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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2159/2022

ATAS/958/2022 du 03.11.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1   canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2159/2022 ATAS/958/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 novembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée c/o Madame B______, ______, ONEX

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé


 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en ______ 1992, s’est inscrite auprès de l’office régional de placement (ci-après : l’ORP) en date du 23 mars 2022, pour un travail à plein temps.

b. Lors de son entretien avec sa conseillère en personnel, en date du 25 mars 2022, cette dernière lui a fixé plusieurs objectifs, parmi lesquels la transmission, chaque mois, d’un minimum de dix preuves de recherches d’emploi qui devaient être reportées dans le formulaire de preuve de recherches d’emploi, ce dernier devant être remis à l’ORP en fin de mois où, au plus tard, le 5 du mois suivant. Le contrat d’objectifs de recherches d’emploi du 25 mars 2022 précisait encore que tout manquement aux obligations envers l’assurance-chômage, ainsi qu’aux instructions de l’ORP, pouvait entraîner une suspension du droit à l’indemnité, également en cas d’utilisation d’un formulaire de recherches d’emploi concernant la mauvaise période de contrôle.

c. En date du 2 juin 2022, l’assurée a été informée que son dossier avait été transmis « au service juridique par l’ORP, pour recherches d’emploi manquantes pendant le chômage en avril 2022 ». Il lui était accordé un délai au 9 juin 2022 pour faire parvenir par mail ou par écrit ses observations ainsi que tous les justificatifs dont elle disposait en rapport avec le manquement qui lui était reproché.

d. Par e-mail du 7 juin 2022, l’assurée a informé l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé) qu’elle avait envoyé la liste de ses candidatures du mois d’avril 2022 à la caisse de chômage UNIA (ci-après : UNIA) via leur plate-forme. Elle avait rempli le document à la main puis l’avait scanné et transmis à la caisse de chômage. Elle n’avait pas compris qu’il fallait uniquement remplir manuellement les détails de ses candidatures, via la plate-forme Job Room, ou remplir le document reçu par courrier à la main et le renvoyer par la Poste. Suite à son dernier entretien du 4 juin 2022 avec sa conseillère, elle avait pu éclaircir sa situation et avait compris qu’elle devait désormais utiliser uniquement la plate-forme Job Room. Elle espérait que l’OCE comprendrait et excuserait cette confusion car elle avait pris le soin de remplir, en temps et en heure, le document qui était annexé. Ledit document était un formulaire de preuve des recherches personnelles d’emploi effectuées en vue de trouver un emploi pour le mois d’avril 2022, daté du 30 avril 2022 et portant la signature de l’assurée. Il comportait dix mentions d’entreprises contactées.

B. a. Par décision du 9 juin 2022, l’OCE a sanctionné l’intéressée pour avoir remis, le 2 juin 2022, ses recherches personnelles d’emploi de la période de contrôle d’avril 2022, en dehors du délai imparti au 5 mai 2022. En se fondant sur le barème du secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) qui prévoit qu’en cas de remise tardive de recherches d’emploi, une suspension d’une durée de cinq à neuf jours est décidée la première fois (SECO, D79), l’OCE a prononcé une sanction de suspension du droit à l’indemnité de chômage de l’assurée de cinq jours, à compter du 6 mai 2022.

b. L’intéressée s’est opposée à la décision du 9 juin 2022, par courrier du 13 juin 2022. Elle expliquait avoir scanné et transféré à la plate-forme d'UNIA, en date du 30 avril 2022, le formulaire concernant les dix recherches qu’elle avait menées pendant le mois d’avril 2022. Elle expliquait avoir bien effectué et envoyé, en temps et en heure, les candidatures pour le mois d’avril mais les avoir simplement transférées au mauvais endroit ; elle concluait, dès lors, à l’annulation de la sanction.

c. Par décision sur opposition du 22 juin 2022, l’OCE a rejeté l’opposition de l’assurée et confirmé la décision du 6 juin 2022 au motif que l’assurée n’avait pas pu apporter la preuve qu’elle avait bien adressé son formulaire récapitulatif du mois d’avril 2022 à sa caisse de chômage, dans le délai imparti, et que ces explications ne sauraient constituer une excuse valable, justifiant la remise tardive de ses démarches dès lors qu’elle devait supporter les conséquences de l’absence de preuve de la remise des recherches dans le délai légal imparti.

C. a. Par écritures postées le 1er juillet 2022, l’assurée a recouru contre la décision du 15 juin 2022 [recte : 22 juin 2022] auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Elle a, en substance, répété les explications déjà données au stade de l’opposition, ajoutant qu’elle joignait à son recours les accusés de réception, avec la date de chacune des candidatures qu’elle avait effectuées durant le mois d’avril 2022, ce qui démontrait que le document de candidatures, pour le mois d’avril 2022, avait été scanné le 28 avril 2022. Elle concluait implicitement à l’annulation de la sanction.

b. Par réponse du 22 juillet 2022, l’OCE a considéré que la recourante n’apportait aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée de sorte que l’intimé persistait intégralement dans les termes de celle-ci. L’OCE ne reprochait pas à la recourante de ne pas avoir effectué ses recherches d’emploi en avril 2022, mais de ne pas les avoir transmises dans le délai imparti au 5 mai 2022, ajoutant que l’assurée n’avait pas apporté la preuve qu’elle avait envoyé, le 30 avril 2022, son formulaire de recherches personnelles d’emploi d’avril 2022 à UNIA.

c. Invitée à répliquer par courrier du 2 septembre 2022, la recourante n’a pas réagi.

d. Par courrier du 4 octobre 2022, la chambre de céans a interpellé UNIA afin de déterminer si cette dernière avait bien reçu, par erreur, le formulaire de recherches personnelles d’emploi de la recourante, pour le mois d’avril 2022.

e. Par réponse du 10 octobre 2022, UNIA a confirmé n’avoir reçu aucun formulaire de la recourante pour le mois d’avril 2022.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

g. Les autres faits seront cités, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de suspension de cinq jours du droit à l’indemnité chômage de la recourante.

4.             Selon l’art. 30 al. 1 let. c LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable. Cette disposition doit être mise en relation avec l’art. 17 al. 1 LACI, aux termes duquel l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit entreprendre tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter ou réduire le chômage (ATF 139 V 524 consid. 2.1.2). Il doit en particulier pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis en vue de rechercher du travail (cf. art. 17 al. 1, troisième phrase, LACI).  La suspension du droit à l’indemnité est destinée à poser une limite à l’obligation de l’assurance-chômage d’allouer des prestations pour des dommages que l’assuré aurait pu éviter ou réduire. En tant que sanction administrative, elle a pour but de faire répondre l’assuré, d’une manière appropriée, du préjudice causé à l’assurance-chômage par son comportement fautif (ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; ATF 126 V 520 consid. 4).

5.             Pour trancher le point de savoir si l’assuré a fait des efforts suffisants pour trouver un travail convenable, il faut tenir compte aussi bien de la quantité que de la qualité des démarches entreprises. Sur le plan quantitatif, la jurisprudence considère que dix à douze recherches d’emploi par mois sont en principe suffisantes (ATF 139 V 524 consid. 21 ; ATF 124 V 225 consid. 6). On ne peut cependant pas s’en tenir de manière schématique à une limite purement quantitative et il faut examiner la qualité des démarches de l’assuré au regard des circonstances concrètes, des recherches ciblées et bien présentées valant parfois mieux que des recherches nombreuses (arrêt du Tribunal fédéral 8C_708/2019 du 10 janvier 2020 consid. 3.2 ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 26 ad art. 17 LACI).

6.             En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

7.              

7.1 En l’espèce, l’intimé a infligé une sanction de suspension du droit à l’indemnité chômage de la recourante au motif que cette dernière ne lui a pas fait parvenir le formulaire de preuve de recherches d’emploi du mois d’avril 2022 en temps utile.

La recourante ne nie pas le fait qu’elle n’a pas envoyé ledit formulaire à l’OCE avant l’issue du délai échéant au 5 mai 2022 mais allègue avoir fait parvenir ledit formulaire, en temps utile, par erreur, auprès de sa caisse de chômage UNIA.

Suite à l’interpellation d'UNIA par la chambre de céans, il s’avère que cette dernière ne peut confirmer la version des faits soutenue par la recourante.

La confusion de destinataire, invoquée par la recourante, est d’autant moins admissible que, selon l’e-mail du 6 avril 2022 envoyé par une employée d’UNIA à la recourante, il lui était spécifiquement rappelé que les preuves de recherches d’emploi ne devaient pas être adressées à UNIA mais « retournées auprès de votre conseiller ORP ».

Selon la jurisprudence (notamment ATF 117 V 264 consid. 3), si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve ; en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 375 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344, p. 418 consid. 3).

7.2 Dès lors, la chambre de céans considère que la recourante a échoué à rendre vraisemblable ses allégations. Compte tenu du retard dans la transmission du formulaire, le principe de la faute de la recourante doit être admis.

8.             Reste à déterminer si l’intimé a respecté le principe de proportionnalité en fixant à cinq jours la durée de la suspension du droit à l’indemnité.

8.1 Selon l’art. 30 al. 3 LACI, la durée de la suspension du droit à l’indemnité de chômage est proportionnelle à la gravité de la faute. En vertu de l’art. 45 al. 3 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), elle est d’un à quinze jours en cas de faute légère. En tant qu’autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l’intention des organes d’exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d’exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d’apprécier le comportement de l’assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l’intéressé au regard de ses devoirs généraux d’assuré qui fait valoir son droit à des prestations (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_601/2012 du 26 février 2013 consid. 4.1, non publié in ATF 139 V 164 et les références). Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (cf. arrêts du Tribunal fédéral 8C_2/2012 du 14 juin 2012 consid. 3.2 ; 8C_64/2012 du 26 juin 2012 consid. 3.2).

8.2 Selon le barème du SECO, si les recherches d’emploi ne sont pas transmises pour chaque période de contrôle, au plus tard, le 5 du mois suivant, les recherches d’emploi ne pourront pas être prises en considération (ch. B324 Bulletin LACI IC du SECO).

S’agissant de la sanction, le barème du SECO, au ch. D79, prévoit pour un tel cas, une durée de suspension de cinq à neuf jours, la première fois.

Le juge des assurances sociales ne peut pas, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l’administration. Il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée. En ce qui concerne l’opportunité de la décision en cause, l’examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité a adoptée dans le cas concret, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 8C_708/2019 du 10 janvier 2020 consid. 4.2 ; 8C_767/2017 du 31 octobre 2018 consid. 4.3).

En l’état, aucun élément ne justifie de s’éloigner de la durée de la suspension décidée par l’intimé, qui correspond au minimum prévu par le barème SECO.

9.             Dès lors, la chambre de céans ne peut que rejeter le recours.

10.         Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le