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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/958/2021

ATAS/712/2022 du 18.08.2022 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/958/2021 ATAS/712/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 août 2022

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à PLAN-LES-OUATES

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en ______1961, au bénéfice d’un certificat fédéral de capacité (CFC) d’horticulteur obtenu en 1979, a travaillé comme horticulteur, puis chef de rayon technique dans un garden center, puis chef de produits (plantes en pots) jusqu’en 1992, fleuriste indépendant et agent technique commercial chargé de la prospection de la clientèle maraîchère en suisse romande en 1994, délégué commercial pour une entreprise horticole en 1995, chef de service aux achats de 1996 à 1998, horticulteur au B______ du à Genève de 1999 à 2004, puis grainier au B______ de 2004 à 2006, puis chargé de mission au B______ de 2007 à 2008.

b. Le 23 juin 2008, l'assuré a déposé une première demande de prestations auprès de l’office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI), en indiquant que c'était à l'instigation de son employeur.

c. Par décision du 25 février 2010, l’OAI lui a nié le droit à des mesures de réadaptation, au motif qu'il avait été apte à reprendre une activité dans le domaine de l’horticulture dès le 23 juin 2008. Une orientation professionnelle n’était pas nécessaire, pas plus qu’une mesure de reclassement.

L'assuré avait fait l’objet d’un bilan de compétences dans le cadre de mesures d’intervention précoce, dont l'OAI rappelait qu'elles étaient octroyées sans examen des conditions liées à l’invalidité.

Cette décision a été rendue à l'issue d'une instruction ayant permis de recueillir notamment les éléments suivants.

-          Dans un rapport daté du 8 juillet 2008, le docteur C______, psychiatre et psychothérapeute FMH, avait conclu à un épisode dépressif sévère avec symptômes psychotiques depuis 2006-2007, atteinte apparue dans un contexte professionnel difficile, mais s’étant amendée progressivement sous traitement antidépresseur et neuroleptique, avec disparition des symptômes psychotiques. Le médecin concluait à une incapacité de travail de 100% de septembre 2007 à avril 2008, 60% d’avril 2008 à mai 2008, 50% du 1er au 22 juin 2008 puis 0% à compter du 23 juin 2008.

-          Dans un rapport du 11 août 2008, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, mentionnait une plastie du ligament croisé antérieur (LCA) du genou droit le 28 avril 2006, une méniscectomie interne du genou gauche en 2003, ainsi qu’une méniscectomie interne à droite en 2008. Le patient devait éviter les accroupissements répétés. Sa capacité de travail était de 100% depuis le 7 avril 2008 dans un poste adapté.

 

-          Un rapport avait été établi suite à une mesure d’orientation professionnelle à titre d’intervention précoce auprès du CEBIG, indiquant que l’assuré avait pu définir plusieurs pistes professionnelles sous forme de projets relatifs à des postes proches de ses domaines d’expertise et tenant compte des limitations en termes d’efforts physiques engendrées par ses problèmes de genoux : chef de produits, responsable de projets, coordinateur ou « system manager environment ». Avaient été identifiés comme employeurs potentiels le Service de la protection de la nature, la Maison de l’environnement et les organisations non gouvernementales rattachées, ainsi que d’autres institutions auprès desquelles l’assuré avait déjà quelques contacts ou se proposait d’en établir. Étaient également envisagées comme pistes les domaines de la mobilité douce et sa promotion dans des entreprises comme Mobility, la distribution de produits biologiques ou encore le secteur plus spécifique du marketing (vu l’expérience de l’intéressé dans le domaine des achats).

-          Dans une note du 6 janvier 2009, le service de réadaptation de l'OAI a constaté que l’assuré pourrait travailler dans plusieurs domaines, moyennant quelques mois de formation. Il était relevé que l'intéressé était alors en conflit avec son employeur pour licenciement abusif et qu’il n’envisageait rien avant l’issue de cette procédure.

-          Le 2 avril 2009, le Service médical régional (SMR) a rappelé que l'assuré avait souffert de plusieurs atteintes au niveau des genoux, mais que, néanmoins, une reprise du travail avait été possible dès le 7 avril 2008, dans un poste adapté ménageant les genoux. Par ailleurs, suite à des problèmes professionnels en 2006, l’assuré avait développé un état dépressif sévère avec symptômes psychotiques qui avait été pris en charge avec une bonne évolution, de sorte que, sur le plan psychiatrique, l'intéressé avait été apte à reprendre sa profession habituelle à 100% le 23 juin 2008. Les problèmes professionnels avaient débuté en 2006, lorsque le poste de l’assuré avait été converti - alors qu’il était en arrêt de travail - en un poste plus lourd (impliquait désherbage régulier et randonnées en montagne) et ce, alors même qu'il lui avait été conseillé d’éviter les accroupissements répétés, la marche prolongée sur terrain irrégulier et le port de charges de plus de 10-15 kg.

-          Le 28 mai 2009, le Dr C______ a souligné que le trouble dépressif était toujours présent, de niveau moyen. Il s’était péjoré au moment de la reprise du travail, en avril 2008, puis du licenciement et de la procédure qui avait suivi. La thymie était légèrement améliorée, mais une importante apathie demeurait.

B. a. En mai 2019, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations d'invalidité, en invoquant un trouble de perturbation de l’activité et de l’attention (TDA-H) diagnostiqué à 56 ans, mais présent depuis toujours.

b. Le 28 mai 2019, le professeur E______, du département de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), a adressé à l’OAI un courrier confirmant que l’assuré souffrait d’un TDA-H (Classification internationale des maladies [CIM-10] F90.1), dont il a expliqué que, de manière générale, il pouvait se manifester par d’importantes difficultés attentionnelles, une distractibilité, des difficultés dans les fonctions exécutives, notamment dans la planification et l’organisation de tâches dans la journée, la gestion du temps, la prise d’initiatives et une tendance à la procrastination. Son patient rencontrait des difficultés attentionnelles de longue date. Il avait pu mettre en place des mécanismes adaptatifs moyennement efficaces et qui n'avaient pu être que faiblement amendés par le traitement de psychostimulants. La capacité attentionnelle de son patient s’était péjorée dernièrement (augmentation des difficultés attentionnelles, plus grande distractibilité, difficultés à se concentrer plus importantes, irritabilité plus présente); il faisait d’énormes efforts pour ne pas commettre d’erreurs sur son lieu de travail, ainsi que pour essayer d'assumer les tâches du quotidien. Ces difficultés réduisaient sa capacité de travail à 50% dans une activité adaptée.

c. Le 13 septembre 2019, le Prof. E______ a précisé qu'il retenait formellement les diagnostics de trouble dépressif récurrent désormais en rémission (F33.4) et de perturbations de l’activité de l’attention (F90.0). La scolarité de son patient s'était déroulée sans grandes difficultés, tout comme son apprentissage d’horticulteur, qu’il avait réussi. Il avait ensuite exercé de nombreuses activités lucratives sur des périodes relativement courtes, toujours dans l’horticulture ou dans des domaines dérivés, parfois dans le commercial, donnant souvent sa démission parce qu'il s'ennuyait ou voulait changer d’activité. Son patient décrivait des difficultés en lien avec ses employeurs. Il s'était finalement mis à son compte comme horticulteur-jardinier, mais avait dû y renoncer rapidement en raison de difficultés rencontrées dans la sphère administrative (gestion des factures, accumulation de dettes à hauteur de plusieurs dizaines de milliers de francs). À l’âge adulte, l’impulsivité s’était manifestée par des décisions rapides et non planifiées, des difficultés d’organisation, de planification à long terme, l’assuré avait eu de plus en plus de peine à s'acquitter des tâches administratives. Le médecin en tirait la conclusion que le trouble avait donc eu un retentissement évident sur son parcours professionnel. 9/9 critères étaient remplis pour l’inattention et 4/9 pour l’impulsivité. Un traitement à base de psychostimulants avait été instauré, qui avait permis une atténuation de la symptomatologie attentionnelle, mais il y avait été renoncé en raison des effets secondaires. L’épisode dépressif moyen avait été traité, avec une très bonne réponse clinique, de sorte qu'au bout d’un an, le traitement avait pu être stoppé, sans réémergence d'épisode dépressif depuis lors. S’agissant des ressources disponibles, le médecin indiquait que son patient disposait d’un réseau social extrêmement restreint, bien que la communication soit relativement bonne. Le manque de motivation était une conséquence directe de son trouble et se traduisait par une importante procrastination qui le handicapait dans l’ensemble de ses tâches et diminuait ses ressources, qualifiées de très faibles. Le trouble de l’attention entraînait une quasi incapacité à effectuer les tâches quotidiennes normalement et le patient avait très peu d’activités sociales. Il lui était difficile d’organiser et planifier ses tâches, de remplir à satisfaction des tâches administratives. Il ne pouvait travailler que quatre heures par jour au maximum. En raison des effets secondaires, aucun traitement médicamenteux ne semblait pouvoir être instauré.

d. Par courrier du 4 octobre 2019, la doctoresse F______, spécialiste FMH en médecine générale et médecin traitant de l’assuré depuis avril 1997, a expliqué ne pas l’avoir vu entre avril 2008 et mai 2019. Elle a indiqué que son patient avait toujours eu de la peine à gérer ses affaires et avait été maintes fois aux poursuites par incapacité à s’organiser. En mai 2019, il était revenu la consulter pour un bilan de santé. C'était à cette occasion, qu'elle avait appris que le diagnostic de TDA-H avait été posé, ce qui lui avait paru tout à fait justifié, car cela expliquait les importantes difficultés organisationnelles de son patient, tant dans sa vie privée que professionnelle. Le médecin évaluait la capacité de travail de son patient à 100% dans un poste adapté (travaux de jardinage légers, de préférence pas en tant qu'indépendant).

e. Le 28 octobre 2019, le Prof. E______, sur question de l'OAI, a indiqué que le bilan neuropsychologique effectué n’avait consisté qu’en la passation d’un examen ayant évalué les capacités attentionnelles et l’impulsivité de l'assuré comme suit :

« inattention : OK

impulsivité : léger

attention soutenue : léger

vigilance : OK » (sic)

Le test montrait donc un léger déficit au niveau de l’attention soutenue, ainsi qu’une légère impulsivité.

Le diagnostic médical était basé sur un entretien clinique approfondi permettant de mettre en évidence les difficultés attentionnelles, l’hyperactivité et l’impulsivité du patient. C'était, selon le médecin, largement suffisant pour affirmer l’existence d’un TDA-H d’intensité sévère, essentiellement sur les dimensions attentionnelles. La littérature scientifique dans le domaine confirmait l’inutilité d’autres tests neuropsychologiques pour poser un diagnostic de TDA-H.

f. Le 17 février 2020, le Prof. E______ a encore précisé les périodes d’incapacité de travail comme suit :

-          "100% du 1er décembre 2017 au 31 janvier 2018,

-          50% du 1er janvier 2018 au 30 novembre 2019,

-          70% du 1er octobre 2019 au 31 décembre 2019

-          et 80% depuis le 1er janvier 2020 " (sic)

La première consultation remontait au 9 octobre 2017. Le TDA-H avait commencé à entraver de façon notable la capacité de travail de son patient dans son activité de référence « depuis le début de l’âge adulte » (sic).

g. S’interrogeant sur les troubles psychiques qui empêcheraient l’activité d’horticulteur ou celle de coach en jardinage revendiquée par l’assuré, le SMR a préconisé une expertise psychiatrique avec bilan neuropsychologique et des tests de validation des symptômes.

h. Un rapport d’examen neuropsychologique a été rendu en date du 18 août 2020 par Madame G______, spécialiste FSP en neuropsychologie et experte neuropsychologique SIM, qui a conclu à une atteinte cognitive légère, caractérisée par une dysfonction exécutive et attentionnelle interférant avec les processus mnésiques, compatible avec un trouble du déficit d’attention de présentation inattentive prédominante, tel que retenu et décrit par le Prof. E______ en septembre 2019. En découlaient les limitations fonctionnelles suivantes : une diminution significative des capacités d’adaptation et d’autonomie de l’assuré dans les situations complexes, de sorte qu’il lui faudrait éviter les fortes contraintes temporelles, les situations de doubles tâches ou de multiples tâches successives, les interférences, les situations de stress, les activités sollicitant ses capacités d’organisation, de prises d’initiatives et d’autocontrôle, et privilégier les activités routinières et les horaires flexibles. La neuropsychologue estimait que, sur le plan strictement neuropsychologique, une reprise d’activité dans le champ d’expérience de l’assuré paraissait réaliste à temps partiel (50%) afin de pallier les difficultés cognitives retenues et éviter une nouvelle décompensation psychique, qui pourrait avoir un effet délétère sur l’exploitation des ressources.

i. Le docteur H______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a quant à lui rendu son rapport le 29 octobre 2020.

L'expert a confirmé le diagnostic de TDA-H, tout en relevant que les troubles cognitifs mis en évidence devaient être considérés comme légers. Au terme de son analyse, il parvenait à la conclusion que la flexibilité et les capacités d’adaptation de l'assuré, bien que peut-être légèrement limitées, n'impliquaient pas un changement d’activité. En définitive, il paraît peu vraisemblable à l’expert qu’une maladie d’étiologie neuro-développementale s'étant révélée sans répercussion durant des années ne devienne invalidante qu’à l'âge de 59 ans. Selon lui, en l’absence de troubles psychiques incapacitants, il n’y avait pas d’éléments objectifs permettant de justifier une incapacité de travail significative dans l’activité habituelle, d'autant moins qu'il n’y avait pas eu de décompensation dépressive depuis 2007; en outre, il n'avait constaté aucune limitation dans l’exécution des tâches domestiques.

j. Dans un courrier du 15 mars 2021, l’assuré a contesté les conclusions de l'expert, expliquant qu'il avait des difficultés à assumer ses obligations administratives, au point qu'une fois, quinze sacs de courriers non ouverts s'étaient accumulés. Grâce à son suivi aux HUG et à son engagement, cette situation s’était bien améliorée, mais restait précaire. L’assuré contestait avoir une vie de couple, être apte à assumer son ménage et a reproché en substance à l'expert de n'avoir pas pris ses difficultés au sérieux.

k. Par décision du 16 février 2021, l’OAI a nié à l'assuré le droit à toute prestation, au motif qu'aucune atteinte à la santé justifiant une diminution de la capacité de travail de longue durée n'avait été mise en évidence.

l. Par écriture du 15 mars 2021, l’assuré a interjeté recours contre cette décision.

En substance, il conteste la valeur probante du rapport d'expertise, auquel il reproche de nombreuses erreurs et inexactitudes et de n'avoir pas pris la mesure de ses difficultés.

m. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 13 avril 2021, a conclu au rejet du recours. Selon l’intimé, l’examen à l’aulne de la nouvelle jurisprudence confirme l’absence de trouble psychiatrique ayant une influence sur la capacité de travail de l’assuré.

n. Une audience d’enquêtes s’est tenue en date du 2 décembre 2021, lors de laquelle a été entendu le Prof. E______, lequel a reproché à l'expert plusieurs assertions erronées, dont il a cité des exemples. Il a fait remarquer que toute la littérature médicale dément l'argument selon lequel un TDA-H ne pourrait pas se manifester seulement à l'âge adulte et expliqué de quelle manière ce trouble se traduisait chez son patient, dont il a souligné les extrêmes difficultés dans sa vie personnelle, qui avaient pour conséquence concrète une accumulation de dettes à hauteur de CHF 200'000.-.

Le témoin a émis l'avis que, dans un milieu structuré, stable, offrant des horaires réguliers et ne requérant que des tâches spécifiques et relativement simples, son patient pourrait travailler à 50% et, relativement vite, augmenter ce taux à 80%, voire 100%, à condition qu'on puisse lui offrir un cadre de vie stable et une certaine sérénité par rapport à sa situation administrative et financière. À cet égard, il a révélé qu'une demande de mise sous curatelle était en cours.

En excluant tous les éléments extra-médicaux (dettes et pression administrative), son patient était capable de travailler à 100% dans un poste adapté, mais on ne pouvait faire abstraction des conséquences de sa situation financière désastreuse sur son psychisme.

o. Entendu en comparution personnelle le même jour, le recourant a expliqué que c'est un psychiatre du Centre du sommeil, consulté en raison d'apnées, qui a soupçonné le diagnostic.

Au fil des ans, il a mis en place un certain nombre de stratégies pour surmonter ses difficultés. C'est ainsi qu'il a pris l'habitude de prendre des notes régulièrement lorsqu'il doit faire face à trop de stimuli.

S'agissant du poste de chef de produits qu'il a occupé à la I______, le recourant a allégué que, contrairement à ce qu'a relaté l'expert, il n'impliquait aucune activité administrative. Il se contentait d'acheter et de vendre des plantes.

Il peut à la fois être très performant dans certains domaines et totalement inapte dans d'autres, notamment dans le domaine administratif. Ainsi, il est parfaitement bilingue, ce qui ne l'a pas empêché d'avoir de très mauvaises notes en allemand lors de sa scolarité.

Le recourant a indiqué qu'il adorait le dernier poste qu'il avait occupé, à la graineterie du Jardin botanique, où il était très performant et remplissait ses objectifs. Cela s'est mal terminé en raison d'un mobbing, sans lien avec ses difficultés. Il souhaiterait retrouver un tel poste, dont il pense qu'il pourrait l'exercer. Ce qui lui pose problème, ce sont les tâches ennuyeuses et répétitives. En revanche, la question de la gestion de ses tâches administratives au quotidien demeurerait.

p. Par pli du 3 décembre 2021, le Prof. E______ a communiqué à la Cour de céans un certain nombre d’articles concernant le TDA-H, lesquels ont été communiqués aux parties.

q. Les autres faits seront repris - en tant que de besoin - dans la partie "en droit" du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

4.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

5.             Le litige porte sur le droit éventuel du recourant à des prestations de l'assurance-invalidité, plus particulièrement sur la question de savoir si la situation s'est péjorée depuis la décision rendue par l'intimé en date du 25 février 2010, au point d'ouvrir un droit aux prestations à l'intéressé.

6.              

6.1 L’art. 17 al. 1er LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Il convient ici de relever que l’entrée en vigueur de l’art. 17 LPGA, le 1er janvier 2003, n’a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés sous le régime de l’ancien art. 41 LAI, de sorte que ceux-ci demeurent applicables par analogie (ATF 130 V 343 consid. 3.5).

6.2 Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l'assuré rend plausible que son invalidité ou son impotence s'est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 17 LPGA; art. 87 al. 3 et 4 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI]). Cette exigence doit permettre à l'administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 130 V 68 consid. 5.2.3, 117 V 200 consid. 4b et les références)

6.3 Lorsque l'administration entre en matière sur la nouvelle demande, elle doit examiner l'affaire au fond et vérifier que la modification de l'invalidité ou de l'impotence rendue plausible par l'assuré est réellement intervenue; elle doit donc procéder de la même manière qu'en cas de révision au sens de l'art. 17 LPGA c'est-à-dire en en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale de rente et les circonstances régnant à l'époque de la décision litigieuse (ATF 130 V 351 consid. 3.5.2 ; 125 V 369 consid. 2 et la référence; 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b) afin d'établir si un changement est intervenu.

6.4 Si l'administration arrive à la conclusion que l'invalidité ou l'impotence ne s'est pas modifiée depuis sa précédente décision, entrée en force, elle rejette la demande. Dans le cas contraire, elle doit encore examiner si la modification constatée suffit à fonder une invalidité donnant droit à prestations, et statuer en conséquence. En cas de recours, le même devoir de contrôle quant au fond incombe au juge (ATF 117 V 198 consid. 3a, 109 V 114 consid. 2a et b).

 

7.              

7.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

7.2

7.2.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel la CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

7.2.2 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2; ATF 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2)

7.2.3 L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

7.2.4 Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

7.3 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-          Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.     Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2) 

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-          Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

8.              

8.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, qui - en tenant compte des facteurs incapacitants externes, d’une part, et du potentiel de compensation (ressources), d’autre part -, permettent d’estimer la capacité de travail réellement réalisable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).

8.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).

8.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

8.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

8.3.2 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

8.3.3 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

9.             En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

10.         En l'espèce, l'intimé a nié toute incapacité de travail, se fondant pour cela sur les conclusions de l'expertise du Dr H______, dont il note qu'il a expliqué les raisons qui l’avaient fait s’éloigner de celles du Dr E______.

Le recourant conteste quant à lui les conclusions de l'expert, auquel il reproche en substance de sous-estimer ses difficultés, notamment à assumer son ménage. Il allègue qu'il néglige ses obligations administratives depuis toujours, relève des inexactitudes dans la relation de la manière dont ont pris fin ses rapports de travail, explique avoir cessé de prendre de la Ritaline parce que celle-ci avait sur lui des effets secondaires insupportables (tachycardie) et souligne que les problèmes qu'il rencontre ne sont pas ceux de "tout le monde", comme il fait grief à l'expert de l'avoir estimé.

11.         Il convient avant tout d'examiner la valeur probante du rapport de l'expert H______.

Au plan formel, la Cour de céans constate que ce document remplit les réquisits jurisprudentiels, dans la mesure où il se fonde sur une anamnèse détaillée, un examen clinique du recourant et tient compte des plaintes rapportées par ce dernier. Il a été établi en pleine connaissance du dossier et ses conclusions, dûment motivées, ne laissent pas apparaître de contradiction.

Quant aux conclusions de l'expert, il convient de s'y rallier en tant qu'il nie toute incapacité de travail en lien avec le diagnostic de TDA-H. En effet, ainsi que le fait remarquer l'expert, les troubles cognitifs mis en évidence doivent être considérés comme légers, ce que confirment tant Mme G______, dans son bilan d'examen neuropsychologique, que le Prof. E______ lui-même, dans son rapport du 28 octobre 2019, puisqu'il parlait de "léger déficit au niveau de l'attention soutenue" et d'une "légère impulsivité".

Certes, selon Mme G______, de ces troubles légers découlent des limitations fonctionnelles (une diminution significative des capacités d’adaptation et d’autonomie de l’assuré dans les situations complexes, de sorte qu’il lui faut éviter les fortes contraintes temporelles, les situations de doubles tâches ou de multiples tâches successives, les interférences, les situations de stress, les activités sollicitant ses capacités d’organisation, de prises d’initiatives et d’autocontrôles, et privilégier les activités routinières et les horaires flexibles). Néanmoins, la neuropsychologue considère qu'une reprise d'activité dans le champ d'expérience de l'assuré paraît réaliste. Il est vrai qu'elle évalue cette capacité de travail à 50%, pour, explique-t-elle, pallier les difficultés cognitives retenues et éviter une nouvelle décompensation psychique. Dans le même temps, la neuropsychologue énumère toutefois les nombreuses ressources de l'intéressé : un langage oral et écrit fonctionnel, une aptitude à assumer des tâches sollicitant les aptitudes visuo-constructives et visuo-perceptives (lectures et dessins de plans / schémas simples), de bonnes ressources intellectuelles et de capacité d’analyses et d’introspection démontrées par le parcours de l’assuré et les observations cliniques. L'argumentation de l'expert psychiatre qui s'écarte de l'évaluation réduite à 50% de la capacité de travail de l'assuré par Mme G______ et le Prof. E______ apparaît dès lors convaincante. Ainsi qu'il le relève, l'assuré peut suivre une conversation, se concentrer sur de nombreuses activités intellectuelles, il n'y a pas d’oublis majeurs, ni de labilité émotionnelle. La résistance au stress est possible. Il n’y a pas d’impulsivité marquée, se traduisant par exemple par des achats ou des investissements financiers non réfléchis ou une conduite dangereuse. L’expert relève que l’assuré n’a pas changé fréquemment d’emploi, qu’il n’est pas souvent en colère, n’a pas d’antécédent d’abus de substances et en tire la conclusion que les critères de gravité requis ne sont pas remplis. Les ressources sont bien disponibles chez un assuré qui ne souffre d'aucun trouble de la personnalité. L'expert note que l’assuré a su s’adapter à certaines règles et routines de son activité professionnelle comme en témoignent les éléments objectifs ressortant de son certificat de travail du 20 octobre 2011. L’assuré n’a pas dû s’acquitter de certaines tâches d’administration, mais a été tout à fait apte à gérer les commandes, la gestion des graines, réaliser un index de graines et avoir un bon contact avec la clientèle. Rien n’indique que l’assuré ne serait pas capable de s’adapter aux règles et aux routines de sa profession. La flexibilité et les capacités d’adaptation sont peut-être légèrement limitées, mais l’assuré n’a pas de raison d’envisager un changement d’activité. Il dispose de nombreuses compétences professionnelles, ainsi que l'a d'ailleurs démontré le bilan du CEBIG effectué dans le cadre de la première demande de prestations. Sa capacité de jugement n’est pas altérée. L’endurance est relative à son âge, mais en tout cas pas diminuée dans son activité habituelle. Il n’a pas de problème relationnel avec des tiers, gère ses besoins personnels et ses déplacements. En définitive, ces éléments ont conduit l'expert à nier l'existence de troubles psychiques incapacitants et, par voie de conséquence, d'une incapacité de travail significative dans l’activité habituelle, étant rappelé qu'il n'y a pas eu de décompensation dépressive depuis 2007 – ce qui n'est pas contesté.

Le Prof. E______, longuement entendu en audience, a d'ailleurs fini par en convenir, admettant que, dans un milieu structuré, stable, offrant des horaires réguliers et ne requérant que des tâches spécifiques et relativement simples, son patient pourrait travailler à 50% et, relativement vite, augmenter ce taux à 80%, voire 100%. Force est de constater que les conditions d'une telle capacité de travail évoquées par le professeur (un cadre de vie stable et une certaine sérénité administrative et financière que pourrait lui procurer une mise sous curatelle de gestion) ne relèvent pas de l'assurance-invalidité. Le témoin en a d'ailleurs convenu en précisant que, si l'on excluait tous les éléments extra-médicaux (dettes et pression administrative), son patient était capable de travailler à 100% dans un poste adapté.

Le médecin-traitant est d'ailleurs parvenu à des conclusions similaires en reconnaissant à l'assuré une capacité de 100% dans un poste adapté décrit comme consistant en travaux de jardinage légers, de préférence pas en tant qu'indépendant.

Au vu de ces éléments, même si, comme l'affirme le Prof. E______, le TDA-H a commencé à entraver de façon notable son patient dans son activité de référence « depuis le début de l’âge adulte », force est de constater que cela ne l'a pourtant pas empêché d'exercer des années durant – près de dix ans - une activité appréciée d'horticulteur pour le B______ du jardin botanique, dans laquelle le recourant a souligné s'être montré très performant et avoir rempli ses objectifs, rappelant que si cela s'était mal terminé, c'était en raison d'un mobbing, sans lien avec ses difficultés. L'intéressé a également convenu que, depuis son suivi aux HUG, sa situation s'était bien améliorée (cf. courrier du 15 mars 2021).

Dès lors, si les conclusions de l'expert estimant que le recourant ne rencontre aucune limitation dans ses tâches habituelles et la tenue de son ménage paraissent, elles, peu crédibles au vu des faits relatés par le professeur et de la nécessité d'une demande de mise sous curatelle de gestion, il apparaît en revanche que, dans un poste adapté de salarié tel que celui qu'il a occupé plusieurs années jusqu'à son licenciement, le recourant a conservé une pleine capacité de travail.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que l'intimé a conclu à l'absence d'incapacité de travail et, par conséquent, de perte de gain et nié le droit à une rente d'invalidité.

12.         Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté et le recourant condamné au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

 

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le