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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1670/2023

ATAS/195/2024 du 26.03.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1670/2023 ATAS/195/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 mars 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______
représentée par PROCAP Service juridique, mandataire

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 27 juin 2019, Madame A______ (ci-après : l’assurée, l’intéressée ou la recourante), née en ______ 2002, alors mineure, représentée par ses parents, domiciliée dans le canton de Genève et déscolarisée depuis le printemps 2018, a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) « Demande pour mineurs : Mesures médicales, mesures d’ordre professionnel et moyens auxiliaires », en raison d’un trouble du spectre autistique, plus précisément un syndrome d’Asperger (CIM-10, F84.5).

b. Dans le cadre de cette demande, des renseignements ont été reçus par l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI, l'office ou l'intimé).

Ont confirmé le diagnostic précité et décrit la situation de l’assurée au plan psychique la docteure B______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie auprès de la clinique de Belmont, dans des rapports des 23 septembre et 6 novembre 2019, ainsi que Monsieur C______, psychothérapeute FSP, dans un rapport de bilan psychologique du 17 mars 2019, qui fait entre autres état d’une addiction au cannabis nécessitant le suivi par la Dre B______, de même que la docteure D______, pédiatre FMH, dans des rapports des 11 décembre 2019 et 24 février 2020.

c. Après des avis d’une pédopsychiatre FMH du service médical régional de l’AI (ci-après : SMR) des 23 janvier et 1er avril 2020, l’OAI a, le 2 avril 2020, octroyé à l’intéressée une prise en charge des coûts de la psychothérapie ambulatoire médicalement prescrite, maintenue le 12 novembre 2020, ainsi que des mesures médicales sous forme de prise en charge des coûts du « traitement de l’infirmité congénitale OIC 405 (trouble du spectre autistique) ».

B. a. Le 5 mai 2020, l’assurée, toujours représentée par ses parents, a déposé auprès de l’office une « Demande pour mineurs : Allocation pour impotent » (ci-après : API), indiquant avoir besoin d’une « aide indirecte » pour « se vêtir/se dévêtir » et pour « se lever/s’asseoir/se coucher », ainsi qu’une aide pour « se déplacer/entretenir des contacts sociaux ».

b. Dans le cadre de l’instruction de cette demande, ont établi des rapports la docteure E______, psychiatre et psychothérapeute d'enfants et d'adolescents, et Madame F______, psychologue FSP (du même cabinet que M. C______), dans un rapport du 3 juillet 2020, de même que la Dre B______, dans un rapport du 28 juillet 2020.

Le 27 octobre 2020 a eu lieu un entretien de « réadaptation professionnelle » entre l’OAI et l’intéressée, qui était accompagnée de sa mère.

c. Le 16 novembre 2020 a eu lieu un entretien à domicile entre d’une part l’assurée et ses parents et d’autre part une « infirmière-évaluatrice AI » (ci-après : l’infirmière évaluatrice), qui a rendu le même jour son rapport d’enquête à domicile pour une assurée majeure. D’après ce rapport, l’assurée, dont l’état de santé nécessitait des soins permanents dès janvier 2018, était autonome pour les actes ordinaires de la vie, mais elle avait régulièrement besoin, en raison de son atteinte à la santé, d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie, l’aide apportée par ses parents étant supérieure à deux heures hebdomadaires. Une API de degré faible était suggérée.

Selon un rapport établi le même jour par la même infirmière évaluatrice, apparemment pour une assurée mineure, l’intéressée avait besoin d’aide pour « préparer les vêtements », « se lever » et « se coucher » ainsi que « se déplacer à l’extérieur ».

d. Par projet de décision du 17 novembre 2020, l’OAI a envisagé d’octroyer à l’intéressée une API faible pour mineure, sans droit au supplément pour soins intenses, pour la période du 1er mai 2019 au 31 juillet 2020, et, par projet de décision du 21 décembre 2020, également une API faible mais pour majeure, à partir du 1er août 2020. Comme mineure, l’assurée avait besoin d’une aide régulière et importante d’autrui depuis plusieurs années pour accomplir les actes ordinaires de la vie « se vêtir/se dévêtir », « se lever/s’asseoir/se coucher » et « se déplacer/entretenir des contacts sociaux », alors que comme majeure, elle n’avait pas besoin d’une aide importante et régulière pour effectuer les actes ordinaires de la vie mais néanmoins d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie.

e. Par écrits des 8 et 23 janvier 2021 signé par ses parents, l’assurée, s’opposant au projet de décision du 17 novembre 2020, respectivement à celui du 21 décembre 2020, a allégué avoir besoin d’une aide régulière pour manger et a sollicité une API d’un degré supérieur à celui faible.

f. Par décisions du 8 février 2021 pour mineure et du 26 octobre 2021 pour majeure, l’OAI a maintenu ses projets de décision précités, étant précisé que dans le cadre de la « procédure d’audition » concernant l’assurée majeure et avant la décision du 8 septembre 2021, l’office avait établi une « note de travail » le 12 juillet 2021.

C. a. En septembre 2021, l’assurée a commencé de suivre des cours au sein d’une école de théâtre et de musique à Paris (France), ouverts même sans maturité ou diplôme équivalent, comme cela ressort notamment d’un échange de courriels en mai et juin 2022 entre sa mère et l’OAI ainsi que d’une « note de travail MOP » de ce dernier du 18 août 2022.

b. Le 29 août 2022, l’office a octroyé à l’intéressée une prise en charge des frais supplémentaires de la formation professionnelle initiale du 1er septembre 2021 au 30 juin 2024 en lien avec cette formation à Paris.

L’assurée ayant commencé des cours de chant auprès d’une nouvelle école à Paris, l’OAI a, par communication du 27 janvier 2023, pris en charge les coûts de cette nouvelle école au titre de frais supplémentaires de la formation professionnelle initiale du 23 septembre 2022 au 30 juin 2023, et, par communication du 30 janvier 2023, il a pris en charge les coûts de thérapie ambulatoire en psychothérapie à raison d’une séance par semaine du 1er août 2022 au 30 juin 2023.

c. En parallèle, le 1er septembre 2022, les parents de l’assurée ont rempli le « questionnaire pour la révision de l’allocation pour impotent AI », auquel était annexée une lettre d’accompagnement. Selon eux, elle avait besoin de l’aide régulière et importante d’autrui pour « se vêtir/se dévêtir », « se lever/s’asseoir/se coucher » et « se déplacer [à l’extérieur]/entretenir des contacts sociaux » et, dans une mesure restreinte, pour « manger » (en cas de fatigue extrême, il fallait lui apporter les aliments au lit).

Les 15 septembre et 22 novembre 2022, la Dre E______, respectivement le docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et Mme F______, psychologue FSP (sous délégation, au sein du même cabinet), ont entre autres noté « une belle évolution » de l’assurée au cours de la thérapie, son trouble du spectre autistique nécessitant néanmoins toujours un accompagnement psychothérapeutique soutenu et de coaching pour sa vie quotidienne. Les allers-retours entre le canton de Genève et Paris demandaient beaucoup d’énergie à la patiente. À cela s’est ajouté un rapport du 16 septembre 2022 de la Dre GEORGE seule, d’après laquelle le pronostic était susceptible d’amélioration.

Le 22 septembre 2022, la Dre B______ a établi un rapport, retenant notamment un pronostic stable.

Le 13 janvier 2023, l’office a rédigé une « note de travail MOP » tenant compte du changement d’école à Paris.

d. À la suite d’une visite à domicile du 22 décembre 2022 avec entretien avec l’assurée et ses parents, l’infirmière évaluatrice (la même que le 16 novembre 2020) a, le 23 janvier 2023, rendu un rapport d’évaluation.

À teneur de ce rapport, l’intéressée n’avait pas besoin de l’aide (directe ou indirecte) d’autrui pour accomplir un des actes ordinaires de la vie, ni non plus régulièrement besoin, en raison de son atteinte à la santé, d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie, ni enfin besoin d’aide pour les soins permanents ou d’une surveillance personnelle.

Sous les « recommandations » de l’infirmière évaluatrice était constatée une amélioration de l’autonomie de l’intéressée (formation et vie autonome à Paris) ; au regard des critères d’exigibilité des parents et de l’intensité du besoin, les conditions d’octroi d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie n’étaient actuellement plus remplies, le risque de mise en institution semblant en effet ici peu probable au regard des capacités de l’intéressée ; en conséquence, la suppression de l’API était recommandée.

e. Par projet de décision du 26 janvier 2023, l’OAI a repris les constatations et considérations émises dans le rapport d’évaluation rédigé le 23 janvier 2023, notant notamment que le soutien apporté par les membres de la famille était considéré comme un soutien lié aux charges de la vie de famille en vertu de l’obligation de réduire le dommage. En conséquence, les conditions d’octroi d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie n’étaient plus remplies, et l’office a prévu que l’API soit supprimée à la fin du mois suivant sa décision.

f. Le 24 février 2023, l’assurée, représentée par une association, a formé opposition contre ce projet de décision, faisant valoir avoir droit à tout le moins à une API faible, en raison du besoin d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie en plus du besoin d’aide pour les actes ordinaires de la vie (« se vêtir/se dévêtir » et « se lever/s’asseoir/se coucher »). Il était ajouté que la mère de l’intéressée, lorsque cette dernière était dans le canton de Genève, dormait fréquemment avec elle pour lui assurer une présence en raison de crises d’angoisse au milieu de la nuit (vers 3h00).

g. Par décision du 4 avril 2023 notifiée le lendemain, faisant suite à une « note de travail » rédigée le 14 mars 2023 par l’infirmière évaluatrice (dans le cadre de la procédure d’audition) et reprenant pour l’essentiel le contenu de son projet de décision du 26 janvier 2023, l’OAI a supprimé l’API le premier jour du deuxième mois suivant la date de cette décision, avec la précision qu’un recours n’aurait pas d’effet suspensif.

D. a. Par acte expédié le 16 mai 2023 au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), l’assurée, toujours représentée par l’association et sous la signature d’une avocate, a interjeté recours contre cette décision, concluant à son annulation et, cela fait, principalement à la continuation de son droit à bénéficier d’une API, subsidiairement au renvoi de la cause à l’office pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

Notamment, selon ses allégations, une aggravation progressive de son état de santé depuis décembre 2022 l’avait obligée à arrêter sa formation à Paris en février 2023.

À l’appui de ces allégations étaient produits des certificats des 9 février et 13 mars 2023 du Dr G______ ainsi qu’un rapport du 8 mai 2023 de la psychologue FSP F______.

b. Par réponse du 13 juin 2023, l’intimé a conclu au rejet du recours, considérant que les éléments apportés à l’appui du recours ne remettaient pas en question les conclusions de l’infirmière évaluatrice, qui devaient se voir pleine valeur probante.

c. Par réplique du 12 juillet 2023, la recourante a persisté dans les griefs et conclusions de son recours.

d. Le 17 août 2023, l’avocate de l’association a remis à la chambre de céans le résumé chiffré de l’activité déployée en procédure de recours, pour un montant total d’honoraires TTC de CHF 3'734.10.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI ‑ RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'AI, à moins que la loi n'y déroge expressément.

La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Elle est ainsi applicable, dès lors que le recours a été interjeté postérieurement à cette date (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Interjeté dans la forme et le délai – de 30 jours et compte tenu des féries de Pâques – prévus par la loi, le recours est recevable (art. 38 al. 4 let. a et 56 ss LPGA ainsi que 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

4.              

4.1 L'objet du litige porte sur la question de savoir si l’intimé était ou non fondé à supprimer, avec effet le premier jour du deuxième mois suivant la date de sa décision du 4 avril 2023, donc le 1er juin 2023, l’API (faible) dont la recourante bénéficiait depuis le 1er mai 2019 comme mineure et depuis le 1er août 2020 comme majeure.

4.2 De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

 

5.              

5.1 L'art. 17 LPGA s'applique à la révision des API (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, n. 75 ad art. 42 LAI).

À teneur de l'art. 35 al. 2 du règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance‑invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201), lorsque, par la suite, le degré d’impotence subit une modification importante, les art. 87 à 88bis RAI sont applicables. Le droit à l’allocation s’éteint à la fin du mois au cours duquel l’une des autres conditions de ce droit n’est plus remplie ou au cours duquel le bénéficiaire du droit est décédé.

5.2 L'al. 2 de l’art. 17 LPGA n’a pas été modifié le 31 décembre 2021 – contrairement à l’al. 1 –, et il dispose que, de même – que concernant la rente (cf. al. 1) –, toute prestation durable accordée en vertu d’une décision entrée en force est, d’office ou sur demande, augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dont dépendait son octroi changent notablement.

En vertu de l'art. 88a RAI – intitulé « modification du droit » –, si la capacité de gain ou la capacité d'accomplir les travaux habituels de l'assuré s'améliore ou que son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d'aide découlant de son invalidité s'atténue, ce changement n'est déterminant pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu'à partir du moment où on peut s'attendre à ce que l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre (al. 1). Si la capacité de gain de l’assuré ou sa capacité d’accomplir les travaux habituels se dégrade, ou si son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d’aide découlant de son invalidité s’aggrave, ce changement est déterminant pour l’accroissement du droit aux prestations dès qu’il a duré trois mois sans interruption notable. L’art. 29bis RAI est toutefois applicable par analogie (al. 2).

Aux termes de l’art. 88bis al. 2 let. a RAI, la diminution ou la suppression de la rente, de l’API ou de la contribution d’assistance prend effet au plus tôt le premier jour du deuxième mois qui suit la notification de la décision.

5.3 L’API de l’AI (art. 42 LAI) constitue clairement une prestation durable au sens de l’art. 17 al. 2 LPGA. L’augmentation, la réduction ou la suppression de l’API suppose donc qu’il existe une modification notable des faits, comme une amélioration ou une péjoration de l’état de santé ou l’utilisation d’un nouveau moyen auxiliaire, propre à influencer le degré d’impotence et donc l’étendue de la prestation. Ainsi, le fait que la personne assurée, dont le droit à une API est justifié par le besoin d’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie (cf. art. 38 al. 1 let. b RAI) et non par des difficultés à réaliser les différents actes ordinaires de la vie, est en mesure de se rendre dans un café-restaurant et d’y rendre service en accomplissant quelques menues tâches ne correspond pas à une modification des circonstances suffisante pour démontrer que le besoin d’accompagnement n’existe plus (Margit MOSER-SZELESS, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 42 ad art. 17 LPGA ; aussi arrêt du Tribunal fédéral 9C_628/2015 du 24 mars 2016 consid. 5.4).

Le point de savoir si un changement notable des circonstances s'est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l'époque de la décision litigieuse. C'est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit qui constitue le point de départ temporel pour l'examen d'une modification du degré d'invalidité lors d'une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108 consid. 5.4 ; ATF 130 V 343 consid. 3.5.2).

6.             Dans le cadre du développement continu de l'AI, la LAI, le RAI et l'art. 17 LPGA notamment ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2022 (modifications des 19 juin 2020 et 3 novembre 2021 ; RO 2021 705 et RO 2021 706).

En l'absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l'application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l'examen d'une demande d'octroi de rente d'invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s'applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

Dans les cas de révision selon l'art. 17 LPGA, conformément aux principes généraux du droit intertemporel (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), il convient d'évaluer, selon la situation juridique en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021, si une modification déterminante pour le droit à la rente est intervenue jusqu'à cette date. Si tel est le cas, les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables. Si la modification déterminante est intervenue après cette date, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. La date de la modification se détermine selon l'art. 88a RAI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2 ; 8C_644/2022 du 8 février 2023 consid. 2.2.3).

En l’occurrence, par analogie avec ce qui vaut concernant le droit à la rente, il n’est pas contesté que le droit à l’API est né antérieurement au 1er janvier 2022. Toutefois, la question litigieuse est de savoir si un motif de révision est survenu, selon l’art. 88a RAI, à compter de la fin de l’année 2022 (vu la visite domiciliaire du 22 décembre 2022), de sorte que les dispositions applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

7.              

7.1 Selon l'art. 42 LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une API (al. 1, 1ère phr.). L’impotence peut être grave, moyenne ou faible (al. 2). Est aussi considérée comme impotente la personne vivant chez elle qui, en raison d’une atteinte à sa santé, a durablement besoin d’un accompagnement lui permettant de faire face aux nécessités de la vie. Si l’atteinte à la santé est uniquement psychique, la personne n’est réputée impotente que si elle a droit à une rente. Si une personne n’a durablement besoin que d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie, l’impotence est réputée faible. L’art. 42bis al. 5 LAI est réservé (al. 3, tel que modifié au 1er janvier 2022).

Est réputée impotente toute personne qui, en raison d'une atteinte à sa santé, a besoin de façon permanente de l'aide d'autrui ou d'une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne (art. 9 LPGA). Ces actes sont ceux que la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de la LPGA désignait par « actes ordinaires de la vie » (Michel VALTERIO, op. cit., n. 10 ad art. 42 LAI). L'art. 9 LPGA n'a pas conduit à un changement de la jurisprudence relative à l'évaluation de l'impotence développée à propos de l'ancien art. 42 al. 2 LAI (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H.66/04 du 9 août 2004 consid. 2.1 et 2.2 et la référence).

L'impotence devant résulter d'une atteinte à la santé, mais pas nécessairement d'une invalidité, une API peut être servie à un assuré qui ne perçoit pas de rente d'invalidité, faute notamment de présenter le degré d'invalidité requis pour l'octroi d'une rente d'invalidité, pourvu que l'atteinte à la santé entraîne les conséquences prévues par la loi - impossibilité d'accomplir les actes ordinaires de la vie, besoins en soins et d'accompagnement (Michel VALTERIO, op cit., n. 1 et 6 ad art. 42 LAI). Toutefois, si une personne souffre uniquement d'une atteinte à sa santé psychique, elle doit, pour être considérée comme impotente selon l'art. 42 al. 3 1ère phr. LAI, avoir droit au moins à une rente (art. 42 al. 3 2ème phr. LAI).

7.2 Conformément à l’art. 37 RAI, l'impotence est grave lorsque l'assuré est entièrement impotent. Tel est le cas s'il a besoin d'une aide régulière et importante d'autrui pour tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des soins permanents ou une surveillance personnelle (al. 1). L'impotence est moyenne si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin : d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie (let. a) ; d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente (let. b) ; ou d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI (let. c ; al. 2). L'impotence est faible si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin de façon régulière et importante, de l'aide d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie (let. a) ; d'une surveillance personnelle permanente (let. b) ; de façon permanente, de soins particulièrement astreignants, exigés par l'infirmité de l'assuré (let. c) ; de services considérables et réguliers de tiers lorsqu'en raison d'une grave atteinte des organes sensoriels ou d'une grave infirmité corporelle, il ne peut entretenir des contacts sociaux avec son entourage que grâce à eux (let. d) ; ou d'un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI (let. e ; al. 3).

Selon la jurisprudence, les actes élémentaires de la vie quotidienne se répartissent en six domaines : 1. se vêtir et se dévêtir ; 2. se lever, s'asseoir et se coucher ; 3. manger ; 4. faire sa toilette (soins du corps) ; 5. aller aux toilettes ; 6. Se déplacer à l'intérieur ou à l'extérieur et établir des contacts sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2014 du 16 octobre 2015 consid. 3.3 et les références).

Selon la jurisprudence, la notion de surveillance personnelle permanente au sens de l'art. 37 al. 2 let. b et al. 3 let. b RAI, qui est traduite en temps destiné à apporter de l'aide supplémentaire (cf. art. 39 al. 3 RAI), ne se confond pas avec l'aide apportée pour réaliser les actes ordinaires de la vie, ni avec le surcroît de temps consacré aux traitements et aux soins de base, si bien que des prestations d'aide qui ont déjà été prises en considération en tant qu'aide directe ou indirecte au titre d'un acte ordinaire de la vie ne peuvent pas entrer à nouveau en ligne de compte lorsqu'il s'agit d'évaluer le besoin de surveillance (arrêt du Tribunal fédéral 9C_831/2017 du 3 avril 2018 consid. 3.1 et les références).

7.3 Aux termes de l'art. 38 al. 1 RAI, le besoin d'un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 42 al. 3 LAI, existe lorsque l'assuré majeur ne vit pas dans une institution mais ne peut pas en raison d'une atteinte à la santé : vivre de manière indépendante sans l'accompagnement d'une tierce personne (let. a) ; faire face aux nécessités de la vie et établir des contacts sociaux sans l'accompagnement d'une tierce personne (let. b) ; ou éviter un risque important de s'isoler durablement du monde extérieur (let. c). L’al. 3 précise que n’est pris en considération que l’accompagnement qui est régulièrement nécessaire et lié aux situations mentionnées à l’al. 1. En particulier, les activités de représentation et d’administration dans le cadre des mesures de protection de l’adulte au sens des art. 390 à 398 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) ne sont pas prises en compte.

7.3.1 Dans la première éventualité (art. 38 al. 1 let. a RAI), l'accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie doit permettre à la personne concernée de gérer elle-même sa vie quotidienne. Il intervient lorsque la personne nécessite de l'aide pour au moins l'une des activités suivantes : structurer la journée, faire face aux situations qui se présentent tous les jours (p. ex. problèmes de voisinage, questions de santé, d'alimentation et d'hygiène, activités administratives simples), et tenir son ménage (aide directe ou indirecte d'un tiers ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_131/2019 du 16 août 2019 consid. 4.1 et la référence). La personne qui accompagne l'assuré peut aussi accomplir elle-même les actes nécessaires lorsque malgré ses instructions, sa surveillance ou son contrôle, l'assuré n'est pas en mesure de le faire à cause de son atteinte à la santé (ATF 133 V 450 consid. 10.2). Le fait déterminant n'est donc pas la manière dont l'aide du tiers est apportée, mais la circonstance que, grâce à elle, la personne puisse acquérir l'indépendance nécessaire dans son habitat (arrêt du Tribunal fédéral I 1013/06 du 9 novembre 2007 consid. 5.4).

La nécessité de l'aide apportée par une tierce personne doit être examinée de manière objective, selon l'état de santé de l'assuré concerné, indépendamment de l'environnement dans lequel celui-ci se trouve ; seul importe le point de savoir si, dans la situation où il ne dépendrait que de lui-même, cet assuré aurait besoin de l'aide d'un tiers. L'assistance que lui apportent les membres de sa famille a trait à l'obligation de diminuer le dommage et ne doit être examinée que dans une seconde étape. Si la question de savoir comment s'organiserait la communauté familiale dans le cas où elle ne devait pas percevoir de prestations d'assurance est certes importante, l'aide exigible ne doit toutefois pas devenir excessive ou disproportionnée. Sauf à vouloir vider l'institution de l'API de tout son sens dans le cas où l'assuré fait ménage commun avec son épouse ou un membre de la famille, on ne saurait exiger de cette personne qu'elle assume toutes les tâches ménagères de l'assuré après la survenance de l'impotence si cela ne correspondait pas déjà à la situation antérieure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_567/2019 du 23 décembre 2019 consid. 6.2 et les références).

7.3.2 Dans la deuxième éventualité (accompagnement pour les activités hors du domicile ; art. 38 al. 1 let. b RAI), l'accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie doit permettre à la personne assurée de quitter son domicile pour certaines activités ou rendez-vous nécessaires, tels les achats, les loisirs ou les contacts avec les services officiels, le personnel médical ou le coiffeur (arrêt du Tribunal fédéral 9C_131/2019 du 16 août 2019 consid. 4.1 et la référence).

7.3.3 Dans la troisième éventualité (art. 38 al. 1 let. c RAI), l'accompagnement en cause doit prévenir le risque d'isolement durable ainsi que de la perte de contacts sociaux et, par-là, la péjoration subséquente de l'état de santé de la personne assurée (arrêt du Tribunal fédéral précité consid. 4.1 et la référence).

7.3.4 Selon le ch. 8053 de la Circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans l'assurance-invalidité établie par l'Office fédéral des assurances sociales [OFAS ; CIIAI], l'accompagnement est régulier au sens de l'art. 38 al. 3 RAI lorsqu'il est nécessité en moyenne au moins deux heures par semaine sur une période de trois mois. Le Tribunal fédéral a reconnu que cette notion de la régularité était justifiée d'un point de vue matériel et partant conforme aux dispositions légales et réglementaires (ATF 133 V 450 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_131/2019 du 16 août 2019 consid. 4.2 et les références).

L'accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI ne comprend ni l'aide de tiers pour les six actes ordinaires de la vie, ni les soins ou la surveillance personnelle. Il représente bien plutôt une aide complémentaire et autonome, pouvant être fournie sous forme d'une aide directe ou indirecte à des personnes atteintes dans leur santé physique, psychique ou mentale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_131/2019 du 16 août 2019 consid. 4.1 et les références). Ainsi, l'aide déjà prise en compte sous l'angle du besoin d'assistance pour accomplir les actes ordinaires de la vie ne peut fonder un droit à une allocation au sens de l'art. 38 RAI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_688/2014 du 1er juin 2015 consid. 3.6 et les références). L'empêchement de se mouvoir à la maison ou en dehors de celle-ci qui nécessite une aide pour accomplir les actes ordinaires de la vie n'exclut toutefois pas un besoin d'accompagnement au sens de l'art. 38 RAI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_135/2014 du 14 mai 2014 consid. 4.3.1 et les références).

Il n'est pas nécessaire que l'accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie soit assuré par un personnel d'encadrement qualifié ou spécialement formé (arrêt du Tribunal fédéral I 652/06 du 25 juillet 2007 consid. 5.2).

7.4 Dans le domaine de l'AI, on applique de manière générale le principe selon lequel un invalide doit, avant de requérir des prestations, entreprendre de son propre chef tout ce qu'on peut raisonnablement attendre de lui, pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité. L'obligation de diminuer le dommage s'applique aux aspects de la vie les plus variés. Toutefois, le point de savoir si une mesure peut être exigée d'un assuré doit être examiné au regard de l'ensemble des circonstances objectives et subjectives du cas concret (arrêt du Tribunal fédéral 9C_661/2016 consid. 2.3 et les références). Ce principe s'applique également à l'assuré qui fait valoir le droit à une API (voir arrêt du Tribunal fédéral des assurances U.146/02 du 10 février 2003 consid. 4.2).

7.5 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d'assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

En règle générale, le degré d'impotence d'un assuré est déterminé par une enquête à son domicile. Cette enquête doit être élaborée par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il s'agit en outre de tenir compte des indications de la personne assurée et de consigner les opinions divergentes des participants. Enfin, le contenu du rapport doit être plausible, motivé et rédigé de façon suffisamment détaillée en ce qui concerne chaque acte ordinaire de la vie et sur les besoins permanents de soins et de surveillance personnelle et finalement correspondre aux indications relevées sur place. Le seul fait que la personne désignée pour procéder à l'enquête se trouve dans un rapport de subordination vis‑à-vis de l'office AI ne permet pas encore de conclure à son manque d'objectivité et à son parti pris. Il est nécessaire qu'il existe des circonstances particulières qui permettent de justifier objectivement les doutes émis quant à l'impartialité de l'évaluation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_907/2011 du 21 mai 2012 consid. 2 et les références). Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision, le juge ne saurait remettre en cause l'appréciation de l'auteur de l'enquête que s'il est évident qu'elle repose sur des erreurs manifestes (ATF 130 V 61 consid. 6.1.2).

La jurisprudence selon laquelle, lors de l'évaluation de l'invalidité découlant d'une atteinte à la santé psychique, il convient d'accorder plus de poids aux constatations d'ordre médical qu'à celles de l'enquête à domicile en cas de divergences, s'applique également lors de l'évaluation du besoin d'un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie (arrêt du Tribunal fédéral 9C_782/2010 du 10 mars 2011 consid. 2.3).

7.6 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

8.              

8.1 En l’espèce, la recourante a, comme majeure, bénéficié d’une API faible du 1er août 2020 au 1er juin 2023, premier jour du deuxième mois suivant la date de la décision – querellée – de l’intimé du 4 avril 2023 supprimant son droit à une API.

À l’époque de l’octroi initial de cette API, par la décision du 26 octobre 2021 fondée sur un rapport d’évaluation de l’infirmière évaluatrice du 16 novembre 2020 à la suite d’un entretien à domicile du même jour, et à teneur de cette décision, l’assurée n’avait pas besoin d’une aide importante et régulière pour effectuer les actes ordinaires de la vie mais néanmoins d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie.

8.2 La décision attaquée s’est fondé sur les constatations et considérations émises dans le rapport d’évaluation rédigé le 23 janvier 2023 par l’infirmière évaluatrice à la suite de sa visite à domicile du 22 décembre 2022 avec entretien avec l’assurée et ses parents.

À teneur de ce rapport d’évaluation, la recourante passait la plupart de son temps à Paris, où elle vivait seule, avec des cours quatre jours par semaine, en début et en fin de semaine entrecoupés souvent d’un retour le mercredi pour son suivi psychologique dans le canton de Genève, où elle vivait chez ses parents. Selon l’infirmière évaluatrice, elle n’avait pas besoin de l’aide (directe ou indirecte) d’autrui pour accomplir un des actes ordinaires de la vie ; le besoin de recevoir l’avis de ses parents concernant les habits à mettre compte tenu notamment des conditions météorologiques (chaud ou froid), de même que le fait que ceux-ci toquaient à la porte de sa chambre dans le canton de Genève à environ trois reprises avant qu’elle se lève du lit et qu’ils l’appelaient au téléphone deux à trois fois pour lui rappeler de se lever lorsqu’elle était à Paris constituaient des indications verbales et des rappels pour accomplir les actes ordinaires de la vie de manière autonome et n’étaient pas considérés comme une aide importante.

Toujours selon l’infirmière évaluatrice, l’intéressée n’avait pas non plus régulièrement besoin, en raison de son atteinte à la santé, d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie ; les appels téléphoniques de ses parents chaque soir pendant une heure lorsqu’elle était à Paris, afin de l’aider à structurer ses journées, étaient raisonnablement exigibles, comme l’était aussi leur aide pour faire face aux situations quotidiennes et pour tenir le ménage lorsqu’elle séjournait auprès d’eux, l’aide apportée par eux pour tenir son ménage à Paris n’étant quant à elle pas régulière ; s’agissant de la question de l’accompagnement ou non pour les activités et les contacts hors du domicile, ses parents l’accompagnaient en voiture à ses rendez-vous médicaux, de coiffeur ou de manucure par exemple, lorsqu’elle était dans le canton de Genève, tandis qu’elle pouvait se déplacer et faire ses achats seule par elle-même à Paris ; il n’y avait pas de besoin d’une présence régulière d’une tierce personne pour éviter un risque important d’isolement, puisqu’elle vivait chez ses parents lorsqu’elle se trouvait dans le canton de Genève et avait une amie et fréquentait une école de chant lorsqu’elle était à Paris.

Sous les « recommandations » de l’infirmière évaluatrice était constatée une amélioration de l’autonomie de l’intéressée (formation et vie autonome à Paris) ; au regard des critères d’exigibilité des parents et de l’intensité du besoin, les conditions d’octroi d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie n’étaient actuellement plus remplies, le risque de mise en institution semblant en effet ici peu probable au regard des capacités de l’intéressée ; en conséquence, la suppression de l’API était recommandé.

Au surplus, dans ladite décision du 4 avril 2023, l’office a notamment noté que le soutien apporté par les membres de la famille était considéré comme un soutien lié aux charges de la vie de famille en vertu de l’obligation de réduire le dommage.

8.3 Cela étant, il n’y pas de nécessité d’examiner ici les griefs de la recourante afférents à ces constatations et considérations de l’infirmière évaluatrice.

8.3.1 En effet, dans son recours, l’intéressée a allégué qu'une aggravation progressive de son état de santé depuis décembre 2022 l’avait obligée à arrêter sa formation à Paris en février 2023.

En outre, à teneur des certificats des 9 février et 13 mars 2023 du Dr G______, son état de santé ne lui permettait pas d’aller actuellement à l’école ni de participer aux sessions d’examens, et une réévaluation serait faite courant septembre 2023, pour déterminer la suite de sa scolarité.

Selon un rapport du 8 mai 2023 de la psychologue FSP F______ qui mentionnait un contact avec les parents en début décembre 2022, la patiente avait continué à cette période de se rendre à Paris, mais sans retourner à l’école, et son « état global » continuant à se détériorer ; la psychologue, lors d’un entretien en février 2023, avait recommandé que l’intéressée revienne vivre dans le canton de Genève « afin qu’elle se repose mais aussi qu’elle soit sous surveillance car elle [avait] arrêté de s’alimenter depuis quelques semaines » ; depuis février 2023, la patiente était de retour chez ses parents, faisait quelques allers-retours à Paris, mais n’avait pas pu reprendre sa scolarité en raison d’une trop grande anxiété et fatigabilité, et elle était aujourd’hui toujours sous médication et poursuivait sa thérapie, à raison d’une fois par semaine.

L’intimé ayant relevé dans sa réponse que la recourante continuait à se rendre régulièrement à Paris, celle-ci a précisé dans sa réplique (du 12 juillet 2023), notamment, que ses déplacements occasionnels à Paris se situaient dans un cadre thérapeutique car elle tentait de « retrouver un peu plus d’autonomie alors qu’elle était depuis le mois de février auprès de ses parents sans aucune activité et dépendante pour une grande partie des actes de la vie quotidienne ».

8.3.2 Il ressort de ces allégations et rapports médicaux à l’appui du recours que les effets de l’atteinte à la santé de l’intéressée pourraient s’être aggravés, de façon progressive dès décembre 2022 puis de manière substantielle à partir de février 2023, et qu’un besoin d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie pourrait être réapparu ou s’être accru par rapport à la situation existant lors de la visite à domicile de l’infirmière évaluatrice le 22 décembre 2022, voire même éventuellement qu’un besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir des actes ordinaires de la vie pourrait être apparu.

Ainsi, à la date où la décision querellée a été rendue (le 4 avril 2023) de même qu’à celle de sa prise d’effet (le 1er juin 2023), de sérieux indices tendent à montrer que les constatations et considérations du 23 janvier 2023 de l’infirmière évaluatrice à la suite de sa visite à domicile du 22 décembre 2022 n’étaient plus d’actualité.

Or le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (cf. la jurisprudence citée plus haut). De surcroît, les allégations de la recourante et les rapports médicaux faisant état de circonstances nouvelles (surtout à partir de février 2023) par rapport à la période durant laquelle l’infirmière évaluatrice a rencontré à domicile l’assurée et ses parents puis établi son rapport d’évaluation (décembre 2022 et janvier 2023) portent sur une période commençant avant le prononcé de la décision querellée et a fortiori sa prise d’effet, et pourraient le cas échéant, si ces éléments étaient confirmés et approfondis, justifier une continuation du droit à une API après le 31 mai 2023.

Il n’est cependant en l’état pas possible de se prononcer sur la situation existant à partir de février 2023, en l’absence d’éléments de fait et moyens de preuve suffisants, et il n’appartient pas à la chambre de céans de procéder par elle-même à une telle instruction complète.

9.             Vu ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision querellée annulée et la cause renvoyée à l’intimé afin qu’il procède à une nouvelle instruction, complète et approfondie, des circonstances pertinentes en lien avec le droit ou non à une API à partir de février 2023, au moyen à tout le moins de rapports médicaux circonstanciés et d’un rapport d’évaluation d’une infirmière évaluatrice à la suite d’une nouvelle visite à domicile avec entretien avec la recourante et ses parents, puis rende une nouvelle décision.

10.         La juridiction saisie dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la quotité de l’indemnité allouée (art. 61 let. g LPGA et 89H al. 3 LPA ; cf. aussi art. 87 al. 1, 2 et 3 LPA) et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu’une participation aux honoraires d’avocat, ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) dès lors que ce dernier fixe le montant minimal de l'indemnité à CHF 200.- et le plafonne à CHF 10'000.- (ATAS/323/2021 du 13 avril 2021 ; ATAS/305/2021 du 6 avril 2021 consid. 10 ; ATA/198/2021 du 23 février 2021 ; ATA/900/2020 du 22 septembre 2020 consid. 4b), étant au surplus précisé que la garantie de la propriété n'impose nullement une pleine compensation du coût de la défense de la partie victorieuse (arrêt du Tribunal fédéral 1C_58/2019 du 31 décembre 2019 consid. 3.4 ; ATA/198/2021 précité ; ATA/900/2020 précité consid. 4b). Pour déterminer le montant de l’indemnité, il convient de prendre en compte les différents actes d’instruction, le nombre d’échanges d’écritures et d’audiences ; le montant retenu doit intégrer l’importance et la pertinence des écritures produites et, de manière générale, la complexité de l’affaire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_58/2019 du 31 décembre 2019 consid. 3.4 ; ATAS/323/2021 précité ; ATA/198/2021 précité ; ATA/900/2020 précité consid. 4c).

Dans le cas présent, la recourante, obtenant en grande partie gain de cause et étant assistée d'un conseil, a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 2’000.- (art. 61 let. g LPGA et 89H al. 3 LPA), montant tenant compte de la complexité, ici modérée, de la cause et du fait que les actes de procédure de l’assuré ont consisté en son recours et sa réplique.

11.         Pour le surplus, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l'intimé (art. 69 al. 1bis LAI).

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision rendue le 4 avril 2023 par l’intimé.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle instruction et nouvelle décision, dans le sens des considérants.

5.        Alloue à la recourante une indemnité de dépens de CHF 2'000.-, à la charge de l’intimé.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le