Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/877/2024 du 31.10.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/4134/2023 ATAS/877/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 31 octobre 2024 Chambre 3 |
En la cause
A______ représentée par sa mère, Madame B______ | recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 2005, souffre, depuis sa naissance, d’un syndrome génétique causé par une micro-délétion du chromosome 1p36.
Ce syndrome peut notamment comprendre une dysmorphie faciale distinctive, une hypotonie, un retard de développement, un déficit intellectuel, une épilepsie, des malformations cardiaques, une perte de l’ouïe et l’apparition prénatale d’un déficit de croissance.
b. L’assurée vit chez sa mère, Madame B______.
c. Par ordonnance du 25 août 2023, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE) a institué une curatelle de portée générale en faveur de l’assurée, cette dernière étant ainsi privée de plein droit de l’exercice de ses droits civils. Le TPAE a désigné la mère de l’assurée aux fonctions de curatrice.
La décision du TPAE a été immédiatement exécutoire à la majorité de l’assurée, le 10 octobre 2023.
B. a. L’assurée a été mise au bénéfice d’une allocation pour impotent :
- du 1er décembre 2007 au 30 juin 2009 : de degré faible (aide pour trois actes ordinaires de la vie) ;
- du 1er juillet 2009 au 30 septembre 2011 : de degré moyen (aide pour quatre actes ordinaires de la vie) ;
- du 1er octobre 2011 au 31 mars 2023 : de degré grave (aide pour tous les actes ordinaires de la vie) ;
- du 1er avril au 31 octobre 2023 : de degré moyen (aide pour cinq actes ordinaires de la vie), avec un supplément pour soins intenses de plus de quatre heures du 1er août 2022 au 31 décembre 2023.
En 2023, l’allocation pour impotence de degré moyen s’élevait à CHF 40.85 par jour et le supplément pour soins intenses à CHF 32.65 par jour.
b. Les 31 mai et 9 juin 2023, à l’approche de la majorité de sa fille, la mère de l’assurée a déposé auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) des demandes de prestations pour adulte visant l’obtention d’une rente d’invalidité, respectivement d’une allocation pour impotent.
c. Dans le cadre de la demande d’allocation pour impotent, une enquête a eu lieu par téléphone, avec la mère de l’assurée et son éducatrice.
Selon le rapport du 6 novembre 2023, le besoin d’une aide régulière et importante a été admise depuis l’enfance de l’assurée pour les actes ordinaires de la vie suivants : « se vêtir - se dévêtir », « manger », « faire sa toilette », « aller aux toilettes » et « se déplacer – entretenir des contacts sociaux ». S’y ajoutait une surveillance personnelle permanente.
L’enquêtrice n’a, en revanche, pas retenu de besoin d’aide régulière et importante pour l’acte consistant à « se lever, s’asseoir, se coucher et changer de position », expliquant que l’assurée marchait depuis l’âge de sept ans. Même si elle utilisait une chaise roulante pour les longues distances, elle était autonome physiquement. L’éducatrice contactée par téléphone avait d’ailleurs confirmé que l’assurée se levait et s’asseyait sans aide et qu’elle était en mesure de se coucher de même. La mère de l’assurée avait, quant à elle, expliqué avoir fait l’acquisition d’un lit spécial, afin de donner un lieu rassurant à sa fille et lui permettre de se lever comme elle le désirait. La mère confirmait également que sa fille pouvait se coucher sans aide.
En définitive, l’enquêtrice a donc admis le besoin d’aide pour cinq actes de la vie quotidienne et celui d’une surveillance personnelle, suggérant l’octroi d’une allocation pour impotent de degré moyen lors du passage à l’âge adulte.
d. Par décision du 12 décembre 2023, l’OAI a reconnu à l’assurée le droit à une allocation pour impotent de degré moyen de CHF 1'225.- par mois, s’agissant d’une personne séjournant à domicile. A noter qu’un projet de décision en ce sens avait été communiqué à l’intéressée en date du 10 novembre 2023.
C. a. Le 8 décembre 2023, l’assurée, soit pour elle sa mère, a interjeté recours auprès de la Cour de céans.
La recourante fait valoir qu’elle a bénéficié, jusqu’en février 2023, d’une allocation pour impotent mineur de degré grave et affirme que ses besoins n’ont pas changé depuis lors.
b. Invitée à transmettre à la Cour la décision qu’elle entendait contester, la recourante a produit tant le projet de décision du 10 novembre 2023 que la décision du 12 décembre 2023.
c. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 17 janvier 2024, a constaté, préalablement, que le recours, en tant qu’il était dirigé contre le projet de décision du 10 novembre 2023, était prématuré. Il a conclu à son rejet en tant qu’il était dirigé contre la décision du 12 décembre 2023.
L’intimé rappelle qu’à l’exception de l’acte consistant à « se lever/s’asseoir/se coucher », le besoin d’une aide importante a été reconnu pour tous les autres actes de la vie quotidienne sur la base d’une enquête effectuée par une personne spécialisée dans ce type d’examen, qui a tenu compte des indications apportées tant par la mère de la recourante que par son éducatrice, qui ont été développées, de manière circonstanciée, dans les différentes rubriques. Il en tire la conclusion que le rapport d’enquête doit se voir reconnaître pleine valeur probante et qu’il n’y a pas lieu de s’en écarter.
d. Par écriture du 5 mars 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions.
Elle produit deux certificats, le premier établi le 7 février 2023 par la docteure C______, spécialiste FMH en pédiatrie, le second établi le 11 décembre 2023 par la docteure D______, médecin adjointe au service de premier recours des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
e. Le 8 mars 2024, la recourante a encore transmis un rapport établi le 7 mars 2024 par le docteur E______, médecin auprès du Centre Médical F______.
f. Par courrier du 8 avril 2024, l’OAI a persisté dans ses conclusions.
g. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
2.
2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.
Selon l'art. 61 let. b LPGA, sous réserve de l'art. 1 al. 3 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021), la procédure devant le tribunal cantonal des assurances est réglée par le droit cantonal. Elle doit satisfaire aux exigences suivantes : (...) l'acte de recours doit contenir un exposé succinct des faits et des motifs invoqués, ainsi que les conclusions ; si l'acte n'est pas conforme à ces règles, le tribunal impartit un délai convenable au recourant pour combler les lacunes, en l'avertissant qu'en cas d'inobservation le recours sera écarté.
L’art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA ‑ E 5 10) prévoit que la demande ou le recours est adressé en deux exemplaires à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice soit par une lettre, soit par un mémoire signé, comportant : a) les nom, prénoms, domicile ou résidence des parties ou, s'il s'agit d'une personne morale, toute autre désignation précise ; b) un exposé succinct des faits ou des motifs invoqués ; c) des conclusions (al. 1). Si la lettre ou le mémoire n'est pas conforme à ces règles, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice impartit un délai convenable à son auteur pour le compléter en indiquant qu'en cas d'inobservation la demande ou le recours est écarté (al. 2).
Ces exigences formelles doivent permettre à la juridiction cantonale de comprendre, au regard du recours (et le cas échéant de son complément) (ATAS/163/2015 du 3 mars 2015) :
- les faits pertinents de la cause, dont – lorsqu’est invoquée une constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA) – quels faits sont prétendument inexacts ou incomplets, et en quoi ils sont inexacts ou incomplets et en plus pertinents pour la solution du litige ;
- les griefs que le recourant émet à l’encontre de la décision attaquée, à savoir en quoi la décision attaquée est prétendument contraire au droit, consacre un excès ou un abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), et/ou repose sur des faits établis de façon inexacte ou incomplète (art. 61 al. 1 let. b LPA) ;
- ce que le recourant demande de la juridiction saisie.
2.2 A teneur de l’art. 56 al. 1 LPGA, les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte sont sujettes à recours.
Selon l’art. 69 al. 1 let. a LAI, en dérogation à l’art. 52 LPGA, les décisions des offices AI cantonaux peuvent directement faire l’objet d’un recours devant le tribunal des assurances du domicile de l’office concerné.
Préalablement, l’office AI communique à l’assuré, au moyen d’un préavis, toute décision finale qu’il entend prendre au sujet d’une demande de prestations ou au sujet de la suppression ou de la réduction d’une prestation déjà allouée, l’assuré ayant le droit d’être entendu conformément à l’art. 42 LPGA (art. 57a al. 1 LAI).
L’assuré peut faire part à l’office AI de ses observations sur le préavis dans un délai de trente jours, par écrit ou oralement, lors d’un entretien personnel (art. 73ter al. 1 et 2 du règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]).
Lorsque l’instruction de la demande est achevée, l’office AI se prononce sur la demande de prestations, la motivation tenant compte des observations qui ont été faites par les parties sur le préavis, pour autant qu’elles portent sur des points déterminants (art. 74 al. 1 et 2 RAI).
2.3 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
2.4 En l’espèce, l’intimé a adressé à la recourante, le 10 novembre 2023, un projet de décision, lequel ne constitue pas une décision formelle sujette à recours.
En tant qu’il est dirigé contre ce projet, le recours adressé à la Cour de céans le 8 décembre 2023 est prématuré et, partant, irrecevable.
La décision formelle, rendue le 12 décembre 2023, ne pouvait par définition pas être l’objet du recours déposé quatre jours plus tôt, le 8 décembre 2023. Cela étant, la recourante l’a transmise à la Cour de céans en date du 14 décembre 2023, comme étant l’objet de son recours. On peut dès lors se demander si ce n’est pas ce courrier du 14 décembre 2023 qui devrait être considéré comme valant recours contre la décision formelle du 12 décembre 2023.
La question de la recevabilité de ce courrier, en tant que recours, peut toutefois rester ouverte, dès lors que même s’il devait être considéré comme recevable, ledit recours doit de toute manière être rejeté pour les motifs suivants.
3. Le 1er janvier 2022, les modifications du 19 juin 2020 de la LAI sont entrées en vigueur (développement de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).
En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 146 V 364 consid. 7.1 et les références).
En l'occurrence, le litige porte sur l'octroi d'une allocation pour impotent dont le droit est né postérieurement au 31 décembre 2021, de sorte que la législation en vigueur depuis le 1er janvier 2022 est applicable.
4. En l’espèce, la recourante a bénéficié d’une allocation pour impotent de degré moyen (aide pour cinq actes ordinaires de la vie) du 1er avril au 31 octobre 2023, avec un supplément pour soins intenses de plus de quatre heures du 1er août 2022 au 31 octobre 2023. Concrètement, les mois précédant sa majorité, la recourante a bénéficié, mensuellement, d’un montant total de CHF 2'205.- (CHF 1'225.50 d’allocation pour impotent de degré moyen [40.85 x 30 jours] + CHF 979.50 à titre de supplément pour soins intenses [32.65 x 30 jours]).
La recourante étant devenue majeure le 10 octobre 2023, son droit à une allocation pour impotent a été réexaminé sous l’angle des conditions applicables aux personnes majeures et seul le droit à une allocation pour impotence de degré moyen lui a été reconnu, à l’exclusion du supplément pour soins intenses.
La recourante conteste la « diminution de prestations » occasionnée par le passage à l’âge adulte, tout en rappelant avoir bénéficié jusqu’à peu de temps avant sa majorité d’une allocation pour impotence grave. On peut comprendre de son argumentation qu’elle conteste donc tant la suppression du supplément pour soins intenses que la réduction du taux de l’allocation pour impotent.
5.
5.1 Selon l’art. 42 al. 1 1ère phrase LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une allocation pour impotent.
Est réputée impotente toute personne qui, en raison d’une atteinte à sa santé, a besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne (art. 9 LPGA). Ces actes sont ceux que la jurisprudence antérieure à l’entrée en vigueur de la LPGA désignait par « actes ordinaires de la vie » (Michel VALTERIO, Commentaire de la Loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, n. 10 ad art. 42 LAI).
L’art. 9 LPGA n’a pas conduit à un changement de la jurisprudence relative à l’évaluation de l’impotence développée à propos de l’ancien art. 42 al. 2 LAI (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H.66/04 du 9 août 2004 consid. 2.1 et 2.2 et la référence).
5.2 La loi distingue trois degrés d’impotence : grave, moyen ou faible (art. 42 al. 2 LAI).
Le degré d’impotence se détermine en fonction du nombre d'actes (associés éventuellement à une surveillance personnelle permanente ou à un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie) pour lesquels l’aide d’autrui est nécessaire (cf. art. 37 du règlement sur l’assurance-invalidité, du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201). L’évaluation du besoin d’aide pour accomplir les actes ordinaires de la vie constitue donc une appréciation fonctionnelle ou qualitative de la situation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_350/2014 du 11 septembre 2014 consid. 4.2.2 et la référence).
L’art. 37 al. 1 RAI prescrit que l’impotence est grave lorsque l’assuré est entièrement impotent. Tel est le cas s’il a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des soins permanents ou une surveillance personnelle.
L’art. 37 al. 2 RAI stipule que l’impotence est moyenne si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin: d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie (let. a); d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente (let. b); ou d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI (let. c).
On est en présence d’une impotence de degré moyen au sens de la let. a lorsque l’assuré doit recourir à l’aide de tiers pour au moins quatre actes ordinaires de la vie (arrêt du Tribunal fédéral 9C_560/2017 du 17 octobre 2017 consid. 2 et la référence).
5.3 Selon la jurisprudence, les actes élémentaires de la vie quotidienne se répartissent en six domaines : 1. se vêtir et se dévêtir ; 2. se lever, s’asseoir et se coucher ; 3. manger ; 4. faire sa toilette (soins du corps) ; 5. aller aux toilettes ; 6. se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur et établir des contacts sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2014 du 16 octobre 2015 consid. 3.3 et les références).
De manière générale, on ne saurait considérer apte à un acte ordinaire de la vie l’assuré qui ne peut l’accomplir que d’une façon non conforme aux mœurs usuelles (ATF 106 V 153 consid. 2b).
L’aide est régulière lorsque l’assuré en a besoin ou pourrait en avoir besoin chaque jour (arrêt du Tribunal fédéral 9C_562/2016 du 13 janvier 2017 consid. 5.3 et les références).
L’aide est importante lorsque l’assuré ne peut plus accomplir seul au moins une fonction partielle d’un acte ordinaire de la vie (ATF 121 V 88 consid. 3c et les références ; ATF 107 V 136 consid. 1b), lorsqu’il ne peut le faire qu’au prix d’un effort excessif ou d’une manière inhabituelle ou que, en raison de son état psychique, il ne peut l’accomplir sans incitation particulière (ATF 106 V 153 consid. 2a et 2b), lorsque, même avec l’aide d’un tiers, il ne peut accomplir un acte ordinaire déterminé parce que cet acte est dénué de sens pour lui (par ex. si l’assuré souffre de graves lésions cérébrales et que sa vie se trouve réduite à des fonctions purement végétatives, de sorte qu’il est condamné à vivre au lit et qu’il ne peut entretenir de contacts sociaux (ATF 117 V 146 consid. 3b ; CIIAI, ch. 8026).
Les personnes chargées de déterminer s’il y a impotence (médecin, collaborateurs des services sociaux) doivent se limiter à indiquer en quoi consiste l’aide accordée de manière régulière. Décider si elle est importante est en revanche une question de droit qu’il incombe à l’administration, respectivement au juge de trancher (ATF 107 V 136 consid. 2b).
6.
6.1 Pour évaluer l’impotence des assurés mineurs, on applique par analogie les règles valables pour l’impotence des adultes selon les art. 9 LPGA et 37 RAI. Toutefois, l’application par analogie de ces dispositions n’exclut pas la prise en considération de circonstances spéciales, telles qu’elles peuvent apparaître chez les enfants et les jeunes gens. Ce qui est déterminant, c’est le supplément d’aide et de surveillance par rapport à ce qui est nécessaire dans le cas d’un mineur non invalide du même âge que l’intéressé (ATF 113 V 17 consid. 1a).
6.2 En vertu de l’art. 42ter al. 3 1ère phrase LAI, l’allocation versée aux mineurs impotents qui, en plus, ont besoin de soins intenses, est augmentée d’un supplément pour soins intenses ; celui-ci n’est pas accordé lors d’un séjour dans un home.
Le supplément pour soins intenses n’est pas une prestation indépendante, il implique la préexistence d’une allocation pour impotent (arrêt du Tribunal fédéral 9C_350/2014 du 11 septembre 2014 consid. 4.2.1 et la référence).
Un supplément pour soins intenses peut donc être ajouté à l’allocation pour impotent lorsque celle-ci est servie à un mineur qui a en outre besoin d’un surcroît de soins dont l’accomplissement atteint le seuil minimum quotidien de quatre heures (cf. art. 42ter al. 3 LAI et 39 al. 1 RAI).
7. Selon l'art. 17 al. 2 LPGA, toute prestation durable – telle l’allocation d’impotence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_533/2019 consid. 3.1) – accordée en vertu d’une décision entrée en force est, d’office ou sur demande, augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dont dépendait son octroi changent notablement.
Au vu des règles différentes en matière d’octroi de l’allocation pour impotent, le passage de l’allocation pour impotent selon l’art. 42bis LAI à celle de l’art. 42 LAI lorsque l’assuré atteint sa dix-huitième année constitue un motif de révision (VALTERIO, op. cit., n. 8 ad art. 42bis LAI). En d’autres termes, l’accession à l’âge de la majorité ne doit pas être considérée comme la survenance d’un nouveau cas d’assurance, si bien que le droit à une allocation pour impotent mineur ne peut pas être examiné librement et complètement à la majorité mais uniquement sous l’angle d’une révision. Le moment d’une éventuelle diminution ou suppression de l’allocation pour impotent se détermine par conséquent selon l’art. 88bis al. 2 RAI (ATF 137 V 424 consid. 3).
Selon la Circulaire sur l’impotence (CSI), les assurés mineurs qui, à leur 18e anniversaire, sont au bénéfice d’une allocation pour impotent pour mineurs sont considérés comme étant annoncés pour l’allocation pour impotent pour adultes. Ils doivent toutefois remplir pour cela le formulaire officiel, qui leur est envoyé par l’office AI (ch. 6008). Si toutes les autres conditions sont remplies, le droit à l’allocation pour impotent pour adulte prend naissance le mois suivant leur 18e anniversaire. L’office AI examine d’office le droit à ces prestations, en particulier s’il existe dès le 18e anniversaire un besoin d’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie (ch. 6009). Le droit d’une personne mineure à l’allocation pour impotent et celui de cette même personne devenue majeure relèvent d’un seul cas d’assurance (ATF 137 V 424). Lorsque la personne mineure accède à la majorité, son droit à l’allocation pour impotent ne peut donc pas être examiné librement et en détail, mais peut l’être uniquement sous l’angle du droit de la révision (ch. 6010).
Le droit à un supplément pour soins intenses est supprimé lors de l’accession à la majorité (ATF 137 V 424 consid. 3.3.3.1).
8.
8.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l’accident, l’incapacité de travail, l’invalidité, l’atteinte à l’intégrité physique ou mentale) supposent l’instruction de faits d’ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l’assuré à des prestations, l’administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).
8.2 En règle générale, le degré d’impotence d’un assuré est déterminé par une enquête à son domicile. Cette enquête doit être élaborée par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il s’agit en outre de tenir compte des indications de la personne assurée et de consigner les opinions divergentes des participants. Enfin, le contenu du rapport doit être plausible, motivé et rédigé de façon suffisamment détaillée en ce qui concerne chaque acte ordinaire de la vie et sur les besoins permanents de soins et de surveillance personnelle et finalement correspondre aux indications relevées sur place. Le seul fait que la personne désignée pour procéder à l’enquête se trouve dans un rapport de subordination vis-à-vis de l’office AI ne permet pas encore de conclure à son manque d’objectivité et à son parti pris. Il est nécessaire qu’il existe des circonstances particulières qui permettent de justifier objectivement les doutes émis quant à l’impartialité de l’évaluation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_907/2011 du 21 mai 2012 consid. 2 et les références). Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision, le juge ne saurait remettre en cause l’appréciation de l’auteur de l’enquête que s’il est évident qu’elle repose sur des erreurs manifestes (ATF 130 V 61 consid. 6.1.2).
9. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).
10. En l’espèce, on relèvera en premier lieu que le supplément pour soins intenses n’est prévu que pour les assurés mineurs (cf. message du Conseil fédéral concernant la 4e révision de la LAI, FF 2002 3045 p. 3135) et qu’avec l’accession à la majorité, une telle prestation est supprimée (cf. ATF 137 V 424 consid. 3.3.3.1). C’est donc à juste titre que l’OAI ne l’a pas accordé à la recourante une fois que celle-ci est devenue majeure. Ce grief ne peut donc qu’être écarté.
Cela étant, en lieu et place de ce supplément pour soins intenses, des prestations complémentaires peuvent être demandées par l’assuré majeur (cf. message du Conseil fédéral concernant la 4ème révision de la LAI, FF 2002 3045 p. 3135).
S’agissant du degré de l’allocation pour impotent, si l’office intimé a retenu le besoin d’une aide importante et permanente pour cinq des actes ordinaires de la vie quotidienne (« se vêtir et se dévêtir », « manger », « faire sa toilette (soins du corps) », « aller aux toilettes » et « se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur et établir des contacts sociaux »), il l’a en revanche nié pour l’acte consistant à « se lever, s’asseoir et se coucher ».
En ce qui concerne cet acte ordinaire de la vie, il y a impotence lorsqu’il est impossible à l’assuré de se lever, de s’asseoir ou de se coucher sans l’aide d’un tiers. S’il peut néanmoins effectuer des changements de position lui-même, il n’y a pas impotence (CIIAI, ch. 8015). L’aide d’autrui nécessitée pour se lever de sièges bas (dont l’assuré n’a pas absolument besoin) ou du sol ou pour monter dans une automobile n’est pas importante et quotidienne. Par conséquent, on n’est pas en présence d’un cas d’impotence régulière et importante (RCC 1987 p. 263 consid. 2b). En revanche, s’il est impossible à l’assuré de se mettre lui-même au lit, il est considéré comme impotent en ce qui concerne cet acte ordinaire de la vie (CIIAI, ch. 8016).
Selon l’enquête à domicile, l’assurée marche depuis l’âge de sept ans. Elle utilise une chaise roulante pour les longues distances. Cela étant, elle se lève, s’asseye et se couche sans aide. Cela n’est pas contesté et ressort des déclarations faites à l’enquêtrice et dûment relatées dans son rapport. Dès lors, c’est à juste titre que l’acte de « se lever, s’asseoir et se coucher » n’a pas été retenu au nombre de ceux nécessitant l’aide importante et régulière d’autrui et que le droit à une allocation pour impotent de degré moyen a été reconnu à la recourante.
11. Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
Il n’y a pas lieu d’allouer de dépens à la recourante, qui n’est pas représentée et qui n’obtient pas gain de cause (art. 61 let. g LPGA).
La procédure en matière d'assurance-invalidité n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), un émolument de CHF 200.- est mis à la charge de la recourante.
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
1. Déclare le recours irrecevable, en tant qu’il est dirigé contre le projet de décision du 10 novembre 2023.
2. Le rejette, dans la mesure où il est recevable, en tant qu’il est dirigé contre la décision du 12 décembre 2023.
3. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le