Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/1013/2024 du 28.11.2024 ( CHOMAG ) , ADMIS/RENVOI
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1551/2024 ATAS/1013/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 28 novembre 2024 Chambre 3 |
En la cause
A______ représenté par Me Jean-Philippe ANTHONIOZ, avocat
| recourant |
contre
OFFICE CANTONAL DE L’EMPLOI
| intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1985, de nationalité suisse, est né à Genève, où il a suivi toute sa scolarité. Il a travaillé dans le canton comme installateur sanitaire de 2010 à 2011, agent de sécurité de 2011 à 2018, veilleur de nuit de 2019 à 2023, puis employé de restaurant.
b. Selon le registre de l’Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), il a résidé à Genève de sa naissance à 2007, avant de quitter le canton pour la France. Il est revenu à Genève en décembre 2018 et a séjourné à Thônex avec son épouse, Madame B______, dans l’appartement de celle-ci. Depuis le 18 janvier 2024, il est officiellement domicilié rue C______, chez Madame D______.
c. L’assuré a été marié à Madame B______ de 2004 à 2022. Dans l’intervalle, en juin 2019, l’assuré a eu un enfant avec Madame E______. Cette dernière a séjourné, d’octobre 2018 à décembre 2020, au « Cœur des Grottes », puis, à compter de décembre 2020 et jusqu’en août 2024, dans l’appartement de Mme B______. Depuis août 2024, elle réside avec l’enfant aux Pâquis, chez une certaine Madame F______.
d. L’assuré a été licencié le 26 mars 2023 pour le 31 mai 2023.
B. a. Il s’est annoncé à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) pour le 16 juin 2023, en déclarant être domicilié chez Madame B______ (son ex-épouse), à Thônex.
b. Invité à s’expliquer sur sa situation et son domicile, l’assuré a indiqué être propriétaire d’une maison de six pièces sise à G______ (France), héritée de sa mère, mais aussi d’un appartement de deux pièces à Annemasse, qu’il avait mis en sous-location. Il n’était pas titulaire d’un bail à loyer à son nom à Genève. Deux personnes habitaient le studio de son ex-épouse. Suite à son divorce, il était « en visite » dans ce studio pour son courrier, étant « sans domicile fixe » et dormant dans son véhicule ou à G______.
c. Par décision du 8 janvier 2024, l’OCE a nié à l’assuré le droit à l’indemnité au motif qu’il ne remplissait pas la condition relative au domicile.
L’OCE a constaté que l’adresse fournie par l’assuré lors de son inscription à l’assurance-chômage correspondait en réalité à celle de son ex-épouse et qu’il n’y était pas domicilié, puisqu’elle ne lui servait que pour recevoir son courrier. Il paraissait peu vraisemblable que l’assuré soit « sans domicile fixe » et dorme dans sa voiture, alors même qu’il possédait deux biens immobiliers en France voisine.
d. Le 12 février 2024, l’assuré s’est opposé à cette décision.
Il alléguait notamment avoir déposé, en mars 2022, un dossier auprès de la régie H______ pour la reprise d’un appartement, avoir fait, en mars 2023, une demande de logement auprès de la I______, avoir ainsi obtenu une proposition d’appartement à J______ en décembre 2023, mais n’avoir pu conclure le bail en raison du fait qu’il était sans revenu, habiter depuis lors chez sa compagne, Mme D______, rue C______, plusieurs jours par semaine et y louer une place de parking. Ces éléments démontraient selon lui son intention de continuer à séjourner à Genève et d’y conserver le centre de ses intérêts.
À l’appui de son opposition, l’assuré joignait, notamment, une attestation établie le 9 février 2024 par Mme D______, confirmant qu’elle l’hébergeait plusieurs nuits par semaine et que l’assuré avait pris une place de parking devant son immeuble.
e. Le 21 mars 2024, l’OCPM a établi un rapport d’entraide administrative concluant que l’intéressé résidait bien rue C______, chez Mme D______. En effet, il avait été vu régulièrement à cette adresse et son véhicule se trouvait également sur place, lors d’un passage de l’enquêteur. Celui-ci avait effectué trois passages à l’adresse indiquée (le 13 mars 2024 à 10h30, le 15 mars 2024 et le 20 mars 2024 à 9h00). L’assuré n’avait jamais été présent, mais Mme D______ avait confirmé à l’enquêteur qu’il séjournait chez elle au moins trois à quatre jours par semaine, ce que l’intéressé avait confirmé par téléphone, en précisant qu’il lui arrivait également parfois de dormir dans sa voiture ou dans sa résidence secondaire à G______.
f. Par décision du 28 mars 2024, l’OCE a rejeté l’opposition.
Il a noté qu’aux dires mêmes de l’assuré, celui-ci ne séjournait pas de façon permanente chez sa compagne, mais seulement quelques jours par semaine. Il n’avait d’ailleurs été présent rue C______ à aucun des trois passages de l’enquêteur.
C. a. Par écriture du 5 mai 2024 – complétée le 28 mai 2024 –, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à ce que le droit à l’indemnité de chômage lui soit reconnu à compter du 16 juin 2023, avec suite de frais et dépens.
Le recourant allègue qu’il est de nationalité suisse, qu’il a continué à résider à Genève de manière prépondérante, le temps de retrouver un logement. Il affirme avoir toujours eu son centre de vie et d’intérêts dans le canton, où son fils est d’ailleurs scolarisé ; qui plus est, c’est là que se déroule le droit de visite.
b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 18 juin 2024, a conclu au rejet du recours.
c. Par écriture du 23 juillet 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions.
L’assuré explique avoir quitté la Suisse pour vivre avec sa mère, invalide, à G______, et avoir, suite à son décès, hérité de ce bien immobilier. Il est revenu habiter à Genève en 2018, à Thônex. Son enfant, né en 2019, est scolarisé à Genève. À la suite de son divorce, le domicile conjugal a été attribué à son ex-épouse et depuis lors, il n’a eu de cesse de se trouver un nouveau logement, tâche rendue ardue du fait de la crise du logement, d’une part, et de ses faibles revenus, d’autre part.
L’assuré explique que s’il était absent en dates des 12, 15 et 20 mars, lorsque sont passés les enquêteurs de l’OCPM, c’est parce qu’il travaillait pour l’entreprise de déménagement et transport K______. À l’appui de ses dires, le recourant a produit une attestation de cette entreprise confirmant sa présence au travail en dates des 12, 15 et 20 mars 2024.
Il répète que le centre de ses intérêts se trouve à Genève, auprès de son fils et de l’ensemble de ses amis, connaissances, ex-collègues ou proches.
Il souligne par ailleurs que le rapport d’enquête de l’OCPM a bel et bien conclu que son domicile se trouvait dans le canton.
d. Par écriture du 22 août 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions, arguant que si l’assuré séjourne plusieurs jours par semaine à Genève, il n’y réside pas de manière stable et permanente depuis juin 2023.
e. Une audience de comparution personnelle et d’enquêtes s’est tenue en date du 17 octobre 2024.
Ont été notamment entendus, sur la longue liste des témoins réclamés par le recourant : Monsieur L______, Monsieur M______, Madame N______
Ces témoins ont confirmé avoir loué le véhicule de l’assuré par le biais d’une application (2 EM) et avoir pris possession dudit véhicule à la rue C______ ou dans les environs.
L’assuré, pour sa part, a expliqué avoir travaillé, d'octobre 2022 à mars 2023, pour l'entreprise K______, société de services dans le domaine du déménagement et du nettoyage, sur appel, de façon irrégulière. Depuis le 14 mars 2024, il travaille à 50% pour le café restaurant O______, au centre commercial de P______. Certains mois, son taux d’activité peut atteindre 80%. Il est désormais sous contrat de durée indéterminée.
L’assuré a allégué avoir rencontré sa compagne actuelle, Mme D______, le 31 décembre 2022, s’être installé chez elle en janvier-février 2023 et y séjourner deux à trois nuits par semaine. Le reste du temps, il dort avec la mère de son fils et ce dernier. Ceux-ci ont vécu temporairement à Annemasse à compter de février 2024, dans l’appartement de l’assuré, qu’il avait sous-loué auparavant. Cela étant, il s’est bel et bien séparé de la mère de son fils quelques mois après avoir rencontré sa compagne actuelle, en mars-avril 2023.
S’il est régulièrement retourné en France, c'est parce qu’il y avait une activité d'auto-partage qui nécessitait sa présence sur place pour confier les clés du véhicule aux utilisateurs. Cette activité a duré tant qu’il avait une assurance qui couvrait ce risque, soit jusqu’en mai 2022.
Le fils du recourant, qui souffre d’un léger handicap, a d’abord été scolarisé à Thônex, puis, depuis septembre 2024 dans une école spécialisée à Rive (dans une classe d'intégration).
Le recourant, désormais officiellement domicilié à la rue C______, a expliqué que s’il avait tardé à s’annoncer officiellement à cette adresse, c’est parce qu’il craignait que cela n'entraîne un changement d'école pour son fils, changement qui a finalement été imposé par son handicap.
f. La Cour de céans a renoncé à entendre les nombreux autres témoins cités par le recourant, qui, tous, étaient des clients de cette plateforme de location, leur préférant l’audition d’autres témoins.
g. Mme E______, mère de l’enfant du recourant, a été entendue en date du 14 novembre 2024.
Cette dernière a indiqué avoir vécu dans l’appartement du recourant à Annemasse durant six mois avant novembre 2023, date à laquelle elle a emménagé aux Pâquis. Durant cette période, du printemps à l'automne 2023 environ, l’assuré était présent tous les jours pour s'occuper de l'enfant, pendant qu’elle travaillait. L’enfant était alors déjà scolarisé, mais il fallait l'amener à la Guidance infantile.
Le témoin a confirmé que leur séparation remontait à janvier-février 2023.
h. Entendue à son tour, Mme D______, compagne actuelle de l’assuré, a allégué avoir rencontré ce dernier en décembre 2022 et l’héberger depuis le printemps 2023, à raison de deux à trois jours par semaine. Le reste du temps, il est auprès de son fils. Le bail du parking utilisé par le recourant devant chez elle a été conclu au printemps 2023.
i. L’enquêteur de l’OCPM a également été auditionné.
Il a expliqué avoir conclu à un domicile à Genève, principalement sur la base des renseignements obtenus auprès du voisinage, en particulier auprès du service d'immeuble. Sur présentation de la photo de l’assuré, on lui a confirmé que ce dernier était régulièrement présent. Son véhicule était par ailleurs garé devant l'immeuble. L’enquêteur a également interrogé Mme D______, qui lui a affirmé que l’assuré dormait là trois ou quatre nuits par semaine.
j. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI – RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 À teneur de l’art. 1 al. 1 LACI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-chômage obligatoire et à l’indemnité en cas d’insolvabilité, à moins que la LACI n’y déroge expressément.
1.3 La procédure devant la Cour de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable
(art. 56ss LPGA et 62ss LPA).
2. L’objet du litige porte sur le droit du recourant aux indemnités de chômage à compter du 16 juin 2023, plus particulièrement sur la question de savoir s’il a été domicilié en Suisse entre juin 2023 et le 28 mars 2024, date de la décision litigieuse.
3. En vertu de l’art. 8 al. 1 LACI, l’assuré a droit à l’indemnité de chômage s’il remplit un certain nombre de conditions cumulatives (ATF 124 V 218 consid. 2), au nombre desquelles figure le fait d’être domicilié en Suisse (art. 8 al. 1 let. c).
3.1 Selon la jurisprudence, la notion de domicile au sens de la LACI ne correspond pas à celle du droit civil (art. 23ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 ; CC – RS 210), mais bien plutôt à celle de la résidence habituelle (cf. bulletin du SECO sur l’indemnité de chômage [IC], état juillet 2013, B 136 ; voir aussi les textes allemands et italien de l’art. 8 al. 1 let. c LACI : « in der Schweiz wohnt », « risiede in Svizzera » ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_270/2007 di 7 décembre 2007, consid. 2.1). Sont ainsi exigées, selon cette disposition légale, la résidence effective en Suisse, ainsi que l’intention de conserver cette résidence pendant un certain temps et d’en faire, durant cette période, le centre de ses relations personnelles (ATF 125 V 469 consid. 5).
L’entrée en vigueur de la LPGA n’a pas modifié cette pratique, dès lors que la notion de domicile inscrite à l’art. 13 al. 1er LPGA ne trouve pas application en matière d’assurance-chômage et ce, même si la LACI ne contient de dérogation expresse qu’à l’égard des étrangers habitant en Suisse (cf. ATAS/726/2008 du 19 juin 2008, consid. 4). En particulier, le principe prévu par l’art. 24 al. 1 CC, selon lequel toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau, n’entre pas en ligne de compte pour l’application de l’art. 8 al. 1 let. c LACI (arrêt du Tribunal fédéral C 121/02 du 9 avril 2003, consid. 2.2).
Pour avoir droit à l’indemnité, l’assuré doit remplir cette condition du « domicile » en Suisse, non seulement à l’ouverture du délai-cadre, mais pendant tout le temps où il touche l’indemnité (Gustavo SCARTAZZINI, Marc HURZELER, Bundessozialversicherungsrecht, 4ème éd. 2012, p. 599, n° 59 et les réf. citées). Cette exigence essentielle est l’expression de l’interdiction de l’exportation des indemnités de chômage, principe instauré pour prévenir les abus. Ce dernier terme doit être compris en ce sens que la vérification et les conditions du droit aux prestations, en particulier l’existence d’une situation de chômage, sont rendues plus difficiles lorsque l’assuré réside à l’étranger (arrêt du Tribunal fédéral C 226/02 du 26 mai 2003 consid. 1.1; Thomas NUSSBAUMER, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit, vol. XIV, 3ème éd. 2016 p. 2319, n. 180).
3.2 Dans la mesure où la résidence suppose un séjour d’une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits (arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2015 du 11 septembre 2015), l’occupation d’un studio une à deux fois par semaine – le reste du temps étant passé à l’étranger – ne suffit pas à établir une résidence effective en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral C 226/02 du 26 mai 2003 ; Boris RUBIN, Assurance-chômage, 2ème éd. 2006, p. 173). De même, un séjour tout à fait éphémère ou de pur hasard, ainsi qu’un pied-à-terre destiné uniquement à la recherche d’un emploi, ne sont pas assimilables à une résidence. Cela étant, un séjour prolongé et permanent n’est pas indispensable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_270/2007 du 7 décembre 2007, consid. 2.2 et 3.1). Si tel n’était pas le cas, certaines personnes se trouveraient dépourvues de résidence et, partant, privées de domicile (Boris RUBIN, ibidem). Ainsi, en cas de séjour, tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, la résidence est là où les liens sont les plus forts (ATF 87 II 7 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral C 153/03 du 22 septembre 2003). En revanche, la présence de seules relations professionnelles, même intenses, avec la Suisse ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_326/2020 du 4 août 2020 consid. 3). Le fait d’avoir une adresse officielle en Suisse et d’y payer ses impôts n’est pas déterminant si d’autres indices permettent de conclure à l’existence d’une résidence habituelle à l’étranger (cf. arrêt du Tribunal fédéral C 149/01 du 13 mars 2002, consid. 3).
Ainsi, le Tribunal fédéral a jugé que l’assuré, qui loge une partie de la semaine à Genève dans un pied-à-terre de dimensions modestes ne lui permettant pas d’accueillir sa famille, afin de conserver une adresse en Suisse pour bénéficier de la qualité de résident sur territoire helvétique, mais réside la plupart du temps en France voisine avec ses trois enfants qui y sont régulièrement scolarisés, dont il a la garde et sur lesquels il exerce l’autorité parentale, a le centre de ses intérêts personnels en France dès lors qu’il y bénéficie de diverses prestations sociales (revenu minimum d’insertion, allocation de soutien familial, aide au logement; arrêt du Tribunal fédéral 8C_777/2010 du 20 juin 2011).
Dans un arrêt 8C_186/2017 du 1er septembre 2017, qui concernait un demandeur d’emploi partageant un appartement de 2.5 pièces avec son frère à Lugano (TI), possédant un véhicule sans l’avoir dédouané, et retournant en Italie (où vivaient ses parents) durant les week-ends, le Tribunal fédéral a considéré que la proximité du domicile avec la frontière, en particulier dans la région du Sottoceneri, exigeait une plus grande rigueur dans l’application de l’art. 8 al. 1 let. c LACI, afin de s’assurer que l’assuré avait effectivement le centre de ses relations personnelles en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 8C_186/2017 du 1er septembre 2017 consid. 5.3 ; cf. aussi l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_440/2022 du 23 février 2023 consid. 4.1).
3.3 Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5).
3.4 La procédure est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle les faits pertinents de la cause doivent être constatés d’office par le juge, mais ce principe n’est pas absolu, sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer
à l’instruction de l’affaire (art. 61 let. c LPGA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 130 I 183 consid. 3.2 ; 125 V 195 consid. 2). Le devoir du juge de constater les faits pertinents ne dispense donc pas les parties de collaborer à l’administration des preuves en donnant des indications sur les faits de la cause ou en désignant des moyens de preuve (ATF 130 I 184 consid. 3.2, 128 III 411 consid. 3.2).
Autrement dit, si la maxime inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, elle ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences (ATF 117 V 264 consid. 3), sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à son adverse partie (ATF 124 V 375 consid. 3).
3.5 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).
3.6 En l’espèce, le recourant allègue en substance être domicilié à Genève depuis février-mars 2023 et l’avoir donc déjà été à l’ouverture du délai-cadre d’indemnisation, le 16 juin 2023.
Il est vrai que la situation familiale et personnelle de l’assuré compliquée nécessite quelques précisions afin d’élucider la question du domicile de l’intéressé, plus précisément celle de savoir où se trouve le centre de ses intérêts personnels.
De l’instruction du dossier, il peut être considéré comme établi que, depuis février-mars 2023, l’assuré vit chez sa nouvelle compagne, rue C______, à tout le moins trois jours par semaine. Cela ressort non seulement de ses dires, mais également du témoignage de la mère de son fils et de celui de sa compagne. C’est d’ailleurs la conclusion à laquelle est également arrivé l’enquêteur de l’OCPM, étant précisé à cet égard que les absences du recourant lors des passages de l’enquêteur s’expliquent par son travail pour l’entreprise K______, qui a confirmé qu’il exerçait pour elle ces jours-là, liste de présences à l’appui.
Certes, de l’aveu même du recourant, confirmé par la mère de son fils, il lui est régulièrement arrivé de dormir, entre mai et octobre 2023, dans son appartement d’Annemasse, avec la mère de son fils et ce dernier, pour s’en occuper lorsque la mère travaillait. Cependant, il s’agissait-là d’une solution provisoire, ce que confirment le fait que l’enfant ait toujours été scolarisé à Genève, d’une part, et le fait que sa mère ait déménagé aux Pâquis en novembre 2023, d’autre part.
Si l’on ne peut nier que, durant cette période, une partie des intérêts personnels du recourant se soit trouvée auprès de son fils, il n’en demeure pas moins qu’il avait refait sa vie avec Mme D______ et que le centre de ses intérêts s’est déplacé auprès de cette dernière dès le début de l’année 2023, date son installation chez elle.
Dans ces conditions, la Cour de céans considère que le recourant était bel et bien domicilié en Suisse entre le moment de son inscription au chômage et la date de la décision litigieuse, si bien que c’est à tort que l’intimé lui a nié le droit aux prestations. Le recours est donc admis et la décision litigieuse annulée.
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet.
3. Annule la décision du 28 avril 2024.
4. Renvoie la cause à l’intimé pour examen des autres conditions à l’octroi de l’indemnité et nouvelle décision.
5. Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de CHF 2'000.- à titre de participation à ses frais et dépens.
6. Dit que la procédure est gratuite.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le