestations complémentaires fédérales et qu’ils soient également déduits du montant du capital avant de procéder au calcul de la rente en prestations complémentaires cantonales. La décision litigieuse comportant les tableaux ayant permis de déterminer les montants des biens dessaisis en raison d'une « consommation excessive » durant les années 2017 et 2018. Pour que les honoraires d'avocat soient déduits, il faudrait qu'ils concernent ces années et qu'ils constituent un « motif important » au sens de la loi. Or, les honoraires d'avocat ne faisaient pas partie des motifs importants retenus par le législateur et n’avaient donc pas à être déduits du montant retenu à titre de biens dessaisis dans le calcul des prestations fédérales. Pour que les frais d’avocat soient déduits du capital net déterminant pour le calcul de la rente hypothétique retenue dans le calcul des prestations cantonales, il faudrait qu'ils soient considérés comme une part de capital employée à titre de prévoyance. Or, tout comme un remboursement de dette ou le paiement d'un arriéré d'impôts, l'argent puisé dans le capital pour payer des honoraires d'avocats n'était pas utilisé à des fins de prévoyance.
e. Copie de cette écriture a été transmise à la recourante le 12 décembre 2024.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du
6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134
al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).
1.3 Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 43 LPCC ;
art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10] et art. 43 LPCC).
Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à
l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20] ; art. 43 LPCC).
2.
2.1 La modification du 22 mars 2019 de la LPC est entrée en vigueur le 1er janvier 2021 (Réforme des PC, FF 2016 7249 ; RO 2020 585).
Conformément à l’al. 1 des dispositions transitoires de ladite modification, l’ancien droit reste applicable trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle. A contrario, les nouvelles dispositions sont applicables aux personnes qui n’ont pas bénéficié de prestations complémentaires avant l’entrée en vigueur de la Réforme des PC (arrêt du Tribunal fédéral 9C_329/2023 du 21 août 2023 consid. 4.1).
2.2 En l’occurrence, le droit aux prestations complémentaires est né postérieurement au 1er janvier 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.
3. Le litige porte sur le calcul du droit de la recourante à des prestations complémentaires dès le 1er août 2023, singulièrement sur la prise en considération de l’avoir de prévoyance encaissé par son époux dans le calcul de son droit aux prestations et, cas échéant, sur le montant retenu à titre de biens dessaisis pour le calcul des prestations complémentaires fédérales et sur le montant du capital déterminant pour fixer la rente hypothétique du 2ème pilier pour le calcul des prestations complémentaires cantonales.
4. Conformément à l'art. 4 al. 1 let. a LPC, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse ont droit à des prestations complémentaires, dès lors quelle perçoivent une rente de vieillesse de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS) ou ont droit à une rente de veuve, de veuf ou d’orphelin de l’AVS.
L’art. 9 LPC prévoit que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants, mais au moins au plus élevé des montants suivants : la réduction des primes la plus élevée prévue par le canton pour les personnes ne bénéficiant ni de prestations complémentaires ni de prestations d’aide sociale (al. 1 let. a) ; 60% du montant forfaitaire annuel pour l’assurance obligatoire des soins au sens de
l’art. 10 al. 3 let. d LPC (al. 1 let. b). Les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints et des personnes qui ont des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI sont additionnés. Il en va de même pour des orphelins faisant ménage commun (al. 2). Pour les couples dont l’un des conjoints ou les deux vivent dans un home ou dans un hôpital, la prestation complémentaire annuelle est calculée séparément pour chacun des conjoints. La fortune est prise en compte a raison de la moitié pour chacun des conjoints. Les dépenses reconnues et les revenus déterminants sont généralement soumis au partage par moitié. Le Conseil fédéral règle les exceptions (al. 3). Le Conseil fédéral édicte des dispositions sur l’addition des dépenses reconnues et des revenus déterminants de membres d’une même
famille ; il peut prévoir des exceptions, notamment pour ceux des enfants qui donnent droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI (al. 5 let. a) ; l’évaluation des revenus déterminants, des dépenses reconnues et de la fortune
(al. 5 let. b).
Au niveau cantonal, en application de l’art. 2 al. 1 LPCC, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui, notamment, ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève (let. a), qui sont au bénéfice d’une rente de l’AVS (let. b) et qui répondent aux autres conditions de la LPCC (let. d).
L’art. 4 LPCC dispose qu’ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable.
Conformément à l’art. 5 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines adaptations non pertinentes.
4.1 En vertu de l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment : un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 30’000.- pour les personnes seules, CHF 50’000.- pour les couples et CHF 15’000.- pour les orphelins et les enfants donnant droit à des rentes pour enfant de l’AVS ou de l’AI (let. c, 1ère phrase) ; les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (let. d).
L’art. 17 al. 1 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301) dispose que la fortune nette est calculée en déduisant les dettes prouvées de la fortune brute.
L’art. 11 al. 1 LPC faisant mention de la « fortune nette », il y a lieu de déduire les dettes. Il s’agit notamment des dettes hypothécaires, des petits crédits auprès des banques, des prêts entre particuliers, ainsi que des dettes fiscales. La dette doit être effectivement née, mais son échéance n’est pas une condition préalable. Les dettes incertaines ou dont le montant n’a pas encore été déterminé, en revanche, ne peuvent pas être déduites. La dette doit être correctement documentée. En outre, seules les dettes qui grèvent la substance économique des actifs peuvent être prises en compte (ATF 142 V 311 consid. 3.1 et 3.3 ; 140 V 201 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_365/2018 du 12 septembre 2018 consid. 3.2 ; ATAS/548/2022 du 15 juin 2022 consid. 6.1).
4.2 La question des dessaisissements fait, depuis le 1er janvier 2021, l’objet d’un article spécifique, l’art. 11a LPC, précisé par des dispositions de l’OPC-AVS/AI.
Selon l’art. 11a LPC, si une personne renonce volontairement à exercer une activité lucrative que l’on pourrait raisonnablement exiger d’elle, le revenu hypothétique correspondant est pris en compte comme revenu déterminant. La prise en compte de ce revenu est réglée par l’art. 11 al. 1 let. a (al. 1). Les autres revenus, parts de fortune et droits légaux ou contractuels auxquels l’ayant droit a renoncé sans obligation légale et sans contre-prestation adéquate sont pris en compte dans les revenus déterminants comme s’il n’y avait pas renoncé (al. 2). Un dessaisissement de fortune est également pris en compte si, à partir de la naissance d’un droit à une rente de survivant de l’AVS ou à une rente de l’AI, plus de 10% de la fortune est dépensée par année sans qu’un motif important ne le justifie. Si la fortune est inférieure ou égale à CHF 100'000.-, la limite est de CHF 10'000.- par année. Le Conseil fédéral règle les modalités ; il définit en particulier la notion de « motif important » (al. 3). L’al. 3 s’applique aux bénéficiaires d’une rente de vieillesse de l’AVS également pour les dix années qui précèdent la naissance du droit à la rente (al. 4).
L’art. 17b OPC-AVS/AI précise qu’il y a dessaisissement de fortune lorsqu’une personne aliène des parts de fortune sans obligation légale et que la
contre-prestation n’atteint pas au moins 90% de la valeur de la prestation (let. a) ou a consommé, au cours de la période considérée, une part de fortune excédant ce qui aurait été admis sur la base de l’art. 11a al. 3 LPC (let. b).
Selon l’art. 17e OPC-AVS/AI, le montant de la fortune qui a fait l’objet d’un dessaisissement au sens de l’art. 11a al. 2 et 3 LPC et qui doit être pris en compte dans le calcul de la prestation complémentaire est réduit chaque année de
CHF 10'000.- (al. 1). Le montant de la fortune au moment du dessaisissement doit être reporté tel quel au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement pour être ensuite réduit chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).
4.2.1 L'art. 11a al. 2 LPC contient une définition claire de la notion de dessaisissement qui faisait défaut dans le cadre de l'art. 11 al. 1 let. g aLPC, sans qu'il ne modifie toutefois la pratique actuelle en matière de renonciation à des ressources ou de dessaisissement de fortune. En particulier, une contre-prestation est considérée comme adéquate si elle atteint au moins 90% de la valeur de la prestation. Pour les biens de consommation ou les services, la contre-prestation obtenue est considérée comme adéquate si la preuve d’achat est apportée par la personne demandant les prestations complémentaires. Les jeux de hasard, les jeux de loterie et les jeux de casino n’offrent au contraire aucune contre-prestation adéquate et la fortune perdue de cette manière constitue un dessaisissement de fortune au même titre qu’une donation. Il en va de même lorsque la fortune a fait l’objet d’un investissement imprudent qu’une personne raisonnable n’aurait, au vu des circonstances, pas effectué (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires [Réforme des PC] du
16 septembre 2016, FF 2016 7249 pp. 7322 et 7323).
L’art. 11a al. 3 complète l’al. 2 en précisant que, même en présence d’une
contre-prestation adéquate, la consommation de la fortune ne doit pas dépasser un certain plafond. En d’autres termes, indépendamment des preuves d’achat fournies, le calcul de la prestation complémentaire tiendra compte d’un dessaisissement de fortune lorsque celle-ci aura été dépensée dans un court laps de temps sans que la personne se soit souciée de l’avenir. Les pertes de fortune involontaires qui ne sont pas imputables à une action intentionnelle ou à une imprudence du bénéficiaire des prestations complémentaires ne sont pas considérées comme une consommation de la fortune et ne tombent donc pas sous le coup de cette disposition. Aucun dessaisissement n’est par exemple pris en compte en cas de perte imprévisible sur un placement financier raisonnable ou en cas d’irrécouvrabilité d’un prêt qui n’était pas prévisible au moment où le prêt a été consenti. Les limites fixées permettent de déterminer si la fortune a été dépensée trop rapidement ou non. Dans la mesure où l’organe d’exécution constate l’existence d’un dessaisissement de fortune, le montant de CHF 10'000.- par année prévu à l’art. 17a al. 1 OPC-AVS/AI doit être pris en compte, comme c’est actuellement le cas (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires [Réforme des PC] du
16 septembre 2016, FF 2016 7249 p. 7323 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_50/2022 du 17 mai 2022 consid. 3.1).
Selon l'al. 3 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019,
l'art. 11a al. 3 et 4 LPC ne s'applique qu'à la fortune qui a été dépensée après l'entrée en vigueur de la présente modification (arrêt du Tribunal fédéral 9C_329/2023 du 21 août 2023 consid. 4.2). Pour les années antérieures, une diminution substantielle de la fortune doit être examinée à la lumière de l’art. 11a al. 2 LPC (CARIGIET/KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 2021, p. 249, n. 640 in fine et la référence aux Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI [ci-après : DPC], ch. 3532.09, valable depuis le 1er janvier 2021).
4.2.2 Pour qu’un dessaisissement de fortune puisse être pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, la jurisprudence soumet cet acte à la condition qu’il ait été fait « sans obligation juridique », respectivement « sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente ». Les deux conditions précitées ne sont pas cumulatives, mais alternatives (ATF 131 V 329 consid. 4.4).
Le moment déterminant pour établir la valeur des parts de fortune dessaisies et de la contre-prestation éventuelle est celui du dessaisissement (DPC, ch. 3532.04 ; ATF 120 V 182 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du
29 août 2011 consid. 5.1). Il y a lieu de prendre en compte dans le revenu déterminant tout dessaisissement sans limite de temps (Pierre FERRARI, Dessaisissement volontaire et prestations complémentaires à l’AVS/AI in RSAS 2002, p. 420). Ainsi, la date à laquelle le dessaisissement a été accompli n’a, en principe, aucune importance (ATF 146 V 306 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_667/2021 du 17 mai 2022 consid. 3.3 et les références ; ATAS/1180/2022 du 22 décembre 2022 consid. 7.1).
Lorsque la fortune diminue de façon substantielle sans que le bénéficiaire des prestations complémentaires puisse prouver l’utilisation qu’il en a faite, on suppose, en principe, qu’il y a dessaisissement (DPC, ch. 3532.09).
Si le bénéficiaire des prestations complémentaires et les membres de sa famille disposaient de revenus suffisants pendant les années où la fortune a diminué, le montant du dessaisissement de fortune correspond à celui de la diminution de la fortune. À l’inverse, s’ils ne disposaient pas de revenus suffisants, le montant du dessaisissement de fortune correspond à la différence entre la diminution non justifiée de la fortune et la part de la fortune dépensée pour son entretien usuel (DPC, ch. 3532.10).
Le revenu est considéré comme suffisant s’il est supérieur à un montant forfaitaire applicable pour l’entretien usuel, et insuffisant s’il est inférieur à ce montant. Pour déterminer le montant forfaitaire applicable et le revenu, il faut tenir compte du bénéficiaire des prestations complémentaires, de son conjoint et des enfants qui étaient mineurs ou qui n’avaient pas encore achevé leur formation et étaient âgés de moins de 25 ans au moment du dessaisissement de fortune (DPC, ch. 3532.11).
Le montant forfaitaire pour l’entretien usuel est déterminé en multipliant le montant destiné à la couverture des besoins vitaux pour les personnes seules tel que défini à l’annexe 5.1 par le facteur correspondant tel que défini à l’annexe 8 (DPC, ch. 3532.12).
Le montant de la part de fortune qui a dû être utilisé pour l’entretien usuel en cas de revenus insuffisants correspond à la différence entre le montant forfaitaire pour l’entretien usuel applicable, y compris les contributions d’entretien, et le revenu effectif (DPC ch. 3532.15).
4.3 S’agissant des prestations complémentaires cantonales, l’art. 2 al. 4 LPCC dispose que les personnes qui ont choisi au moment de la retraite un capital de prévoyance professionnelle en lieu et place d’une rente et qui l’ont consacré à un autre but que celui de la prévoyance ne peuvent bénéficier des prestations accordées en application de la présente loi.
Ainsi, le capital LPP dépensé, en tout ou partie, au jour du calcul des prestations complémentaires, est pris en considération selon les règles du dessaisissement en matière de prestations complémentaires fédérales, alors qu'en matière de prestations complémentaires cantonales, il est fait application de l'art. 2
al. 4 LPCC et de la jurisprudence y relative (ATAS/501/2023 du 28 juin 2023 consid. 8.1 ; ATAS/703/2022 du 11 août 2022 consid. 13.2).
Selon la jurisprudence rendue en application de l’art. 2 al. 4 LPCC, l’utilisation du capital de prévoyance afin de couvrir les besoins vitaux relève d’un but de prévoyance. La chambre de céans a jugé que l’on pouvait résumer ainsi les principes régissant l’octroi de prestations complémentaires cantonales en cas de retrait du 2ème pilier en capital : si le capital de prévoyance n’est pas épuisé selon le calcul de la couverture des besoins, il convient de calculer les revenus déterminants en y intégrant la rente du 2ème pilier à laquelle l’assuré aurait pu prétendre en lieu et place du capital. Si ces revenus excèdent les dépenses reconnues, l’assuré n’a pas droit aux prestations complémentaires cantonales. Si au contraire ces revenus sont inférieurs aux dépenses reconnues, l’assuré peut prétendre aux prestations complémentaires cantonales qui lui auraient été servies en cas de versement d’une rente de la prévoyance professionnelle. En revanche, dès qu’il est établi que le capital de prévoyance a été entièrement utilisé selon le calcul de la couverture des besoins, l’assuré a droit dans tous les cas à des prestations complémentaires cantonales. Dans cette dernière hypothèse, leur calcul s’opère sans tenir compte d’une rente hypothétique de la prévoyance professionnelle à titre de revenu (ATAS/808/2021 du 16 août 2021 ; ATAS/191/2018 du 5 mars 2018 ; ATAS/84/2018 du 30 janvier 2018).
La notion de besoins vitaux n’est pas expressément définie par la LPC et la LPCC. Par conséquent, pour en déterminer la teneur, on peut se référer au règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle
(RIASI - J 4 04.01 ; ATAS/3670/2017 du 30 janvier 2018 consid. 9). Aussi, la notion de besoins vitaux englobe en tout cas la couverture des besoins de base décrits dans ce règlement, soit le forfait mensuel pour l’entretien (art. 2), les loyers et charges (art. 3), la prime d'assurance-maladie obligatoire des soins (art. 4), les pensions alimentaires et contributions d'entretien (art. 4A) et les prestations circonstancielles (art. 5). Selon l’art. 2 al. 2 RIASI, la prestation de base couvre notamment les besoins suivants : alimentation ; habillement ; consommation d'énergie, sans les charges locatives ; entretien du ménage ; achats de menus articles courants ; frais de santé (tels que médicaments achetés sans ordonnance), sans franchise ni quote-part ; transport ; communication ; loisirs et formation; soins corporels ; équipement personnel (tel que fournitures de bureau).
4.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2). Aussi
n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré et le défaut de preuve va au détriment de la partie qui entendait tirer un droit du fait non prouvé (ATF 126 V 319 consid. 5a ; arrêt du Tribunal fédéral I 339/03 du
19 novembre 2003 consid. 2).
Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).
5. En l’espèce, la recourante ne conteste pas que son mari a encaissé un capital de retraite de CHF 514'675.55 en 2015, correspondant à un montant de
CHF 477'469.- après déduction de l'impôt, ni que cet avoir a été placé dans le portefeuille de titres UBS 1______, comme retenu dans la décision attaquée.
Elle reproche en revanche à l’intimé d’avoir déterminé son droit aux prestations en tenant compte de la rente hypothétique du 2ème pilier de son époux, soulignant qu’elle n’était pas la bénéficiaire du versement du capital.
Elle fait également grief à l’intimé de ne pas avoir déduit les frais d’avocat que son mari et elle ont déboursés, faisant valoir que de telles impenses ne peuvent pas être assimilées à une consommation excessive de fortune. L’intimé aurait ainsi dû les prendre en considération dans son calcul du dessaisissement de fortune. De plus, ce montant aurait dû être déduit de celui pris en compte pour calculer la rente théorique sur la base d’un taux de 6.8%.
5.1 La chambre de céans rappelle que la loi prévoit expressément que les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints sont additionnés. Toutefois, lorsque l’un des conjoints ou les deux vivent dans un home ou dans un hôpital, la prestation complémentaire annuelle est calculée séparément pour chacun des conjoints. Dans un tel cas, la fortune est prise en compte à raison de la moitié pour chacun des conjoints, et les dépenses reconnues et les revenus déterminants sont généralement soumis au partage par moitié.
La recourante ne nie pas qu’elle vivait bien avec son mari à leur domicile commun entre le 1er août 2023 et le 31 mars 2024, date à partir de laquelle l’intimé a repris le calcul des prestations complémentaires afin de tenir compte de la nouvelle situation de l’intéressée, singulièrement de l’entrée en institution de son mari, ce qui justifiait effectivement de corriger les montants des dépenses reconnues et des revenus déterminants.
Pour la période restant litigieuse, la décision attaquée du 28 juin 2024 n’apparait pas critiquable, l’intimé étant fondé à additionner les revenus déterminants et les dépenses reconnues des deux conjoints.
5.2 L’intimé a pris en compte un bien dessaisi dans le calcul des prestations complémentaires fédérales et une rente hypothétique du 2ème pilier dans le calcul du droit aux prestations complémentaires cantonales.
5.2.1 Au plan fédéral, il a notamment rappelé que la décision litigieuse comportait les tableaux ayant permis de déterminer les montants des biens dessaisis en raison d'une « consommation excessive » au sens de l’art. 11a al. 3 LPC durant les années 2017 ou 2018. Il a soutenu, dans le cadre de sa réplique, que les honoraires d'avocat ne pouvaient être déduits de la fortune dessaisie que s’ils concernaient les deux années en cause, et pour autant qu’ils constituent un « motif important » au sens de la loi. Il a considéré, en se référant à l’art. 17d al. 3 let. b OPC-AVS/AI, que les frais d’avocat ne faisaient pas partie d’un tel motif retenu par le législateur et qu’ils n’avaient donc pas à être déduits du montant des biens dessaisis, arrêtés à CHF 39'730.40 au 1er janvier 2023 et à CHF 29'730.40 au 1er janvier 2024.
La chambre de céans relève cependant que l’art. 11a al. 3 LPC ne s’applique pas au cas d’espèce, la fortune ayant été dépensée avant l'entrée en vigueur, le
1er janvier 2021, de la modification du 22 mars 2019. Aucune consommation excessive de la fortune ne saurait donc être retenue. Seule est déterminante la question de savoir s’il peut être considéré que la recourante a renoncé sans obligation légale et sans contre-prestation adéquate à une part de sa fortune.
Or, l’intimé n’a pas du tout instruit le dossier sur ce point. Il n’a en particulier pas cherché à déterminer et comparer les dépenses reconnues et les revenus déterminants au sens de l’art. 9 al. 1 LPC. La décision entreprise ne fait aucune référence aux revenus dont disposait le couple entre 2015 et 2023, soit durant la période pendant laquelle sa fortune a diminué, de sorte qu’on ignore si leurs revenus étaient suffisants pour leur entretien usuel.
De plus, si l’intimé s’est enquis, par courrier du 11 décembre 2023 et rappels des 11 janvier et 12 février 2024, de l’utilisation qui avait été faite du capital du
2ème pilier, il convient de relever que ces missives ont été adressées au SPAd, et seulement en copie à la recourante, laquelle n’est pas représentée par ledit service et n’était à l’époque pas assistée. Une demande de renseignement adressée directement à la bénéficiaire de prestations semblait donc s’imposer, ce d’autant plus que le SPAd avait signalé à l’intimé ses difficultés à collaborer avec l’intéressée. Cela étant, dans le cadre de la procédure d’opposition, la recourante a clairement demandé à l’intimé, par courrier du 20 juin 2024, de reprendre certains éléments du calcul, dont le montant des biens dessaisis et de la rente hypothétique. Elle s’est prévalue de justificatifs joints à sa lettre, lesquelles semblent toutefois avoir été omis de l’envoi, puisqu’ils sont parvenus à l’intimé le 1er juillet 2024 seulement, d’après le tampon apposé sur la première page des documents enregistrés sous pièce 31. Dès lors que la recourante a expressément mentionné disposer de documents attestant de ses dépenses, susceptibles de remettre en cause les montants retenus à titre de biens dessaisis et de rente hypothétique, l’intimé aurait dû attendre de les recevoir afin de les analyser avant de statuer sur l’opposition.
Qui plus est, le SPAd, lequel a également contesté la décision du 15 avril 2024, a fait état de poursuites, étayées par pièce, dans son courrier du 25 juin 2024. L’intimé n’en a cependant pas tenu compte dans la décision contestée, sans explication, alors que les dettes doivent être déduites du montant de la fortune nette.
L’intimé ayant déterminé de façon erronée le montant de la renonciation à des parts de fortune, en tenant compte d’une consommation excessive de la fortune, la décision litigieuse est mal fondée.
5.2.2 Au plan cantonal, il est rappelé que le droit aux prestations dépend de la question de savoir si le capital de prévoyance a été affecté à la couverture des besoins vitaux.
Cette question n’a pas non plus été examinée par l’intimé qui n’a pas établi les besoins vitaux du couple depuis le moment où le capital de prévoyance a été versé.
5.3 Partant, la cause doit être renvoyée à l’intimé afin qu’il reprenne le calcul du droit aux prestations de la recourante en tenant compte des dispositions applicables. Il lui incombera notamment de vérifier si la diminution du capital de retraite perçu par l’époux de la recourante en 2015 est, à tout le moins partiellement, justifiée par l’acquisition de contre-prestations correspondantes. À cet égard, il est rappelé que la recourante a fait état de dépenses pour plus de
CHF 450'000.-, comprenant notamment des frais médicaux, de cliniques, d’IMAD, de fiduciaire, d’avocat, d’aide-ménagère et de restaurant, ou encore du paiement de primes d’assurance complémentaire et d’impôts, et qu’elle a produit un certain nombre de documents visant à les attester. Il conviendra également de tenir compte des dettes documentées dans le calcul de la fortune nette.
6. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision du 28 juin 2024 annulée au sens des considérants.
La recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet partiellement.
3. Annule la décision du 28 juin 2024.
4. Renvoie la cause à l'intimé pour nouveau calcul et nouvelle décision dans le sens des considérants.
5. Condamne l’intimé à verser à la recourante CHF 1'000.- à titre de dépens.
6. Dit que la procédure est gratuite.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le