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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1780/2023

ATAS/1019/2024 du 17.12.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1780/2023 ATAS/1019/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 décembre 2024

Chambre 15

 

En la cause

A______, enfant mineur, agissant par ses parents, B______ et C______,
représentée par PROCAP SUISSE, soit pour elle Caroline SCHLUNKE, mandataire

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. La mineure A______ (ci-après : la mineure), née le ______ 2015, souffre d’une trisomie 21, associée à un retard de développement du langage et de la communication, des difficultés motrices et une cataracte bilatérale congénitale oblitérante.

b. Malgré deux opérations des yeux durant sa première année, la mineure présente des troubles visuels importants (-13/-15).

B. a. En novembre 2022, les parents de la mineure ont sollicité de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) une allocation pour impotence et un supplément pour soins intenses. Dans le formulaire, ils ont indiqué que leur fille avait besoin d’une aide directe depuis sa naissance, tous les jours, pour les actes de la vie ordinaire : se vêtir/se dévêtir, manger, soins du corps, aller aux toilettes, se déplacer/entretenir des contacts sociaux. S’agissant de l’acte ordinaire intitulé « se lever/s’asseoir/se coucher », ils ont répondu « depuis la naissance », mais ont tracé la case « non ». L’enfant avait besoin d’une aide durable de ses parents pour la pose de patchs à l’œil, le changement de couches lié à des troubles digestifs, la prise de médicaments journaliers. Elle avait également besoin d’une surveillance personnelle, car ses parents ne pouvaient pas la laisser seule durant la journée pour une ou deux heures. Elle pouvait se mettre en danger, mettre différents objets à la bouche et casser des objets.

b. Dans un rapport établi le 4 juillet 2022 à l’attention de l’OAI, la pédiatre de la mineure, la docteure D______, a indiqué que sa patiente présentait des difficultés sur le plan langagier (expressif > compréhension), moteur (marche instable, collision à répétition, fatigue avec perte de tonus) et digestif (souillure).

c. L’OAI a mis en œuvre une enquête à domicile. L’enquêtrice a retenu que la mineure avait besoin d’aide pour cinq actes de la vie quotidienne, soit pour se vêtir (temps supplémentaire : 20 minutes) ; couper ses aliments et les amener à la bouche (temps supplémentaire : 20 minutes) ; se laver, se coiffer et se baigner / se doucher (temps supplémentaire : 15 minutes) ; porter des couches le jour et la nuit, se nettoyer aux toilettes (temps supplémentaire : 30 minutes) ; se déplacer à l’extérieur, entretenir des contacts sociaux (non pris en compte), mais des visites chez le médecin (supplément de 7 minutes par jour). À cela s’ajoutait le besoin d’une surveillance permanente qui correspond à un temps supplémentaire de deux heures par jour. Ainsi, le temps supplémentaire devant être accordé à la recourante par rapport à un enfant du même âge en bonne santé s’élevait à 3h32 par jour, ce qui était insuffisant pour ouvrir le droit à un supplément pour soins intenses.

d. Par projet de décision du 8 février 2023, l’OAI a proposé de reconnaître à la mineure le droit à une allocation pour impotence moyenne dès le 1er novembre 2021, soit un an avant la demande en application de la disposition légale en cas de demande tardive, en se fondant sur le rapport d’enquête.

e. Le 9 mars 2023, les parents de la mineure se sont opposés à ce projet en contestant l’enquête faite à domicile.

f. L’enquêtrice a pris position en maintenant son rapport.

g. Par décision du 20 avril 2023, l’OAI a maintenu son projet de décision.

C. a. Par acte du 24 mai 2023, la mineure a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre de céans) d’un recours contre cette décision dont elle sollicitait l’octroi d’une allocation pour impotence grave et un supplément pour soins intenses de plus de 8 heures, mais au moins de 4 heures.

b. Le 22 juin 2023, l’OAI a conclu au rejet du recours.

c. Le 18 août 2023, la mineure a fait parvenir à la chambre de céans un rapport de sa pédiatre.

d. Le 14 septembre 2023, l’OAI a persisté dans sa conclusion.

e. Le 25 octobre 2023, le conseil de la mineure a adressé sa note d’honoraires à la chambre de céans.

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA, applicable par le renvoi de l'art. 1 al. 1 LAI) et le délai de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]) prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le point de savoir si la recourante peut prétendre au versement d'une allocation pour impotent mineur de degré faible dès le 22 novembre 2017 (cinq ans avant la demande du 21 novembre 2022) et jusqu’au 31 octobre 2021 (une allocation de degré moyen étant dès le 1er novembre 2021 reconnue dans la décision attaquée), puis une allocation de degré grave dès le 7 mars 2023 (8 ans), et si elle a droit à un supplément pour soins intenses pour plus de 8 heures, mais d’au moins 4 heures.

3.              

3.1 Selon l’art. 42 LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une allocation pour impotent. L’art. 42bis est réservé. Cette dernière disposition prévoit que les ressortissants suisses mineurs qui n’ont pas leur domicile (art. 13 al. 1 LPGA) en Suisse sont assimilés aux assurés en ce qui concerne l’allocation pour impotent, à la condition qu’ils aient leur résidence habituelle (art. 13 al. 2 LPGA) en Suisse.

L’impotence peut être grave, moyenne ou faible (art. 42 al. 2 LAI).

L’allocation pour impotent est octroyée au plus tôt à la naissance. Le droit naît dès qu’une impotence de degré faible au moins existe depuis une année sans interruption notable ; l’art. 42bis al. 3 est réservé (art. 42 al. 4 LAI).

S’agissant du début du droit à l’allocation pour impotent, l’art. 48 al. 1 LAI portant sur le paiement des arriérés de prestations stipule que si un assuré ayant droit à une allocation pour impotent, à des mesures médicales ou à des moyens auxiliaires présente sa demande plus de douze mois après la naissance de ce droit, la prestation, en dérogation à l’art. 24 al. 1 LPGA, n’est allouée que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande.

Les prestations arriérées sont allouées à l’assuré pour des périodes plus longues aux conditions suivantes :

a. il ne pouvait pas connaître les faits ayant établi son droit aux prestations ;

b. il a fait valoir son droit dans un délai de douze mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de ces faits.

3.2 Conformément au message relatif à la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité (6e révision, premier volet ; (FF 2010 1647)), cet article rétablit le droit au versement d’arriérés pour l’allocation pour impotent, les mesures médicales et les moyens auxiliaires, tel qu’il s’appliquait avant la 5e révision. Celle-ci avait modifié cette disposition en l’adaptant à l’art. 29 (rentes) et à l’art. 10 al. 1 (mesures de réinsertion et d’ordre professionnel). Le droit aux arriérés concernant l’allocation pour impotent, les mesures médicales et les moyens auxiliaires était alors passé d’un an à cinq ans sans que cela ne corresponde à l’intention du législateur. Cela a créé une inégalité de traitement par rapport à l’allocation pour impotent de l’AVS, pour laquelle le droit aux arriérés est limité à 12 mois, et l’application de la disposition n’était guère possible ; aussi le droit antérieur à la 5e révision a-t-il été restauré pour les prestations énoncées.

4.              

4.1 S’agissant de l’allocation pour impotence faible sollicitée par la recourante pour une période antérieure au 1er novembre 2021, force est de constater que cette allocation n’a été expressément sollicitée que le 21 novembre 2022.

L’on ne saurait admettre que la demande de mesures médicales datant du 31 mars 2016 aurait dû être comprise comme une demande d’allocation pour impotent et être instruite d’office en ce sens par l’intimé, dans la mesure où l’enfant n’était âgée alors que d’un an et que son état ne nécessitait pas un surcroît d’aide par rapport à un enfant sans handicap du même âge.

Il n’est pas contesté à cet égard que le surcroît d’aide pour accomplir trois actes pouvait être reconnu au plus tôt en mars 2018. La demande de mesures médicales ne pouvait dès lors pas être considérée comme une demande d’allocation pour impotent suffisamment étayée pour que l’intimé ait dû instruire celle-ci d’office (einen seinerzeit hinreichend substantiiert geltend gemachten Leistungsanspruch übersehen hat).

Les parents de la recourante connaissaient quant à eux les faits pour faire valoir le droit aux prestations dès le mois de mars 2018, mais n’ont pas fait valoir celui-ci dans un délai de douze mois à compter de la date à laquelle ils ont eu connaissance de ces faits, de sorte que la demande d’allocation pour impotent du 22 novembre 2022 est tardive. Le fait que l’OAI a prolongé par communication du 20 mars 2018 le droit aux mesures médicales sur la base d’un rapport de l’ergothérapeute de la recourante du 12 mars 2018 ne pouvait pas palier une véritable demande d’allocation pour impotent faute de comporter suffisamment de précisions sur le besoin d’aide pour les divers actes de la vie ordinaire au regard de l’âge et des compétences de la recourante et l’éventuel supplément de temps pour soins intenses.

L’intimé ne pouvait dès lors pas allouer des prestations avant le 1er novembre 2021.

5.              

5.1 S’agissant de l’allocation d’impotent pour mineur de degré grave sollicitée dès le 7 mars 2023 (8 ans de la mineure), il sera rappelé que la décision entreprise du 20 avril 2023 reconnaît un droit à une allocation pour impotent mineur de degré moyen dès le 1er novembre 2021 en précisant qu’une révision pourrait être faite à l’âge de 10 ans.

Cette décision ne retient dès lors pas de modification dès les 8 ans de l’enfant. Il convient dès lors d’examiner si le droit à l’allocation pour impotence grave est ouvert dès les 8 ans de la recourante.

Il est établi que l’enfant a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir cinq actes ordinaire de la vie (se vêtir/se dévêtir, manger, faire sa toilette, aller aux toilettes, se déplacer et entretenir des contacts avec autrui) sur six (le sixième étant l’acte de se lever/ s’asseoir/ se coucher).

Le conseil de la recourante conteste la non-prise en compte de ce sixième acte dès l’âge de 8 ans de la mineure, au motif que les parents de celle-ci doivent notamment suivre un très important rituel d’endormissement débutant bien avant le coucher, que la mère doit dormir au côté de sa fille pour la rassurer durant ses nombreux réveils nocturnes. L’enfant nécessite en sus une surveillance permanente particulièrement intense. Il n’est en revanche pas contesté que l’enfant peut physiquement accomplir ce groupe d’acte.

5.2 L’art. 37 al. 1 RAI prescrit que l’impotence est grave lorsque l’assuré est entièrement impotent. Tel est le cas s’il a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des soins permanents ou une surveillance personnelle.

Selon la jurisprudence, les actes élémentaires de la vie quotidienne se répartissent en six domaines : 1. se vêtir et se dévêtir ; 2. se lever, s’asseoir et se coucher ; 3. manger ; 4. faire sa toilette (soins du corps) ; 5. aller aux toilettes ; 6. se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur et établir des contacts sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2014 du 16 octobre 2015 consid. 3.3 et les références).

5.3 Pour évaluer l’impotence des assurés mineurs, on applique par analogie les règles valables pour l’impotence des adultes selon les art. 9 LPGA et 37 RAI. Toutefois, l’application par analogie de ces dispositions n’exclut pas la prise en considération de circonstances spéciales, telles qu’elles peuvent apparaître chez les enfants et les jeunes gens. Ce qui est déterminant, c’est le supplément d’aide et de surveillance par rapport à ce qui est nécessaire dans le cas d’un mineur non invalide du même âge que l’intéressé (ATF 113 V 17 consid. 1a).

Ainsi, en vertu de l’art. 37 al. 4 RAI, seul est pris en considération dans le cas des mineurs le surcroît d’aide et de surveillance que le mineur handicapé nécessite par rapport à un mineur du même âge et en bonne santé. Cette disposition spéciale s’explique par le fait que plus l’âge d’un enfant est bas, plus il a besoin d’une aide conséquente et d’une certaine surveillance, même s’il est en parfaite santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_798/2013 du 21 janvier 2014 consid. 5.1.1 ; ATF 137 V 424 consid. 3.3.3.2 ; CSI, ch. 8019).

Afin de faciliter l’évaluation de l’impotence déterminante des mineurs, des lignes directrices figurent dans la Circulaire sur l’invalidité et l’impotence dans l’assurance-invalidité CIIAI valable à partir du 1er janvier 2021, en vigueur lors du début de l’octroi de l’allocation litigieuse. Ces lignes directrices détaillent l’âge à partir duquel, en moyenne, un enfant en bonne santé n’a plus besoin d’une aide régulière et importante pour chacun des actes ordinaires de la vie. Cet âge détermine le début du délai d’attente d’un an (cf. ATAS/48/2020 du 28 janvier 2020 consid. 6).

5.4 Dès le 1er janvier 2022, cette circulaire a été remplacée par la Circulaire sur l’impotence (CSI).

Dans la mesure où il s’agit dans ce cas de vérifier, d’une part, les durées retenues à titre de surcroit de temps dans cinq actes de la vie retenus par l’enquêtrice jusqu’au 8 ans de la recourante (durées contestées) et, d’autre part, de vérifier s’il sied de retenir un surcroit de temps pour le sixième acte (non retenu par l’intimé), il conviendra premièrement de se référer à la CIIAI, puis à la CSI pour le sixième acte.

6.              

6.1 S’agissant tout d’abord de l'acte de se lever/s'asseoir/se coucher, la CSI indique qu’il y a impotence lorsqu’il est impossible à l’assuré de se lever, de s’asseoir ou de se coucher sans l’aide d’un tiers. S’il peut néanmoins changer de position lui-même, il n’y a pas impotence (CSI 2030 p. 21).

De fréquents réveils nocturnes (au moins trois fois par nuit), à l’occasion desquels l’assuré doit être calmé et remis au lit, peuvent être pris en compte pour cet acte ordinaire de la vie. En revanche, une simple demande adressée à l’assuré qui se réveille la nuit de se recoucher et de se rendormir ne constitue une aide régulière d’autrui ni pour cet acte ordinaire de la vie (arrêt du TF I 71/2005 du 6.10.2005) ni en termes de surveillance.

Les rituels d’endormissement ne fondent pas l’impotence et ne peuvent pas être reconnus dans le domaine « se lever, s’asseoir, se coucher », à moins que l’ampleur de ces rituels aille nettement au-delà de ce qui entre dans le cadre habituel d’une prise en charge adaptée à l’âge. Ces circonstances doivent toutefois être clairement documentées dans les rapports médicaux existants (des mesures médicales telles que la remise de médicaments ou d’autres stratégies ont été envisagées et leur inefficacité est attestée par un médecin).

Au moins jusqu’à la huitième année, il est considéré comme adapté à l’âge de l’enfant de lui consacrer du temps avant son coucher sous forme d’attention, d’intimité physique entre l’enfant et les parents, d’échanges, de chansons, de prières, de séries audio, etc. Un rituel d’endormissement peut donc être pris en compte seulement à partir de l’âge de 8 ans et à partir d’une certaine intensité (supplément forfaitaire de 60 minutes par nuit au maximum). Raconter une histoire, laisser la lumière allumée, rester près de l’enfant ou lui faire un massage apaisant ne suffisent pas à caractériser un besoin d’aide pour cet acte ordinaire de la vie (CIIAI 2035 p. 22).

6.2 En l’occurrence, les parents soutiennent que l'enquêtrice a indiqué des informations fausses dans son rapport. Ils rappellent que leur fille dort toutes les nuits avec sa mère et non pas « la plupart du temps ». Ils ont prévu une chambre à coucher dédiée à cette situation. Selon eux, l'enquêtrice a vu ou aurait dû voir « cette circonstance » qui vaut la peine d'être considérée. Ils ajoutent que la phrase « elle s'endort après avoir écouté une histoire » est un démembrement erroné du rituel d'endormissement, lequel « commence bien avant, alors qu'il faut obliger Sofia, grâce à des procédures longues, à se coucher. La mère doit la calmer donc chanter et danser, s'occuper de sa poupée, ensuite il faut rester à côté non seulement jusqu'au moment de l'endormissement, mais aussi toute la nuit. Il faut d'ailleurs également la convaincre à se déshabiller avant d'aller au lit. En effet, Sofia présente chaque soir un comportement récalcitrant, ne voulant pas aller au lit. Durant la nuit, elle se réveille à maintes reprises avec une demande incessante (boire, trop noir dans la chambre, d'autres questions, se lève veut allumer la lumière, veut descendre à l’étage), une crise ou par suite d'un cauchemar ». (…) « Les dernières phrases lisibles de la description du sous-acte "se coucher" faites par l'infirmière ne correspondent pas non plus à la réalité : le fait que la mère s'endort à côté de sa fille tous les soirs et y reste toute la nuit n'est pas dicté par la fatigue de la mère qui, sans Sofia, pourrait dormir avec son conjoint comme dans la plupart des mariages, mais par la nécessité de répondre aux réveils multiples de Sofia. L'agitation de Sofia atteint un seuil de sévérité qui exige l'utilisation d'une chambre dédiée. Quant aux réveils, il ne suffit pas de lui demander de se recoucher ou de dormir. Sofia demande donc non seulement un rituel d'endormissement quotidien qui dépasse le cadre ordinaire, mais aussi une aide indirecte constante et importante durant la nuit ».

Les parents relèvent encore que dans sa note de travail du 6 avril 2023 1'enquêtrice (prise de position après l’opposition) a admis, entre les lignes, qu’elle avait oublié de tenir compte des réveils nocturnes puisqu'elle ne les conteste pas, mais retient au demeurant que « d'autre part les actions de nuit visant à la recoucher si besoin sont prises en compte sous surveillance ». Finalement, les parents rappellent que le réveil est également très difficile avec une opposition totale pour l'acte partiel « se lever », de sorte qu'on peut se demander, subsidiairement, si l'aide pour un tel acte partiel remplirait également les conditions.

Ils en tirent la conclusion que ce sixième acte de la vie nécessite également une aide permanente et importante à l’instar des autres actes retenus dans la décision attaquée. Ils considèrent que le temps supplémentaire à retenir est de 50 minutes (25 minutes en fonction de l'âge et 25 minutes pour le comportement récalcitrant).

6.3 La chambre de céans quant à elle constate que le récit des parents au sujet de la prise en charge de leur fille avant le coucher, lors de celui-ci, durant les nuits et encore au matin démontre que des besoins supplémentaires de l’enfant vont largement au-delà des exemples cités dans la CSI. Le rapport d’enquête est incomplet sur ce point (la phrase non terminée) et ne contient pas le temps estimé par les parents, alors que ces derniers expliquent - sans que l’enquêtrice amenée à se prononcer sur leur opposition ne l’ait contesté dans sa note – qu’ils ont dû mettre en place de longs rituels afin de mettre au lit leur fille. Ils suivent ces rituels chaque soir, bien avant de pouvoir la coucher, et ont mis en place une organisation (chambre pour la mère et l’enfant) pour que leur fille s’endorme chaque soir et pour qu’elle se sente en sécurité en présence de sa mère durant toute la nuit, en particulier lors de ses nombreux réveils nocturnes qui obligent la mère à recommencer le rituel d’endormissement, plusieurs fois par nuit. Les parents décrivent ainsi des rituels quotidiens longs et fastidieux en raison du comportement récalcitrant de leur fille au moment du coucher et durant la nuit.

En conséquence tant ces rituels, non pris en compte par l’enquêtrice, au motif qu’ils ne relèveraient pas de cet acte ordinaire de la vie, que l’organisation destinée à endormir et faire dormir l’enfant durant la nuit, notamment après de fréquents réveils nocturnes, sont d’une ampleur telle qu’ils vont nettement au-delà de ce qui entre dans le cadre habituel d’une prise en charge adaptée à l’âge d’un enfant de 8 ans, au regard des directives précitées.

Il se justifie dès lors de prendre en compte ces circonstances particulières liées aux handicap de la mineure, de sorte qu’il apparaît établi que celle-ci a besoin d’une aide régulière d’autrui pour cet acte ordinaire de la vie. Celle-ci peut être arrêtée à 50 minutes par jour pour tenir compte du surcroît de temps et du comportement récalcitrant de l’enfant décrit par les parents, ce qui demeure dans la limite du temps maximum à considérer pour cet acte.

7.             La recourante estime également que le surcroît de temps retenu par l’enquêtrice pour l’acte « se vêtir/se dévêtir » est erroné faute de prendre en compte son comportement récalcitrant. Ses parents ont expliqué être confrontés à un comportement récalcitrant de leur fille à chaque habillage : « chaque matin nous avons un gros problème pour habiller Sofia. Elle ne veut pas se lever et résiste à s’habiller, pleure, s’enfuit de nouveau au lit. Je dois l’attraper, la persuader et l’habiller à nouveau. Cela prend énormément de temps. En outre, au cours de la journée, elle doit se changer plusieurs fois. Chaque soir, l’histoire se répète, elle ne veut pas se changer et s’enfuit jouer ».

Au vu de ce comportement, il apparaît justifié de retenir un supplément de 10 minutes. Le poste « se vêtir/se dévêtir » est ainsi de 30 minutes (25 minutes admises et décrites par les parents lors de l’enquête + 10 minutes pour le comportement - la déduction de 5 minutes pour un enfant du même âge).

8.              

8.1 Pour l’acte « manger », les parents relèvent qu’il manque le temps pour le découpage de la nourriture, leur fille ne sachant pas utiliser le couteau et la fourchette pour ce faire.

L’enquêtrice rappelle que l’enfant aime bien manger et peut en partie manger avec une cuillère et une fourchette et prend ce qui est possible avec les mains.

8.2 Selon la CIIAI et la CSI, un enfant de 8 ans est autonome, sait se servir d’un couteau et couper la viande (CIIAI p. 115 et CSI Annexe 2 p. 107). Il est renvoyé pour le surplus à la jurisprudence relative à l’impotence des adultes.

Ainsi, il n’y a pas d’impotence si l’assuré n’a besoin de l’aide directe d’autrui que pour couper des aliments durs, car de tels aliments ne sont pas consommés tous les jours et l’assuré n’a donc pas besoin de cette aide de façon régulière et importante (arrêt du TF 8C_30/2010 du 8.4.2010). En revanche, il y a impotence lorsque l’assuré ne peut pas du tout se servir d’un couteau (et donc pas même se préparer une tartine ; arrêt du TF 9C_346/2010 du 6.8.2010).

8.3 Dans ce cas, la recourante ne sait pas se servir d’un couteau et a en outre des difficultés à manger avec sa fourchette, ses parents devant l’encourager et finir parfois les repas en la nourrissant à la cuillère. Un surcroit de temps de 10 minutes pour la découpe des aliments apparaît justifié, soit au total 30 minutes.

9.              

9.1 Quant à l’acte « faire sa toilette », les parents soutiennent que l’acte de se coiffer est impossible pour l’enfant, de sorte qu’il faut en tenir compte dans le surcroît de temps. Le comportement récalcitrant n’a selon eux à tort pas été retenu.

9.2 Selon la CIIAI (8020 p. 140), il y a impotence lorsque l’assuré ne peut effectuer lui-même un acte ordinaire de la vie quotidiennement nécessaire du domaine de l’hygiène corporelle (se laver, se coiffer, se raser, prendre un bain ou se doucher). Par contre, il n’y a pas impotence lorsque l’assuré a besoin d’aide pour se coiffer ou se vernir les ongles (arrêt du TF 9C_562/2016 du 13 janvier 2017).

9.3 En l’espèce, le fait que la recourante ne se coiffe pas seule ne ressort pas expressément de l’enquête, mais est affirmé par ses parents. Par ailleurs, l’enquêtrice a indiqué que tous les soins d’hygiène étaient faits par la maman et a précisé, s’agissant de la brosse à dents, que l’enfant pouvait uniquement tenir celle-ci et brosser le devant des dents, sa mère faisant le reste.

Il faut dès lors en déduire que la recourante ne peut pas se coiffer seule comme l’affirment les parents.

Quant au comportement récalcitrant, il apparaît que la mère de la recourante doit lui brosser les dents et la laver entièrement. Si les parents n’ont pas évoqué un comportement récalcitrant en ces termes lors de l’enquête, il apparaît qu’à son âge un autre enfant serait autonome. Le temps nécessaire pour accompagner la recourante, la laver entièrement, lui prodiguer les soins d’hygiène quotidien excède le temps qu’il faut pour un enfant du même âge sans handicap évalué à 15 minutes.

Il y a ainsi lieu sur ce point de retenir comme le soutienne les parents un surcroît de temps de 25 minutes (40 minutes pour cet acte sous déduction de 15 minutes pour les enfants du même âge).

10.          

10.1 Enfin, la recourante considère que le surcroît de temps pour l’acte aller aux toilettes doit être alourdie du fait de son comportement récalcitrant.

10.2 Il y a impotence lorsque l’assuré a besoin de l’aide et de l’accompagnement d’un tiers pour vérifier son hygiène, pour se rhabiller, pour s’asseoir sur les toilettes ou pour s’en relever (ATF 121 V 88 consid. 6). C’est également le cas lorsqu’il faut procéder à une manière inhabituelle d’aller aux toilettes (par ex. apporter le vase de nuit et le vider, apporter un urinal, l’ajuster pour l’assuré, apporter une aide régulière pour uriner etc. ; Pratique VSI 1996 p. 182 ; cf. ch. 8027) (CIIAI 8021 p. 140).

10.3 L’annexe rappelle qu’à 6 ans, l’enfant peut s’essuyer lui-même et se rhabiller tout seul. À titre de surcroît de soins, il faut prendre en considération le changement fréquent des couches pour des raisons médicales et la difficulté à changer les couches en raison d’une forte spasticité (CIIAI, Annexe III, p. 216).

10.4 Dans ce cas, l’enquêtrice a retenu six passages aux toilettes par jour, en précisant que la recourante s’y rendait toujours avec un adulte auquel elle tenait la main et qu’il n’y avait pas toujours de selles à nettoyer. La recourante savait en outre monter et descendre sa couche. La mère de la recourante a exposé pour sa part que sa fille se rendait 12 fois par jour au toilettes, car elle avait régulièrement de la diarrhée et de la constipation. Elle devait l’aider pour tout y compris la laver entièrement lorsque les selles avaient débordé. Cela prenait beaucoup de temps. Elle ne fait pas état d’un comportement récalcitrant de l’enfant pour cet acte, mais d’un surcroît de temps lié à l’aide importante à apporter à l’enfant.

10.5 Il est incontesté dans ce cas que la recourante porte des couches, souffre de problèmes intestinaux relevés par sa pédiatre et pour lesquels elle est suivie médicalement. Elle n’est pas autonome pour ces actes contrairement aux enfants de son âge. Au vu de son âge et des changes fréquents, il s’impose ainsi de retenir un surcroît de temps de 40 minutes auxquels s’additionnent les minutes pour le change. Dans son opposition, la recourante a chiffré ce temps à 60 minutes (12 x 5 minutes) par jour, ce qui apparaît vraisemblable au vu de la situation notamment médicale de l’enfant. Il paraît en revanche inconvenable que cet acte ne requiert que 30 minutes puisqu’il ne s’agit pas de changer un bébé plusieurs fois par jour en 5 minutes chaque fois, mais bien d’accompagner aux toilettes une jeune enfant souffrant d’un retard et de diarrhées notamment chaque fois que cela est nécessaire dans une journée et de la laver régulièrement en raison des souillures résultant de ses problème gastro-intestinaux.

Il sied dès lors de retenir un surcroît de temps de 100 minutes pour cet acte comme le soutient la recourante.

11.          

11.1 La recourante soutient en outre que sa mère doit lui poser un patch sur les yeux chaque jour sans indiquer le temps que cela prend. Il apparaît en outre que l’enquêtrice a indiqué que la recourante avait besoin d’une aide régulière dans le cadre d’un traitement (LAXIPEG), sans toutefois en indiquer la durée.

11.2 Selon la CSI (2063 ss), le besoin de soins de plus de deux heures par jour est qualifié de particulièrement astreignant si des critères qualitatifs aggravants doivent aussi être pris en compte (arrêt du TF 8C_663/2016 du 17.1.2017).

11.3 En l’occurrence, le fait de donner un laxatif quotidiennement et de poser un patch sur un œil n’entre pas dans les soins particulièrement astreignants à retenir en sus du surcroît de temps pour les actes de la vie ordinaire.

12.          

12.1 Les parents de la recourante contestent ensuite le temps retenu par l’enquêtrice pour la surveillance personnelle (2 heures).

12.2 Selon la directive CIIAI (en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021), il y a surveillance en particulier lorsque :

- l’enfant pourrait se mettre en danger ou constituer un danger pour des tiers. La situation de danger et la surveillance qui en découle doivent continuer de subsister malgré les mesures prises pour réduire le dommage (parc pour enfant, babyphone, caches couvrant les prises électriques, sécurités aux fenêtres, aux portes, aux plaques de cuisson, etc.). Exemple : Un enfant de 9 ans ne saisit pas les dangers. Il va sans cesse examiner les prises électriques. L’eau exerce aussi sur lui une grande attirance, et il essaye tout le temps d’ouvrir tous les robinets. Malgré les mesures prises pour réduire le dommage (caches couvrant les prises, notamment), les risques ne sont pas exclus. Une surveillance s’avère donc nécessaire. Si, dans la même situation, l’enfant n’a que 5 ans, la surveillance ne peut pas être reconnue vu qu’elle est encore normale à cette âge (8078.1).

- la surveillance personnelle se caractérise par une certaine intensité, qui dépasse le besoin de surveillance d’un enfant du même âge ne souffrant d’aucun handicap (arrêt du TF 9C_431/2008 du 29.02.2009) (8078.2).

Chez les mineurs, une surveillance permanente est automatiquement reconnue dans le cadre du SSI avec un forfait de 2 heures. Contrairement à ce qui se fait chez les adultes, il faut donc lui accorder une grande importance même dans les cas d’impotence grave (8078.3).

Il y a surveillance permanente particulièrement intense lorsqu’on exige de la personne chargée de l’assistance une attention supérieure à la moyenne et une disponibilité constante. Cela signifie que cette personne doit se trouver en permanence à proximité immédiate de l’assuré, car un bref moment d’inattention pourrait de façon très probable mettre en danger la vie de ce dernier ou provoquer des dommages considérables à des personnes ou à des objets. En raison de la nécessité d’assurer cette assistance ou cette surveillance en permanence, la personne qui en est chargée ne peut guère se consacrer à d’autres activités. En outre, des mesures doivent avoir déjà été prises pour protéger l’assuré et son entourage afin de réduire le dommage, sans pour autant qu’il en résulte une situation qu’on ne saurait raisonnablement exiger de l’entourage. Si des instruments de surveillance (moniteur, alarme) peuvent être utilisés, il ne faut pas considérer d’office qu’il y a surveillance particulièrement intense. La nécessité d’une surveillance pendant la nuit ne constitue pas une condition pour la reconnaissance d’une surveillance particulièrement intense. Exemple : Un enfant ne reconnaît pas les dangers ; il peut par ex. vouloir à l’improviste passer par la fenêtre. Il n’est pas toujours capable de réagir de manière adéquate aux injonctions ou avertissements verbaux. Dans certaines situations, il peut vouloir se faire du mal à lui-même ou avoir un comportement agressif envers des inconnus. La personne chargée de l’assistance doit donc rester très attentive, se tenir en permanence à proximité immédiate de l’enfant et être à tout moment prête à intervenir. Exemple : Un enfant souffre d’une forme grave d’épilepsie. Il a tous les jours plusieurs attaques en série qui surviennent brusquement et lors desquelles sa respiration s’interrompt. La personne qui l’assiste doit donc rester très attentive, se tenir en permanence à proximité immédiate de lui et être à tout moment prête à intervenir (8079).

Le surcroît de temps de 120 minutes en cas de surveillance ou de 240 minutes en cas de surveillance particulièrement intense liée à l’atteinte à la santé (art. 39, al. 3, RAI) correspond à des forfaits et non au surcroît de temps effectif. Ces durées servent uniquement au calcul du droit au supplément pour soins intenses (8079.1).

12.3 En matière d’autisme infantile, le Tribunal fédéral a admis le besoin d’une surveillance personnelle permanente particulièrement intensive dans le cas d’une enfant qui grimpait partout, « s’enfuyait » de la maison, jetait des objets lors de crises de colère, courait, sautait ou se couchait sur tout ce qui pouvait se trouver sur son chemin, par exemple un jouet ou même un autre enfant, qui était imprévisible, avait toujours besoin d'une personne pour l'aider à accomplir les tâches quotidiennes et devait être tenue et guidée dans toutes ses activités, car elle s'y opposait (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 49/07 du 10 janvier 2008 consid. 6.1 et 6.2).

12.4 En l’espèce, les parents soutiennent que l’état de santé de leur fille nécessite une surveillance personnelle particulièrement intense et qu’il faudrait retenir 4 heures par jour à ce titre au lieu des 2 heures admises.

Ils indiquent que leur fille n'a pas conscience des dangers à l'intérieur, tout comme à l'extérieur en raison de son retard mental et de son déficit visuel. Elle ne comprend pas (et ne voit pas correctement) son environnement et les codes relatifs aux interactions sociales, manifeste des réactions imprévisibles et non contrôlées liées à sa maladie. Elle peut uniquement suivre des consignes très simples et ne les suit qu'en présence de l'adulte, comme c'est le cas dans le cadre de l'hippothérapie. Contrairement à ce que l'enquêtrice a retenu, bien que cela soit clair dans le rapport d’enquête, leur fille peut se consacrer à une tâche uniquement en présence de l'adulte qui doit aussi lui dédier son attention. À titre d’exemple, ils rappellent qu’à l’occasion de l'enquête, leur fille a manifesté une de ses crises quotidiennes, au motif que sa mère parlait à l'enquêtrice au lieu de s'occuper d'elle, de sorte qu’il a été nécessaire de mettre l’enfant un moment à l’écart derrière une porte vitrée, comme le révèle le rapport. Les constatations dans le rapport ne coïncident ainsi pas avec les conclusions de l'enquêtrice, lesquelles ne correspondent pas aux faits. Finalement, les parents considèrent qu’il n'est pas correct d'utiliser le fait que leur fille a pu monter seule à l'étage de la maison et redescendre pour nier le besoin de surveillance particulièrement intense. Il s'agissait d'un entrainement à l'autonomie dans le cadre thérapeutique et l'adulte doit la surveiller de près, comme indiqué dans le rapport du 12 février 2022 de Madame E______ qui mentionne expressément la nécessité d'une « supervision rapprochée ». Ils relèvent qu’il est au demeurant difficile de comprendre pourquoi la nécessité d'une surveillance particulièrement intense devrait impliquer la nécessité de tenir la main de leur fille lorsqu'elle monte les escaliers de sa maison. La question de savoir si une aide ou une surveillance personnelle permanente est nécessaire doit être tranchée de manière objective selon l'état de l'assuré. Dans le cas de Sofia, une petite fille avec retard mental qui « se déplace en oscillant de droite à gauche, ne marche pas droit » (cf. enquête point 1.1.6), a besoin de surveillance rapprochée 24 heures sur 24, le déficit visuel et le grave retard de leur fille parlant objectivement en faveur de cette nécessité. Les parents en concluent qu’il y a lieu de retenir le besoin d'une surveillance personnelle de quatre heures.

Quant à elle, l’enquêtrice a retenu un besoin de surveillance personnelle permanente (2 heures), mais sans reconnaître que cette surveillance soit particulièrement intense : « une surveillance personnelle a été retenue pour cette fillette ayant un certain retard mental et une malvoyance, elle peut se mettre en danger par inadvertance, en particulier à l'extérieur. Elle fait des crises de frustration avec pleurs/cris assise au sol. Cependant, elle peut également rester assise à jouer tranquillement, peut se déplacer seule dans la maison, passer d'un étage à l'autre seule, de plus Sofia n'est pas agressive envers les autres, ni envers elle-même. La surveillance personnelle permanente particulièrement intense n'est effectivement pas donnée avant 8 ans, mais surtout justifiée uniquement si le mineur se met en danger de façon constante ou est un danger pour les autres, s'il y a agressivité envers les autres ou envers lui-même. Dans ces rares cas de figure, un adulte, formé à cela, se tient constamment prêt à intervenir immédiatement pour éviter l'acte agressif ou dangereux. La jeune Sofia ne rentre absolument pas dans cette catégorie ».

12.5 Il sied de constater que les explications des parents de la recourante sont corroborés par les éléments apportés par la pédiatre traitante en lien avec les déficits moteur et langagier (dans sa composante « compréhension ») et avec l’atteinte visuelle qui est incontestable.

S’agissant de la mise en danger de soi-même ou des autres, la pédiatre de la recourante estime que sa patiente n’est pas automne dans les actes ordinaires de la vie et qu’elle nécessite en permanence la présence d’un adulte, sans toutefois mentionner de risques de mise en danger pour elle ou les tiers.

Le besoin d’une surveillance personnelle en permanence a ainsi à juste titre été retenu par l’enquêtrice. Cette surveillance est forfaitairement de 2 heures par jour, au contraire de la surveillance particulièrement intense qui justifie de retenir 4 heures. Le cas de la recourante ne peut pas être comparé en terme d’intensité du besoin de surveillance à celui de l’autisme infantile précité (consid. 12.3).

Dans la mesure où la notion de surveillance est interprétée de manière restrictive par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 43/02 du 30 septembre 2002 consid. 3), il ne peut être considéré que la recourante nécessite dans ce cas malgré ses atteintes à la santé une surveillance dite particulièrement intensive.

12.6 En conséquence, au surcroît de temps pour les actes ordinaires de la vie de 50 + 30 + 30 + 25 + 100 + 7 minutes additionnelles pour les visites médicales, s’ajoutent 120 minutes pour la surveillance personnelle permanente telle que retenue dans la décision attaquée, soit au total 362 minutes (6 heures 02).

12.7 L’allocation de degré grave est due dès le mois de mars 2023 et le droit à un supplément pour soins intenses de 6 heures doit être reconnu dès cette même date (art. 42ter al. 3 LAI).

12.8 En effet, selon l’art. 39 RAI, chez les mineurs, sont réputés des soins intenses au sens de l’art. 42ter al. 3 LAI, les soins qui nécessitent, en raison d’une atteinte à la santé, un surcroît d’aide d’au moins quatre heures en moyenne durant la journée (al. 1), ce qui est établi en l’espèce.

13.         Au vu de ce qui précède, le recours est admis et la décision attaquée annulée.

14.         La cause sera renvoyée à l’OAI pour nouvelle décision au sens des considérants.

La recourante qui obtient gain de cause dans une large mesure a le droit à une indemnité de procédure de CHF 3'500.- à charge de l’intimé.

Un émolument sera mis à charge de l’intimé.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Alloue à la recourante une indemnité de procédure de CHF 3’500.- à charge de l’intimée.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le