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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2821/2021

ATAS/792/2022 du 09.09.2022 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 20.10.2022, rendu le 29.06.2023, REJETE, 8C_605/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2821/2021 ATAS/792/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 septembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à FILLINGES, FRANCE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Laurence MIZRAHI

recourante

 

contre

VISANA ASSURANCES SA, sise Weltpostrasse 19, BERNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Maryam KOHLER

intimée

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante) est née le ______ 1968 et est de nationalité française. Elle est mariée et mère d’un enfant.

b. L’assurée est titulaire d’un certificat fédéral de capacité d’assistante en soins et santé communautaire qu’elle a obtenu en 2007 après avoir suivi une formation d’aide-soignante en France.

c. L’assurée a été engagée le 1er novembre 2010 par l’Institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : l’IMAD) en tant qu’assistante en soins et santé communautaire. Cette relation de travail a pris fin au 7 juillet 2018.

d. En 2015, l’assurée travaillait 32 heures par semaine pour l’IMAD, soit un taux d’activité de 80 %. Le revenu annuel tiré de cette activité par la recourante s’élevait en 2015 à CHF 73'918.75.-.

B. a. Le 30 juin 2015, l’assurée a subi un accident de la route sur la Route H______ à Vétraz-Monthoux, dans la partie française du Grand Genève, alors qu’elle se rendait à son travail. Un motard a percuté de face son propre véhicule. Suite à cet évènement, elle a immédiatement perçu des douleurs dans son épaule gauche.

b. Après une interruption de son travail suivie d’une reprise, l’assurée s’est retrouvée incapable de travailler, en lien avec l’évènement susmentionné, depuis le 1er février 2016. Visana Assurances SA (Visana Versicherungen AG) (ci-après : Visana, l’assurance ou l’intimée) lui a alors versé des indemnités journalières.

c. L’assurée a été opérée de l’épaule gauche le 1er mars 2016 à la Clinique B______. Les frais de cette opération ont été pris en charge par l’assurance.

C. a. Par décision datée du 25 octobre 2016, l’assurance a mis fin au versement des indemnités journalières pour le 21 juin 2016, tout en précisant qu’elle continuerait à prendre en charge les frais médicaux liés à l’accident.

b. L’assurée a fait opposition à cette décision par courrier du 14 novembre 2016.

c. En date du 18 octobre 2017, l’assurance a ordonné une expertise auprès du Centre d’Expertises Médicales situé à Nyon (ci-après : le CEMed).

d. Le docteur C______, médecin spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, et le docteur D______, médecin neurologue, ont rendu un rapport d’expertise orthopédique et neurologique daté du 24 septembre 2018. Ces médecins ont conclu à l’absence d’atteinte neurologique objectivable et à l’existence de plusieurs atteintes orthopédiques, à savoir une lésion acromio-claviculaire stade 2+, une lésion SLAP (Superior Labrum from Anterior to Posterior) et une capsulite rétractile, toutes trois en lien de causalité avec l’accident de la route du 30 juin 2015. Le rapport conclut à une incapacité de travail totale de l’assurée dans sa dernière activité d’aide-soignante, et à une capacité de travail entière dans une activité adaptée, à savoir une activité sans utilisation du bras gauche au-dessus de l’horizontale et sans port de charges supérieures à 3-4 kg. Les experts ont précisé que l’état de santé de l’assurée ne pouvait être considéré comme stabilisé, une amélioration notable de ses troubles à l’épaule gauche pouvant être espérée avec la réalisation d’une prise en charge médicale adéquate, en particulier par une poursuite de la physiothérapie.

e. Le 24 janvier 2019, le docteur E______, médecin spécialiste FMH en chirurgie (générale) et médecin consultant de l’assurance, a écrit à celle-ci qu’il fallait considérer la situation médicale de l’assurée comme stabilisée au plus tard au 24 septembre 2018.

f. Du 1er février au 28 février 2019 inclus, la recourante a travaillé pour la Fondation "F______" sise à Anières dans le canton de Genève et ayant pour but la gestion de foyers de jour et d’appartements pour personnes âgées. Elle a cependant dû mettre fin à cette reprise d’activité en lien avec les douleurs handicapantes survenues au cours de celle-ci.

g. Par décision sur opposition datée du 15 février 2019, l’assurance a réformé sa décision initiale du 25 octobre 2016 en ce sens qu’elle reconnaissait devoir à l’assurée des indemnités journalières pour une période allant jusqu’au 31 janvier 2019 inclus, mais niait qu’il en aille de même après cette date. L’assurance réservait expressément la future clôture du cas. Cette décision n’a pas été contestée par la recourante.

h. Par courrier daté du 7 mars 2019, le docteur G______, médecin spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin traitant de l’assurée, a écrit à l’assurance que l’assurée était entièrement capable de travailler dans une activité adaptée depuis le 1er février 2019.

i. En date du 12 mars 2020, l’assurance a ordonné une expertise orthopédique complémentaire et l’a confiée au Dr C______ du CEMed.

j. Le Dr C______ a rendu un second rapport d’expertise orthopédique daté du 25 juin 2020. Celui-ci a conclu à la persistance des troubles à la santé qu’il avait antérieurement diagnostiqués et à une péjoration des limitations fonctionnelles de l’assurée en lien avec son épaule gauche, celle-ci ne pouvant plus être amenée à l’horizontale. Le Dr C______ a considéré que la capacité de travail de l’assurée était toujours de 100 % (pour une activité à taux partiel de 80 %) dans une activité adaptée.

k. Par décision datée du 4 janvier 2021, l’assurance a clôturé le cas en considérant que l’état de santé de l’assurée était stabilisé au 30 novembre 2019. Elle lui a octroyé une rente d’invalidité d’un montant de CHF 1'084.15, correspondant à un degré d’invalidité de 22 %, dès le 1er décembre 2019. Elle lui a également reconnu une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un montant de CHF 31'500.- (25 % de CHF 126'000.-). Elle a enfin précisé qu’elle refusait la prise en charge de frais médicaux postérieurs au 30 novembre 2019.

l. L’assurée a fait opposition à cette décision en date du 3 février 2021 en contestant la date de départ de la rente d’invalidité, ainsi que le montant de la rente en lien avec le degré d’invalidité.

m. Dans une décision datée du 17 mai 2021, l’office de l’assurance invalidité pour les assurés résidants à l’étranger (ci-après : OAIE), se basant sur l’analyse du dossier par l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), a octroyé à l’assurée une rente d’invalidité entière, pour une période allant du 1er février 2017 au 31 janvier 2019 inclus. À partir de cette date, le degré d’invalidité de l’assurée s’élevait à 37.93 % en tenant compte du fait qu’elle travaillait auparavant à temps partiel. Ce pourcentage étant inférieur au seuil de 40 % ne lui permettait donc plus de bénéficier d’une rente d’invalidité.

n. Par décision sur opposition datée du 25 juin 2021, et reçue le 28 juin par la recourante, l’assurance a confirmé intégralement la teneur du dispositif de sa décision du 3 février 2021.

D. a. L’assurée a recouru contre la décision sur opposition par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) par mémoire du 30 août 2021 en concluant à sa mise au bénéfice d’une rente d’invalidité LAA d’un montant annuel de CHF 33'749, correspondant à un taux d’invalidité de 56 %, dès le 1er février 2019 à tout le moins, intérêts moratoires en sus, le tout sous suite de frais et dépens.

b. L’intimée a répondu par mémoire du 26 novembre 2021 en concluant au rejet du recours sous suite de frais et dépens.

c. La recourante a répliqué par mémoire du 6 janvier 2022 et l’intimée a dupliqué par mémoire du 31 janvier 2022. Les deux parties ont maintenu leurs positions respectives.

d. La recourante s’est encore spontanément déterminée sur la duplique de l’intimée par courrier du 15 février 2022.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours de trente jours (cf. art. 60 al. 1 LPGA) suspendu du 15 juillet au 15 août inclus (cf. art. 62 al. 2 LPGA en lien avec l’art. 38 al. 4 LPGA) courait jusqu’au dimanche 29 août et son échéance a donc été reportée au lundi 30 août 2021. Déposé dans ce délai et dans les formes prévues par la loi (cf. art 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable.

3.             Le litige a pour objet le droit de la recourante à une rente d’invalidité, et en particulier le point de départ de celle-ci, ainsi que son montant, lié au degré d’invalidité reconnu.

3.1 Selon la recourante, son état doit être considéré comme stabilisé au 1er novembre 2018. En tenant compte d’un délai transitoire de trois mois, sa rente d’invalidité doit prendre naissance au 1er février 2019, ce qui est cohérent avec la fin du versement de ses indemnités journalières par l’intimée au 31 janvier 2019. S’agissant de son degré d’invalidité, il convient de se baser sur la médiane générale pour les femmes et les emplois de niveau de compétence 1, comme l’a fait l’OAI, et de tenir compte d’un abattement de 25 %, ce qui conduit à retenir un taux d’invalidité de 56 %.

3.2 Selon l’intimée, le rapport d’expertise du 24 septembre 2018 est clair quant au fait que l’état de santé de la recourante n’était pas stabilisé à cette date. Sur ce point, il convient donc d’écarter l’opinion contraire de son médecin-conseil. Elle a certes suspendu les indemnités journalières au 30 janvier 2019 car la recourante avait retrouvé une capacité de travail entière au 1er novembre 2018, mais cela ne signifie pas encore qu’une amélioration notable de l’état de santé de la recourante était impossible à cette date. S’agissant du degré d’invalidité de la recourante, il convient de se fonder sur le salaire médian d’une femme du niveau de compétence 2 dans le domaine des assurances (branche économique n° 65 NOGA). Enfin, il faut retenir un abattement de 10 % en ne tenant en particulier pas compte de l’expérience professionnelle de l’assurée, de son statut de frontalière, de son âge, ou encore de l’exercice d’un temps partiel par celle-ci.

4.             Bien que la recourante soit domiciliée en France, il ne fait pas de doute que l’intimée est compétente pour statuer sur une rente d’invalidité de droit suisse selon le principe de parallélisme des rentes selon les art. 50 § 1 et 52 § 1 du Règlement n°883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, applicable dans la relation franco-suisse, par renvoi de l’art. 46 § 1 du même règlement (voir également : ATAS/595/2022 [arrêt de principe] du 9 juin 2022 consid. 4.2 [concernant une rente de vieillesse]).

5.             Le droit à une rente d’invalidité de la recourante n’étant, en tant que tel, pas contesté, il convient d’examiner en premier lieu la question du point de départ de cette rente.

5.1 Selon l’art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu’il n’y a plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de l’assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité ont été menées à terme ; le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

La question de la fin des prestations provisoires et celle de l'octroi de la rente et/ou de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité constituent un tout juridique et doit donc faire l'objet d'une décision unique de la part de l'assurance-accidents (ATF 144 V 418 consid. 2.2 ; ATF 144 V 354 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_95/2021 du 27 mai 2021 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3).

La notion d’amélioration sensible de l’état de l’assuré ne fait pas, en tant que telle, référence à l’état médical d’un assuré, mais à l’influence de celui-ci sur sa capacité de travail (ATF 134 V 109 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_95/2021 du 27 mai 2021 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_674/2019 du 3 décembre 2019 consid. 4.1). Autrement dit, il est nécessaire que l’état de santé de l’assuré puisse subir une modification notable et que celle-ci soit de nature à modifier sa capacité de travail en général, soit sa capacité de gain, pour considérer qu’un cas d’assurance n’est pas encore stabilisé, au sens de l’art. 19 al. 1 LAA. L'état de santé de la personne assurée doit être évalué de manière prévisionnelle et non rétrospective, c'est-à-dire à la lumière des circonstances connues au moment de la clôture potentielle du cas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_604/2021 du 25 janvier 2022 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_44/2021 du 5 mars 2021 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_363/2020 du 29 septembre 2020 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_183/2020 du 22 avril 2020 consid. 2.3).

En ce qui concerne, spécifiquement, la physiothérapie, le Tribunal fédéral a précisé que le bénéfice qu’elle peut amener à un assuré ne fait en principe pas obstacle à la clôture de son cas d’assurance (arrêt du Tribunal fédéral 8C_674/2019 du 3 décembre 2019 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_736/2017 du 20 août 2018 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_39/2018 du 11 juillet 2018 consid. 5.1).

5.2 La jurisprudence relative au délai transitoire de trois à cinq mois entre le passage d’une incapacité de travail relative uniquement à la dernière activité professionnelle et l’extension du champ d’activités exigible en cas d’incapacité de travail de longue durée (cf. art. 6 LPGA) ne trouve pas application en cas de clôture d’un cas selon l’art. 19 al. 1 LAA, soit de passage de la perception de prestations transitoires comme les indemnités journalières à la perception de prestations durables comme la rente d’invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_240/2021 du 15 septembre 2021 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_39/2020 du 19 juin 2020 consid. 4.3 ; voir également : arrêt du Tribunal fédéral 8C_118/2021 du 21 décembre 2021 consid. 4.2.3 et 4.2.4).

6.              

6.1 En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise bidisciplinaire du 24 septembre 2018 que la capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée était entière à cette date. Sur le plan orthopédique, il existait, certes, une possibilité d’amélioration notable de la santé de la recourante au moyen d’un traitement par physiothérapie, mais sans que ladite possibilité d’amélioration soit de nature à avoir une influence sur sa capacité de travail. Sur cette base, le Dr E______, médecin-conseil de l’intimée, a considéré que l’état de l’assurée au regard de sa capacité de travail était stabilisé au plus tard le 24 septembre 2018.

En outre, l’intimée affirme dans son mémoire de réponse qu’elle a mis fin au paiement des indemnités journalières de l’assurée au 31 janvier 2019 car elle a considéré, sur la base du rapport d’expertise pluridisciplinaire du 24 septembre 2018, que la recourante avait retrouvé une pleine capacité de travail au plus tard dès le 1er novembre 2018, et qu’en application d’un délai transitoire de trois mois, ce retour à une pleine capacité de travail devait être pris en compte au 1er février 2019. Cette affirmation est corroborée par le courrier recommandé daté du 6 novembre 2019 adressé par l’intimée à l’OAI dans lequel Visana précise que l’incapacité de travail de la recourante, pour la période du 1er février au 30 novembre 2019, n’est plus de 100 %, mais de 22 %, taux qui correspond à celui retenu dans la décision de rente près de quatorze mois plus tard. On en déduit que l’intimée était en mesure de fixer précisément le degré d’invalidité de la recourante, au début du mois de novembre 2018 déjà.

Il ressort de ce qui précède que la capacité de travail (dans une activité adaptée) de la recourante devait être considérée comme suffisamment stabilisée au plus tard au 1er novembre 2018. Le fait qu’il existait à l’époque une possibilité sérieuse que des séances de physiothérapie puissent conduire à une amélioration fonctionnelle de l’épaule de la recourante, sans influence sur la capacité de travail de celle-ci, n’est en effet pas décisif au regard de la jurisprudence relative à l’art. 19 al. 1 LAA.

6.2 Contrairement à ce qu’affirment les parties, la jurisprudence est claire sur le fait qu’il n’y a pas lieu de prolonger d’au minimum trois mois le paiement des indemnités journalières une fois atteint le moment visé par l’art. 19 al. 1 LAA.

Dès lors qu’aucune des parties n’avance que des mesures de réadaptation AI aient été en cours au 1er novembre 2018 et qu’elles aient été de nature à influencer le degré d’invalidité de la recourante (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_892/2015 du 29 avril 2016 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_588/2013 du 16 janvier 2014 consid. 3.4), il convient de considérer que, dans le cas d’espèce, le moment déterminant pour le passage des prestations provisoires LAA aux prestations durables LAA est le 1er novembre 2018.

6.3 La recourante a conclu à l’octroi d’une rente d’invalidité « à tout le moins dès le 1er février 2019 ». Il n’est donc pas contraire à ses conclusions de fixer le début de sa rente d’invalidité au 1er novembre 2018.

Le recours doit donc être admis en ce qui concerne le moment où la rente d’invalidité de la recourante prend naissance en ce sens que la recourante a droit à une rente d’invalidité LAA depuis le 1er novembre 2018.

La question du moment auquel le droit de la recourante à des indemnités journalières a pris fin a, en revanche, fait l’objet d’une décision séparée de l’intimée et dépasse donc l’objet de la contestation de la présente procédure, d’autant que ladite décision est entretemps entrée en force.

7.             En second lieu, il convient d’examiner la question du degré d’invalidité de la recourante, respectivement si c’est à juste titre que l’assurance a fixé celui-ci à 22 %.

7.1 Selon l’art. 16 LPGA, pour évaluer le taux d'invalidité d’un assuré, le revenu que celui-ci aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide (revenu hypothétique de valide) est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation sur un marché du travail équilibré (revenu d’invalide) ; il faut ainsi diviser le revenu hypothétique de valide par le revenu d’invalide pour obtenir le taux/degré d’invalidité (ATF 148 V 174 consid. 6.1 ; ATF 143 V 295 consid. 2.1).

Le moment déterminant pour effectuer la comparaison des revenus est celui du début de la rente d’invalidité putative en tenant compte des circonstances survenues jusqu’à la décision d'opposition sur la rente d'invalide (ATF 143 V 295 consid. 4.1.3 ; en ce sens également : ATF 145 V 141 consid 5.2.1 ; ATF 139 V 28 consid. 3.3.2; ATF 129 V 222 consid. 4.3.1).

7.2 Le revenu (hypothétique) de valide est celui que l'assuré aurait, avec haute vraisemblance, perçu sans l'évènement invalidant ; il se détermine sur la base du dernier salaire perçu avant cet évènement, adapté à l'inflation et à une éventuelle hausse des revenus dans la branche économique concernée (ATF 145 V 141 consid. 5.2.1 ; ATF 134 V 322 consid. 4.1 ; ATF 129 V 222 consid. 4.3.1). Il faut sur baser sur le revenu effectif et non sur le revenu ramené à un temps horaire donné (ATF 126 V 75 consid. 3a). Le salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré comprend tous les revenus d'une activité lucrative (y compris les gains accessoires et la rémunération des heures supplémentaires effectuées de manière régulière) soumis aux cotisations à l'assurance-vieillesse et survivants (AVS) ; pour l’établir, il convient de se fonder, en premier lieu, sur les renseignements fournis par l'employeur et sur les revenus figurant dans l'extrait du compte individuel de l'AVS (arrêt du Tribunal fédéral 8C_289/2021 du 3 février 2022 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_679/2020 du juillet 2021 consid. 5.1).

Dans le cadre du calcul du taux d’invalidité selon la LAA, il faut convertir son revenu hypothétique de valide en temps plein, car la prise en compte d'un temps partiel dans le cadre de la LAA se réalise au moyen du gain assuré, et pas du taux d'invalidité (ATF 135 V 287 consid. 3.2 ; ATF 119 V 475 consid. 2b et 2c ; voir également : ATF 144 V 72 consid. 5.2.2).

7.3  

7.3.1 Le revenu d'invalide est, quant à lui, calculé prioritairement sur la base du revenu que la personne concernée reçoit effectivement après son invalidité ; à défaut de revenu effectif, le revenu d'invalide doit être calculé sur la base des salaires médians de l'enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) (ATF 148 V 174 consid. 6.2 ; ATF 143 V 295 consid. 2.1 ; ATF 139 V 592 consid. 2.3 ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et 3b/bb). Dans ce cas, il faut se baser sur les statistiques les plus récentes disponibles au moment de la décision administrative déterminante (ATF 143 V 295 consid. 2.3 ; Margit MOSER-SZELESS, Commentaire romand LPGA, 2018, n. 35 ad. art. 16 LPGA).

Il convient en principe de se référer à la ligne « total secteur privé » du tableau « TA1_skill_level » (ATF 148 V 174 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 5.2.1), ou la valeur correspondante du tableau T17, si un emploi dans le secteur public est, par exception, adapté à l’assuré et exigible de sa part (ATF 148 V 174 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_205/2021 du 4 août 2021 consid. 3.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_124/2021 du 2 août 2021 consid. 4.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_66/2020 du 14 avril 2020 consid. 4.2.2). Toutefois, lorsque l'assuré a travaillé dans un domaine économique pendant de nombreuses années, qu’il est toujours apte à travailler dans ce domaine et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pratiquement plus en ligne de compte, il y a lieu de se référer à des salaires médians de secteurs économiques particuliers, voire à des salaires médians de branches économiques particulières (arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_205/2021 du 4 août 2021 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_124/2021 du 2 août 2021 consid. 4.4.2).

Le salaire médian total doit cependant encore être précisé sur la base du sexe de l’assuré (1) et du niveau de compétence des fonctions qui peuvent être exigées de lui (2) : le niveau 1 comprend les activités ne comportant que des tâches physiques et manuelles simples, le niveau 2 se réfère aux activités comportant des tâches pratiques comprenant une mobilisation intellectuelle et/ou certaines connaissances, le niveau 3 comprend les activités qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances spécialisées, et le niveau 4 comprend les activités qui nécessitent de résoudre des problèmes complexes et de disposer d'un vaste ensemble de connaissances théoriques et pratiques dans un domaine spécialisé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_444/2021 du 29 avril 2022 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_66/2020 du 14 avril 2020 consid. 4.2.1). Lorsqu’une personne ne peut plus exercer la profession pour laquelle elle a été formée, l’application d’un niveau de compétence supérieur à 1 ne se justifie que si elle dispose d’aptitudes et de connaissances particulières (arrêt du Tribunal fédéral 8C_801/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_226/2021 du 4 octobre 2021 consid. 3.3.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_374/2021 du 13 août 2021 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_737/2020 du 23 juillet 2021 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_64/2021 du 14 avril 2021 consid. 6.2).

7.3.2 Lorsque le revenu d'invalide est calculé sur la base de l’ESS, il est possible de réduire, dans une appréciation d'ensemble, le salaire statistique pertinent dans la fixation du revenu d'invalide, jusqu'à un maximum de 25 % afin de tenir compte des limitations fonctionnelles de l'assuré et d'autres circonstances personnelles et professionnelles concrètes de la personne concernée, qui sont objectivement de nature à influencer sa capacité de gain sur un marché du travail équilibré, et notamment son type de permis de séjour, son expérience professionnelle, et son taux d’activité maximum contraint (ATF 148 V 174 consid. 6.3 ; ATF 146 V 16 consid. 4.1 ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 ; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa, 5b/bb et 5b/cc ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 6.2). Les éléments qui sont pris en compte pour limiter de manière générale la capacité de gain d’un assuré ne peuvent, cependant, pas fonder un abattement du salaire statistique, car sinon ils seraient pris en compte à deux reprises dans la fixation du degré d’invalidité d’un assuré (ATF 148 V 174 consid. 6.3 ; ATF 146 V 16 consid. 4.1). Un tribunal social ne doit pas simplement subsister son appréciation à celle de l'autorité de première instance, s'agissant de la valeur d'un abattement, mais il peut s'en écarter dès lors qu'il existe un motif fondé pour ce faire (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; ATF 126 V 75 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_331/2019 du 18 septembre 2019 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_103/2018 et 8C_131/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2 et 4.3).

Le fait que l'assuré ne puisse exercer qu'un travail à temps partiel peut mener à admettre un abattement sur le salaire statistique, en calculant la différence entre un salaire à 100 % selon les statistiques et un salaire pour un temps partiel transposé à un 100 %, cela sur la base du tableau T18 « Salaire mensuel brut (valeur centrale) selon le taux d'occupation, la position professionnelle et le sexe » ; cependant, cet abattement ne doit pas être octroyé dans les activités où le travail à temps partiel est également ou mieux rémunéré que le travail à temps plein (arrêt du Tribunal fédéral 9C_273/2019 du 18 juillet 2019 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_10/2019 du 29 avril 2019 consid. 5.2.1 et 5.2.2 ; voir également : 9C_373/2019 du 18 juillet 2019 consid. 5.2).

En ce qui concerne les emplois relevant du niveau de compétence 1, au sens des ESS, soit le niveau le moins élevé, le fait de ne pas pouvoir bénéficier de son expérience antérieure en raison d'un nécessaire changement d'activité ne peut pas fonder un abattement, car le salaire médian de cette catégorie recouvre un large éventail d'activités ne requérant pas d'expérience professionnelle spécifique, ni de formation particulière (ATF 146 V 16 consid. 6.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_118/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.3.2). Le Tribunal fédéral est également restrictif s’agissant des autres niveaux de compétence, puisqu’il a jugé qu’une ancienneté de sept ans et demi dans un emploi de niveau de compétence 2 ne suffisait pas à fonder un abattement (arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 6.4.2), au contraire d’une expérience de trente-cinq ans (arrêt du Tribunal fédéral 8C_46/2018 du 11 janvier 2019 consid. 4.4).

7.4 S’agissant de l’âge avancé d’un assuré, l’art. 28 al. 4 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA - RS 832.202) interdit d’en tenir compte dans le cadre du calcul d’une rente d’invalidité de l’assurance-accidents, dès lors que les revenus de valide et d’invalide d’un assuré doivent être fixés sur la base d’un âge de 40 à 45 ans (arrêt du Tribunal fédéral 8C_219/2022 du 2 juin 2022 consid. 6.1 ; voir également : arrêt du Tribunal fédéral 8C_582/2020 du 2 août 2021 consid. 3). En effet, cette norme vise précisément à éviter que l’âge influence le taux d’invalidité d’un assuré et que la rente d’invalidité LAA prenne donc une connotation de rente de vieillesse (ATF 134 V 392 consid. 6.2). Depuis le 1er janvier 2022, il en va d’ailleurs de même, s’agissant de l’assurance-invalidité, selon l’art. 25 al. 3 3ème phr. du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201).

8.              

8.1 En 2015, la recourante travaillait pour l’IMAD 32 heures par semaine, soit un taux d’activité de 80 %. Son revenu annuel tiré de cette activité s’élevait à CHF 73'918.75.-. Cela correspond à un revenu de CHF 92'398.45, une fois celui-ci converti en taux plein ([73'918.75 / 80] x 100).

Ce montant doit être adapté à la hausse générale des salaires dans la branche économique santé, hébergement médico-social et action sociale entre 2015 et 2018, laquelle s’est élevée à 1.014 % selon le tableau T1.10 « Indices des salaires nominaux 2011-2021 » de l’Office fédéral de la statistique (ci-après : OFS). Cela aboutit à un revenu de CHF 93'335.35 (92'398.45 + 936.90) en 2018.

Partant, il y a lieu de retenir que le revenu (hypothétique et à 100 %) de valide de la recourante se monte à CHF 93'335.35.

8.2  

8.2.1 La recourante a brièvement retrouvé du travail après l’accident du 30 juin 2015, mais sans que cette reprise ne se concrétise dans la durée. Dans ces circonstances, il convient d’établir son salaire d’invalide sur la base des statistiques de l’OFS, soit des ESS 2018.

La dernière activité exercée par la recourante relevait du secteur public. Il ressort cependant du rapport d’expertise des Drs C______ et D______ que celle-ci était totalement incapable de travailler dans ce domaine d’activité au 1er novembre 2018, et que cette situation perdurerait à l’avenir. Dès lors qu’aucun élément présent au dossier ne laisse spécifiquement penser qu’elle puisse retrouver plus facilement une place dans le secteur public, dans un nouveau domaine d’activité, en comparaison avec un assuré moyen, il convient d’avoir recours au principe général, à savoir l’application du tableau TA_1_tirage_skill_level. Pour déterminer le revenu d’invalide, c’est en effet la situation de l’assuré après la survenance de son invalidité qui est déterminante. Le fait que celui-ci ait autrefois exercé un emploi dans le secteur public ne signifie donc pas automatiquement qu’il en sera de même à l’avenir ; des éléments de preuves permettant de conclure, avec le degré de preuve de la vraisemblance prépondérante, que tel est le cas sont nécessaires. L’OAI a d’ailleurs également appliqué le tableau TA_1_tirage_skill_level dans la procédure parallèle d’invalidité selon la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20).

8.2.2 S’agissant du salaire médian de référence à prendre en compte, l’intimée et la recourante s’opposent. La première considère qu’il convient de se référer au salaire médian pour le niveau de compétence 2, branche économique numéro 65 « assurances », femme, alors que la seconde considère qu’il convient de suivre le salaire médian général du niveau de compétence 1 pour les femmes.

Selon la description qu’en donne l’OFS, la catégorie NOGA n°65 « Assurances » couvre la souscription de contrats d'assurance de rente et d'autres formes de contrats d'assurance ainsi que l'investissement des primes pour constituer un portefeuille d'actifs financiers en prévision des sinistres futurs ainsi que la fourniture de services d'assurance et de réassurance directe (cf. https://www.kubb-tool.bfs.admin.ch/fr/code/k; consulté pour la dernière fois le 29 août 2022). Il s’agit donc de tâches demandant, en particulier, des connaissances juridiques et comptables de base pour un niveau de compétence 2, des connaissances médicales apparaissant être un atout dans la mesure où elles permettent de mieux exploiter ces compétences, par exemple pour contrôler une facture d’un prestataire de soins.

Selon le site internet du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (ci-après : CHUV), le métier d’aide-soignant, respectivement d’assistant en soins et santé communautaire, consiste à assurer le bien-être des patients, à organiser des activités journalières en étant à l'écoute de leurs besoins et de leurs habitudes et à appliquer certains actes médico-techniques sous la responsabilité du personnel infirmier, par exemple mesurer la tension artérielle, prendre le pouls ou encore récolter des urines ou du sang (cf. https://www.chuv.ch/fr/chuv-home/formation/offre-de-formation/offre-de-formation-detail/formation/assistant-e-en-soins-et-sante-communautaire-cfc ; consulté pour la dernière fois le 29 août 2022). L’essentiel de la mission d’un assistant en soin et santé communautaire, respectivement d’un aide-soignant, consiste donc à assister les patients dans leur vie de tous les jours et à effectuer certains actes médico-techniques simples, le reste des actes médicaux étant en revanche réservé aux médecins et aux infirmiers. Aucun élément présent au dossier de la présente procédure ne laisse penser que les tâches de la recourante auraient différé substantiellement de ce cahier des charges type. Au contraire, la description que la recourante a donné du contenu de son travail (cf. pièce 277 intimée) correspond avec la représentation standardisée de celui-ci, telle qu’exposée ci-dessus.

Dans ces circonstances, rien ne laisse penser que la recourante bénéficierait des compétences nécessaires pour exercer une activité de niveau 2 dans le secteur des assurances, contrairement à ce qu’a retenu l’intimée.

En outre, rien ne laisse penser que l’expérience et les compétences de la recourante devraient amener à s’écarter de la règle générale pour une personne ne pouvant plus exercer son ancienne activité, qui consiste à recourir à la médiane générale des emplois de niveau de formation 1. C’est la solution qu’a retenue l’OAI dans le cas d’espèce. C’est également la solution qu’a retenue le Tribunal fédéral dans le cas d'une assurée qui avait travaillé de nombreuses années en tant qu'infirmière mais qui n'avait pas de formation commerciale ni d'expérience dans ce domaine (arrêt du Tribunal fédéral 8C_226/2021 du 4 octobre 2021 consid. 3.3.3.2) ou dans le cas d’un chauffagiste qui avait travaillé sur des courtes périodes dans une assurance, mais ne disposait pas de formation d’employé de commerce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_125/2009 du 19 mars 210 consid. 4.4.3 et 4.4.4).

En conclusion, il faut se fonder sur le salaire médian global pour les femmes dans les emplois de niveau de formation 1 des ESS 2018, ce qui correspond à un salaire mensuel de CHF 4'371.- et à un salaire annuel de CHF 52'452.- pour 40 heures de travail hebdomadaires.

Il convient d’adapter ce montant à la durée normale hebdomadaire de travail en 2021 en Suisse, à savoir 41.7 heures, ce qui aboutit à un salaire de référence en 2018 de CHF 54'681.20 ([52'452/40] x 41.7). Il n’y a en revanche pas lieu d’adapter ce montant à la hausse générale des salaires dès lors que le revenu hypothétique de valide de la recourante est aussi calculé sur une base correspondant à l’année 2018 ; la comparaison entre revenu de valide et d’invalide peut donc se réaliser sur des variables de même nature.

8.2.3 S’agissant de l’abattement sur le salaire statistique retenu, l’intimée l’a fixé à 10 %, alors que la recourante considère qu’un taux de 25 % serait plus approprié au vu de l’âge et de la nationalité de la recourante, de la perte de son expérience professionnelle, du fait qu’elle travaillait à temps partiel et de ses limitations fonctionnelles.

Selon le rapport d’expertise du 24 septembre 2018 et le rapport d’expertise complémentaire du 25 juin 2020, la recourante ne peut porter des charges supérieures à 3-4 kg et ne peut plus amener son bras gauche à l’horizontale.

Selon le tableau TA12 « Salaire mensuel brut (valeur centrale et intervalle interquartile), Suisses/Suissesses et étrangers/étrangères, selon la position professionnelle et le sexe » des ESS 2018, le salaire médian pour les frontalières « permis G » (soit celles qui ne sont pas fonctionnaires internationales ni ne possèdent la nationalité suisse) dans les postes sans fonction de cadre était de CHF 5’105.-, contre CHF 5’284.- pour l’ensemble des salariées (en équivalent plein temps), soit un salaire inférieur de 3.4 %.

Selon le tableau T18 « Salaire mensuel brut (valeur centrale) selon le taux d'occupation, la position professionnelle et le sexe » des ESS 2018, le salaire médian pour les femmes avec un taux d’activité entre 75 et 89 % sans position de cadre était de CHF 6'164.- (équivalent temps plein), contre CHF 5’674.- pour l’ensemble des salariées. Le salaire médian des salariées, tous taux d’activité confondus, était donc inférieur de 8 % à celui de celles travaillant à 80 %, au prorata de leur temps de travail respectif. Si tant est qu’on considère que la jurisprudence relative à l’abattement pour travail partiel concret puisse s’appliquer à la recourante, alors qu’une telle restriction n’est pas prise en compte dans le montant de son revenu d’invalide et de valide, elle aurait donc un effet à la baisse sur l’ampleur d’un éventuel abattement.

S’agissant de l’âge de la recourante, il n’est pas possible d’en tenir compte selon l’art. 28 al. 4 OLAA. La recourante était par ailleurs encore éloignée de l’âge légal de la retraite au moment déterminant pour l’évaluation de son taux d’invalidité. Il en va de même du critère du manque d’expérience, celui-ci n’ayant, selon la jurisprudence fédérale, pas à être pris en compte lorsque le salaire hypothétique de valide est calculé sur la base du niveau de compétence 1, ce qui est le cas en l’espèce.

Au vu de ce qui précède, l’abattement de 10 % retenu par l’intimée n’apparait en tout cas pas inadéquat au point qu’il se justifie de procéder à une appréciation divergente. L’OAI a d’ailleurs également retenu un abattement de 10 % dans le cadre de son calcul du taux d’invalidité de la recourante.

Dès lors que les experts ont retenu que la recourante pouvait travailler sans diminution de rendement dans une activité adaptée, le montant de CHF 54'681.20 retenu plus haut doit uniquement être réduit de 10 %. Le salaire (hypothétique) d’invalide de la recourante en 2018 s’élève donc à CHF 49'213.10 (54'681.20 x 0.9).

8.3 En conséquence, le degré d’invalidité de la recourante se monte à 47,273 % ([49'213.10 / 93'335.35] - 1), arrondi à 47 % (cf. ATF 130 V 121 consid. 3.2).

Ce degré d’invalidité correspond à celui retenu par l’OAI avant qu’il ne procède à une réduction au prorata de la part active (cf. ATF 142 V 290 consid. 7.1, 7.2 et 7.3), procédure propre au calcul de l’invalidité en assurance-invalidité et prévoyance professionnelle (cf. ATF 144 V 72 consid. 5.2.2).

Ce taux ne correspond pas aux conclusions de la recourante qui l’estime à 56 %, mais est supérieur au taux de 22 % retenu par l’intimée, de sorte que le recours doit être partiellement admis sur ce point.

9.             En conclusion, le recours doit être partiellement admis et l’intimée condamnée à verser à la recourante une rente d’invalidité, à partir du 1er novembre 2018, sur la base d’un taux d’invalidité de 47 %.

S’agissant du gain assuré selon l’art. 15 LAA, fixé à CHF 73'918.75 par l’intimée, il n’est pas contesté en tant que tel par la recourante. À première vue, la chambre de céans disposerait donc de toutes les variables pour calculer le montant concret de la rente d’invalidité de la recourante selon l’art. 20 al. 1 LAA. Cependant, il ressort des documents produits à la procédure que les organes de l’assurance-invalidité sociale lui ont octroyé une rente d’invalidité entière à tout le moins pour une période allant du 1er février 2017 au 31 janvier 2019. Dans ces circonstances, il est nécessaire d’examiner la question d’une coordination, respectivement d’une rente complémentaire selon l’art. 20 al. 2 LAA. Il se justifie donc de renvoyer la cause à l’intimée, afin qu’elle soit en mesure de clarifier cet aspect.

10.         La recourante obtenant partiellement gain de cause et étant assistée d’une avocate, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LAA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Renvoie la cause à l'intimée pour qu’elle calcule le montant de la rente due à la recourante à partir du 1er novembre 2018 sur la base d’un taux d’invalidité de 47 % au sens des considérants.

4.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 2'500.-, à la charge de l’intimée.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le