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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/916/2021

ATAS/383/2022 du 29.04.2022 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/916/2021 ATAS/383/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 avril 2022

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à CHÂTELAINE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Maxime CLIVAZ

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1989, a obtenu un CFC de coiffeur en 2011 après un apprentissage de trois ans.

b. De septembre 2012 à avril 2013, il a effectué une formation de professeur de fitness. Il a obtenu des certificats « FISAF », de « group fitness instructor » (17 décembre 2012), de « fitness training instructor » (17 décembre 2012) et de « personal trainer » (26 avril 2013). Par la suite, il a obtenu plusieurs certificats « LesMills » attestant de formations dans le domaine du coaching sportif, le dernier datant de février 2016.

c. Du 1er février 2014 au 30 juin 2014, il a travaillé en qualité de moniteur de fitness pour la société B______. Du 18 mai 2015 au 31 mars 2019, il a travaillé pour la société C______ SA en qualité d’instructeur de fitness pour un salaire annuel de CHF 13'562.35.

d. Il bénéficie de prestations de l’hospice général depuis le 1er décembre 2014.

B. a. Le 18 mai 2011, l’assuré a effectué une IRM en raison de douleurs lombaires. L’examen a révélé une hernie discale L4-L5 et L5-S1, ainsi qu’une dégénérescence discale. Il a bénéficié d’un traitement conservateur avec un lombostat et des exercices de renforcement lombaire.

b. L’assuré a subi une nouvelle IRM le 12 septembre 2018.

c. Selon un rapport médical du 10 décembre 2018, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a relevé que les lombalgies avaient commencé en 2011 alors qu’il travaillait en qualité de coiffeur. Une IRM effectuée alors avait démontré des discopathies lombaires pour lesquelles l’assuré avait bénéficié d’un traitement conservateur. Depuis septembre 2018, il était à nouveau confronté à des lombalgies d’intensité croissante, associée à des douleurs au niveau des genoux. La symptomatologie douloureuse à laquelle était confronté l’assuré depuis quelques années était à mettre dans le cadre de la lombalgie discogénique sur une double discopathie. Une indication opératoire n’était pas à prendre en considération. Le médecin a insisté sur l’importance de diminuer son activité physique et notamment les exercices qu’il devait effectuer dans le cadre de son activité professionnelle. Une reconversion professionnelle était indispensable.

d. Son médecin traitant, le docteur E______, médecin praticien FMH, a attesté d’une incapacité de travail totale depuis le 10 septembre 2018.

C. a. Le 28 novembre 2018, l’assuré a rempli un formulaire de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) de demande de mesures professionnelles.

b. Par courrier du 10 décembre 2018, l’assuré a expliqué qu’il souffrait depuis plusieurs années de douleurs au dos et aux genoux. Les douleurs au dos avaient commencé pendant son apprentissage de coiffeur du fait d’être tout le temps debout et souvent penché en avant. On lui avait conseillé de se muscler pour améliorer sa situation. Il avait alors découvert le fitness et avait décidé de changer de métier. Les douleurs aux genoux étaient apparues en 2013. Une IRM, réalisée en 2018, avait révélé une hernie discale.

c. Dans un rapport médical du 14 mars 2019, le Dr D______ a confirmé son diagnostic de lombalgies chroniques sévères sur discopathies L4-L5 et L5-S1. Son incapacité de travail pour une activité de coiffeur et d’entraineur de fitness était de 100%. Dans une activité sédentaire, essentiellement exercée en position assise avec la possibilité de se lever et de marcher régulièrement, en évitant des mouvements de flexion extension lombaire ainsi que des mouvements de rotation lombaire répétitive, en évitant de soulever ou porter des charges supérieures à 5 kg de façon répétitive, il pourrait exercer une activité professionnelle d’au moins 50%, voire plus.

d. Le 25 janvier 2020, le Dr D______ a indiqué que, dans une activité adaptée, l’assuré pourrait travailler à 100% en tenant compte des limitations de santé décrites dans ses précédents rapports.

e. Par rapport final du 26 mai 2020, le service médical régional (ci-après : SMR) de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) a retenu que l’assuré présentait des lombalgies depuis 2011, avec intensification des douleurs depuis septembre 2019 impliquant une incapacité de travail totale. Il présentait toutefois une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Les limitations professionnelles étaient les suivantes : activité plutôt sédentaire, exercée essentiellement en position assise, avec la possibilité de se lever et de faire de courtes marches, sans torsion ni rotation du tronc répétées, sans port de charges supérieur à cinq kg et de façon répétitive.

D. a. Par projet de décision du 18 juin 2020, l’OAI a informé l’assuré de son intention de refuser sa demande de prestations. Le statut d’assuré était celui d’une personne se consacrant à temps complet à son activité professionnelle. L’assuré présentait une incapacité de travail de 100% dans son activité habituelle depuis le 10 septembre 2018 (début du délai d’attente d’un an). Dans une activité adaptée à son état de santé, sa capacité de travail était entière dès février 2019. Sa perte de gain s’élevait à 10%, ce qui était insuffisant pour lui ouvrir le droit à des prestations.

b. Dans un avis médical du 16 novembre 2020, le SMR a retenu que l’activité de coiffeur n’était pas compatible et donc non exigible avec les limitations fonctionnelles retenues dans son rapport du 26 mai 2020. Toutefois, avant le 10 septembre 2018, aucun élément médical objectif ne permettait de dire que l’activité de coiffeur n’était pas exigible.

c. Par décision du 5 février 2021, l’OAI a refusé de lui accorder une rente d’invalidité et des mesures professionnelles. Tenant compte d’un revenu sans invalidité de CHF 67'657.- (basé sur les statistiques de l’enquête suisse sur la structure des salaires [ESS] du tableau TA1 pour un homme, activités sportives et récréatives, niveau 2) et d’un revenu avec invalidité de CHF 61'503.- (basé sur les statistiques de l’ESS du tableau TA1, pour un homme, ligne total, niveau 1), sa perte de gain s’élevait à 9%.

La formation de coach sportif avait pu être terminée en dépit des limitations fonctionnelles à l’origine de l’interruption de la formation initiale dans le domaine de la coiffure. Il s’était ensuite contenté d’un salaire modeste durant quatre ans, puis avait résilié le contrat de travail qui le liait à C______. Il convenait donc de se référer aux salaires statistiques des ESS pour fixer le revenu de valide. Dans une activité adaptée aux limitations physiques, il était à même d’intégrer le marché du travail dans une activité de contrôle visuel dans le domaine de l’horlogerie ou pharmaceutique, ou dans des tâches simples d’accueil. En tenant compte d’un abattement de 10%, sa perte de gain s’élevait à 9%. Ce taux n’ouvrait pas le droit à des prestations.

E. a. Par acte du 11 mars 2021, l’assuré a interjeté recours devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant à son annulation et à l’octroi de mesures professionnelles. Il a fait valoir qu’il était en début de carrière professionnelle. Les activités envisageables selon l’OAI ne nécessitaient pas de formation, de sorte qu’elles n’offriraient pas de progression salariale comparable aux activités de coiffeur et d’instructeur de fitness pour lesquelles il avait dû suivre des formations. Il se justifiait dès lors d’ignorer la limite des 20% et de constater que l’intéressé avait droit à un reclassement. Cette mesure devait lui permettre de maintenir un gain équivalent à long terme. Au demeurant, bien que le taux de 20% n’était pas pertinent dans sa situation, le taux d’invalidité de 9% retenu par l’OAI était erroné. Le revenu sans invalidité retenu par l’OAI ne correspondait pas aux activités d’un entraineur personnel et instructeur. Il était intéressé par l’obtention d’un CFC d’employé de commerce ou une formation à la Haute école de santé.

b. Par réponse du 9 avril 2021, l’OAI a conclu au rejet du recours. Le taux d’invalidité de 9% était insuffisant pour lui ouvrir le droit à un reclassement. L’assuré n’était pas en début de carrière professionnelle et la mise en œuvre d’une mesure de reclassement ne permettrait pas de procurer une possibilité de gain supérieur à celle que lui offrait ses formations. L’OAI avait appliqué un revenu de coach sportif qualifié et avec expérience pour déterminer le revenu sans invalidité (CHF 67'567.-), lequel correspondait approximativement au revenu pour une activité simple sans formation complémentaire (TA1). L’atteinte à la santé de l’assuré n’était pas un obstacle à ce qu’il choisisse une profession adaptée. Il pouvait exercer différentes activités adaptées qui ne nécessitaient pas de formation complémentaire. Il n’avait pas non plus droit à une mesure d’aide au placement.

c. Par réplique du 6 mai 2021, l’assuré a persisté dans ses conclusions. Le niveau de compétence à prendre en considération pour son activité de coach sportif qualifié était de niveau 3. Âgé de 30 ans en 2019, l’assuré était en début de carrière, étant précisé que les quelques années de travail après la formation constituent un début de carrière.

d. Par duplique du 31 mai 2021, l’OAI a persisté dans ses conclusions, relevant qu’avant l’atteinte à la santé, l’assuré était au bénéfice de prestations de l’hospice général. C’était donc à juste titre qu’il avait retenu un niveau de compétence 2 sur les données de l’ESS (TA1) pour un coach sportif qualifié avec expérience (ligne 90-93).

e. Le 25 juin 2021, l’assuré a persisté dans ses conclusions, rappelant que les interruptions de ses activités professionnelles, ayant conduit à solliciter l’aide sociale, avait été dictées par les atteintes à sa santé.

f. Le 27 septembre 2021, l’assuré a informé la chambre de céans avoir repris très partiellement une activité d’instructeur de fitness, quelques heures par semaine et selon ses limitations. Dès le mois d’octobre 2021, son activité s’effectuerait à raison de 10 heures de cours par semaine. Cette activité ne remettait en aucun cas en question son projet de reconversion et ses conclusions en octroi de mesures professionnelles.

g. La chambre de céans a transmis cette écriture à l’OAI.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA, applicable par renvoi de l’art. 1 al. 1 LAI ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Compte tenu des conclusions et motifs du recours, le litige porte sur le droit du recourant à des prestations de l’assurance-invalidité, en particulier à une mesure d'ordre professionnel.

 

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

3.2 En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées ci-après dans leur ancienne teneur.

4.             Le recourant conteste en premier lieu le taux d’invalidité retenu par l’intimé.

4.1 Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

4.2 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222).

4.3  

4.3.1 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’ESS éditée par l'Office fédéral de la statistique (ci-après : OFS) (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide ; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

4.3.2 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et bb). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb).

4.3.3 Depuis la 10ème édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'OFS par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l'ESS 2012 ; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3 p. 184). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt du Tribunal fédéral 8C_46/2018 du 11 janvier 2019 consid. 4.4 et les références).

4.4 En l’occurrence, il est constant que le recourant a le statut de personne active. Devant la chambre de céans, le recourant ne conteste pas qu’il présente une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Il ne remet pas non plus en cause le revenu avec invalidité retenu par l’intimé, ni l’année de référence pour la comparaison des revenus (2019). S’agissant du revenu sans invalidité, il ne conteste pas sa fixation selon les données statistiques de l’ESS, ce qui est du reste conforme à la jurisprudence précitée. En effet, en 2019, le recourant, au bénéfice de prestations de l’aide sociale, a perçu un revenu ne correspondant manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide. Le recourant conteste, en revanche, le niveau de compétence retenu par l’intimé dans la fixation du revenu sans invalidité. Il estime qu’un coach sportif qualifié doit appréhender des problèmes d’une certaine complexité, en prenant en compte les interactions entre de nombreux domaines (mobilité, diététique, biologie, psychologie, aspects sociaux, animation, ). C’est le lieu de préciser que l’argument soulevé par le recourant ne remet pas en cause le refus d’octroyer une rente d’invalidité. En effet, même à retenir un niveau de compétence 3 dans le cadre du revenu sans invalidité, le recourant présente une invalidité inférieure à 40%. La question reste, en revanche, pertinente pour déterminer si le recourant a droit à une mesure de reclassement. En effet, comme il sera exposé ci-après, le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement est une diminution de la capacité de gain de 20% environ. Or, la prise en compte d’un salaire déterminant pour un niveau de compétence 3, soit CHF 6'395.- (ESS 2018, TA1_skill_level, secteur privé, total pour les hommes, activités récréatives, niveau de compétence 3) dans le cadre du revenu sans invalidité, en lieu et place des CHF 5'356.- retenu par l’intimé, aboutit à un degré d’invalidité supérieur à 20%. En effet, tenant compte d’un revenu avec invalidité, non contesté, de CHF 60'687.- et d’un revenu sans invalidité de CHF 80'721.45 (soit un salaire annuel de CHF 77'430.65.- [tenant compte d’une indexation par un facteur de 0.9 pour 2019] x 41.7 / 40), la perte de gain s’élève à CHF 20'034.45, ce qui correspond à un degré d’invalidité, arrondi, de 25%.

Il ressort du dossier que le recourant a obtenu des certificats « FISAF », de « group fitness instructor » (17 décembre 2012), de « fitness training instructor » (17 décembre 2012) et de « personal trainer » (26 avril 2013). Sur la base de ces certificats, il a été engagé, dans un premier temps, par Let’s Go Fitness, du 1er février 2014 au 30 juin 2014, puis par la société Activ Fitness SA, du 18 mai 2015 au 31 mars 2019. Durant ces périodes, son taux d’activité a oscillé entre 15% et 23%. Dans ses écritures, le recourant ne démontre pas que l’obtention de ses différents certificats impliquait des connaissances approfondies en matière de mobilité, diététique, biologie, psychologie, aspects sociaux et animation. Par ailleurs, force est de constater que l’assuré a exercé son métier de coach sportif à des taux d’activité très faibles. Le compte individuel du recourant atteste, d’ailleurs, de revenus annuels très modestes, variant entre CHF 16'000.- et CHF 22'000.-. Devant la chambre de céans, l’assuré explique certes qu’il a toujours été en recherche d’un taux d’activité maximal et qu’il était en formation en parallèle à son emploi. Il n’en demeure pas moins qu’au vu des taux d’activité exercés, l’intéressé ne peut se targuer d’avoir accumulé une expérience solide et spécialisée dans le domaine du coaching sportif. À cela s’ajoute qu’à la lecture du rapport final de la Fondation IPT du 29 janvier 2020, il n’a ni base informatique, ni connaissances administratives. Dans ces conditions, le recourant ne saurait se prévaloir d’avoir accompli des tâches pratiques complexes et nécessitant un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé. C’est partant à juste titre que l’intimé a retenu le niveau de connaissance 2.

Reste à déterminer si, en dépit d’un degré d’invalidité inférieur à 20%, le recourant peut prétendre à une mesure de reclassement.

5.              

5.1  

5.1.1 Selon l'art. 17 al. 1 LAI, l'assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Est réputé invalide au sens de cette disposition, celui qui n'est pas suffisamment réadapté, l'activité lucrative exercée jusque-là n'étant plus raisonnablement exigible ou ne l'étant plus que partiellement en raison de la forme et de la gravité de l'atteinte à la santé. Le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement est une diminution de la capacité de gain de 20% environ (ATF 139 V 399 consid. 5.3 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références).

5.1.2 Par reclassement, la jurisprudence entend l'ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à la personne assurée une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle générale, l'intéressé n'a droit qu'aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas. En particulier, il ne peut prétendre une formation d'un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l'invalidité sont telles que seule une formation d'un niveau supérieur permet de mettre à profit d'une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé. On notera aussi que si les préférences de l'intéressé quant au choix du genre de reclassement doivent être prises en considération, elles ne sauraient toutefois jouer un rôle déterminant (ATF 139 V 399 consid. 5.4 ;130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références).

5.1.3 Sont réputées nécessaires et appropriées toutes les mesures de réadaptation professionnelle qui contribuent directement à favoriser la réadaptation dans la vie active. L'étendue de ces mesures ne saurait être déterminée de manière abstraite, dès lors qu'elles présupposent un minimum de connaissances et de savoir-faire et que seules entrent en ligne de compte, en vue de l'acquisition d'une formation professionnelle, celles qui peuvent s'articuler sur ce minimum de connaissance. Au contraire, il faut s'en tenir aux circonstances du cas concret. La personne qui peut prétendre au reclassement en raison de son invalidité a droit à la formation complète qui est nécessaire dans son cas, si sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être sauvegardée ou améliorée de manière notable (ATF 124 V 108 consid. 2a p. 110). Une mesure de reclassement ne saurait être interrompue de façon prématurée, aussi longtemps que le but de réadaptation visé peut, dans les limites de la proportionnalité, encore être atteint (ATF 139 V 399 consid. 5.5).

5.1.4 En présence d'un assuré en début de carrière professionnelle et pour lequel les activités adaptées envisagées (sans mesure de réadaptation) relèvent de travaux ne requérant pas de formation ou connaissances particulières, le droit aux mesures de reclassement dans une nouvelle profession ne saurait être subordonné à la limite des 20%. En effet, l'équivalence approximative des possibilités de gain offertes par l'ancienne activité et par la nouvelle ne saurait être réalisée à long terme que si les deux formations ont, elles aussi, une valeur approximativement comparable (ATF 124 V 108 consid. 3b ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_623/2020 du 8 mars 2021 consid. 4 ; 9C623/2020 du 8 mars 2021 consid. 2 ; 8C_808/2017 du 11 janvier 2018 consid. 4 ; 9C_262/2016 du 30 août 2016 consid. 5.2 et 5.3 ; 9C_704/2010 du 31 janvier 2011 consid. 3.1 et les références; voir également MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3e éd. 2014, n. 16 ad art. 17 LAI). Or, selon l'expérience générale de la vie, l'évolution des salaires des personnes avec ou sans formation professionnelle n'est pas la même. L'expérience montre en particulier que dans un grand nombre de catégories professionnelles, le salaire initial des personnes ayant terminé leur apprentissage n'est pas supérieur, ou ne l'est pas de manière significative, aux rémunérations offertes sur le marché du travail pour des activités n'impliquant pas de formation particulière, tandis qu'il progresse d'autant plus rapidement par la suite (ATF 124 V 108 consid. 3b).  

5.2 En l’occurrence, le recourant n’avait que 22 ans lorsque les douleurs lombaires sont apparues pour la première fois alors qu’il terminait son apprentissage de coiffeur. Dans ses écritures, l’intéressé a expliqué que le métier de coiffeur, qui impliquait une position debout prolongée, n’était pas compatible avec ses douleurs au dos. On lui avait alors conseillé de muscler son dos pour améliorer sa situation, ce qui l’avait conduit à changer d’orientation professionnelle. Compte tenu de ces éléments, on peut admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, applicable en assurances sociales, que sans son atteinte à la santé, il aurait continué son métier de coiffeur, pour lequel il avait obtenu un CFC. Certes, le SMR a retenu, dans son avis médical du 16 novembre 2020, qu’aucun élément médical objectif ne permettait de dire que l’activité de coiffeur n’était pas exigible avant le 10 septembre 2018. Il n’en reste pas moins que les examens réalisés en 2011 ont révélé la présence d’une dégénérescence discale et d’une hernie discale (cf. rapport du Dr F______ du 18 mai 2011). Les discopathies lombaires avaient entraîné l’instauration d’un traitement conservateur avec lombostat et des exercices de renforcement lombaire (cf. rapport du Dr D______ du 10 décembre 2018). À cela s’ajoute que les douleurs lombaires sont réapparues en septembre 2018, alors que le recourant n’était âgé que de 29 ans. Le médecin orthopédiste a alors considéré qu’une reconversion professionnelle était « indispensable » (cf. rapport médical du Dr D______ du 10 décembre 2018). Or, à cette époque, le recourant venait de terminer une formation dans le domaine du coaching sportif, le dernier certificat obtenu datant de février 2016. Depuis cette date, le recourant cherchait à augmenter son activité par l’obtention de nouveaux cours à dispenser. Ce début de carrière dans le milieu sportif a toutefois été subitement interrompu par un arrêt de travail complet dès septembre 2018. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que le recourant se trouvait en début de carrière professionnelle au sens de la jurisprudence précitée.

Dans la décision entreprise, l’intimé a repris les limitations fonctionnelles retenues par le médecin orthopédiste (activité plutôt sédentaire, exercée essentiellement en position assise avec la possibilité de se lever et de faire de courtes marches, sans torsion ni rotation du tronc répétés, sans soulever de poids supérieur à 5 kg et de façon répétitive, sans port de charge supérieure à 5 kg et de façon répétitive) et considéré que les activités adaptées envisageables relevaient du niveau 1, soit des tâches physiques ou manuelles simples n'impliquant pas de formation particulière et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes.

Au vu de ces éléments, c’est à tort que l’intimé s'est fondé sur le seul degré d'invalidité pour lui dénier le droit à une mesure de reclassement de l’AI. Il est indéniable que lorsque les lombalgies sont apparues, le recourant était âgé de 22 ans et terminait son apprentissage de coiffeur, pour lequel il a obtenu un CFC. C’est en raison de ses douleurs qu’il s’est réorienté professionnellement et a obtenu plusieurs diplômes d’entraineur sportif. Il se justifie dès lors pleinement de mettre en œuvre une mesure de reclassement pour un assuré encore jeune et au début de sa carrière professionnelle, de façon à lui permettre, à condition que les autres conditions de l'art. 17 LAI soient remplies, de se procurer une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait sa formation professionnelle initiale. Il convient donc d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la cause à l'administration pour qu'elle examine le droit du recourant au reclassement dans une nouvelle profession, compte tenu des considérants qui précèdent, puis rende une nouvelle décision.

6.             Le recours sera donc admis et la décision du 5 février 2021 annulée. La cause sera renvoyée à l’intimé pour examen du droit aux mesures professionnelles et, ceci fait, nouvelle décision.

Le recourant qui obtient gain de cause, assisté d’un conseil, a droit à des dépens de CHF 1'500.-, qui seront mis à la charge de l’intimé (art. 61 let. g LPGA). Un émolument, fixé à CHF 200.-, sera mis à la charge de l’intimé, qui succombe.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision du 5 février 2021.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour réexamen du droit aux mesures d’ordre professionnel et, ceci fait, nouvelle décision sur ce point.

5.        Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de CHF 1'500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le