Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3588/2021

ATAS/756/2022 du 31.08.2022 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3588/2021 ATAS/756/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 31 août 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o Monsieur B______, à GENÈVE

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après l’intéressé ou le recourant), au bénéfice d’une rente AVS, a demandé des prestations complémentaires le 30 août 2019.

b. Par décision du 30 mars 2020, le service des prestations complémentaires (ci-après le SPC ou l’intimé) a refusé sa demande, au motif que ses dépenses reconnues étaient entièrement couvertes par le revenu déterminant.

Dans les plans de calcul, le SPC prenait en compte CHF 234'094.40 de biens dessaisis pour la période du 1er août au 31 décembre 2019, puis CHF 224'094.40 dès le 1er janvier 2020.

c. L’intéressé a formé opposition à cette décision le 6 avril 2020.

d. Par décision sur opposition du 4 octobre 2021, le SPC a rejeté l’opposition.

B. a. L’intéressé a formé recours contre la décision sur opposition du SPC, concluant à l’octroi d’une aide au logement de CHF 1’000.- et d’un subside de CHF 575.-, soit le montant de sa prime d’assurance maladie de base.

b. L’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Le 26 novembre 2021, le recourant a transmis à la chambre de céans son bordereau de taxation fiscale pour l’année 2020, dont il ressortait qu’il n’avait aucune fortune et qu’il avait eu un revenu de CHF 2'370.-.

d. Le 3 janvier 2022, le recourant a informé la chambre de céans que le conseil d’État de Genève lui avait octroyé un subside de l’assurance maladie de CHF 300.- par mois. De ce fait, sa requête auprès de la chambre des assurances sociales pour le subside de l’assurance maladie était réduite à CHF 275.- par mois (prime de base de CHF 575.-, moins subside RDU de CHF 300.-).

e. Le recourant a été entendu par la chambre de céans le 27 avril 2022. Il a déclaré qu’il était toujours domicilié chez son frère. Il avait pour CHF 1'100'000.- de commandements de payer. La somme qu’il avait touchée en 2015, suite à la vente d’un bien immobilier et de son divorce, avait été versée en remboursement de cette dernière somme. Informé du fait qu’il devait démontrer l’usage qu’il avait fait de la somme prise en compte au titre de dessaisissement, il a répondu qu’il fallait prendre en compte sa situation actuelle. Il n’avait plus de pièces à produire s’agissant du dessaisissement, en raison du temps passé, de son divorce compliqué et de son déménagement. Il renonçait à un délai supplémentaire pour produire des pièces. Il était difficile d’obtenir un bail sans les moyens de payer le loyer.

Le représentant de l’intimé a déclaré à la chambre de céans que les régies avaient l’habitude ainsi que les services sociaux et qu’il pouvait établir une attestation du montant maximum pris en compte à titre de loyer dans les calculs des prestations. Il encore précisé qu’il n’avait pas tenu compte d’une diminution annuelle du montant dessaisi, sous réserve du montant annuel de CHF 10'000.-, car le recourant avait été taxé d’office en 2015 avec une fortune nulle, de sorte qu’il avait été considéré que le dessaisissement avait eu lieu durant l’année pendant laquelle le recourant avait touché la somme en cause.

f. Le 28 avril 2022, la chambre de céans a demandé à l’office cantonal des poursuites s’il ressortait des pièces en sa possession que l’assuré avait utilisé la somme de CHF 264’094.40 encaissée en 2015 suite à la vente d’un bien immobilier pour payer une partie de ses dettes ayant fait l’objet d’un commandement de payer.

g. L’office des poursuites a informé la chambre de céans par téléphone du 2 mai 2022, que les poursuites remboursées ou pas tombaient au bout de cinq ans. De ce fait, elles n’étaient plus visibles, sauf pour les non-remboursés, si les créanciers en demandaient la continuation.

h. Le recourant a indiqué le 3 mai 2022 qu’il contestait avoir déclaré lors de l’audience avoir consacré une partie du montant touché en 2015, à régler une partie des commandements de payer. Il avait utilisé cette somme pour payer des dettes, qui étaient antérieures aux poursuites et avaient été générées entre 2008 et 2015, à divers créanciers personnels et professionnels. Ses problèmes financiers personnels et professionnels étaient consécutifs à la crise bancaire de 2008, qui avait entraîné la faillite de ses principaux clients étrangers. Il demandait la communication à l’office des poursuites de ce rectificatif pour éviter une confusion dans l’esprit de ce dernier.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du recours contre la décision sur opposition de l’intimé est ainsi établie, en tant qu’elle porte sur son droit aux prestations complémentaires.

2.             Dans la mesure où il porte sur le droit aux prestations complémentaires 1er août au 31 décembre 2019, puis dès le 1er janvier au 30 mars 2020, soit sur une période antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, des modifications des 22 mars, 20 décembre 2019 et 14 octobre 2020, le présent litige est soumis à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit. Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

3.              

3.1 Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA; art. 43 LPCC; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10] et art. 43 LPCC).

Le recours a été interjeté en temps utile et est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC).

4.             Le litige porte le bien-fondé de la décision sur opposition du 4 octobre 2021, qui refusait au recourant le droit aux prestations complémentaires.

5.              

5.1  

5.1.1 Dans la décision sur opposition l’intimé a pris en compte un dessaisissement de fortune à hauteur de CHF 224’094.40, considérant que le recourant avait touché cette somme en 2015 dans le cadre de la vente d’un bien immobilier et qu’il n’avait pas prouvé par pièce que la diminution de sa fortune était due à des dépenses effectuées avec des contre-prestations adéquates. Le recourant devait supporter les conséquences de l’absence de preuve.

5.1.2 Le recourant a fait valoir que le montant qu’il avait encaissé en 2015 avait été entièrement utilisé au remboursement de ses créanciers et que sa situation financière s’était considérablement péjorée pendant les six dernières années. Selon son bordereau de taxation fiscale 2019, il n’avait pas de fortune et son revenu s’élevait à CHF 5'000.- par an.

5.2  

5.2.1 Pour qu'un dessaisissement de fortune puisse être pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, la jurisprudence soumet cet acte à la condition qu'il ait été fait « sans obligation juridique », respectivement « sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente ». Les deux conditions précitées ne sont pas cumulatives, mais alternatives.

Il y a lieu de prendre en compte dans le revenu déterminant tout dessaisissement sans limite de temps (Pierre FERRARI, Dessaisissement volontaire et prestations complémentaires à l'AVS/AI in RSAS 2002, p. 420).

L'assuré qui n'est pas en mesure de prouver que ses dépenses ont été effectuées moyennant contre-prestation adéquate ne peut pas se prévaloir d'une diminution correspondante de sa fortune mais doit accepter que l'on s'enquière des motifs de cette diminution et, en l'absence de la preuve requise, que l'on tienne compte d'une fortune hypothétique (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 65/04 du 29 août 2005 consid. 5.3.2). Pour que l'on puisse admettre qu'une renonciation à des éléments de fortune ne constitue pas un dessaisissement, il faut que soit établie une corrélation directe entre cette renonciation et la contre-prestation considérée comme équivalente. Cela implique nécessairement un rapport de connexité temporelle étroit entre l'acte de dessaisissement proprement dit et l'acquisition de la contre-valeur correspondante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 6.2).

5.3 En l’espèce, le recourant ne conteste pas avoir touché CHF 224’094.40 en 2015, mais se contente d’affirmer l’avoir entièrement utilisé au remboursement de ses créanciers, sans en produire la preuve. Dès lors que ses allégations n’ont pas pu être établies au degré de la vraisemblance prépondérante, le recourant doit supporter le fardeau de la preuve et ses griefs doivent être rejetés.

Le fait que sa situation financière s’est péjorée durant ces six dernières années n’y change rien.

6.              

6.1  

6.1.1 Dans sa décision sur opposition, l’intimé a indiqué n’avoir pris en compte aucun loyer dans le calcul des prestations complémentaires, car il avait reçu, le 6 novembre 2019, une attestation établie le 4 précédent, dans laquelle Monsieur B______ indiquait loger le recourant gracieusement.

6.1.2 Le recourant a fait valoir que son frère le logeait depuis deux ans dans son appartement, mais que celui-ci ne désirait pas le faire éternellement et l’avait sommé de trouver un logement indépendant. Le recourant sollicitait de l’intimé une aide au logement à hauteur de CHF 1'000.- par mois.

6.2 Selon l'art. 9 al. 1 LPC, le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

L'art. 10 LPC définit les dépenses reconnues et fixe notamment les montants destinés à la couverture des besoins vitaux et le montant maximal reconnu pour le loyer d'un appartement. Pour une personne seule, le montant du loyer de l’appartement et des frais accessoires y relatifs s’élève à CHF 13'200.- par an (art. 10 al. 1 let. b chiffre 1 LPC dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020).

Sur le plan cantonal, les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'article 3 (art. 6 LPCC).

En cas d’inexistence de frais de logement, il n’y pas de raison de prendre en considération un loyer à titre de dépense reconnue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_511/2013 du 8 mai 2014 consid. 3.3.).

6.3 En l’espèce, faute pour le recourant de payer effectivement un loyer pendant la période en cause, c’est à juste titre que l’intimé n’a pas tenu compte d’un loyer dans ses calculs de prestations. Le recourant peut demander à l’intimé une attestation du montant maximum pris en compte à titre de loyer dans les calculs des prestations pour faciliter sa recherche d’appartement.

6.4  

6.4.1 Le recourant sollicite de l’intimé un subside de l’assurance-maladie de CHF 275.- par mois, soit le montant de la prime de base LAA de son assurance maladie.

6.4.2 L’intimé conteste ce droit.

6.5 Les bénéficiaires d’une prestation annuelle, fédérale et/ou cantonale, complémentaires à l’AVS/AI versée par le SPC ont droit – aux termes de l’art. 22 al. 6 LaLAMal – à un subside égal au montant de leur prime d’assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l’intérieur, étant ajouté que les personnes qui ont un excédent de ressources inférieur à la prime moyenne cantonale ont droit à un subside équivalent à la différence entre la prime moyenne cantonale et l’excédent de ressources (ATAS/1129/2017 du 12 décembre 2017 consid. 2b).

Selon l’art. 23A LaLAMal, le service de l’assurance-maladie et le SPC se communiquent régulièrement par fichier informatique les données nécessaires à l’exécution de la présente loi, de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, du 6 octobre 2006, et de la loi sur les prestations complémentaires cantonales, du 25 octobre 1968, notamment le nom des bénéficiaires des prestations, la date d’ouverture du droit aux subsides et, cas échéant, le montant, ainsi que la date de fin du droit aux subsides (al. 2).

Lorsqu'un subside est octroyé en cours d'année à un bénéficiaire des prestations du service, il peut exceptionnellement couvrir la prime effective facturée par l'assureur jusqu'au prochain terme de résiliation du contrat d'assurance. Passé ce délai, le subside est limité au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur (al. 2).

Lorsqu'un subside est octroyé avec effet rétroactif, le montant du subside rétroactif couvre la prime effective facturée par l'assureur (al. 3).

Le service de l'assurance-maladie transmet régulièrement à chaque assureur par fichier informatique la liste de ses assurés bénéficiaires d'un subside à déduire sur le montant de leurs primes (al. 4).

6.6 En l’espèce, l’excédent du revenu déterminant étant supérieur à la prime moyenne cantonale d’assurance maladie, le recourant n’a pas droit au subside de l’assurance-maladie par l’intermédiaire de l’intimé (art. 22 al. 6 LaLAMal).

7.             Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le