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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1539/2023

ATAS/754/2023 du 29.09.2023 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1539/2023 ATAS/754/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 septembre 2023

Chambre 9

 

En la cause

Monsieur A______

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : le bénéficiaire), né le ______ 1953, marié et domicilié au 17 rue B______, à Genève, a sollicité des prestations complémentaires fédérales (PCF) et cantonales (PCC) à sa rente AVS le 30 décembre 2021.

b. Par décision du 3 octobre 2022, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) lui a accordé des PCF et des PCC dès le 1er janvier 2022. Selon le plan de calcul annexé à la décision, le SPC a notamment tenu compte d’un loyer net de CHF 9'720.- et de prestations périodiques à hauteur de CHF 12'573.80.

c. Par courrier du 6 octobre 2022, le bénéficiaire a formé opposition à cette décision. Il sous-louait une chambre avec jouissance de la cuisine pour un montant de CHF 1'400.- par mois. Le loyer mensuel retenu dans la décision, de CHF 810.-, ne correspondait pas à son loyer effectif. Il avait choisi cette solution en raison de son état de santé précaire, étant atteint d’une tumeur à la moelle épinière et à l’anus. Il signalait également qu’il ne percevait aucune rente.

d. Par décision du 6 décembre 2022, le SPC a recalculé son droit aux prestations complémentaires. Selon le plan de calcul annexé à la décision, le SPC a tenu compte d’un loyer net de CHF 10’410.- et de prestations périodiques à hauteur de CHF 12’573.80.

e. Le bénéficiaire a formé opposition à cette décision le 22 décembre 2022.

f. Par décision sur opposition du 18 janvier 2022 (recte : 2023), le SPC a admis les oppositions, en ce sens que le montant de CHF 12'573.80 pris en compte à titre de prestations périodiques était supprimé. Ce montant représentait le remboursement d’un prêt qu’il avait accordé à un tiers. Il ne pouvait toutefois pas revêtir la qualification de « prestations périodiques », car la condition de périodicité n’était pas remplie. La suppression accordée conduisait à l’octroi de prestations complémentaires dès le 1er janvier 2022, ce qui générait un solde rétroactif en sa faveur de CHF 11'773.-.

g. Le 21 janvier 2023, le bénéficiaire a contesté le montant du loyer pris en compte dans cette décision. Sa part de loyer s’élevait à CHF 1'400.-, charges comprises, pour une chambre meublée avec un accès à toutes les commodités. Il cohabitait avec une autre personne dans un appartement à deux chambres à coucher.

h. Par courrier du 30 janvier 2023, le SPC a expliqué qu’il se trouvait dans la situation d’une personne seule vivant avec une autre personne qui n’était pas prise en compte dans le calcul de la prestation. Elle correspondait ainsi à celle d’une communauté d’habitation. Le montant annuel maximal reconnu au titre de loyer était celui pour une personne vivant dans le ménage de deux personnes. Pour l’année 2022, le loyer annuel maximal était ainsi de de CHF 9'720.- (région 1), montant qui avait été augmenté à CHF 10’410.- (région 1) en 2023.

B. a. Par acte du 31 janvier 2023 adressé au SPC, le bénéficiaire a recouru contre la décision sur opposition du 18 janvier 2023, contestant les montants pris en compte à titre de loyer.

b. Le 27 avril 2023, il a informé le SPC qu’il était toujours dans l’attente d’une réponse.

c. Le 5 mai 2023, le SPC a transmis ces courriers pour raison de compétence à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, qui a enregistré un recours.

d. Par réponse du 5 juin 2023, le SPC a conclu au rejet du recours. Selon le contrat de bail du 29 novembre 2021 conclu entre la régie et C______, le loyer annuel de l’appartement était de CHF 33'600.-. Le logement était occupé par le bénéficiaire et Monsieur D______, directeur de la société C______. Le bénéficiaire était marié, mais ne vivait pas avec son épouse. Sa situation était donc bien celle d’une personne seule vivant en communauté d’habitation. Ainsi, bien qu’il payait la moitié du loyer qui ressortait du bail précité, seul un montant de CHF 9'720.- annuel pouvait être retenu pour l’année 2022, augmenté à CHF 10'410.- pour l’année 2023.

e. Par réplique du 19 juin 2023, le bénéficiaire a persisté dans son recours, estimant qu’il n’y avait aucune raison de ne pas prendre en charge le montant de base de CHF 1'100.-.

f. La chambre de céans a transmis cette écriture à l’intimé.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, et transmis pour raison de compétence à la chambre de céans, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 43 LPCC ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10] et art. 43 LPCC).

2.             Le litige porte sur le montant du loyer déterminant pris en compte dans le calcul des PCF et PCC du recourant pour les années 2022 et 2023.

2.1 Sur le plan fédéral, dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585). Dans la mesure où la décision du SPC date du 3 octobre 2022 et qu’elle octroie des prestations dès le 1er janvier 2022, il convient d’appliquer le nouveau droit.

2.2 L'art. 10 LPC définit les dépenses reconnues et fixe notamment les montants destinés à la couverture des besoins vitaux et le montant maximal reconnu pour le loyer d'un appartement.

Selon l'art. 10 al. 1ter LPC, dans sa version applicable depuis le 1er janvier 2021, pour les personnes vivant en communauté d’habitation, lorsqu’il n’y a pas de calcul commun en vertu de l’art. 9 al. 2 LPC, le montant pris en considération est le montant annuel maximal reconnu au titre du loyer pour une personne vivant dans un ménage de deux personnes. Selon la disposition transitoire de la modification du 20 décembre 2019, les personnes qui percevaient déjà une prestation complémentaire annuelle au moment de l’entrée en vigueur de la modification du 22 mars 2019 (réforme des PC), le 1er janvier 2021, se verront appliquer les dispositions inscrites à l’art. 10 al. 1ter à la fin de la période de trois ans prévue dans les dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 (RO 2020 4525 ; FF 2019 3941).

Le montant annuel maximal reconnu au titre de loyer pour une personne vivant dans un ménage de deux personnes est précisé à l’art. 10 al. 1 let. b LPC. Selon cette disposition, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2023, ce montant s’élève à CHF 17'580.- dans la région 1 pour une personne seule (let. a), auquel s’ajoute un supplément de CHF 3'240.- pour la deuxième personne (let. b). Dans sa teneur applicable entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2022, cette disposition prévoyait un montant annuel maximal de CHF 16’440.- dans la région 1 pour une personne seule (let. a), auquel s’ajoutait un supplément de CHF 3’000.- pour la deuxième personne (let. b).

Selon l’art. 10 al. 1quater, le Conseil fédéral règle la répartition des communes entre les trois régions. Il se base à cet effet sur les niveaux géographiques définis par l’Office fédéral de la statistique.

Aux termes de l'art. 9 al. 2 LPC, les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints et des personnes qui ont des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI sont additionnés.

Selon les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, état au 1er janvier 2022 (ci-après : DPC), une communauté d’habitation correspond à la situation dans laquelle une personne seule – c’est-à-dire une personne vivant seule, un conjoint vivant séparément ou une personne dont le conjoint vit dans un home ou un hôpital – vit avec une ou plusieurs personnes qui ne sont pas comprises dans le calcul de la PC (ch. 3232.06).

2.3 Sur le plan cantonal, les dépenses reconnues sont celles énumérées par la LPC et ses dispositions d'exécution (art. 6 LPCC).

2.4 La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n'est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

2.5 Le recourant reproche à l’intimé de n’avoir pas tenu compte de son loyer réel pour le calcul du loyer déterminant.

Il n’est toutefois pas contesté que le recourant vit séparément de son épouse avec une personne qui n’est pas comprise dans le calcul de la prestation complémentaire. Il se trouve, en cela, dans la situation d’une personne vivant en communauté d’habitation. Or, l'art. 10 al. 1ter LPC précise que, dans ce cas, et lorsque - comme en l’espèce - il n’y a pas de calcul commun en vertu de l’art. 9 al. 2 LPC, le montant pris en considération est le montant annuel maximal reconnu au titre du loyer pour une personne vivant dans un ménage de deux personnes. Comme précisé ci-avant, celui-ci est fixé à l’art. 10 al. 1 let. b LPC. Dans la mesure où il n’est pas contesté que le recourant vit dans la région 1 (cf. annexe I de l’ordonnance du Département fédéral de l'intérieur concernant la répartition des communes dans les trois régions de loyer définies par la LPC du 12 mars 2020 -RS 831.301.114), le loyer maximal d’une personne seule vivant dans une communauté d’habitation s’élève à CHF 10’410.- ([CHF 17'580.- + CHF 3'240.-] / 2) en 2023 et à CHF 9’720.- ([CHF 16'440.- + CHF 3'000.-] / 2) en 2022. Ainsi, même si le loyer est partagé entre les occupants de l’appartement, il doit néanmoins respecter les plafonds fixés par la législation fédérale, étant précisé que la loi ne prévoit aucune dérogation à cet égard. Il appert certes que le loyer maximal admis pour une personne vivant seule (soit, pour la région 1, de CHF 17'580.- en 2023 et de CHF 16'440.- en 2022) est supérieur à celui d’une personne seule vivant dans une communauté d’habitation. Cette différence procède toutefois d’un choix délibéré du législateur de distinguer les situations en fonction du type de logement choisi par la personne assurée, étant précisé que le montant maximal reconnu au titre de loyer varie également selon la taille du ménage et la région de loyer. La diversité de ces cas de figure justifie ainsi des traitements différents, si bien que la chambre de céans ne peut qu’appliquer le texte clair de la LPC, repris en cela par la législation cantonale.

C’est partant à juste titre que l’intimé a pris en compte un montant de CHF 10'410.- à titre de loyer pour le calcul des PCF et PCC dès le 1er janvier 2023, et de CHF 9'720.- pour le calcul des PCF et PCC du 1er janvier au 31 décembre 2022.

3.             Infondé, le recours sera rejeté.

La procédure est gratuite.

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le