Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/863/2021

ATAS/1035/2021 du 05.10.2021 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/863/2021 ATAS/1035/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 5 octobre 2021

1ère Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A.      a. Madame A______ (ci-après : l’assurée) a été engagée en tant qu’agente de sûreté par l’Aéroport international de Genève (ci-après   AIG) du 1er avril 2019 au 31 mars 2020 à 80% au département « sûreté - service sûreté passagers » le 15 février 2019 dans le cadre d’un contrat d’auxiliaire.

b. Par courrier du 11 février 2020, le service RH de l’AIG a confirmé à l’assurée que ses rapports de travail se termineraient le 31 mars 2020 conformément aux termes du contrat de travail.

c. L’assurée s’est inscrite à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) le 17 mars 2020, de sorte qu’un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur dès le 1er avril 2020.

d. Par décision du 28 septembre 2020, l’OCE a prononcé à l’encontre de l’assurée une suspension de son droit à l’indemnité d’une durée de neuf jours, au motif que ses recherches personnelles d’emploi étaient insuffisantes en termes de qualité durant les trois derniers mois de son contrat de durée déterminée.

e. L’assurée a formé opposition le 29 septembre 2020. Elle constate qu’il manque dans son dossier ses recherches des mois de janvier et février 2020 et se demande si celles-ci n’ont pas été égarées. Elle les joint à nouveau à son courrier.

f. Par décision du 9 février 2021, l’OCE a partiellement admis l’opposition. Il relève que l’assurée a effectué trois recherches en janvier, huit en février et six en mars, ce qui reste insuffisant, dès lors qu’elles ne se sont pas intensifiées à l’approche de l’arrivée au chômage. Tenant toutefois compte du fait que les informations, données par l’office régional de placement (ci-après : ORP) au début de la période de pandémie, avaient pu prêter à confusion, il a finalement ramené la période de congé à deux mois (sans le mois de mars 2020) et a réduit la durée de la suspension à six jours.

g. L’assurée a interjeté recours le 8 mars 2021 contre ladite décision. Elle explique que la pandémie est arrivée au plus mauvais moment pour elle, car son contrat de travail arrivant à son terme, son employeur en avait profité pour ne pas le renouveler, alors qu’en principe les contrats à durée déterminée de deux ans sont renouvelables d’année en année. Aussi n’avait-elle pas pensé en janvier 2020 qu’elle perdrait son emploi.

h. Dans sa réponse du 9 avril 2021, l’OCE a conclu au rejet du recours.

i. La chambre de céans a ordonné la comparution personnelle des parties le 29 juin 2021. À cette occasion, l’assurée a précisé : « J'ai signé un contrat à durée déterminée du 1er avril 2019 au 31 mars 2020. Il s'agissait d'un contrat conclu pour une année, mais renouvelable pour une année supplémentaire. Chaque employé est ainsi mis au bénéfice d'un contrat d'une durée de deux ans. À l'issue de ces 2 ans, on est engagé sur la base d'un contrat à durée indéterminée. Je ne dispose d'aucun document afin de démontrer ce renouvellement pour une année supplémentaire. C'est en tout cas ce qu'on nous explique quand on est engagé à l'Aéroport ».

j. Invitée par la chambre de céans à produire tout document ou liste de témoins afin de démontrer qu’à l’AIG, les contrats de travail à durée déterminée d’une année sont systématiquement renouvelés pour une année supplémentaire, l’assurée lui a communiqué copie d’un mail de la gestionnaire des RH de Genève Aéroport daté du 4 mars 2021, et aux termes duquel

« Lors du processus de sélection, il vous a été spécifié que selon les besoins du service et selon la qualité de vos prestations professionnelles, ces deux conditions étant cumulatives, votre contrat pourrait être renouvelé pour une année supplémentaire. Cette information ne s’entendait nullement comme un acquis ni une garantie de bénéficier de deux ans d’activité professionnelle au sein de GA.

Enfin, il vous a également été mentionné qu’en cas de nouvellement de ce contrat pour une nouvelle année, si au terme de cette 2ème année, le besoin en effectif était toujours d’actualité et que vos prestations professionnelles donnaient toujours satisfaction, un contrat fixe vous serait proposé ».

L’assurée a ajouté que ses anciens collègues avaient tous été engagés au terme de ces deux ans.

k. Par courrier du 6 août 2021, l’OCE a constaté que, contrairement à ce que soutenait la recourante, elle n’avait pas de certitude quant au renouvellement de son contrat après le 31 mars 2020, de sorte qu’il lui appartenait de rechercher un emploi dès le mois de janvier 2020 et jusqu’à son inscription à l’OCE.

Il a admis que ses efforts en matière de recherches personnelles d’emploi avaient été suffisants en février et mars 2020, compte tenu de la pandémie, mais a persisté à considérer que tel n’était pas le cas en janvier 2020, et a proposé la réduction de la suspension à trois jours.

l. Invitée à indiquer si elle avait ainsi obtenu satisfaction, l’assurée ne s’est pas manifestée.

Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les formes et les délais légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 LPGA ; art. 43 LPCC).

3.        L'objet du litige porte sur le bien-fondé de la suspension - ramenée à trois jours - du droit à l'indemnité de l'assurée pour recherches insuffisantes d'emploi pendant les deux mois de délai de congé précédant son inscription à l'OCE.

4.        Selon l'art. 17 al. 1 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter ou réduire le chômage (ATF 123 V 88 consid. 4c p. 96). Il doit en particulier apporter la preuve de ses efforts en vue de rechercher du travail pour chaque période de contrôle (cf. art. 17 al. 1 phr. 3 LACI). Sur le plan temporel l'obligation de rechercher un emploi prend naissance avant la survenance effective du chômage. Il incombe, en particulier, à un assuré de s'efforcer déjà pendant le délai de congé de trouver un nouvel emploi et, de manière générale, durant toute la période qui précède l'inscription au chômage. Les efforts de recherches d'emploi doivent en outre s'intensifier à mesure que le chômage devient imminent (ATF 139 V 524 consid. 2.1.2 p. 526; arrêt 8C_854/2015 du 15 juillet 2016 consid. 4.2 et les références citées). L’examen des recherches d’emploi porte sur les trois derniers mois précédent le droit à l’indemnité de chômage (Bulletin LACI IC B314).

Le fait de continuer à travailler pour son employeur n'est pas incompatible avec l’accomplissement de recherches d’emploi, dans la mesure où un grand nombre de personnes ne sont pas libérées de leur obligation de travailler pendant le délai de congé et sont dès lors obligées d’effectuer des recherches parallèlement à l’exercice de leur activité lucrative (ATAS/1281/2010 du 8 décembre 2010 consid. 6). Les vacances prises pendant le délai de congé, elles n'entraînent pas ipso facto la suppression de l'obligation de rechercher un emploi (arrêts du Tribunal fédéral 8C_768/2014 du 23 février 2015 consid. 2.2.3; 8C_952/2010 du 23 novembre 2011 consid. 5.1; 8C_399/2009 du 10 novembre 2009 consid. 4.2).

Selon le ch. 7 de l’Aide-mémoire Pandémie / Coronavirus établi par le SECO le 28 mars 2020, les assurés devaient poursuivre leurs recherches d’emploi et les documenter. L’office compétent avait une certaine marge d’appréciation pour évaluer si les recherches en vue de trouver un emploi étaient suffisantes sur le plan qualitatif et quantitatif. Il devait prendre en compte l’ensemble des circonstances propres au cas particulier dans son évaluation. Durant la situation extraordinaire, les personnes au chômage n’avaient plus à produire la preuve de leurs recherches d’emploi. L’assuré devait remettre la preuve des recherches au plus tard un mois après l’abrogation de l’ordonnance 2 COVID-19. La totalité de la durée de validité de l’ordonnance 2 COVID-19 comptait comme période unique de contrôle de manière rétroactive à partir de la période de contrôle de mars 2020, et le contrôle des recherches d’emploi effectuées se déroulerait après l’expiration de cette ordonnance.

La directive n. 4 du SECO du 3 avril 2020, annulant la directive 2020/03 ainsi que les précisions qui s’y rattachaient, prévoyait, s’agissant de l’activité de contrôle et de placement des ORP en cas de pandémie, que la personne assurée était tenue d’entreprendre tout ce qu’on pouvait raisonnablement exiger d’elle pour éviter le chômage ou l’abréger. Elle avait en particulier l’obligation de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’elle a apprise (art. 17 al. 1 LACI).

L’office compétent avait une certaine marge d’appréciation pour évaluer si les recherches en vue de trouver un emploi étaient suffisantes sur le plan qualitatif et quantitatif. Il devait prendre en compte l’ensemble des circonstances propres au cas particulier dans son évaluation.

La situation extraordinaire rendait la recherche d’un emploi convenable extrêmement difficile selon la branche concernée; il convenait d’accorder une grande importance à cette circonstance lors du contrôle en vertu de l’art. 26 al. 3, OACI, et la stratégie de réinsertion, de candidature et de placement devait être revue en conséquence sur le plan quantitatif et qualitatif.

Le but premier de la réinsertion rapide et durable de la personne assurée dans le marché du travail devait toutefois toujours être visé, dans la mesure du possible.

L'assuré doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis (art. 17 al. 1 LACI). Il doit se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral (art. 17 al 2 in fine LACI). Pour juger de la suffisance des efforts consentis par l'intéressé dans ses recherches d'emploi, il doit être tenu compte non seulement de la quantité, mais aussi de la qualité des démarches entreprises (ATF 124 V 231 consid. 4). Sur le plan quantitatif, la jurisprudence considère que dix à douze recherches d'emploi par mois sont en principe suffisantes (ATF 124 V 225). On ne peut cependant pas s'en tenir de manière schématique à une limite purement quantitative et il faut examiner la qualité des démarches de l'assuré au regard des circonstances concrètes, des recherches ciblées et bien présentées valant parfois mieux que des recherches nombreuses (arrêt du Tribunal fédéral 8C_737/2017 du 8 janvier 2018).

L'autorité compétente dispose d'une certaine marge d'appréciation pour juger si les recherches d'emploi sont suffisantes quantitativement et qualitativement. Elle doit tenir compte de toutes les circonstances du cas particulier. Le nombre de recherches d'emploi dépend notamment de la situation du marché du travail et des circonstances personnelles, telles que l'âge, la formation, la mobilité géographique, les problèmes de langue, etc. (Bulletin LACI IC B 316).

Les obligations du chômeur découlent de la loi. Elles n'impliquent ni une information préalable (par exemple sur les recherches d'emploi pendant le délai de congé; cf. ATF 124 V 225 consid. 5b p. 233 et arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 208/03 du 26 mars 2004 consid. 3.1 in DTA 2005 n° 4 p. 58), ni un avertissement préalable.

5.        Le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (art. 30 al. 1 let. c LACI).

Il résulte de l'échelle des suspensions établie par le SECO que lorsque l'assuré a effectué des recherches d'emploi insuffisantes pendant le délai de congé, l'autorité doit infliger une sanction de 3 à 4 jours si le délai de congé est d'un mois, de 6 à 8 jours si le délai de congé est de deux mois et de 9 à 12 jours si le délai de congé est de trois mois ou plus (Bulletin LACI IC D 79/1.A). La chambre de céans doit se limiter à examiner si l'administration a fait un usage critiquable de son pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C 316/07 du 16 avril 2008 consid. 2.2).

6.        En l'espèce, l'assurée a conclu un contrat de travail le 15 février 2019 comme auxiliaire pour une durée allant du 1er avril 2019 au 31 mars 2020. Il est établi qu'elle n’a procédé qu’à trois recherches d’emploi en janvier et huit en février 2020, soit pendant son délai de congé.

Elle a expliqué dans son recours qu'elle avait pensé que son contrat serait renouvelé et a produit, pour preuve, un courriel du 4 mars 2021 rédigé par le gestionnaire des RH de l'employeur. Les explications données dans ce courriel, ne permettent toutefois pas de conclure que les contrats à durée déterminée sont automatiquement renouvelés pour une année supplémentaire. Il est au contraire indiqué que le renouvellement n'était ni acquis ni garanti. Elle ne pouvait en conséquence partir de l'idée que son contrat de travail ne prendrait pas fin au 31 mars 2020.

Elle ne saurait se prévaloir de son ignorance du nombre de recherches à faire par mois, ni du fait qu’elle devait effectuer des recherches d’emploi avant de s’inscrire au chômage, dès lors que les obligations du chômeur découlent de la loi et n'impliquent pas d’information ni avertissement préalables.

Bien qu’exceptionnelle, la période liée au COVID-19 ne l’empêchait pas de rechercher du travail. À teneur des directives 4 et 6 du SECO, l'assurée devait continuer à faire des recherches d’emploi pendant un délai de congé. Ce n’est que le délai pour transmettre la preuve de ses recherches qui a été prolongé.

Le 6 août 2021, l’OCE a proposé la réduction de la suspension à 3 jours. Cette sanction correspond au minimum du barème du SECO en cas de recherches personnelles d'emploi insuffisantes pendant un délai de congé d'un mois avant l'inscription à l'OCE. Il se justifie partant de la retenir.

7.        Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision entreprise réformée, en ce sens que la durée de la suspension est réduite à 3 jours.

8.        La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement, en ce sens que la durée de la suspension est réduite à 3 jours.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Doris GALEAZZI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le