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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1875/2021

ATAS/694/2022 du 09.08.2022 ( LAA ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1875/2021 ATAS/694/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 août 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Philippe NORDMANN

recourant

contre

HELSANA ASSURANCES SA, représentée par son département Droit & Compliance, sise avenue de Provence 15, Lausanne

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1954, est associé gérant de la société à responsabilité limitée Optique B______ et photo C______ Sàrl, à parts égales, aux côtés de son épouse, Madame D______. Il est également lié à son entreprise par un contrat de travail et s’est assuré, à ce titre, auprès de HELSANA ASSURANCES SA (ci-après : l’assurance-accidents ou l’intimée).

b. Par courrier du 3 décembre 2014, l’assuré a sollicité la prise en charge, par l’assurance-accidents, au titre de maladie professionnelle, de son atteinte dermatologique.

En annexe à ce courrier figuraient :

-        La motivation de la décision de l’office de l’assurance-invalidité de Genève (OAI) du 6 octobre 2006, aux termes de laquelle un quart de rente était octroyé à l’assuré et ce dès le 1er janvier 2001 en raison de l’atteinte précitée, le degré d’invalidité étant de 45% après comparaison des revenus ;

-        Un courrier du 12 novembre 2014 du docteur E______, spécialiste FMH en médecine interne et médecin traitant de l’assuré, dont il ressort que ce dernier souffrait d’une allergie, sous la forme d’une dermatite de contact aux métaux des montures de lunettes, induisant une invalidité de 45%. Pour le médecin précité, il s’agissait d’une maladie professionnelle relevant de la compétence de l’assurance-accidents.

c. Suite à cette annonce, l’assurance-accidents a interpelé, par courrier du 4 février 2015, la division de médecine du travail de la caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (SUVA) afin qu’elle se détermine sur l’existence – ou non – d’une maladie professionnelle.

d. Après plusieurs échanges de courriers, la doctoresse F______, médecin du travail auprès de la SUVA, a qualifié, dans des courriers datés des 24 février et 12 décembre 2016, l’atteinte de l’assuré de maladie professionnelle.

e. Parallèlement à ses échanges avec la SUVA, l’assurance-accidents a mandaté la Fiduciaire G______ SA pour une expertise comptable. Il ressort notamment de son rapport du 24 mai 2018, que le revenu de l’assuré, de CHF 72'000.- par année, n’avait pas fluctué. L’aggravation de la maladie dès 2012 n’avait pas eu de conséquences directement perceptibles dans les résultats de l’entreprise, dès lors que ceux-ci s’étaient détériorés, dans un premier temps, pour la partie « Photo » et non pas « Optique », étant précisé que l’assuré travaillait dans ce dernier secteur uniquement.

B. a. Par décision du 8 janvier 2021, l’assurance-accidents a implicitement laissé ouverte la question de la qualification de maladie professionnelle de l’atteinte dermatologique. Elle a en revanche refusé de prester, au motif que l’assuré ne pouvait justifier d’une perte de gain. En effet, il avait continué à travailler à 100% en tant que responsable du magasin. Il pouvait exécuter ses tâches de manière relativement indépendante. Enfin, les pièces comptables ne permettaient pas de déterminer si et quand ses troubles auraient eu un impact sur la marche financière de son commerce et, le cas échéant, de le quantifier.

b. Les 8 février et 29 mars 2021, l’assuré, sous la plume de son conseil, s’est opposé à la décision précitée, concluant exclusivement à la qualification de maladie professionnelle de l’atteinte dermatologique.

c. Par décision sur opposition du 29 avril 2021, l’assurance-accidents a confirmé sa décision du 8 janvier 2021, relevant, d’une part, qu’une maladie professionnelle avait été reconnue du point de vue médical et qu’afin d’en établir les conséquences économiques, une enquête économique avait été confiée à la fiduciaire susmentionnée et, d’autre part, que comme elle l’avait déjà relevé dans sa décision querellée, le droit aux prestations d’assurance avait été nié faute de preuve de pertes économiques.

C. a. Le 31 mai 2021, sous la plume de son conseil, l’assuré a interjeté recours contre la décision sur opposition du 29 avril 2021, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l’allocation, dès la date que la Chambre de céans établira, d’une part, d’une rente d’invalidité de 100% calculée sur le salaire assuré de CHF 72'000.-, avec intérêts à 5% dès l’échéance de chacune des rentes et, d’autre part, d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 20%. À l’appui de ses conclusions, le recourant a principalement invoqué une perte de gain due à son atteinte dermatologique.

b. L’intimée a répondu en date du 15 juillet 2021 et a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours, considérant en substance que le recourant n’avait pas démontré que sa baisse de rendement et de chiffre d’affaires serait en relation de causalité avec la maladie professionnelle, à savoir l’atteinte dermatologique. Quant au taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, il n’avait aucun fondement médical et résultait de simples spéculations personnelles.

c. Par réplique du 6 octobre 2021 et par duplique du 14 octobre 2021, le recourant, respectivement l’intimée, ont confirmé leurs précédentes conclusions.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où la maladie professionnelle est survenue avant cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis à l'ancien droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016.

4.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA).

5.             À titre liminaire, il convient de déterminer l’objet du litige.

5.1. L'art. 52 al. 1 LPGA prévoit que les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure. Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours (art. 56 al. 1 LPGA). La procédure d'opposition est obligatoire et constitue une condition formelle de validité de la procédure de recours de droit administratif subséquente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 279/03 du 30 septembre 2005 consid. 2.2.2, in SVR 2006 ALV n° 13 p. 43 ; cf. aussi ATF 130 V 388).

L'opposition est un moyen de droit permettant au destinataire d'une décision d'en obtenir le réexamen par l'autorité administrative, avant qu'un juge ne soit éventuellement saisi (ATF 125 V 118 consid. 2a; Grisel, Traité de droit administratif, vol. II, p. 939). La procédure d'opposition porte sur les rapports juridiques qui, d'une part, font l'objet de la décision initiale de l'autorité et à propos desquels, d'autre part, l'opposant manifeste son désaccord, implicitement ou explicitement (ATF 119 V 350 consid. 1b et les références). L'autorité valablement saisie d'une opposition devra se prononcer une seconde fois sur tous les aspects du rapport juridique ayant fait l'objet de sa décision initiale, quand bien même la motivation de la nouvelle décision portera principalement sur les points critiqués par l'opposant. La décision sur opposition remplace la décision initiale et devient, en cas de recours à un juge, l'objet de la contestation de la procédure judiciaire (ATF 125 V 415 consid. 2; Meyer-Blaser, Der Streitgegenstand im Streit - Erläuterungen zu BGE 125 V 413,  in Aktuelle Rechtsfragen der Sozialversicherungspraxis, 2001, n° 17 p. 19; Meyer/von Zwehl, L'objet du litige en procédure de droit administratif fédéral,  in Mélanges Pierre Moor, 2005, p. 435 ss; Seiler, Rechtsfragen des Einspracheverfahrens in der Sozialversicherung [Art. 52 ATSG],  in Sozialversicherungsrechtstagung 2007, n° 10.5 p. 99 sv.).

5.2. L'objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui constitue, d'après les conclusions du recours, l'objet de la décision effectivement attaquée (ATF 131 V 164 consid. 2.1 p. 164; 125 V 413 consid. 1b et 2 p. 414). Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1, 125 V 414 consid. 1A, 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).

6.             En l'espèce, dans sa décision du 8 janvier 2021, l’intimée a refusé tout droit aux prestations d’assurance selon la LAA. Par courriers des 8 février et 29 mars 2021, le recourant a formé opposition à la décision précitée et a conclu à ce que son atteinte dermatologique soit considérée comme une maladie professionnelle. Dans sa décision sur opposition du 29 avril 2021, l’intimée a admis la qualification de maladie professionnelle, mais a refusé tout droit à une rente faute de perte de gain. Dans son recours du 31 mai 2021, l’assuré conclut à l’annulation de la décision sur opposition précitée et à l’octroi, d’une part, d’une rente d’invalidité de 100% calculée sur un salaire assuré de CHF 72'000.-, avec intérêts à 5% et, d’autre part, d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 20%.

Force est toutefois de constater que la question de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité n’a pas été abordée dans la décision sur opposition querellée, cette dernière se limitant à l’examen du droit à une rente d’invalidité. C’est donc uniquement cette dernière prestation qui fait l’objet de la contestation et, partant, de la présente procédure judiciaire, à l’exclusion de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, pour laquelle aucune décision sur opposition n’a été rendue.

Partant, le présent litige porte uniquement sur le droit du recourant à une rente d’invalidité, singulièrement sur l’existence d’une perte de gain, les conclusions tendant à l’allocation d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité étant irrecevables, faute de décision sur opposition sur ce point.

Cela étant, l’intimée sera invitée à rendre une décision sur opposition dûment motivée sur la question de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité.

7.              

7.1. Aux termes de l’art. 1a al. 1 LAA, sont notamment assurés à titre obligatoire conformément à la loi : les travailleurs occupés en Suisse, y compris les travailleurs à domicile, apprentis, stagiaires, volontaires, ainsi que les personnes travaillant dans des écoles de métiers ou des ateliers protégés (let. a). Le Conseil fédéral peut étendre l’assurance obligatoire aux personnes dont la situation est analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail. Il peut exempter de l’assurance obligatoire certaines personnes, notamment les membres de la famille du chef de l’entreprise qui collaborent à celle-ci, les personnes occupées de manière irrégulière, ainsi que les personnes bénéficiaires de privilèges, d’immunités et de facilités visées à l’art. 2 al. 2 de la loi sur l’État hôte (al. 2).

Selon l’art. 1 de l’ordonnance sur l’assurance-accidents (OLAA - RS 832.202) est réputé travailleur, selon l’art. 1a al. 1 LAA, quiconque exerce une activité lucrative dépendante au sens de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS - RS 831.10).

Le rapport d’assurance découle de la loi. Il ne dépend pas d’une décision d’affiliation, de la conclusion d’un contrat d’assurance ou encore d’une déclaration de l’employeur. Peu importe au demeurant que les primes d’assurance aient ou non été payées (Jean-Maurice FRESARD / Margit MOSER-SZELESS, L’assurance-accidents obligatoire in  Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd., Bâle 2016, n. 7 p. 900).

7.2. L’art. 4 al. 1 LAA prévoit que les personnes exerçant une activité lucrative indépendante et domiciliées en Suisse, ainsi que les membres de leur famille qui collaborent à l'entreprise, peuvent s'assurer à titre facultatif, s'ils ne sont pas assurés à titre obligatoire. Selon l’art. 5 LAA, les dispositions sur l’assurance obligatoire s’appliquent par analogie à l’assurance facultative (al. 1). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions complémentaires sur l’assurance facultative. Il réglemente notamment l’adhésion, la démission et l’exclusion ainsi que le calcul des primes (al. 2).

Dans l’assurance facultative, le rapport d'assurance se fonde sur un contrat écrit qui fixe notamment le début, la durée minimale et la fin du rapport d'assurance (art. 136 OLAA). Il s'agit d'un contrat d'assurance de droit public qui doit être interprété, dans le cadre des limites fixées par la loi, de la même manière qu'un contrat de droit privé, à savoir selon la réelle et commune intention des parties, respectivement selon le principe de la confiance (arrêt du Tribunal fédéral 8C_200/2017 du 2 mars 2018 consid. 3.1).

7.3. Le point de savoir si l'on a affaire, dans un cas donné, à une activité indépendante ou salariée ne doit pas être tranché d'après la nature juridique du rapport contractuel entre les partenaires. Ce qui est déterminant, ce sont bien plutôt les circonstances économiques (arrêt du Tribunal fédéral 9C_213/2016 du 17 octobre 2016 consid. 3.2). Les rapports de droit civil peuvent certes fournir quelques indices, mais ils ne sont pas déterminants. D’une manière générale, est réputé salarié celui qui dépend d’un employeur quant à l’organisation du travail et du point de vue de l’économie de l’entreprise, et ne supporte pas le risque encouru par l’entrepreneur (ATF 123 V 161 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_796/2014 du 27 avril 2015 consid. 3.2). Est indépendant celui qui exerce son activité selon sa propre organisation librement choisie – reconnaissable de l'extérieur – et à ses propres risques et profits (arrêt du Tribunal fédéral 8C_658/2007 du 26 septembre 2008 consid. 2). Ces principes ne conduisent cependant pas à eux seuls à des solutions uniformes, applicables schématiquement. Les manifestations de la vie économique revêtent en effet des formes si diverses qu'il faut décider dans chaque cas particulier si l'on est en présence d'une activité dépendante ou indépendante en considérant toutes les circonstances de ce cas. Souvent, on trouvera des caractéristiques appartenant à ces deux genres d'activité. Pour trancher la question, on se demandera quels éléments sont prédominants dans le cas considéré (ATF 114 V 65 consid. 2a). 

Une personne assurée peut exercer plusieurs activités lucratives en parallèle et être assujettie simultanément comme salariée et comme indépendante. Lorsque cela est le cas, il y a lieu de se demander pour chacun des revenus réalisés si celui-ci provient d’une activité salariée ou indépendante (ATF 122 V 169 consid. 3b).

Selon la jurisprudence, le gérant ou le dirigeant d'une entreprise employé par cette dernière est, même s'il a dans les faits une position d'actionnaire unique ou majoritaire et a une influence déterminante sur la marche des affaires, formellement un travailleur salarié de la société. Cependant, ce ne sont pas les rapports de droit civil qui sont déterminants pour déterminer le statut d'une personne du point de vue des assurances sociales, mais bien la position économique. La question de savoir si une personne a une influence déterminante sur la politique de l'entreprise et le développement de celle-ci - et doit ainsi être considérée comme tirant ses revenus d'une activité indépendante - doit être examinée sur la base de critères tels que le cercle des actionnaires, la participation au capital social, la composition du conseil d'administration, le taux d'activité des actionnaires et leur fonction dans la société (arrêts du Tribunal fédéral 8C_121/2017 du 5 juillet 2018, publié in SVR 2019 UV n° 3 p. 9, consid. 7.1 ; 9C_453/2014 du 17 février 2015 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 185/02 du 29 janvier 2003 consid. 3.1).

7.4. Le Tribunal fédéral a récemment confirmé un arrêt de la Cour des assurances sociales du canton du Valais retenant qu’un associé et directeur d’une Sàrl, disposant de la signature individuelle, avait une fonction assimilable à un travailleur indépendant, étant donné notamment que la charge essentielle du travail afférent au lancement de la société lui avait incombé et qu’il avait supporté une partie du risque de l'entrepreneur lors du lancement de sa société. En outre, l'intéressé avait lui-même admis détenir le pouvoir de décision (arrêt du Tribunal fédéral 8C_331/2017 du 8 mars 2018 consid. 4.2).

Le Tribunal fédéral a nié l'aptitude au placement d'un assuré qui avait créé sa propre Sàrl, constatant que ce dernier n'avait en réalité jamais cessé son activité indépendante depuis son inscription au chômage (arrêt du Tribunal fédéral 8C_435/2010 du 25 janvier 2011).

L’associé gérant d’une Sàrl, qui participe à l’exploitation de la société, doit être assimilé, sous l’angle de la réalité économique, à une personne de condition indépendante (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 224/01 du 13 décembre 2002 consid. 4.3 ; ATF 126 V 212 consid. 2b ; DTA 1998 n° 32 p. 177 consid. 4a et b). Tel est le cas également lorsque l’activité n’est pas rémunératrice (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 224/01 du 13 décembre 2002 consid. 4.3).

La personne qui possède l'intégralité du capital social d'une Sàrl et qui est, ainsi, juridiquement fondée à prendre toutes les décisions concernant sa société a un statut indépendant. Elle ne peut par conséquent pas être assurée à titre obligatoire à l'assurance-accidents (ATAS/1123/2018 du 30 novembre 2018).

7.5. Sont considérés comme travailleurs indépendants, les propriétaires d'une entreprise, d'une exploitation et d'un commerce (OFAS, Directives sur les cotisations des travailleurs indépendants et des personnes sans activité lucrative dans l’AVS, AI et APG [DIN], ch. 1005).

Une personne peut être considérée comme exerçant une activité indépendante sans égard au rôle qu'elle joue effectivement dans l'entreprise et de l'usage qu'elle fait des pouvoirs qui lui sont légalement conférés. Dans le doute, est réputée travailleur indépendant la personne imposable pour le revenu de l'entreprise, du commerce ou de l'exploitation ou, en l'absence d'obligation fiscale, celle qui gère l'affaire à son propre compte (ch. 1010 et 1011 DIN).

Les notions d’activité lucrative dépendante et indépendante propres au droit de l’AVS s’appliquent également à l’assurance-chômage obligatoire, à la prévoyance professionnelle et à l’assurance-accidents obligatoire (OFAS, Directive sur le salaire déterminant dans l'AVS, l'AI et l'APG - DSD - ch. 1040).

8.              

8.1. Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, et sous réserve de dispositions spéciales de la loi, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle.

Selon l'art. 9 al. 1 LAA, sont réputées maladies professionnelles les maladies (art. 3 LPGA) dues exclusivement ou de manière prépondérante, dans l'exercice de l'activité professionnelle, à des substances nocives ou à certains travaux. Le Conseil fédéral établit la liste de ces substances ainsi que celle de ces travaux et des affections qu'ils provoquent.

8.2. Conformément à l'art. 18 al. 1er LAA, si l’assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d’invalidité. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (art. 7 LPGA). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

Il y a encore lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; le taux d'invalidité ne se confond ainsi pas nécessairement avec le taux d'incapacité fonctionnelle déterminé par le médecin, car ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 275 consid. 4a, 105 V 207 consid. 2). Lorsqu'en raison de l'inactivité de l'assuré, les données économiques font défaut, il y a lieu de se fonder sur les données d'ordre médical, dans la mesure où elles permettent d'évaluer la capacité de travail de l'intéressé dans des activités raisonnablement exigibles (ATF 115 V 133 consid. 2, 105 V 158 consid. 1).

9.              

9.1. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.2. La procédure est régie par le principe inquisitoire, d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Car si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences (ATF 117 V 261 consid. 3), sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à l'adverse partie (ATF 124 V 372 consid. 3; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3).

9.3. Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves; ATF 122 II 464 consid. 4a; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b; ATF 122 V 157 consid. 1d).

10.          

10.1. En l’espèce, le recourant est associé gérant de la Sàrl dont il est également le salarié. Du point de vue du droit civil, il doit être considéré comme un employé, soit comme une personne dépendante. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il s’est assuré auprès de l’intimée. Cela étant, en matière d’assurances sociales, ce ne sont pas les rapports de droit civil qui sont déterminants pour déterminer le statut d’un assuré, mais sa position économique. Or, il ressort du dossier que le recourant est associé gérant de la Sàrl à parts égales avec sa femme et que c’est lui qui gérait et dirigeait le magasin d’optique dans lequel il travaillait. Conformément à la jurisprudence en la matière, il doit être considéré comme un indépendant. C’est d’ailleurs ce statut qui lui a été reconnu par l’OAI, sans qu’il n’y ait eu contestation de la part du recourant (cf. ATAS/696/2022).

En tant qu’indépendant, le recourant n’est pas assuré à titre obligatoire auprès de l’intimée comme cela ressort de l’art. 1a LAA a contrario. Afin de bénéficier d’une couverture d’assurance, il aurait dû entreprendre les démarches pour s’assurer facultativement auprès de l’intimée, en concluant un contrat écrit fixant notamment le début, la durée minimale et la fin du rapport d'assurance. Or, rien ne permet de considérer que le recourant a effectivement effectué de telles démarches : la décision sur opposition querellée ne mentionne pas l’existence d’un tel contrat ; le dossier ne comprend pas de contrat d’assurance écrit ; la quasi-totalité des courriers adressés par l’intimée au recourant se réfère à l’assurance-accidents obligatoire ; le recourant s’est déclaré en tant que salarié, au même titre que les autres employés.

Par conséquent, en tant que le recourant n’a pas conclu d’assurance-accidents facultative, la couverture d’assurance fait défaut et il ne peut prétendre à des prestations relatives à sa maladie professionnelle (voir dans le même sens les ATAS/840/2021 du 18 août 2021 et ATAS/1123/2018 du 30 novembre 2018).

10.2. La Chambre de céans relève encore que le résultat serait le même si l’on devait accorder au recourant le statut de dépendant. En effet, dans cette hypothèse, force est de constater que le recourant n’a pas subi d’incapacité de gain, le salaire perçu depuis la création de la société étant de CHF 72'000.-, sans que ce montant n’ait varié suite à l’apparition de l’atteinte dermatologique comme cela ressort de l’extrait du compte individuel du recourant, du rapport d’expertise économique de la fiduciaire et de la déclaration des salaires versés (cf. ATAS/696/2022).

En appliquant donc la méthode de la comparaison des revenus, on constate que le recourant ne subit pas de perte de gain, comme l’a relevé à juste titre l’intimée. Par conséquent, dans la mesure où l’invalidité est une notion économique et non médicale, tant que le recourant continue à réaliser, malgré l’atteinte, un salaire identique à celui qu’il percevait auparavant, il n’y a pas de perte de gain.

La comparaison des revenus avec et sans invalidité conduit donc, en l’état, à un taux d’invalidité de 0%, de sorte que le recourant ne saurait prétendre à une rente d’invalidité.

11.         Au vu de ce qui précède, c’est à juste titre que l’intimée a refusé de prester et le recours sera donc rejeté.

Par ailleurs, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause devant une juridiction de première instance n'ont en principe pas le droit à une indemnité de dépens (ATF 126 V 149 consid. 4).

Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le