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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/562/2021

ATAS/952/2021 du 16.09.2021 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/562/2021 ATAS/952/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 16 septembre 2021

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en ______ 1959, a déposé une demande de prestations d’invalidité en date du 18 mai 2015 auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : l’OAI ou l’intimé).

2.        Dans le cadre de l’instruction menée par l’OAI, un examen clinique rhumatologique a été pratiqué par le docteur B______, expert médical certifié SIM, en date du 18 novembre 2016. À la suite de cet examen, le médecin a considéré que la capacité de travail exigible dans l’activité habituelle de nettoyeuse professionnelle était de 0% et dans une activité adaptée de 75%, depuis le 20 mai 2010.

3.        Une enquête économique sur le ménage a été réalisée le 10 mai 2017, à l’issue de laquelle l’enquêtrice a noté que la belle-fille de l’assurée venait trois fois par semaine faire deux heures de ménage car l’assurée était incapable de le faire elle-même en raison de douleurs. L’enquêtrice notait une éventuelle incohérence avec les informations données par l’assurée lors de l’expertise médicale, cette dernière n’ayant pas mentionné à l’expert qu’elle avait besoin d’une aide extérieure pour les tâches ménagères.

4.        À l’issue de l’instruction, l’OAI a communiqué à l’assurée un projet de décision de refus de rente d’invalidité en date du 11 mai 2017. Le statut retenu pour l’assurée était celui d’une personne non active, consacrant tout son temps à ses travaux habituels. L’empêchement dans l’accomplissement du ménage était estimé à 6%, ce qui était inférieur au taux de 40%.

5.        Par opposition du 10 juin 2017, l’assurée a contesté le projet de décision, sans toutefois transmettre des documents médicaux pouvant confirmer ses allégations.

6.        Par décision du 4 juillet 2017, l’OAI a confirmé sa décision de refus de rente d’invalidité pour les motifs déjà exposés dans son projet de décision du 11 mai 2017. La décision n’a pas été contestée et est entrée en force.

7.        En date du 21 novembre 2018, l’assurée a déposé une nouvelle demande de prestations d’invalidité, pour les mêmes motifs que précédemment, mentionnant le même médecin traitant soit la doctoresse C______, généraliste.

8.        Le médecin traitant a adressé un courrier au médecin-conseil de l’OAI en date du 17 décembre 2018, rappelant les diagnostics qu’elle avait retenus, par rapport à sa patiente et indiquant qu’il y avait une persistance des douleurs et une péjoration de l’état psychique chez sa patiente de jour en jour, étant précisé que celle-ci lui avait déclaré qu’elle allait voir, dans les prochains jours, un spécialiste en psychiatrie. Le médecin traitant concluait en demandant au médecin-conseil de l’OAI qu’il revoie le cas de l’assurée.

9.        Par décision du 1er juillet 2019, l’OAI a refusé d’entrer en matière sur la demande de prestations. La décision n’a pas été contestée et est entrée en force.

10.    En date du 16 juin 2020, l’assurée a présenté une nouvelle demande de prestations d’invalidité, mentionnant qu’elle avait subi une opération de la hanche et du genou et avait été en traitement auprès des Hôpitaux universitaires de Genève
(ci-après : HUG) du 4 au 9 mars 2020.

11.    Par courrier du 17 juin 2020, l’OAI a rappelé à l’assurée que sa demande ne pouvait être examinée que s’il était rendu plausible que l’invalidité s’était modifiée de façon à influencer ses droits depuis la dernière décision. Aussi, l’assurée devait adresser tous les documents médicaux permettant d’admettre une aggravation de son état de santé dans un délai de 30 jours.

12.    L’assurée a communiqué à l’OAI un compte-rendu opératoire daté du 4 mars 2020 pour la pose d’une prothèse totale de la hanche gauche, pratiquée par le docteur D______, chef de clinique.

13.    Le service médical régional (ci-après : SMR) de l’OAI a rendu un rapport en date du 1er décembre 2020, sous la plume du docteur E______.

Ce dernier rappelait qu’il s’agissait d’une nouvelle demande de prestations suite à la pose d’une prothèse totale de la hanche gauche, les précédentes demandes déposées en 2015 et en 2018 pour des douleurs diffuses ayant abouti à un refus de toutes prestations et un refus d’entrer en matière. Se fondant sur la lettre de sortie du 12 mars 2020, le médecin-conseil constatait que les chirurgiens écrivaient que les suites postopératoires avaient été simples, sans complications, avec une bonne maîtrise des douleurs par le traitement et confirmaient que l’évolution avait été favorable. Compte tenu de la bonne évolution, le médecin-conseil considérait qu’on ne pouvait pas retenir d’aggravation durable de l’état de santé et qu’on devait, par conséquent, reprendre les conclusions précédentes.

14.    Se fondant sur l’avis médical du SMR, l’OAI a communiqué, en date du 2 décembre 2020, un projet de décision de refus d’entrer en matière, considérant que depuis le rejet des précédentes demandes de prestations, l’assurée n’avait pas communiqué de nouvelles pièces permettant de mettre en évidence une aggravation de son état de santé.

15.    Par décision du 27 janvier 2021, l’OAI a confirmé le refus d’entrer en matière, reprenant la motivation du projet de décision du 2 décembre 2020.

16.    Par courrier du 5 février 2021 reçu par l’OAI en date du 15 février 2021, l’assurée a déclaré faire recours contre la décision du 27 janvier 2021, alléguant que l’OAI n’avait pas eu connaissance de tous les éléments de son dossier et ajoutant qu’elle était dans l’incapacité de marcher de longues distances, de prendre les escaliers, de croiser les jambes et qu’elle n’était pas capable de s’étirer afin de prendre un objet en hauteur, ce qui la forçait à demander de l’aide à ses proches. Elle joignait à son recours un certificat médical de la Dresse C______, daté du 28 janvier 2021, dans lequel cette dernière reprenait les diagnostics précédemment exposés, ajoutait que l’assurée avait des douleurs importantes et constantes à la hanche gauche et qu’elle constatait une péjoration de l’état psychique de sa patiente, de jour en jour.

17.    Le recours de l’assurée a été transmis à la chambre de céans.

18.    Par réponse du 16 mars 2021, l’OAI a rappelé qu’il avait refusé tout droit à des prestations d’invalidité par décision du 4 juillet 2017, puis, suite à une nouvelle demande, par décision du 1er juillet 2019. Selon l’OAI, l’invalidité de l’assurée ne s’était pas modifiée de manière à influencer ses droits et la comparaison des faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière décision de refus des prestations et la décision querellée ne permettait pas de constater que la recourante avait rendu plausible une modification des conditions de fait ou une aggravation durable de son état de santé. Il était ajouté que la nouvelle pièce produite à l’appui de son recours, soit le certificat médical de son médecin-traitant, la Dresse C______ ne pouvait pas être prise en considération dans le cadre du présent litige, dès lors que le juge devait examiner la situation d’après l’état de fait tel qu’il se présentait à l’administration au moment où celle-ci avait statué. Son examen était ainsi d’emblée limité au point de savoir si les pièces déposées en procédure administrative justifiaient, ou non, la reprise de l’instruction du dossier et il ne devait pas être tenu compte des rapports produits postérieurement à la décision litigieuse. L’OAI concluait dès lors au rejet du recours.

19.    Par courrier du 22 mars 2021, la chambre de céans a fixé un délai à la recourante pour répliquer et joindre toutes pièces utiles. Celle-ci n’a pas réagi.

20.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

3.        Est litigieuse la question de savoir si l’intimé était fondé de refuser d’entrer en matière sur la dernière demande de la recourante.

4.        a. Lorsque la rente a été refusée une première fois parce que le degré d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l'assuré rend plausible que son invalidité s'est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 87 al. 3 et 4 RAI dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2011 ;
ATF
109 V 262 consid. 3 p. 264 s.). Cette exigence doit permettre à l'administration, qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 125 V 410 consid. 2b p. 412, 117 V 198 consid. 4b p. 200 et les références). Lorsqu'elle est saisie d'une nouvelle demande, l'administration doit commencer par examiner si les allégations de l'assuré sont, d'une manière générale, plausibles. Si tel n'est pas le cas, l'affaire est liquidée d'entrée de cause et sans autres investigations par un refus d'entrer en matière. À cet égard, l'administration se montrera d'autant plus exigeante pour apprécier le caractère plausible des allégations de l'assuré que le laps de temps qui s'est écoulé depuis sa décision antérieure est bref. Elle jouit sur ce point d'un certain pouvoir d'appréciation que le juge doit en principe respecter. Ainsi, le juge ne doit examiner comment l'administration a tranché la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière en se fondant sur l'art. 87 al. 4 RAI et que l'assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas nécessaire lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 108 consid. 2b p. 114).

b. Le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'autorité (cf. art. 43 al. 1 LPGA), ne s'applique pas à la procédure de l'art. 87 al. 3 RAI (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 p. 68 s.). Eu égard au caractère atypique de celle-ci dans le droit des assurances sociales, le Tribunal fédéral a précisé que l'administration pouvait appliquer par analogie l'art. 73 aRAI (cf. art. 43 al. 3 LPGA depuis le 1er janvier 2003) - qui permet aux organes de l'AI de statuer en l'état du dossier en cas de refus de l'assuré de coopérer - à la procédure régie par l'art. 87 al. 3 RAI, à la condition de s'en tenir aux principes découlant de la protection de la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 Cst. ; ATF 124 II 265 consid. 4a
p. 269 s.). Ainsi, lorsqu'un assuré introduit une nouvelle demande de prestations ou une procédure de révision sans rendre plausible que son invalidité s'est modifiée, notamment en se bornant à renvoyer à des pièces médicales qu'il propose de produire ultérieurement ou à des avis médicaux qui devraient selon lui être recueillis d'office, l'administration doit lui impartir un délai raisonnable pour déposer ses moyens de preuve, en l'avertissant qu'elle n'entrera pas en matière sur sa demande pour le cas où il ne se plierait pas à ses injonctions. Enfin, cela présuppose que les moyens proposés soient pertinents, en d'autres termes qu'ils soient de nature à rendre plausibles les faits allégués. Si cette procédure est respectée, le juge doit examiner la situation d'après l'état de fait tel qu'il se présentait à l'administration au moment où celle-ci a statué (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 p. 68, arrêts 9C_708/2007 du 11 septembre 2008 consid. 2.3 et I 52/03 du 16 janvier 2004 consid. 2.2 ; ATF 9C_789/2012 du 27 juillet 2013, consid. 2). Son examen se limite, ainsi, au point de savoir si les pièces déposées en procédure administrative justifient ou non la reprise de l'instruction du dossier (ATF 9C_789/2012 du 27 juillet 2013, consid. 4.1).

5.        En l’espèce, l’examen clinique rhumatologique de la recourante, effectué en date du 18 novembre 2016 par le Dr B______, avait conduit ce dernier à retenir les diagnostics suivants ayant une répercussion durable sur la capacité de travail :

diagnostic principal : polyarthrose (colonne cervicale, colonne dorsale, colonne lombaire, ange gauche, genou gauche et doigts) M15.0 ;

diagnostic associé : tendinopathie du susépineux de l’épaule droite dans le cadre d’un conflit sous acromial (M75.1) ;

diagnostic sans répercussion sur la capacité de travail : douleurs diffuses de type fibromyalgie et status après probable fracture versus entorse de l’articulation IPD de l’annulaire droit.

Le médecin concluait à une incapacité de travail de 100% comme nettoyeuse professionnelle, mais à une capacité de travail de 75% dans une activité sédentaire, plus légère, en retenant comme limitations fonctionnelles le port de charges au-delà de 5 kg, la position assise au-delà de deux heures, la position debout au-delà de 15 minutes, des activités au-dessus de l’horizontale ou en zone basse, des mouvements répétitifs ou contre résistance.

Dans le cadre de l’instruction de la demande de prestations déposée en date du 16 juin 2020, la recourante a communiqué à l’OAI le compte-rendu opératoire du 4 mars 2020, ainsi que la lettre de sortie des HUG du 12 mars 2020, rédigés par le Dr D______. Ce dernier ne mentionne aucune complication postopératoire. Dans la synthèse de l’hospitalisation et prise en charge des problèmes rédigée par le même médecin, il est mentionné une évolution favorable, « la patiente quitte notre service pour un retour à domicile à la date susmentionnée ». Le suivi à la sortie consiste en une rééducation à la marche avec appui autorisé entre deux cannes, un contrôle post-opératoire à deux mois avec l’opérateur, une ablation des agrafes à J18 et une thromboprophylaxie par Clexane pendant trente-cinq jours.

La recourante a produit dans le cadre de son recours un certificat médical de la Dresse C______ daté du 28 janvier 2021, lequel n’avait pas été produit devant l’intimé dans le cadre de la procédure ayant abouti à la décision querellée.

Il convient toutefois de noter que ledit certificat est semblable au courrier adressé par la Dresse C______ au médecin-conseil du SMR, en date du 17 décembre 2018, et qui avait déjà été examiné dans le cadre de la précédente demande de prestations d’invalidité. La seule différence entre les deux certificats médicaux consiste en l’adjonction du status post-arthroplastie par PHT de la hanche gauche le 4 mars 2020 (ch. 3 du certificat médical du 28 janvier 2021).

Étant précisé que le médecin-traitant avait, à l’époque, mentionné que l’assurée allait consulter un psychiatre, alors qu’aucun document médical n’a été communiqué à l’OAI ou à la chambre de céans, établissant l’existence d’un traitement ou d’un suivi psychiatrique.

Compte tenu de ce qui précède, c’est en toute connaissance de cause que le SMR, ayant examiné le courrier du 17 décembre 2018 de la Dresse C______ et ayant pris en compte l’opération de la hanche et la lettre de sortie des HUG du 12 mars 2020, a rendu son avis médical constatant qu’il n’y avait pas d’aggravation de l’état de santé de la recourante.

6.        En l’absence d’éléments médicaux nouveaux, le présent recours, interjeté contre la décision de l’intimé de refus d’entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations de la recourante, ne peut qu’être rejeté, étant rappelé que l’OAI avait attiré l’attention de la recourante sur le fait qu’il lui incombait de prouver l’aggravation de son état de santé.

7.        Vu le sort du recours, la recourante sera condamnée au paiement d'un émolument, arrêté en l'espèce à CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le